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samedi 15 octobre 2016

Le Pen, Trump, Sarkozy : Le temps des populistes



LE PEN, TRUMP, SARKOZY : LE TEMPS DES POPULISTES

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps 

           
          L’année politique 2017 pourrait se résumer par la victoire des populismes dans le monde avec en particulier, Donald Trump aux États-Unis, Marine le Pen, Jean-Luc Melenchon et Nicolas Sarkozy en France. Le populisme, doctrine toujours employée dans un sens péjoratif avec une connotation de démagogie, désigne des discours et des courants politiques qui font appel aux intérêts du «peuple». Il prône son recours en opposant les intérêts du peuple à ceux de l’élite qu'il prend pour cible de ses critiques. Le populisme s’incarne toujours à travers une figure charismatique soutenue par un parti acquis à ce corpus idéologique. 



          Les populistes ont prospéré parce qu’ils estiment que l’élite égoïste n’était pas capable de gérer et de traiter les questions concernant les gens ordinaires, la majorité du peuple en quelque sorte. À présent ils s’appuient sur la crainte et sur un racisme à peine camouflé en prétendant que les gouvernements ne sont pas capables d’assurer à leurs concitoyens la sécurité au moment où prospèrent les terrorismes en tout genre.
            Le populisme revient à la mode dans les démocraties occidentales, en Europe et aux États-Unis. En France on l'a connu avec le boulangisme, le poujadisme, et à présent le Front national. Aujourd’hui le populisme ne défend plus «la race», comme sous les nazis mais la culture occidentale en affirmant que les autres cultures sont incompatibles avec le sienne. Ce message, entendu régulièrement au FN, a tendance à se retrouver dans la dialectique de Nicolas Sarkozy.
            La qualification de Marine le Pen comme populiste est récente et ne s’est pas imposée d’emblée. Le Front national était certes qualifié de fasciste ou d’extrême-droite en raison des liens du parti avec les collaborateurs de Vichy et les mutins de l’OAS qui entretenaient des discours racistes. Le FN est identitaire, nationaliste, protectionniste, xénophobe, islamophobe et anti-européen. Même si Marine Le Pen conteste ces qualificatifs, elle ne peut nier qu’il s’agit des fondamentaux de son parti. 

        Mais à présent les électeurs, étant supposés issus majoritairement des classes populaires, la désignation de parti populiste est justifiée. Le populisme de Le Pen ne consiste pas à̀ valoriser le peuple, mais à se servir de lui pour donner un semblant de légitimité́ sociale à une cause qui lui est étrangère. En fait le FN est une nouvelle droite, certes radicale et pas encore dangereuse, qui se qualifie de populaire par des discours «sociaux» et anti-élites face aux victimes de la crise sociale et économique, de type poujadiste.
            Le populisme du FN s’était exprimé dans les années 1990 lorsque l’analyse des résultats électoraux avait montré que les classes populaires constituées d’ouvriers, d’employés et de chômeurs avaient voté Le Pen. Le parti ralliait alors les fractions sociales les plus illégitimes socialement, les sans-diplômes et les faibles économiquement par opposition aux plus riches protégés, par leur haute culture, de toute idée xénophobe. On se souvient d’ailleurs du match des populismes entre Mélenchon et Le Pen. Mais ce populisme français a réussi à s’imposer lorsque des «savants», des hommes politiques, et des intellectuels ont rejoint progressivement cette vision d’un FN «populiste». La conjoncture s'y prête puisque les groupes populaires n’ont plus tellement de défenseurs collectifs ; le PCF est à̀ la dérive, le PS s’adresse désormais aux classes supérieures, et le Front de gauche est en déroute. Les politiques sociales n’ont pas réussi à freiner la dégradation sociale des groupes populaires qui sont enclins au pire.
            Malgré son héritage, Marine Le Pen tente de prouver que le parti frontiste n’a pas l’idéologie d’un fascisme ou d’une extrême-droite au passé sulfureux. Elle veut convaincre qu’elle est en rupture de filiation en tant que nouvelle droite radicale et populaire. Elle tente de convaincre l’opinion qu’elle s’est acclimatée à la démocratie. Mais les credo sont les mêmes : les risques viennent du peuple lui-même. Le FN veut exercer la «préférence nationale» et veut stopper l’immigration. 

