ISRAËL-PALESTINE : LA PAIX PAR L’ÉCONOMIE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Bus d'ouvriers palestiniens |
Une information vient de tomber précisant que le gouvernement israélien avait délivré des permis de travail à des milliers d’Ukrainiens pour être employés dans les chantiers de construction. Sauf à considérer cette décision comme une volonté politique pour satisfaire les relations avec ce pays de l’Est, on ne trouve aucun justificatif à aller chercher si loin des ouvriers alors qu’à nos portes il y a pléthore d'ouvriers palestiniens. Tout comme il y a une très faible minorité de «terroristes» juifs, on ne peut pas considérer que tous les Palestiniens n’aspirent qu’à manier le couteau contre les Juifs.
Construction à Jérusalem |
Selon
le promoteur qui construit des balcons dans notre région, il ne trouve pas de
meilleurs ouvriers ponctuels que les Arabes des territoires qui travaillent
sous les ordres de chefs de chantiers arabes israéliens. Il a confirmé que les Juifs avaient horreur du travail dans les chantiers. Il n’a jamais eu à se plaindre d’un
quelconque incident, même dans les moments difficiles des attentats au couteau.
Il soupçonne les Arabes de faire leur propre police pour éviter d’être renvoyés
chez eux, avec à la clef le chômage pour plusieurs mois.
Les
attentats n’ont jamais découragé les autorités sécuritaires israéliennes qui ont
misé sur l’encouragement économique plutôt que sur la répression pour endiguer
le flot de terreur qui a envahi Jérusalem et les territoires. On peut leur
faire confiance sinon il faudrait désespérer de tout. Ils semblent avoir raison
puisque le calme est presque totalement revenu. On entend déjà la critique venant
des milieux nationalistes pour accuser les chefs sécuritaires de «gauchisme»
alors qu’en fait ils font preuve de pragmatisme dans le seul intérêt du pays.
Chez
les Palestiniens, le chômage et les chiffres de la pauvreté sont troublants et
les perspectives économiques inquiétantes. De l’avis général, Israël doit
calmer la grogne des Palestiniens qui, en l’absence d’amélioration de leur
situation économique, risquent de basculer en majorité vers le terrorisme. Il
est un fait qu’ils ont été sourds aux appels des extrémistes islamistes qui les
incitaient à une nouvelle Intifada. La situation est grave en Cisjordanie car
le Bureau central palestinien des statistiques y évalue le taux de chômage à
26.9% contre 43,9% à Gaza et 5% en Israël.
Malgré la hausse de l’aide internationale et quelques réformes
structurelles de l’Autorité palestinienne, la croissance, qui s’était fortement
accrue, s’est ensuite ralentie pour
entrer en récession en 2014 et en 2015. La situation financière de l’AP
est plus que jamais critique. Or l’économie palestinienne est totalement
dépendante des Israéliens avec 81,7% des exportations et 71,3% des importations
dans une sorte de quasi-union douanière. C’est essentiellement une économie de
service avec un secteur public très important (22,9% des employés) en
particulier à Gaza, une industrie limitée (14,5% avec l’extraction de pierres)
et une agriculture en perte de vitesse (3,8%). Le secteur de la construction
représente 7,2% du PIB.
Etudiants palestiniens à l'université El-Qods |
Les troubles sécuritaires n’ont pas gêné uniquement les Israéliens. L’économie
palestinienne n’est plus en capacité de tirer pleinement partie de ses
avantages liés à une main d’œuvre éduquée, une importante diaspora et des
atouts touristiques. La peur s'est emparée de toute la région et les touristes
sont moins nombreux dans les bazars de souvenirs de Bethléem. La consommation est soutenue
par les revenus étrangers constitués des salaires des 11,7% des Palestiniens
travaillant en Israël et les transferts de l’étranger. Le secteur privé est composé de microentreprises incapables d’absorber la croissance de la
population active dont le salaire minimal est de 1.700 shekels (400 euros) par
mois alors qu’il est trois fois plus élevé en Israël. L’économie devrait
bénéficier d’un faible rebond en 2016 (+6,5% dans la bande de Gaza et +2% en
Cisjordanie) à condition que la reconstruction se mette en place pour créer des
emplois et que le calme règne.
