LE HEZBOLLAH PRÊT À AFFRONTER ISRAËL POUR LES ZONES HYDROCARBURES
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Si
le Liban veut retourner à l’âge de pierre, il lui suffit de laisser le
Hezbollah agir à sa guise. Dans une interview accordée au journal saoudien
Elaph le 12 décembre 2017, le ministre israélien du renseignement, Israël Katz,
avait menacé de «ramener le Liban à l'âge de pierre» en
détruisant toutes ses infrastructures. Mais cette menace n’a pas l’air
de faire de l’effet puisque, fidèle à lui-même, Hassan Nasrallah a affirmé, lors
de son intervention devant ses partisans le 16 février 2018 à Beyrouth, que son
parti pouvait mettre hors d'usage en quelques heures les plates-formes gazières off-shore israéliennes, au large de Haïfa. Il intervenait à l'occasion de la «commémoration
annuelle des grands martyrs du parti, Ragheb Harb, Abbas Moussaoui et Imad Moughniyeh».
Katz et Netanyahou |
Ce
n’est pas une menace en l’air car elle peut se réaliser grâce à la présence au
Liban de l’Iran. Les services israéliens des renseignements ont établi que
l'Iran y construit des «usines de missiles avancés». Le
ministre Katz avait menacé le Liban de devenir la cible des attaques
israéliennes : «Oui. Nous agirons aussi militairement et les
empêcherons, comme c'est le cas en Syrie. Ce qui s'est passé en 2006 sera un
pique-nique comparé à ce que nous pouvons faire. Je me souviens d'un ministre
saoudien qui a dit qu'il enverrait le Hezbollah dans ses grottes du Sud-Liban.
Je vous dis que nous allons ramener le Liban à l'âge de pierre».
Cette menace de détruire les plates-formes
gazières israéliennes off-shore intervient après le rejet par Beyrouth d'une
proposition américaine pour régler le contentieux entre le Liban et Israël, qui
se disputent la souveraineté sur une zone maritime riche en hydrocarbures.
Liban bloc-9 |
Pourtant le règlement des
contentieux frontaliers terrestres et maritimes entre le Liban et Israël est du
ressort de l'État libanais et on ne comprend pas qu’une milice intervienne sur
cette question internationale. En fait, Nasrallah veut aider le gouvernement
libanais à acquérir une position de force pour la négociation grâce à «l’action
de la Résistance» qui selon le Hezbollah, est «capable de
mettre hors service les installations gazières maritimes israéliennes en
quelques heures».
Hassan Nasrallah est exigeant dans
la médiation entreprise par les Etats-Unis pour tenter de régler le contentieux
libano-israélien autour du bloc 9 de la zone économique exclusive du Liban qu’Israël
considère comme faisant partie de son territoire. Mais Nasrallah n’est pas seul
à adopter une position intransigeante puisque le président du Parlement, le
chiite Nabih Berri, a rejeté l’offre du Secrétaire d'État adjoint américain par
intérim pour les Affaires du Moyen-Orient, David Satterfield, qui a proposé un
arrangement pacifique consistant à attribuer les deux tiers du bloc 9 au Liban et un tiers à Israël.
David Satterfield |
Mais le Liban ne veut pas renoncer à
la totalité de son droit sur le bloc 9 qui se trouve selon lui dans sa zone
économique exclusive (ZEE) en Méditerranée ni à engager des négociations
directes avec Israël. L’émissaire américain a essayé, au cours de son séjour à
Beyrouth, de convaincre ses interlocuteurs de l’utilité de négociations
directes qui pourraient favoriser un règlement à l’amiable du triangle de 860
km² sur lequel le Liban pourrait récupérer 500 km². Il a même proposé une
répartition temporaire équilibrée des produits de vente des hydrocarbures si
les travaux étaient adjugés à Tel-Aviv.
Tamar |
Dans ce contexte, le Hezbollah a
trouvé un alibi pour entrer en lice afin de promettre lui aussi de protéger les
ressources pétrolières libanaises en menaçant les installations israéliennes de
gaz de Tamar et Léviathan. Au lieu de recourir à un arbitrage international, le
Liban aurait tort de confier ses intérêts à Hassan Nasrallah qui n’attend que
cette excuse pour réchauffer le front libanais. Il veut rendre utiles ceux de ses troupes de retour de Syrie. Le secrétaire général
du Hezbollah, pour redorer son blason après les pertes sévères de miliciens sur
le front syrien, est prêt à affronter Israël au sujet des ressources
d'hydrocarbures au large des côtes libanaises, dont le contentieux selon lui entre
«dans le cadre d'une guerre régionale menée par les Etats-Unis pour le
pétrole et le gaz».
Nasrallah veut utiliser la violence :
«La seule force que vous pouvez utiliser dans cette guerre du pétrole
et du gaz, c'est la résistance car il est interdit à l'armée libanaise d'avoir
les missiles et les armes pour affronter les ennemis. Nous devons être unis et
faire montre de courage. Nous ne ferons aucune concession».
Mais l'exploitation des ressources
d'hydrocarbures n’est pas le seul contentieux soulevé par les autorités
libanaises qui, sous la pression du Hezbollah, s'élèvent contre le projet
israélien de construire à la frontière un mur en béton, pourtant en territoire
israélien. Le Liban réfute en effet le tracé actuel de la frontière effectué
par le comité Paulet-Newcombe en 1923. Mais tout est bon pour justifier le
déclenchement d’un conflit. Il appartient donc au Liban de décider s’il veut
retourner à «l’âge de pierre» alors qu’Israël ne montre
aucune agressivité vis-à-vis de son voisin dès lors qu’aucune menace militaire
n’est mise en application contre lui. Alors que la
libanisation de la Syrie est en marche, celle de Liban aurait un impact plus
dramatique.
Il serait temps pour l’ancienne
petite suisse du Moyen-Orient de rejoindre le clan occidental et de songer, comme la Jordanie, l’Égypte et bientôt l’Arabie saoudite, à nouer des relations
diplomatiques avec Israël, seule condition pour obtenir pacifiquement des
concessions de la part de l’État juif et pour garantir son indépendance.
@V. Jabeau
RépondreSupprimerj'ai tenu compte de vos remarques. Merci.
Dommage que je ne puisse vous écrire directement avec votre mail privé.