Le 19 novembre
1977, l’avion aux couleurs égyptiennes qui transportait Anouar El Sadate
atterrissait en Israël. C’était il y a quarante ans, quatre ans après la guerre
du Kippour qui avait fait trembler le pays et coûté la vie à deux mille cinq
cents soldats. Dix jours, auparavant, Anouar El Sadate avait prononcé, au Caire
devant le Parlement égyptien, un discours qui avait abasourdi les députés en
déclarant : «Je suis prêt
à aller au bout du monde pour la paix … les Israéliens seraient surpris mais je
suis même prêt à aller jusqu’à chez eux, jusqu’à leur Knesset pour discuter
avec eux». Menahem Begin,
alors premier ministre avait tout de suite accepté de le recevoir.
Sadate à la Knesset avec Shamir président de l'assemblée |
On peut
difficilement, aujourd’hui, comprendre le choc, le tsunami que provoqua cette
proposition de paix après toutes ces années de guerre. Le plus important État
arabe allait faire la paix avec Israël, allait le reconnaitre, c’était
inouï ! Je me souviens d’avoir suivi, en direct, les discours de Sadate et
Begin que la télévision française retransmettait comme bien d’autres
télévisions étrangères. J’avais trouvé celui de Sadate flamboyant, celui de
Begin plutôt terne, mais j’avais admiré leur courage ; l’Arabe mettait sa
vie en danger, il le savait, on connaît la suite ; le Juif remettait en
question ses fondements idéologiques, pour que chacun puisse apporter la paix à
son peuple.
Un traité de paix
fut signé en mars 1979. On échangea des ambassadeurs mais, ce fut une paix
froide qui tient toujours malgré quelques vicissitudes. Il aura fallu attendre,
encore, plusieurs années pour qu’un autre pays arabe, la Jordanie, choisisse, à
son tour, de faire la paix avec Israël. Mais le cœur du problème ne se situait
pas entre les pays arabes et Israël, il se situait entre les Palestiniens et
les Israéliens.
Près de quarante
ans se sont écoulés depuis ce traité avec l’Egypte, plusieurs tentatives de
paix ont eu lieu entre Israéliens et Palestiniens mais elles ont très vite
avorté. Des pourparlers indirects, avec
l’entremise d’un parrain, le plus souvent américain, ou des pourparlers
directs, ont bien eu lieu, mais aucune
solution n’est en vue. On a affaire, des deux côtés, à des dirigeants faibles,
sans envergure, qui savent pertinemment
quels sont les compromis nécessaires pour aboutir à un accord mais qui n’osent pas
affronter leurs opposants. Ils ont peur de perdre leur pouvoir et les honneurs
qui en découlent ou la vie, comme Sadate. Benyamin Netanyahou a déclaré ne pas
avoir encore trouvé un Sadate palestinien ; serait-il lui-même un Menahem
Begin ? On peut en douter ! Pourtant s’ils font un peu de
prospective, à dix ou vingt ans, les dirigeants israéliens et palestiniens ne
peuvent pas s’imaginer que le maintien du statu quo puisse profiter à leurs
peuples.
Les Palestiniens y
ont tout à perdre, les territoires qui auraient dû leur être dévolus
rétrécissent comme peau de chagrin, rendant quasiment impossible la création
d’un État palestinien viable. Des générations de jeunes palestiniens ont déjà
été, en vain, sacrifiées, par des dirigeants, le plus souvent corrompus, qui
les envoyaient mourir en martyr ou les laissaient croupir dans la misère. Ils
préfèrent les voir ressasser leur ressentiment contre l’occupation israélienne
que développer la partie de la Palestine qu’ils auraient déjà pu obtenir dans
le cadre d’un compromis. Les Israéliens ne sont pas dénués de toute responsabilité
dans cette situation, mais les divisions et les rivalités entre Palestiniens,
les surenchères des différents groupes armés les ont bien servis.
Tu es assis sur ma chaise |
Le statu quo ne
profite pas non plus aux Israéliens : certes la partie juive de la terre
d’Israël continue à s’étendre mais, ce faisant, elle rend de plus en plus
improbable la création d’un Etat palestinien, et conduit inexorablement à la
pire des solutions, un État binational, un seul Etat pour deux peuples où Juifs
et Arabes bénéficieraient des mêmes droits. On ne voit pas comment un de ces
deux peuples accepterait la primauté de l’autre. Pour Israël, ce serait la fin du rêve sioniste. Il ne serait plus un État juif et
démocratique. Je ne pense pas que les Israéliens voudraient vivre dans un
état d’apartheid même si certains d’entre eux, une minorité encore, sont
partisans d’un État théocratique, ou considèrent que le respect de la
démocratie est un lourd fardeau dont il faut se débarrasser.
Mahmoud Abbas chez
les Palestiniens, Benyamin Netanyahou chez les Israéliens n’ont malheureusement
pas la stature d’un Sadate ou d’un Begin ; il faudra donc que quelqu’un d’autre
leur impose une solution de compromis et Donald Trump serait peut-être le mieux
placé pour le faire.
Anouar El Sadate savait qu'il signait son "Arrêt de Mort", mais il l'a fait pour son Pays.
RépondreSupprimerMenahem Begin savait qu'il serait critiqué, mais il l'a fait pour son Pays.
Une anecdote, pour finir : L'un des premiers échanges entre Anouar El Sadate et Begin : Anouar El Sadate demande à Menahem Begin : "Vous savez quel est notre point commun ?". Menahem Begin réfléchit et lui dit : "Nous avons, tous les 2, été condamnés à mort par les Anglais lors d'un Procès en Contumace" et Anouar El Sadate lui répond : "C'est exact et ça doit créer des liens".
Les éternels ennemis en Europe,la France et l'Allemagne ont fait la paix.Qui aurait pu penser cela?Personne.Quelle est la base de cette paix :Le respect de l'Independance de chaque pays.Pourquoi cela ne pourrait pas se produire au Proche Orient?ce que réclame Israël c'est son droit à son existence juive avec une vie en commun de 1 500 000 arabes israéliens..Abbas refuse cette existence juive et demande une indépendance de ses territoires en ayant avec lui aucune présence juive de plus il demande le retour de millions de réfugiés à l'intérieur de l'Etat d'Israel.Ou sont les indépendances de chacun des pays,nulle part là est le problème.
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