POUR CONTRER L’IRAN, ISRAËL CIBLE L’AFRIQUE
Par Jacques BENILLOUCHE
Carte de l'Iran en Afrique |
Le président iranien Hassan Rohani accueille le président sud-africain Jacob Zuma |
Les relations entre l’Iran et le continent africain s’étaient déjà intensifiées sous le régime de Mohammad Reza Pahlavi. Cependant depuis 1979, la présence de l’Iran sur le continent africain n’a pas de vocation économique mais a un but d’expansion idéologique car l'Iran cherche en effet à exporter sa révolution islamique en rejoignant le mouvement des non-alignés. En 1986, alors que l’Iran était en guerre contre l’Irak, le président Ali Khamenei, s'était rendu en Afrique, notamment au Mozambique et en Angola, pour discuter de l’approvisionnement en pétrole, de la coopération industrielle et du développement agricole. Une visite pour affirmer l’influence de Téhéran, mais aussi destinée à trouver des soutiens contre Saddam Hussein.
L’Iran, qui compte 25 ambassades en Afrique, se
retrouve face à l’Arabie saoudite qui voit d’un mauvais œil la puissance chiite
en Afrique. Le Maroc a rompu ses relations avec l’Iran à deux reprises. La
première fois en 2009, dénonçant «l’activisme» religieux de Téhéran ;
la deuxième en 2018, accusant cette fois l’Iran de soutenir le Polisario au
Sahara occidental via le Hezbollah libanais. L’Iran est aussi soupçonné de
trafic d’armes en Afrique. D’ailleurs le Sénégal avait rompu ses relations
diplomatiques avec l’Iran à la suite de la saisie d’une cargaison d’armes à
Lagos en 2010.
Yaïr Lapid au Maroc |
En fait aujourd’hui la question se situe au-delà des
relations Israël-Maroc-Algérie car l’Iran veut implanter son influence en
Afrique pour contrer l’influence de l’Occident mais surtout de l’Arabie
saoudite en surfant sur les sentiments anticoloniaux. Il a beaucoup investi en
érigeant des mosquées, en construisant des centres culturels et en multipliant
les réseaux caritatifs. Son but est clair, diffuser ses idées révolutionnaires.
L’Iran marche en fait sur les platebandes d’autres
pays musulmans qui ont placé leurs pions en Afrique. En plus de l’Arabie, la
Turquie, le Qatar et les Émirats arabes unis ont beaucoup financé l'Afrique.
Mais si ces pays musulmans développent leurs relations avec l’Afrique, l’Iran poursuit d'autres objectifs. Il s’agit pour lui de profiter de la
faiblesse de certains pays et de l’implantation très ancienne des Libanais en
Afrique pour créer des réseaux de contrebande et de criminalité pour se
financer de manière occulte. L’Iran recrute des agents locaux pour consolider la
cause religieuse iranienne en Afrique. L’ancien chef des Gardiens de la
Révolution, Qassem Soleimani, avait chargé l’unité 400 de sa force El Qods de
former et de financer des groupes chiites en Afrique à l’instar du Mouvement
islamique du Nigéria. Certains pays africains, moyennant finance, avaient aidé
l’Iran à contourner les sanctions américaines.
Zarif avec Mohamed Bouhary du Nigéria |
L’Algérie entretient avec l’Iran de bonnes relations
depuis des décennies. C’est d’ailleurs la cause essentielle de la brouille avec
le Maroc. La brouille s’est encore envenimée avec le soutien algérien au
Polisario qui exige l’indépendance du Sahara occidental.
De son côté, Israël n’a pas ménagé ses efforts pour
s’introduire en Afrique en développant ses liens diplomatiques, économiques et
sécuritaires avec pour conséquence l’acceptation par l'Union africaine, le 23 juillet 2021, d’Israël en tant qu’État observateur. L’Algérie, l’Afrique du Sud et
le Nigéria avaient tout fait pour faire capoter cette décision.
