LE PEN, TRUMP, SARKOZY : LE TEMPS
DES POPULISTES
Par Jacques
BENILLOUCHE
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L’année politique 2017 pourrait se
résumer par la victoire des populismes dans le monde avec en particulier,
Donald Trump aux États-Unis, Marine le Pen, Jean-Luc Melenchon et Nicolas
Sarkozy en France. Le populisme, doctrine toujours employée dans un sens
péjoratif avec une connotation de démagogie, désigne des discours et des
courants politiques qui font appel aux intérêts du «peuple». Il prône
son recours en opposant les intérêts du peuple à ceux de l’élite qu'il prend
pour cible de ses critiques. Le populisme s’incarne toujours à travers une
figure charismatique soutenue par un parti acquis à ce corpus idéologique.
Les populistes ont prospéré parce
qu’ils estiment que l’élite égoïste n’était pas capable de gérer et de traiter
les questions concernant les gens ordinaires, la majorité du peuple en quelque
sorte. À présent ils s’appuient sur la crainte et sur un racisme à peine
camouflé en prétendant que les gouvernements ne sont pas capables d’assurer à leurs
concitoyens la sécurité au moment où prospèrent les terrorismes en tout genre.
Le populisme revient à la mode dans les
démocraties occidentales, en Europe et aux États-Unis. En France on l'a connu
avec le boulangisme, le poujadisme, et à présent le Front national.
Aujourd’hui le populisme ne défend plus «la race», comme sous les nazis
mais la culture occidentale en affirmant que les autres cultures sont
incompatibles avec le sienne. Ce message, entendu régulièrement au FN, a
tendance à se retrouver dans la dialectique de Nicolas Sarkozy.
La qualification de Marine le Pen comme populiste est récente et ne
s’est pas imposée d’emblée. Le Front national était certes qualifié de fasciste
ou d’extrême-droite en raison des liens du parti avec les collaborateurs de Vichy
et les mutins de l’OAS qui entretenaient des discours racistes. Le FN est
identitaire, nationaliste, protectionniste, xénophobe, islamophobe et
anti-européen. Même si Marine Le Pen conteste ces qualificatifs, elle ne peut
nier qu’il s’agit des fondamentaux de son parti.
Mais à présent les électeurs,
étant supposés issus majoritairement des classes populaires, la désignation de
parti populiste est justifiée. Le populisme de Le Pen ne consiste pas à̀
valoriser le peuple, mais à se servir de lui pour donner un semblant de
légitimité́ sociale à une cause qui lui est étrangère. En fait le FN est une
nouvelle droite, certes radicale et pas encore dangereuse, qui se qualifie de
populaire par des discours «sociaux» et anti-élites face aux victimes
de la crise sociale et économique, de type poujadiste.
Le populisme du FN s’était exprimé
dans les années 1990 lorsque l’analyse des résultats électoraux avait montré
que les classes populaires constituées d’ouvriers, d’employés et de chômeurs
avaient voté Le Pen. Le parti ralliait alors les fractions sociales les plus
illégitimes socialement, les sans-diplômes et les faibles économiquement par
opposition aux plus riches protégés, par leur haute culture, de toute idée
xénophobe. On se souvient d’ailleurs du match des populismes entre Mélenchon et
Le Pen. Mais ce populisme français a réussi à s’imposer lorsque des «savants»,
des hommes politiques, et des intellectuels ont rejoint progressivement cette vision d’un FN «populiste». La conjoncture s'y prête puisque les
groupes populaires n’ont plus tellement de défenseurs collectifs ; le PCF est
à̀ la dérive, le PS s’adresse désormais aux classes supérieures, et le Front de
gauche est en déroute. Les politiques sociales n’ont pas réussi à freiner la
dégradation sociale des groupes populaires qui sont enclins au pire.
Malgré son héritage, Marine
Le Pen tente de prouver que le parti frontiste n’a pas l’idéologie d’un
fascisme ou d’une extrême-droite au passé sulfureux. Elle veut convaincre qu’elle est en rupture de filiation en tant que nouvelle droite radicale et populaire. Elle tente de convaincre l’opinion qu’elle s’est acclimatée à la démocratie. Mais
les credo sont les mêmes : les risques viennent du peuple lui-même. Le FN veut
exercer la «préférence nationale» et veut stopper l’immigration.
