LE RISQUE D’UN GOUVERNEMENT D’INERTIE NATIONALE
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Le
temps mis à rédiger l’accord de gouvernement s’explique à présent par la
volonté de Netanyahou de verrouiller à son profit des pans entiers de gouvernance. Il est à
craindre que le gouvernement d’union nationale ne finisse par n’être qu’un
gouvernement d’inertie nationale. Au fur et à mesure que les détails de
l’accord sont dévoilés et que les postes sont répartis, on constate
effectivement que Benny Gantz a reculé sur les fronts économiques, constitutionnels
et juridiques comme s’il était acculé à conclure rapidement un accord au
rabais. Il n’est
pas question de procès d’intention mais bien d’une constatation, face à des futurs changements juridiques imposés pour protéger le premier ministre de ses
juges.
Lors
de sa campagne électorale, Gantz avait mis l’accent sur les aspects économiques
de son programme : «Sur le plan socio-économique, j’espère que vous
avez pu remarquer que je suis vraiment à gauche parce que je veux m’occuper des
personnes les plus vulnérables de la société…. Beaucoup d’éléments de la nation
n’ont pas profité de la croissance. Les hôpitaux, les écoles et les transports
sont un échec retentissant… mes priorités seront l’investissement dans
l’éducation, l’infrastructure, les establishments démocratiques et juridiques,
et la sécurité… L'économie israélienne est forte, mais les inégalités sociales
menacent d'affaiblir la nation. Les fruits de la prospérité économique dont
Israël a récemment été témoin ne se sont pas répercutés sur l'ensemble de la
population, laissant de nombreuses personnes de côté, notamment les communautés
arabes et ultra-orthodoxes». Ce programme social ambitieux ne pouvait que
recevoir l’agrément de ses électeurs qui lui ont offert leurs voix. Mais pour le réaliser, le nerf de la guerre reste
l’argent et le vote du budget. Or Gantz
ne contrôlera rien de la politique économique du gouvernement puisque les
principaux postes qui la gèrent ont été attribués au Likoud.
On
notera déjà que le gouvernement sera le plus dispendieux puisqu’il démarrera
avec 32 ministres, puis passera à 36 dans six mois, selon l’accord de coalition.
Chaque ministre disposera d’un bureau
doté d’un personnel complet, d’un véhicule blindé et d’un chauffeur pour un
coût de 5 millions de shekels (1,28 million d’euros) par ministre et par an, soit
180 millions de shekels (46 millions d’euros) au total.
En ces temps incertains, la dépense est considérée comme irréaliste, voire déplacée. La grave crise économique et sanitaire impose un gouvernement très resserré de 15 à 20 ministres, plus efficace pour prendre des décisions communes. Or on a privilégié de satisfaire les ego de nombreux fidèles par des cadeaux onéreux en découpant des ministères pour multiplier les postes et les promus au détriment du budget de l'Etat.
En ces temps incertains, la dépense est considérée comme irréaliste, voire déplacée. La grave crise économique et sanitaire impose un gouvernement très resserré de 15 à 20 ministres, plus efficace pour prendre des décisions communes. Or on a privilégié de satisfaire les ego de nombreux fidèles par des cadeaux onéreux en découpant des ministères pour multiplier les postes et les promus au détriment du budget de l'Etat.
Souk de Jérusalem |
On
a par ailleurs créé 16 postes de vice-ministres supplémentaires qui vont
alourdir la note qui s’élèvera au total à environ un milliard des shekels (260
millions d’euros). Une bonne partie de ces sommes auraient été plus utile pour mieux
dédommager les chômeurs forcés, les travailleurs indépendants contraints à
l’inactivité et les PME en difficulté qui ne peuvent compter que sur le Ciel
pour survivre. On ne comprend plus l’attitude de Gantz qui a laissé filer
autant d’argent pour un usage non indispensable, voire inutile, dont le but est
d’acheter la passivité de la Knesset. Il a permis qu’en ajoutant aux ministres
et sous-ministres les présidents de commissions, près de la moitié de la
Knesset aura un rôle ministériel. Une véritable armée mexicaine !
Salle de commission à la Knesset |
Benny
Gantz n’a aucun moyen d’influer sur les décisions économiques puisque les
ministères des finances, de la santé et de l’éducation seront entre les mains
du Likoud. Par ailleurs, les principales commissions économiques de la Knesset seront
dirigées par les amis de Netanyahou. La commission des finances, la commission
spéciale sur le coronavirus, la commission du travail, de la protection sociale
et de la santé et la commission des affaires économiques resteront attribuées
au Likoud pour que Netanyahou puisse avoir un contrôle total sur la politique
sociale et économique. Gantz aura du mal à imposer des mesures pour aller dans
le sens de son programme électoral. Les défavorisés attendront et lui, perdra de sa crédibilité. Tous les ministères offerts à Gantz dépendront du financement décidé par le ministre des finances et par le premier ministre, leur enlevant toute latitude dans leur action politique.
