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vendredi 30 mars 2018

Le Hamas prend des risques avec la grande marche



LE HAMAS PREND DES RISQUES AVEC LA GRANDE MARCHE

Par Jacques BENILLOUCHE
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          Avec le concours des djihadistes, le Hamas a décidé d’organiser la «grande marche de retour».  Il a déclaré que l'objectif principal de la manifestation est de promouvoir le droit au retour des Palestiniens. Il veut donner à la manifestation une grande ampleur puisqu’elle aura lieu à six endroits le long de la frontière avec Israël. Le premier événement a été planifié pour le vendredi 30 mars 2018, jour des prières, à dix heures. Le Hamas veut impulser une forte audience et pour cela il met les grands moyens en installant un centre de presse au passage d’Erez. 



Tente érigée en centre de presse

            Des bus partiront de toutes les mosquées de la bande de Gaza pour amener les participants dans six camps de tentes le long de la frontière. Les civils, les militants du Hamas et les responsables de diverses organisations participeront à la marche. Des comités locaux ont été désignés pour coordonner les événements dans tous les districts de la bande de Gaza. Ils sont en particulier chargés de recruter le maximum de civils, de leur fournir un transport, d’assurer la nourriture et l'eau et même de prévoir des toilettes portables et des services médicaux. L'activité devrait durer jusqu’au 15 mai 2018, jour de la Nakba (catastrophe), anniversaire de la création d’Israël.


            Salah Bardawil, membre du bureau politique du Hamas, a souligné que la «Marche du grand retour» était une riposte des Palestiniens aux décisions du président américain Donald Trump vis-à-vis du transfert de son ambassade à Jérusalem considéré comme un acte déloyal à l’égard des Palestiniens : «Le Hamas ne tolérera aucune pression qui puisse empêcher les Palestiniens de participer à la marche du vendredi 30 mars». Israël veut éviter que cette marche ne dégénère en affrontements meurtriers. Des rumeurs font d’ailleurs état de contacts secrets établis par Tel-Aviv avec plusieurs pays arabes sollicités pour calmer le jeu.

            Le Hamas réfute toute idée de pression. Il précise que «tous les groupes palestiniens assisteront à la Marche du grand retour du 30 mars qui aura lieu en Cisjordanie, dans la bande de Gaza, les territoires occupés de la Palestine de 1948. On souhaite qu’elle soit un prélude au retour des réfugiés palestiniens dans leur terre ancestrale». Tout rêve est permis.
            Selon Imad Salim, porte-parole de l'Autorité nationale suprême de la marche de retour, les civils resteront dans les camps jour et nuit sachant que des activités seront organisées tous les jours. Il a assuré qu'il n'y aura aucune planification d’affrontements avec les forces de Tsahal et que les activités populaires seront non violentes. Il espère que les participants obéiront aux ordres de l'autorité nationale pour éviter tout débordement et surtout une réaction violence de la part d’Israël.

            De grands travaux de terrassement ont été entrepris pour niveler le terrain à l’endroit où les tentes seront installées. Des bulldozers sont déjà en action dans six zones de la frontière, Khan Younès, Rafah, la ville de Gaza et le nord et le centre de la bande. Le 25 mars 2018, le premier camp de tentes a été érigé dans le village de Khirbat Ikhza'a, à l'est de Khan Younès. Les Palestiniens ont construit des remblais pour créer une zone tampon entre les manifestants et Tsahal. Les Israéliens pensent cependant que ces murs de sable ont pour but de bloquer toute avance des troupes en cas d’émeutes. Mais selon Ahmed Abu Ratima, porte-parole de la grande marche de retour, il ne s’agit nullement de remblais militaires.
Réunion pour préparer la grande marche 

            Les media palestiniens ont été mobilisés pour appeler le public à participer aux événements qui auront lieu à 700 mètres de la barrière de sécurité. Des voitures avec haut-parleurs sur le toit sont prêtes à circuler dans les rues pour recruter des volontaires dans les mosquées. Les écoles sont chargées de recruter des élèves et des étudiants pour aller au-devant de Tsahal. Il est prévu que les femmes et leurs enfants marchent en tête des cortèges avec la volonté cachée de protéger les manifestants. 
Nous n'avons pas d'autre choix que de marcher vers la frontière

            Les organisateurs prétendent qu’il s’agit d’une manifestation pacifique et pourtant Yusuf al-Sharqawi, présenté comme un expert militaire, a appelé le public à se «précipiter vers l'avant jusqu'à ce qu'ils soient face à face avec les soldats, et même à essayer de prendre leurs armes». Cette menace, si elle est mise en application, risque de mettre le feu.
            Des appels similaires ont été lancés en Cisjordanie. Wa'el Abu Yusuf, membre du Comité exécutif de l'OLP, a déclaré, dans une surenchère face au Hamas, que des événements seront organisés pour souligner le «droit au retour», incluant des marches de masse à la barrière de sécurité frontalière.
Réunion du Conseil législatif palestinien

            Le 26 mars 2018, le Conseil législatif palestinien (PLC) contrôlé par le Hamas a tenu une réunion sous une tente érigée près de la frontière orientale de la bande de Gaza. Ahmed Bahar, vice-président du CLP et haut responsable du Hamas, a précisé que la réunion s'était tenue près de la frontière pour souligner le «caractère sacré des droits et principes de base palestiniens». Il a également déclaré que le PLC avait envoyé une lettre aux chefs arabes pour obtenir leur soutien politique, médiatique et moral pour la marche.
            Israël se prépare à contrecarrer la violence éventuelle au cours de cette marche. La police a annoncé qu’elle avait préparé différentes méthodes pour faire échouer toute traversée de la frontière. Aucun débordement sur le sol israélien ne sera toléré. Israël a déployé plus d’une centaine de snipers pour gérer la manifestation palestinienne et le pays leur permettra d’ouvrir le feu si des vies israéliennes sont en danger, a déclaré le chef d’Etat-major de l’armée israélienne Gadi Eizenkot. C’est un risque pourtant que prend le Hamas dans cette aventure si elle n’est pas sérieusement canalisée. Les responsables palestiniens de leur côté veulent donner une «priorité aux marches populaires non violentes qui ne donneraient pas d'excuses à Israël pour les faire échouer». Ils n’ont pas l’intention d’être entraînés dans une confrontation militaire. Encore faut-il qu’il n’y ait pas de provocation de la part des djihadistes qui veulent remettre en cause toute réconciliation Fatah-Hamas.

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