LE HAMAS ET LE DJIHAD ISLAMIQUE S’AFFRONTENT À GAZA
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Délégation de haut rang du Hamas à Téhéran |
Il est difficile de comprendre les gesticulations du Hamas après l’accord de réconciliation signé avec le Fatah. À peine l’encre du paraphe séchée, une délégation du Hamas, présidée par son chef du bureau politique Saleh Arouri, s’est rendue à Téhéran, pour une visite de plusieurs jours. Sans chercher à obtenir l’imprimatur de l’Iran, le Hamas voulait se justifier tout en marchandant une aide concrète financière et matérielle pour éventuellement renoncer à cet accord qui leur enlève le pouvoir à Gaza. En fait, il voudrait renouer des liens distendus après ses zigzags politiques.
Yahya Sinwar |
Dans
une sorte de pied de nez aux Américains, qui ont appelé au désarmement du Hamas
et exigé la rupture des relations avec l’Iran, les islamistes de Gaza défient
ouvertement Israël. Le chef du Hamas, Yahya Sinwar, justifie son voyage parce
que «l’Iran est le plus grand fournisseur d’armes, d’argent et de formation
militaire aux brigades al-Kassem, branche armée du Hamas. Aura tort
celui qui pense que nous allons rompre nos relations avec l’Iran. Téhéran est
le plus grand soutien pour les brigades al-Kassem. La force dont se dote al-Kassem
revient en grande partie à l’Iran. Le Hamas a fait entrer à Gaza, entre les
années 2015 et 2016, une grande quantité d’armes dépassant de loin celle
arrivée à Gaza depuis 10 ans. Nous
sommes capables de frapper Tel-Aviv, en 5 minutes, par un nombre de missiles
équivalent à ce que nous avons lancé durant 51 jours lors de la guerre de 2014».
Cette
déclaration belliqueuse ne s’explique pas au lendemain de la signature d’un
accord qui sous-entend une collaboration pacifique entre les clans et une
tentative de solution avec Israël. Alors, pour seule explication, on justifie
ce revirement par la nécessité du Hamas de marcher sur les pas du Djihad
islamique, son concurrent à Gaza, qu’il ne cesse de combattre d’ailleurs.
En effet la guerre entre ces deux clans a été récemment ravivée quand un membre de la branche militaire du Hamas, Nidal al-Jaafari, a été tué le 17 août dans un attentat suicide, près de la frontière de Gaza avec l’Égypte. L’État islamique avait été rendu responsable de cet épisode sanglant, résultant de la rivalité meurtrière qui dure depuis plus de dix ans et qui oppose le Hamas aux salafistes. Cette attaque suicide contrecarrait l’accord avec l’Égypte qui conditionnait l’allégement du blocus sous réserve que le Hamas empêche l’entrée des Salafistes à travers le Sinaï.
Nidal Al-Jaafari |
En effet la guerre entre ces deux clans a été récemment ravivée quand un membre de la branche militaire du Hamas, Nidal al-Jaafari, a été tué le 17 août dans un attentat suicide, près de la frontière de Gaza avec l’Égypte. L’État islamique avait été rendu responsable de cet épisode sanglant, résultant de la rivalité meurtrière qui dure depuis plus de dix ans et qui oppose le Hamas aux salafistes. Cette attaque suicide contrecarrait l’accord avec l’Égypte qui conditionnait l’allégement du blocus sous réserve que le Hamas empêche l’entrée des Salafistes à travers le Sinaï.
En
fait Nidal al-Jaafari et son neveu étaient en mission pour empêcher
l’infiltration de deux hommes armés à l’entrée d’un tunnel. L’un des deux infiltrés
s’est défendu en actionnant sa ceinture explosive suicidaire tuant Nidal. Le
deuxième infiltré avait été arrêté. La riposte sanglante du Hamas fut immédiate ;
les forces de sécurité, aidées par les Brigades Al-Kassem, avaient lancé une
opération de répression des groupes salafistes des villes de Rafah et de Khan
Younes. Les bureaux de l’État islamique de Gaza et l’Armée de l’Islam, proche
d’Al-Qaïda, ont été fermés et leurs membres arrêtés. Des raids contre des
maisons et des camps d’entraînement djihadistes ont été lancés ; des
dizaines de personnes avaient été arrêtées, dans le quartier de Tal al-Sultan à
Rafah d’où venait Mustafa Kullab, l’auteur de l’attentat-suicide. Eyad
al-Buzom, porte-parole du ministère de l’Intérieur de Gaza, avait précisé que les
autorités ne toléreraient plus ceux qui menaçaient la sécurité à Gaza.
La
répression s’était encore poursuivie en ce mois d’octobre au moment même du
déplacement au Caire de la délégation du Hamas. Nour Issa, haut commandant de
la milice de l’État islamique et trois de ses adjoints furent emprisonnés. Ce
commandant avait un CV éloquent puisqu’il avait combattu en Libye et avait été ensuite
envoyé à Gaza pour créer une antenne de Daesh. Ce conflit qui oppose le Hamas
aux Salafistes date d’août 2009. À cette époque Abd al-Latif Musa avait
proclamé un califat islamique à Gaza et avait exigé du Hamas l’application stricte
de la charia. Les Brigades Al-Kassem n’avaient bien sûr pas accepté l’ultimatum
ce qui avait entraîné de nouveau affrontements périodiques qui ont fait
plusieurs centaines de morts.