Avi Nissenkorn |
Durant plusieurs semaines les meilleurs avocats israéliens ont choisi chaque terme de l'accord dans le but de contourner les lois et de ne pas être repris par la Cour suprême. Les textes de loi ont été détricotés au profit d'un seul homme. Tout cela avec la complicité de ministres et de députés, pourtant garants de la démocratie. La
nomination d’Avi Nissenkorn au ministère de la Justice a été un leurre qui a
masqué le véritable pouvoir de Netanyahou sur la Cour Suprême. En effet la
commission des nominations judiciaires constituée de neuf membres reste sous la
coupe de la droite. Il s’agit de verrouiller la Cour Suprême qui exerce un
contrôle de la constitutionnalité des lois votées par la Knesset. Selon la Loi
fondamentale, un comité, composé de neuf membres, nomme les juges à la Cour : trois juges de la Cour suprême, deux représentants
de la Knesset (un de la coalition et un de l’opposition), deux ministres et
deux représentants du barreau israélien. Une majorité de sept des neuf membres
du comité est nécessaire pour la nomination d’un nouveau juge impliquant que
les détenteurs de trois voix disposent d’un droit de veto en bloquant toute
nomination.
Cour Suprême |
Mais
Netanyahou veut éviter que des «mauvais» juges soient désignés, des
juges non inféodés à la droite, et a exigé son droit de veto en modifiant une
des Lois fondamentales. Jusqu’à présent la coalition majoritaire à la Knesset
détenait ce droit de veto avec deux ministres et au moins un député. Aucun juge
ne pouvait être donc désigné sans l’imprimatur de la coalition gouvernementale.
Mais la situation a changé depuis la nomination d’un ministre de la justice,
membre de droit de la coalition mais membre de Kahol-Lavan ; la majorité Likoud
tombe avec le risque de nomination de juges «gauchistes». Netanyahou a donc
imposé la modification de la composition des membres de la commission ; l’opposition
n’y aura plus accès et à la place, un deuxième membre de la coalition
siégera. Le Likoud qui détiendra deux sièges a entériné la nomination du
transfuge de Telem Zvi Hauser, ancien du Likoud et sympathisant de la droite, comme
deuxième représentant de la coalition. Le comité de législation ministérielle,
dirigé par Avi Nissenkorn et qui fonctionnera à base de veto pour la nomination
des juges, sera donc l'institution la plus paralysée du pays.
Enfin
l’accord a supprimé la disposition selon laquelle les ministres seront révoqués
si des actes d'accusation sont déposés contre eux. Les repris de justice du
Likoud en délicatesse avec la justice reprendront du service. Il a été prévu
par ailleurs que si la Cour Suprême décidait de révoquer Netanyahou, alors
l’accord de coalition deviendra nul et de nouvelles élections seront
obligatoires. On n’aura rien gagné en stabilité.
Benny
Gantz a totalement les bras liés et il lui reviendra de montrer qu’il ne sera
pas une marionnette entre les mains du Likoud et de Netanyahou qui a tout
verrouillé autour de lui pour être pendant trois ans à l’abri de la justice.
Toute action menée contre lui entraînera de fait la dissolution de la Knesset, avec un
risque de nouveau chaos. Un chantage permanent. Bref, personne ne doit agir contre le premier
ministre. L’inertie nationale risque d’être donc de mise dans ce nouveau
gouvernement.
« Les repris de justice du Likoud en délicatesse avec la justice « ???
RépondreSupprimerCelui qui n’a pas présenté sa défense, celui qui n’a pas été jugé , celui qui n’a pas été condamné
EST PRÉSUMÉ INNOCENT
même si cela déplaît à ceux qui se sont tant trompés !
Il faudra juger ce gouvernement sur son action et sur ses résultats et non pas lui jeter une sorte de malédiction parce qu’il ne correspond pas aux ambitions du candidat Lapid !
RépondreSupprimerCelui qui n’a pas présenté sa défense, n’a pas été jugé, n’a pas été condamné EST PRÉSUMÉ INNOCENT !
« Les repris de justice du Likoud en délicatesse avec la justice « . SONT PRÉSUMÉS INNOCENTS !
Il faudra juger ce gouvernement sur ses résultats et non le maudire a l’avance même si Lapid qui a été roulé dans la farine a le droit d’exhaler sa mauvaise humeur .
André Simon MAMOU
Tribune juive
@ André Mamou,
RépondreSupprimerOn ne se connait pas mais je constate que vous lisez avec attention les articles de Jacques Benillouche et que vous avez toujours des commentaires négatifs. La critique est facile surtout qu’on vous lit rarement dans votre site médiocre.
Je ne suis pas là pour prendre sa défense, il est assez grand pour le faire. Mais je trouve que vous n’être certainement pas qualifié ni armé pour vous attaquer systématiquement à un journaliste, dont je n’approuve pas toujours les textes mais qui ont l’avantage de nous faire réfléchir contrairement à vous qui ne publiez que de la bouillie de chat, quand votre inspiration rare vous le permet.
Rehaussez le niveau de Tribune Juive avant de tremper votre plume dans l’acide.
De plus vous ignorez la loi israélienne, la seule qui s’applique à la Knesset. Elle stipule actuellement que tout député inculpé perd tous ses droits de devenir ministre, présumé innocent ou pas. La loi c’est la Loi.
Vos commentaires méritent d’être plus circonstanciés.
@Michael Boutboul,
RépondreSupprimerMerci pour votre intervention. Effectivement je sais et je peux me défendre.
Mais j'ai pour principe de ne jamais organiser de débats avec mes lecteurs. J'écris mon article où j'essaie d'analyser et de commenter, rarement de prendre position.
Il appartient ensuite aux lecteurs de commenter, de critiquer. Nous publions tous les commentaires qui ne sont pas insultants pour nos chroniqueurs.
André Mamou est dans son droit lorsqu'il donne son avis même s'il est toujours partisan, pour ne pas dire idolâtre de Bibi.
Cordialement et merci encore