Donald Trump est l’exemple type d’un
candidat à la Maison-Blanche qui n’a pas été pris au sérieux au départ. Son populisme
s’exprime par des propos outranciers qui séduisent l’électorat blanc
déboussolé. Les Républicains, dont il fait partie, sont désarmés face à ce
phénomène. D’esprit reaganien, le magnat de l’immobilier incruste partout son
slogan «Make America Great Again», (rendre l’Amérique à nouveau grande).
Ses déclarations choquent Washington quand il qualifie les dirigeants politiques
de corrompus ou d’incompétents. Diplômé
de la prestigieuse Wharton School of Finance de Philadelphie, le
candidat républicain vante sa fortune de plusieurs milliards de dollars pour
montrer son indépendance vis-à-vis des lobbies.
Sa technique oratoire est éprouvée
puisqu’il ne se sert pas d’un téléprompteur pour ses discours improvisés. Il
reste imprévisible dans ses propos, surprenants ou choquants : «je serai le
plus grand président que Dieu ait créé quand il est question de créer des
emplois». Véritable tribun, populiste et démagogue, il ne choque personne
par ses excentricités consistant à étaler ses richesses. Il insulte l’électorat
féminin ou minimise les mérites du héros de la guerre du Vietnam, John
McCain.
Frontière Mexique |
Tout est à l’excès lorsqu’il promet
d’ériger un mur de 3.200 kilomètres entre le Mexique et les États-Unis et d’en
faire payer la construction aux Mexicains, décrits comme «des criminels et
des violeurs». Il envisage d’expulser les 11 millions de clandestins qui
vivent en Amérique. Son discours anti-immigration avait choqué au départ mais
il reste à la base de sa stratégie qui déstabilise ses concurrents, ne trouvant
rien de mieux que de lui emboîter le pas. Il vise cet électorat spécifique des Blancs
sans formation universitaire, qui ne croient plus en l’État et à ses
institutions, qui exècrent les élites et qui voient dans son discours un élan
de type poujadiste.
Trump sait marquer les esprits
lorsqu’il s’appuie sur les statistiques précisant qu’en 2044, les Blancs ne
seront plus majoritaires et que les États-Unis se préparent à un «génocide
culturel». Il ne connaît rien à la politique étrangère puisqu’il confond
les Kurdes et la force iranienne Al-Qods, le Hezbollah et le Hamas. Mais les
Américains sont portés à croire que ce candidat loufoque est capable de gagner
l’élection présidentielle puisque sa politique populiste semble ainsi marquer
des points.
Dans la campagne électorale
française, le président des Républicains s’est donné la carrure du seul homme
providentiel capable d’incarner les aspirations du peuple. Il a annoncé que «La
primaire se jouera sur la France, la République, la culture française» et a
dénoncé «l’islam prosélyte et intégriste qui vous dit comment manger,
comment vous habiller, quel rapport entretenir avec le sexe opposé». Pour
lui il est indéniable que «La France, c’est un pays chrétien». Il
réutilise le même langage que lui avait soufflé Patrick Buisson quand il était
encore son conseiller.
Buisson-Sarkozy |
Son populisme est avéré car il ne prône
pas le rassemblement mais il dresse les communautés les unes contre les autres.
Cette stratégie est loin d’être acceptée au sein de son parti dont le clivage explique
d’ailleurs la présence de sept candidats à la primaire. Sa stratégie consiste à
user de populisme pour faire venir à lui le peuple de l’extrême-droite et de l’extrême-gauche,
faisant fi ainsi des traditions gaullistes. Il met en cause les media puis se
comporte comme au café du commerce, loin du niveau exigé pour un
président : «Qu’est-ce qu’y z’attendent vos téléspectateurs ? Est-ce
que demain, on sera en sécurité ? Est-ce que demain on pourra sortir dans la
rue ? Alors si pour vous, la démocratie, c’est l’absence totale de débat… ».
