LE RÉVEIL TARDIF DES AMÉRICAINS EN SYRIE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Les
Israéliens ont tenu à mettre en garde les Américains sur le double-jeu des
Russes qui protègent certes le régime de Bachar Al Assad mais qui, par
ailleurs, permettent l’implantation des Iraniens de manière permanente en
Syrie. Les envoyés israéliens de l’État-major ont réussi à persuader les
Etats-Unis qu’ils devaient vite réagir avant que la situation ne devienne
irréversible. Washington a donc décidé de ne pas évacuer les bases américaines dans le nord de la
Syrie et de créer une nouvelle force locale de 30.000 hommes pour sécuriser la
région.
général Vladimir Chamanov |
Évidemment
cette décision n’a pas plu aux Russes et leur réaction a été à la mesure du
nouveau risque. Le président du Comité de défense de la Douma russe, le général de corps d'armée Vladimir Chamanov a menacé de contre-mesures : «Les pratiques des
Etats-Unis, qui dirigent une coalition internationale prétendument contre
Daesh, contredisent les intérêts russes en Syrie. La Russie travaillera en
coopération avec ses partenaires afin de prendre les mesures nécessaires pour
établir la stabilité en Syrie».
Les
Russes s’inquiètent à long terme de la partition de la Syrie puisque le
ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, s’est exprimé : «On
craint qu'ils ne poursuivent une politique visant à couper la Syrie en
plusieurs morceaux». Trump a effectivement compris tardivement qu’il
avait été berné par Poutine qui ouvrait la porte à l'Iran pour qu'il renforce
sa présence militaire en Syrie. L’accord tacite avec les Russes était devenu
caduc.
Une
délégation de l’ASL (Armée syrienne libre) s’est rendue cette semaine à Washington
pour obtenir de la CIA de nouveaux programmes d’aide et de formation. Cela a
convaincu les Américains de créer une nouvelle force de sécurité frontalière
dans le nord de la Syrie, composée de 30.000 hommes en collaboration avec les FDS
(Forces démocratiques syriennes), dominée par les milices kurdes YPG, les
Unités de protection du peuple formant la branche armée du Parti de l'union
démocratique (PYD) syrien. Ces forces ont pour but d’opérer sur d’autres fronts
pour contrer l'avancée de l'armée syrienne et de ses alliés iraniens ainsi que du
Hezbollah. Les Forces démocratiques syriennes, est une coalition
militaire formée le 10 octobre 2015, active dans le nord de la Syrie, regroupant
des rebelles arabes proches de l'Armée syrienne libre, des tribus locales et
des chrétiens du Conseil militaire syriaque.
Nouvelle force de sécurité |
Cela contredit ainsi l’affirmation
de Poutine, sur la base aérienne russe de Hmeimim le
11 décembre, prétendant que la guerre était terminée sur une victoire russe alors
qu’elle était passé en fait à une nouvelle étape. Les Russes, et le ministre
Lavrov en particulier, craignent que «de vastes étendues de territoire le
long des frontières de la Turquie et de l'Irak à l'est de l'Euphrate soient
isolées».
Trump
s’est donc montré ferme pour appliquer sur le terrain ses décisions car les
zones de désescalade qui avaient été convenues n’ont plus de raison d’exister sous
la pression des mouvements russo-iraniens, des contre-attaques américaines et
des menaces de Moscou. Il a mis en place cette force de sécurité de 30.000
hommes sur les territoires contrôlés par les Kurdes dans le nord et le nord-est
de la Syrie, à la frontière avec la Turquie et l’Irak. Pour les FDS, il s'agit d'assurer
la sécurité aux frontières de la Fédération de la Syrie du Nord donnant ainsi l’impression
que les Américains sont favorables à une sorte de fédéralisme pour morceler la
Syrie. Ces 30.000 soldats vont protéger les frontières turque et irakienne,
ainsi que la frontière qui sépare des forces du régime des Kurdes.
Il
est établi maintenant que les Etats-Unis ont décidé de jouer la carte kurde
malgré les mises en garde de la Turquie qui dénonce ce plan car les milices YPG
sont considérées par Ankara comme une émanation du Parti des travailleurs du
Kurdistan (PKK), mouvement séparatiste classé sur la liste des organisations
terroristes par la Turquie. Ces nouveaux combattants ont reçu des Américains une
série de systèmes de missiles sol-air portatifs.
La
Turquie, de son côté, masse du matériel militaire sur sa frontière avec la
Syrie, dans la province turque de Hatay. Le porte-parole d’Erdogan, Ibrahim
Kalin, a jugé «inacceptable cette Force de sécurité aux frontières. Les
États-Unis prennent des initiatives inquiétantes pour légitimer cette
organisation et l'installer dans la région. Il est impossible de l'accepter».
En signe de riposte, Ankara a menacé de lancer une offensive sur Afrin, ville
du nord de la Syrie tenue par ces forces kurdes.
En
fait, une répartition des tâches a été établie par la coalition. Les
combattants kurdes de la Force de sécurité contrôleront principalement la
frontière avec la Turquie, tandis que les soldats arabes seront plutôt déployés
dans la vallée de l'Euphrate, territoire dont ils sont originaires.
La guerre en Syrie prend une autre tournure.
Vieux proverbe tibetain 😊:
RépondreSupprimerIl n'est jamais trop tard pour bien faire.
Ou égyptien : " rien Nasser de courir, il faut partir à point".
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