            Donald Trump est l’exemple type d’un candidat à la Maison-Blanche qui n’a pas été pris au sérieux au départ. Son populisme s’exprime par des propos outranciers qui séduisent l’électorat blanc déboussolé. Les Républicains, dont il fait partie, sont désarmés face à ce phénomène. D’esprit reaganien, le magnat de l’immobilier incruste partout son slogan «Make America Great Again», (rendre l’Amérique à nouveau grande). Ses déclarations choquent Washington quand il qualifie les dirigeants politiques de corrompus ou d’incompétents.  Diplômé de la prestigieuse Wharton School of Finance de Philadelphie, le candidat républicain vante sa fortune de plusieurs milliards de dollars pour montrer son indépendance vis-à-vis des lobbies.
            Sa technique oratoire est éprouvée puisqu’il ne se sert pas d’un téléprompteur pour ses discours improvisés. Il reste imprévisible dans ses propos, surprenants ou choquants : «je serai le plus grand président que Dieu ait créé quand il est question de créer des emplois». Véritable tribun, populiste et démagogue, il ne choque personne par ses excentricités consistant à étaler ses richesses. Il insulte l’électorat féminin ou minimise les mérites du héros de la guerre du Vietnam, John McCain. 
Frontière Mexique

            Tout est à l’excès lorsqu’il promet d’ériger un mur de 3.200 kilomètres entre le Mexique et les États-Unis et d’en faire payer la construction aux Mexicains, décrits comme «des criminels et des violeurs». Il envisage d’expulser les 11 millions de clandestins qui vivent en Amérique. Son discours anti-immigration avait choqué au départ mais il reste à la base de sa stratégie qui déstabilise ses concurrents, ne trouvant rien de mieux que de lui emboîter le pas. Il vise cet électorat spécifique des Blancs sans formation universitaire, qui ne croient plus en l’État et à ses institutions, qui exècrent les élites et qui voient dans son discours un élan de type poujadiste.
            Trump sait marquer les esprits lorsqu’il s’appuie sur les statistiques précisant qu’en 2044, les Blancs ne seront plus majoritaires et que les États-Unis se préparent à un «génocide culturel». Il ne connaît rien à la politique étrangère puisqu’il confond les Kurdes et la force iranienne Al-Qods, le Hezbollah et le Hamas. Mais les Américains sont portés à croire que ce candidat loufoque est capable de gagner l’élection présidentielle puisque sa politique populiste semble ainsi marquer des points.

            Dans la campagne électorale française, le président des Républicains s’est donné la carrure du seul homme providentiel capable d’incarner les aspirations du peuple. Il a annoncé que «La primaire se jouera sur la France, la République, la culture française» et a dénoncé «l’islam prosélyte et intégriste qui vous dit comment manger, comment vous habiller, quel rapport entretenir avec le sexe opposé». Pour lui il est indéniable que «La France, c’est un pays chrétien». Il réutilise le même langage que lui avait soufflé Patrick Buisson quand il était encore son conseiller.
Buisson-Sarkozy

            Son populisme est avéré car il ne prône pas le rassemblement mais il dresse les communautés les unes contre les autres. Cette stratégie est loin d’être acceptée au sein de son parti dont le clivage explique d’ailleurs la présence de sept candidats à la primaire. Sa stratégie consiste à user de populisme pour faire venir à lui le peuple de l’extrême-droite et de l’extrême-gauche, faisant fi ainsi des traditions gaullistes. Il met en cause les media puis se comporte comme au café du commerce, loin du niveau exigé pour un président : «Qu’est-ce qu’y z’attendent vos téléspectateurs ? Est-ce que demain, on sera en sécurité ? Est-ce que demain on pourra sortir dans la rue ? Alors si pour vous, la démocratie, c’est l’absence totale de débat… ».

            Dans cette idéologie, Sarkozy s’affranchit du dialogue républicain digne et serein : «Est-ce que vous croyez que le souci des Français, c’est de savoir si on va se faire des risettes, des sourires. Si on va se tendre la main ?». C’est presque du Trump alors qu’il aurait voulu être Churchill. 