Dans cette
idéologie, Sarkozy s’affranchit du dialogue républicain digne et serein : «Est-ce
que vous croyez que le souci des Français, c’est de savoir si on va se faire
des risettes, des sourires. Si on va se tendre la main ?». C’est presque du
Trump alors qu’il aurait voulu être Churchill.
populistes: qui parle au peuple comme il parle et qui leur parlent de ceux qu ils veulent entendre et qui adaptent leurs discours aux circonstances.Le contraire d un chef d etat qui doit prendre du recul de la hauteur et parfois aller a contre courant
RépondreSupprimerNicolas Sarkozy ne peut être rangé dans la catégorie des hommes populistes .Il a été Président de la République pendant un quinquennat et on peut aujourd'hui lui reprocher de n'avoir pas été franchement à droite : LES 35 heures et L' ISF ont été maintenues et il a fait appel à des personnalités de la gauche pour gouverner : Kouchner, Fadela Amara, Frédéric Mitterrand, Jean-Pierre Jouyet .
RépondreSupprimerVous appelez cela du populisme ?
Souligner les dangers de l'islamisme et DE l'immigration non contrôlée , dire que l'identité de la France est en péril Sarkozy l'a dit à voix haute et François Hollande est d'accord avec lui dans ses confidences aux journalistes du Monde ( Un Président ne devrait pas dire cela)
Allons il convient de ne pas vous laisser emporter par votre hostilité à l'égard de Nicolas Sarkozy!
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimer"Populisme" ! Le grand mot est lâché. Mais comme il ne saurait se suffire à lui-même - car qui pourrait s'offusquer de ce que les politiques se soucient de "l'intérêt du peuple" - il faut vite lui accoler : "identitaire, nationaliste, protectionniste, xénophobe, islamophobe, et anti-européen". Vous auriez même pu continuer : homophobe, fasciste et antisémite !
D'ailleurs, que ne nous parlez-vous pas de ces stratégies populistes aussi - mais de gauche celles-là - de certaines communes françaises à forte communauté musulmane, qui se sont engagées pour la cause palestinienne, comme la ville de Bondy qui a décidé le boycott des produits israéliens, en juin dernier ?
Le malheur est, comme le souligne Christophe Guilluy que "si les Français restent attachés au modèle républicain, laïque et égalitaire, leur réalité est déjà celle d'une société multiculturelle et de ses dérives communautaires."
Le reste n'est que glose politicienne.
Très cordialement.
N'est-ce pas du populisme lorsque François Hollande voulait inscrire dans la constitution la déchéance de nationalité pour les bi-nationaux, jouant ainsi sur la peur?
RépondreSupprimerPour en rajouter une couche sur J.L. Mélenchon à peine effleuré dans l'article, qui dans son programme pour sa candidature à la présidentielle, nous dit ceci: "Je crois que le gavage des riches, l’appauvrissement des classes moyennes et les misères du peuple n’ont rien de fatal."
Le gavage des riches.... En oubliant que ce sont eux qui procurent les emplois, qui payent les plus gros impôts....
Puis sur le plan international, qui flatte-t-il lorsqu'en 2014, parlant de la guerre de Gaza: Défendre comme il l'a fait devant "ses" militants, "les populations martyrisées de Gaza" en précisant : "Nous ne croyons pas aux Peuples supérieurs aux autres" est lourd, trop lourd de sous-entendus. Il suggère ainsi que les "crimes" de Gaza sont motivés par l'idée que les Juifs seraient un peuple élu.
Les journalistes ne sont pas en reste de démagogie lorsqu'ils suivent le courant actuel en montant aux nues Alain Juppé en même temps qu'ils vouent aux gémonies Sarkozy.
Article partial destiné à vos lecteurs de gauche Monsieur Benillouche....
Veronique Allouche
@ Véronique
RépondreSupprimerJ'ai suffisament écrit par ailleurs que la Gauche était disqualifiée pour ces élections parce qu'elle avait déçu. A quoi sert d'en rajouter.Le combat se situe dorénavant entre Sarkozy, Juppé et Le Pen. Donc inutile de parler de ceux qui sont hors jeu.
Et Macron ?
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