Pourquoi un
article sur les hérons (Machatz en Hébreu) dans ce site ? Ce ne sont pas
ceux qui hivernent dans la réserve naturelle de Houla. Ce sont les autres, ceux
qui ont trouvé un endroit sûr pour nicher à Tel Nof et veillent sur les
frontières d’Israël. Car on sait bien qu’au Moyen Orient tout vient d’en haut. Pour
protéger ses frontières et faire face aux défis quotidiens sur sa sécurité, parallèlement
aux Américains, Israël est à la pointe du développement des drones. Le pays est
dans la liste du top-5 des premiers producteurs mondiaux avec les États-Unis,
la Russie, la Chine, le Royaume Uni.
Hérons en opération |
Ce sont
actuellement les meilleurs outils dans la guerre asymétrique moderne. Depuis
le 9 novembre, les drones sont passés de la fonction de reconnaissance à
une version armée. Ils offrent un avantage unique, celui de mener une guerre très
loin du pays d’origine, sans mettre en danger la vie d'un pilote. En
matière de coûts versus avantages, un avion de combat F-22 coûte 150 millions
de dollars avec un risque humain contre environ 4,5 millions de dollars pour un
drone qui accomplit la même mission. Ainsi, permettent-ils de lancer des
frappes de précision à moindre coût. On s’en est rendu compte en Arabie
Saoudite lorsque les Houthis du Yémen, armés par l’Iran, ont attaqué des champs
pétrolifères.
Mais après l’élimination de certains de ses plus notoires
chefs militaires ou grands responsables, l’Iran connaît maintenant le prix
qu’elle aurait à payer. Destructeur de cibles de grande valeur, les drones
sont clairement l'arme la plus polyvalente et constituent un élément essentiel
de l'avenir de la guerre et de la lutte contre le terrorisme. Ces engins
peuvent voler en très haute altitude (45.000 pieds) au-dessus de reliefs très
accidentés pour atteindre des endroits que les troupes terrestres auraient de
grandes difficultés à pénétrer. La démonstration en a été faite au Sahel où,
pour la première fois en décembre 2019, l’armée française a utilisé un drone
armé pour neutraliser des terroristes. Elle dispose des drones américains MQ-9
Reapers équipés de missiles guidés par laser dont l’utilisation va
s’intensifier. Cela a permis au président français de déclarer, lors de la
récente conférence avec les cinq pays du Sahel, que la France resterait «présente»
au Sahel, sans entrer dans les détails.
Ces engins ont réduit le fardeau des forces
conventionnelles en offrant une alternative bon marché et polyvalente. Le
nombre élevé de frappes de missiles réussies témoigne de leur caractère unique. De
même, les décideurs politiques reconnaissent leur utilité, particulièrement en
Israël où la vie d’un soldat est précieuse. Selon une information
officielle, 80% des heures de vol de
l’armée de l’air israélienne sont effectuées par les drones.
Entrainement des pilotes allemands avec Hérons |
Le Bundestag allemand a décidé d’équiper
la Bundeswehr avec le Héron TP contre son concurrent américain. La question de
leur armement a été âprement débattue. Finalement devant une opposition assez
large, le gouvernement a renoncé à retenir la version de combat. Ainsi, le
contingent allemand de la Minusma, présente au Sahel sous l’égide de l’Onu,
utilise quatre drones Héron de surveillance et de recherche basés à Goa. On
peut donc dire qu’Israël est présent sur ce vaste territoire où les drones vont
progressivement jouer un rôle déterminant. Il suffit de constater le nombre
croissant d’appareils utilisés. Il faut aussi se rappeler que les États-Unis
ont un accord avec le Niger où ils disposent d’une base à Agades destinée à
l’origine à la surveillance et aux actions militaires. Les drones américains Predators
et Reapers participent à des missions, sans que beaucoup de publicité soit
faite.
L'armée française déplie ses drones |
Enfin, étonnante a été l’annulation par le ministre
Likoud de la coopération régionale Ofir Akunis, de trois vols pour Abu Dhabi,
en raison de la pandémie et ce malgré la demande du ministre de la défense
Benny Gantz. Le déplacement de quelques
270 collaborateurs des firmes israéliennes du secteur militaire à l’exposition IDEX à Abu Dhabi pour laquelle
les firmes concernées avaient déjà pris des dispositions, loués des stands etc…
planifié des contacts était prévu de longue date. On s’étonne d’autant plus que
dans le même temps, El Al avec l’accord des autorités effectue plusieurs vols
vers l’Europe et les États Unis.
On doit donc s’interroger sur les motivations
réelles, voire cachées de ce revirement de dernière minute. Il pourrait s’agir d’une
lutte interne et néfaste entre ministères alors qu’on vient de signer des
accords avec les Émirats dont une des clauses concerne le développement d’une
coopération militaire en matière de défense. Ce qu’a confirmé Moshe Patel, qui
dirige le département missiles au ministère de la défense : «aucun accord régional n’est en cours pour
l’instant, mais la coopération entre Israël et ses voisins arabes pourrait être
possible dans le futur». Quel est donc l’intérêt d’exposer ce matériel et d’en
vanter ses capacités ?
La délégation des Emirats visite le centre Peres pour la paix et l’innovation, reçue par la directrice générale Efrat Duvdevani |
Cette décision pourrait avoir une autre
origine. La nouvelle administration américaine autorise certes Israël a
développer ses ventes dans toute une série d’équipements mais elle peut aussi
vouloir «marquer le coup et montrer les
dents» comme elle l’a fait en suspendant temporairement les ventes de
matériels militaires à l’Arabie et aux Émirats. Le président Biden n’a pas
manqué de répéter «USA is back» à la
conférence sur la sécurité à Munich ! Les Américains auraient peut-être fait
pression sur le gouvernement israélien qui, ne voulant pas perdre la face, a invoqué
la Covid pour justifier la décision ; la question restera sans réponse.
Dans le même temps une délégation des Émirats a visité le centre Peres pour la
paix à Jérusalem le 17 février, sans excuse de la pandémie. Il est certain que cette
visite a été organisée avec la totale coopération et la volonté des autorités.
En conclusion, les fabricants d’armes ne se
sont pas adressés à la bonne agence de voyage et les Hérons attendront un peu
pour visiter les Émirats. Mais au profit de qui, diront certains ?
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