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jeudi 24 décembre 2020

Sahara occidental, Maroc et Algérie par Alain PIERRET

 

SAHARA OCCIDENTAL, MAROC et ALGÉRIE


Par Alain PIERRET

Ancien Ambassadeur de France

7 mai 1987 - la MIMOUNA à Jérusalem – Au premier rang Teddy Kollek, maire ; Yitzakh Navon, ministre de l'Éducation; Shimon Pérès, Premier ministre; Haïm Herzog président de l'Etat et Shlomo Hillel, Président de la Knesset; Alain Pierret, au second rang, troisième à gauche,


          Dès mon arrivée en Israël en juillet 1986, au jour où Shimon Pérès s’envolait pour Ifrane rencontrer Hassan II, j’ai entendu cette boutade de la bouche d’une Israélienne radieuse : «Mon Premier ministre rend visite à mon Roi !». Seul ambassadeur convié, je découvrirai plus tard à Jérusalem la fête grandiose de la Mimouna qui marque pour les Juifs marocains la fin de la Pâque.



Foule séfarade marocaine immense dans le parc proche de la Knesset.


          Ashdod, le grand port israélien au sud de Tel Aviv, a été fondée en 1956 par quelques familles marocaines installées sous des tentes par les Ashkénazes qui ne souhaitaient pas les voir dans les grandes villes du pays. Aujourd’hui, un tiers de ses 200.000 habitants sont d’origine marocaine. Pour fêter l’ouverture de relations entre Israël et le Maroc, une grande manifestation y a été organisée le 24 novembre, drapeaux nationaux joints. Le français y est encore très pratiqué. Il est vrai, les Israéliens d’origine russe y sont également nombreux.

        À quelques jours de la guerre du Golfe, j’y fus invité pour commémorer la tragédie du Pisces, petit navire qui coula le 10 janvier 1961 au large des côtes espagnoles avec quarante-quatre Marocains en route pour leur aliyah. Je me retrouvais ainsi trente ans en arrière. Nommé sous-préfet d’In Salah au lendemain du putsch des généraux afin, me dit-on, d’apaiser les esprits, je découvris que les habitants du quartier des Cheurfa [*] d’Aoulef dédiaient leur prière du vendredi au chérif du royaume marocain. Faut-il le préciser, cette oasis est située 700 km à l’est de Tindouf.

          De mes études, je savais que l’influence, voire la souveraineté, de ce royaume s’étendait depuis de nombreux siècles jusqu’à Tombouctou comme au cœur de l’Algérie actuelle. La France en fit l’expérience en 1891 à propos de notre occupation de l’oasis d’El Goléa, à plus de 1.200 km à vol d’oiseau de Tindouf. Ministre des Affaires étrangères, futur académicien et à trois reprises président du Conseil, Alexandre Ribot déclara le 26 octobre à la tribune de la Chambre que «le gouvernement français n’a pas hésité à signifier au Maroc, de la façon la plus claire et la plus catégorique, qu’il ne tolèrerait de sa part aucun acte de souveraineté sur ces territoires qui rentrent dans la zone naturelle de l’influence française».



        J’apprendrai plus tard que Mohamed Abdelaziz, premier président de la République Arabe Sahraouie Démocratique, était né à Marrakech et avait fait ses études au Maroc. Secrétaire général des Nations Unies, Javier Pérez de Cuellar me dira sa surprise lorsqu’il découvrit à leur première rencontre qu’il ne parlait pas espagnol, langue qu’il avait tout naturellement employée.

        En se retirant de sa colonie en 1975, l’Espagne ne s’était guère préoccupée de son avenir politique. L’Algérie fut heureuse de s’en charger. Grâce à la France coloniale qui lui légua près de deux millions de kilomètres carrés, elle se trouvait posséder à son indépendance un immense territoire saharien. Aujourd’hui, elle souhaiterait l’agrandir encore, à tout le moins s’assurer le contrôle de la RASD avec un accès sur l’Atlantique et affaiblir dans cette vaste région la présence séculaire du Maroc, ce voisin importun.

Mohamed Abdelaziz (1947-2016)


       Pour celui-ci toutefois, la partie n’est pas encore gagnée. Le roi préside le Comité Al Qods (Jérusalem). Il ne fera pas revenir Joe Biden sur la décision prise, il y a trois ans déjà par Donald Trump, reconnaissant Jérusalem capitale d’Israël. L’Europe ne bouge pas, la France ménage l’Algérie. Nous paraissons en effet accepter le verdict prononcé le 4 juillet dernier par le président Tebboune selon qui, ignorant délibérément le principe de la double nationalité, notre pays compte «plus de six millions d’Algériens».

         Quant aux Palestiniens, s’ils veulent un État souverain, donc une capitale, il leur faudra faire un autre choix. Hébron pourrait être tout à fait indiquée. Centre économique des territoires, elle est aussi un lieu saint pour les musulmans, Ibrahim repose dans le tombeau des Patriarches.

          Et Israël ne saurait davantage oublier les Arabes qui vivent sur son territoire. La Knesset doit revenir sur sa loi du 18 juillet 2018 déniant à l’arabe son caractère de langue officielle à côté de l’hébreu.

[*] Pluriel de chérif

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