Abd al-Latif Musa |
En
2011, après l’enlèvement et le meurtre d’un militant italien, Vittorio Arrigoni,
le Hamas avait exécuté deux militants salafistes soupçonnés d’en être les
auteurs et arrêté quatre autres membres du groupe, condamnés par la suite à la
prison à vie. L’un d’entre eux, Mahmoud al-Salfiti, avait bénéficié de
complicité pour s’échapper de Gaza avant d’être tué en Irak en combattant avec Daesh.
Les
relations conflictuelles entre Hamas et Djihad islamique n’ont jamais cessé de se dégrader.
Ainsi en 2015, des attentats à la bombe à Gaza avaient déclenché une autre
répression. Le Hamas avait manifesté sa bonne volonté vis-à-vis de l’Égypte alors
qu’il partageait l’idéologie des Frères musulmans du président déchu Morsi. Il savait qu’il devait abandonner ses convictions pour améliorer ses relations avec Le Caire afin d’obtenir
l’ouverture permanente du passage de Rafah. Il s’est donc mis à lutter contre
les infiltrations d’hommes et d’armes à travers Gaza. La situation s’était
violemment envenimée à la suite de l’éviction de Mohamed Morsi lorsque les
tribus locales du Sinaï s’étaient soulevées, poussant les groupes salafistes à
faire allégeance à l’État islamique.
Mais
des analystes arabes, fidèles à leur théorie du bouc émissaire, se sont mis à
divaguer en prétendant qu’Israël finançait l’État islamique au Sinaï pour saper
l’autorité du Hamas. Ils ont par ailleurs, pour faire bonne mesure, accusé le
Hamas d’avoir abandonné la loi islamique pour se rapprocher des chiites, donc
de l’Iran. La question reste de savoir si le djihad islamique a pour objectif
de torpiller toute réconciliation politique Fatah-Hamas alors que cet accord, salué comme «historique», risque d’être sans lendemain car
il ne prend pas en compte les problèmes réels liés à la capacité de nuisance
du djihad islamique. Le Hamas, de son côté, n’a pas d’autres perspectives car
il a vu disparaître ses appuis et ses moyens syriens et qataris. Il risque
d’être emporté dans une stratégie de violence imposée par les activistes du
djihad.
Mais
les Palestiniens de Cisjordanie, et certains de Gaza, ne croient plus que la
violence et le terrorisme soient les seuls ingrédients pour permettre aux
Palestiniens d’obtenir des avancées politiques. Ils sont à présent convaincus
que l’avenir du conflit israélo-arabe passe par la marginalisation des
extrémistes arabes. Le Djihad islamique a donc compris le sort qui lui était
réservé par le Fatah, et même par le Hamas, donc il cherche donc à réchauffer le front
de Gaza pour provoquer Israël. Il voit d’un mauvais œil l’amélioration de
l’image de marque du Hamas depuis la signature de l’accord.
Le Djihad islamique condamne toute
action diplomatique puisque l’essence même de son combat consiste à entretenir
la violence. Pour cela, il doit s'opposer, par la force, à toute réunification des clans
palestiniens qui pourrait le marginaliser. Dans ce combat fratricide, Israël risque
d’être la principale victime de la concurrence entre le Hamas et le Djihad
islamique. Il ne pourrait pas rester longtemps un témoin passif si le sud
connaissait à nouveau une flambée de tirs de roquettes. Le Hamas devra
éclaircir sa position pour préciser s’il choisit la voie pacifique de l’Égypte ou l’aventure militaire avec l’Iran.
Chacun essaye de flouer l'autre et de l'éliminer. Dans tous les cas les pétrodollars font la loi !
RépondreSupprimerVoici donc un remake en version islam-iste de la guerre interne entre SA et SS. Avec une complication néanmoins : l'intervention de puissances étrangéres au soutien des uns et des autres pour permettre à un clan de prendre le pouvoir. Sur le fond rien ne change ni ne changera envers Israel ,-l'ennemi à abbattre- aprés la domination de l'un sur l'autre. La meilleure situation possible est qu'ils se détruisent l'un l'autre. A suivre...
RépondreSupprimerQue des vilains..! ça donne une image morbide de la situation du coin, que des gueules d'assassins, beurk..!
RépondreSupprimerEn finir avec l'abces Gaza: une seule solution, "refiler" Gaza a l'Egypte.
RépondreSupprimerC'est que les gazaouis(?) sont soumis a la demagogie du hamas. Ils sont convaincus qu'une nouvelle tentative de guerre contre Israel sera la derniere, etant donne que cette guerre sera victorieuse en quelques heures. Voici donc la conclusion esperee par les dirigeants...
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