6 commentaires:

  1. populistes: qui parle au peuple comme il parle et qui leur parlent de ceux qu ils veulent entendre et qui adaptent leurs discours aux circonstances.Le contraire d un chef d etat qui doit prendre du recul de la hauteur et parfois aller a contre courant

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  2. Nicolas Sarkozy ne peut être rangé dans la catégorie des hommes populistes .Il a été Président de la République pendant un quinquennat et on peut aujourd'hui lui reprocher de n'avoir pas été franchement à droite : LES 35 heures et L' ISF ont été maintenues et il a fait appel à des personnalités de la gauche pour gouverner : Kouchner, Fadela Amara, Frédéric Mitterrand, Jean-Pierre Jouyet .
    Vous appelez cela du populisme ?
    Souligner les dangers de l'islamisme et DE l'immigration non contrôlée , dire que l'identité de la France est en péril Sarkozy l'a dit à voix haute et François Hollande est d'accord avec lui dans ses confidences aux journalistes du Monde ( Un Président ne devrait pas dire cela)
    Allons il convient de ne pas vous laisser emporter par votre hostilité à l'égard de Nicolas Sarkozy!

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  3. Cher monsieur Benillouche,

    "Populisme" ! Le grand mot est lâché. Mais comme il ne saurait se suffire à lui-même - car qui pourrait s'offusquer de ce que les politiques se soucient de "l'intérêt du peuple" - il faut vite lui accoler : "identitaire, nationaliste, protectionniste, xénophobe, islamophobe, et anti-européen". Vous auriez même pu continuer : homophobe, fasciste et antisémite !
    D'ailleurs, que ne nous parlez-vous pas de ces stratégies populistes aussi - mais de gauche celles-là - de certaines communes françaises à forte communauté musulmane, qui se sont engagées pour la cause palestinienne, comme la ville de Bondy qui a décidé le boycott des produits israéliens, en juin dernier ?
    Le malheur est, comme le souligne Christophe Guilluy que "si les Français restent attachés au modèle républicain, laïque et égalitaire, leur réalité est déjà celle d'une société multiculturelle et de ses dérives communautaires."
    Le reste n'est que glose politicienne.

    Très cordialement.

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  4. Véronique ALLOUCHE14 octobre 2016 à 18:52

    N'est-ce pas du populisme lorsque François Hollande voulait inscrire dans la constitution la déchéance de nationalité pour les bi-nationaux, jouant ainsi sur la peur?
    Pour en rajouter une couche sur J.L. Mélenchon à peine effleuré dans l'article, qui dans son programme pour sa candidature à la présidentielle, nous dit ceci: "Je crois que le gavage des riches, l’appauvrissement des classes moyennes et les misères du peuple n’ont rien de fatal."
    Le gavage des riches.... En oubliant que ce sont eux qui procurent les emplois, qui payent les plus gros impôts....
    Puis sur le plan international, qui flatte-t-il lorsqu'en 2014, parlant de la guerre de Gaza: Défendre comme il l'a fait devant "ses" militants, "les populations martyrisées de Gaza" en précisant : "Nous ne croyons pas aux Peuples supérieurs aux autres" est lourd, trop lourd de sous-entendus. Il suggère ainsi que les "crimes" de Gaza sont motivés par l'idée que les Juifs seraient un peuple élu.
    Les journalistes ne sont pas en reste de démagogie lorsqu'ils suivent le courant actuel en montant aux nues Alain Juppé en même temps qu'ils vouent aux gémonies Sarkozy.
    Article partial destiné à vos lecteurs de gauche Monsieur Benillouche....
    Veronique Allouche

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  5. Jacques BENILLOUCHE14 octobre 2016 à 18:56

    @ Véronique

    J'ai suffisament écrit par ailleurs que la Gauche était disqualifiée pour ces élections parce qu'elle avait déçu. A quoi sert d'en rajouter.Le combat se situe dorénavant entre Sarkozy, Juppé et Le Pen. Donc inutile de parler de ceux qui sont hors jeu.

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