L'Union africaine |
La volonté de l’Iran de consolider son terrain de
chasse en Afrique a été confirmée par le nouveau président iranien Ebrahim Raïssi
qui vient de déclarer : «dans le
nouveau gouvernement iranien, toutes nos capacités seront consacrées à
l'approfondissement de la coopération avec les pays africains». Il s’agit d’une
nouvelle stratégie iranienne. Le nouveau ministre iranien des Affaires
étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, étroitement lié aux Gardiens de la
révolution, aura pour rôle de soutenir les activités de l’Iran en Afrique et au
Moyen-Orient. L’Iran axera dorénavant ses activités anti-israéliennes en
Afrique.
Il est fort probable qu’Israël sera amené à développer
ses propres activités de renseignements en Afrique mais en fera profiter
certains amis africains qui veulent contrer la capacité de nuisance de l’Iran
en Afrique. Israël cherchera à identifier les cellules terroristes fomentées
par l’Iran et l'infrastructure idéologique iranienne opérant en Afrique. L’Iran
s’est en effet implanté dans les universités, dans les mosquées et plusieurs
centres religieux. Cela passe aussi par la révélation des actifs de l'Iran et du
Hezbollah en Afrique.
La récente rupture diplomatique
entre le Maroc et l'Algérie n'est pas uniquement un problème local. Elle
exprime la confrontation diplomatique entre Israël et l'Iran en Afrique avec bien
sûr des retombées militaires.
Bravo
RépondreSupprimerCher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerJ’attends avec impatience le commentaire de Philippe Bliah, car pour ma part, oserais-je vous l’avouer, vous lisant une seule idée a traversé mon esprit, celle de Clémenceau qui disait : « Politique intérieure ? Je fais la guerre. Politique étrangère ? Je fais la guerre. »
Très cordialement.
A Madame Arnaud,
RépondreSupprimerAinsi votre commentaire sollicitant mon avis me contraint donc à lire l'article de Jacques Benillouche!! Je n'ai que du bien à en dire...
Je ne le regrette pas. Monsieur Benillouche à informé clairemment ses lecteurs d'une situation encore peu connue qui démontre qu'Israel doit se battre tous azimuths-apparemment sans demander l'avis de "Jonathan", pardon pour cette petite pique irrésistible sans doute mal à propos mais que ne me damnerais -je pas pour un jeu de mots-pour contenir apparemment presque seul la pieuvre islamo-chiite iranienne qui présente un danger mondial sans alerter à l'excès l'UE voire les américains de plus en plus préoccupés par l'Asie...
Ce qui en dit long sur la perte d'influence des occidentaux sur ce continent face à d'autres puissances montantes trés présentes : celle des Russes et des Chinois alliés a divers degrés de real politik avecc les mollah désireux de sapproprier les richesse de ce continent... pour mieux combattre les occidentaux toujours en train de rever au bonheur universel agité par les minorités de gauche et d'extreme gauche.
Un tel article n'eut certainement pas été écrit à l'époque où l'Afrique était considérées une chasse gardée de la France notamment sous De Gaulle et Pompidou. Mais ce temps prestigieux prend fin.
Israel vu sa taille et sa démographie n'a pas les moyens de s'opposer frontalement à ces nouvelles puissances mais dipose d'un savoir faire en matiére d'agriculture ,de technologie, d'armement et de formation militaire permettant une présence efficace "occidentale" sans etre qualifiée d'impérialiste", ce qui n'est pas le cas des autres.
Nul ne sait comment cet affrontement va se terminer. Toujours est-il que losque la France doit céder du terrain elle préfére encore la largement sur le terrain la présence des israéliens à celle des Russes ou des Chinois aux intentions plus brutales et moins louables.
@ Philippe Bliah
Je vous remercie pour la réponse que vous avez faite à ma sollicitation ainsi qu’à ma citation. Croyez bien que l’ai appréciée, "petite pique" y compris !
Mais si j’essaie de résumer votre pensée, à la question que tout le monde se pose, et qui clôt dans mon magazine préféré, un article qui s’intitule : « Dans la poudrière afghane », mais qui pourrait tout aussi bien clore un article intitulé : « Dans la poudrière du Moyen-Orient » ou même : « Dans la poudrière africaine » au point où nous en sommes :
« …L’Amérique a déçu et en particulier ses plus proches alliés. Qui sera capable aujourd’hui de relever le gant du monde libre ? »
Vous répondez sans hésitation : Israël !
Mais je note que vous voilà déjà obligé d’aller ferrailler contre l’Église de Rome !