Benjamin Netanyahou n'a jamais choisi la politique du pire. Il est plus
sensible aux recommandations des chefs sécuritaires israéliens qui conseillent
une plus grande ouverture vers les Palestiniens afin de ne pas les pousser au
désespoir, voire à l’extrémisme. Les Palestiniens de Cisjordanie ont montré
qu’ils ne voulaient pas s’engager vers une violence stérile et, malgré les
appels à une troisième Intifada lancée par les islamistes, ils ont vite compris où
était leur intérêt ; ils ont refusé en masse de soutenir les terroristes. En
fait, le terrorisme a été circonscrit à quelques éléments minoritaires qui
n’ont pas réussi à soulever une population qui aspire au calme et qui a fait le
choix de l’amélioration de sa condition de vie. L’exemple de la Syrie et de
l’Irak leur a démontré l’inanité du choix des armes. Au contact d’Israël, ils
ont fait le choix du progrès.
Etudiante arabe du Technion |
Les Arabes israéliens servent aussi de modèles puisqu’ils sont employés
dans les commerces, dans les supermarchés, dans les hôpitaux, dans les
pharmacies et dans tous les chantiers de construction. Les Palestiniens prennent
exemple sur eux et, sans l’avouer, ils deviennent les ambassadeurs de la
réussite arabe en Israël. À part quelques brebis galeuses, ils participent à
l’essor du pays en profitant du manque de bras en Israël.
Le
gouvernement est le seul à pouvoir donner une chance à la Cisjordanie en
accueillant en Israël encore plus de travailleurs qui ont l’avantage de rentrer
chez eux au terme d’une journée de travail alors que les travailleurs immigrés
célibataires peuplent les bas-fonds des villes, sont soumis à la tentation de
la drogue et des prostituées pour meubler leurs soirées solitaires, tandis que
certains sont amenés à collaborer avec la pègre.
Plus les Palestiniens trouvent du travail, et plus ils s’éloignent des vendeurs de haine. Le Shabak (sécurité intérieure) est formel. La distribution de nouveaux permis de travail minimise les risques d’attaques terroristes parce que les travailleurs palestiniens recherchent uniquement une source de revenus pour leur famille, sachant qu'un ouvrier en Israël fait vivre trois familles, compte tenu des écarts de salaires.
Tel-Aviv ancienne gare routière zone de non-droit des immigrés |
Plus les Palestiniens trouvent du travail, et plus ils s’éloignent des vendeurs de haine. Le Shabak (sécurité intérieure) est formel. La distribution de nouveaux permis de travail minimise les risques d’attaques terroristes parce que les travailleurs palestiniens recherchent uniquement une source de revenus pour leur famille, sachant qu'un ouvrier en Israël fait vivre trois familles, compte tenu des écarts de salaires.
Actuellement 84.000 Arabes de Cisjordanie disposent d’un permis de
travail. 58.000 à l’intérieur de la ligne verte et 26.000 dans territoires, en
totale collaboration avec les habitants des implantations. On évalue par
ailleurs à 30.000 le nombre de clandestins palestiniens qui travaillent en
Israël. À peine une dizaine a été prise en flagrant délit de terrorisme ce qui
est infime. Les besoins sont tels en Israël que les entreprises réclament 100.000
permis de travail pour satisfaire la demande des chantiers. Ce chiffre est
significatif parce qu’il représente un tiers des chômeurs palestiniens. Quand
on enferme une population dans le désespoir elle n'a que la violence pour
conseiller. C’est pourquoi on comprend mal «l’importation» de
travailleurs ukrainiens.
Aucune réserve n’a été exprimée par les services de police ni par les
ministres. Le leader des sionistes religieux, Naftali Bennett, a approuvé le
doublement du nombre de permis accordés aux Palestiniens. La baisse du chômage
en Cisjordanie entraînera à coup sûr une diminution de la tension tandis que
les extrémistes trouveront moins d’oreilles bienveillantes. Tout le monde y
trouve son compte. Les employeurs juifs obtiennent une main-d’œuvre efficace et
qualifiée à bon marché et les travailleurs palestiniens améliorent leur niveau
de vie.
Le vivre ensemble est fondamental si l’on veut la paix par l’économie
comme l’avait souhaité Benjamin Netanyahou. Il
existe, des deux bords, une réalité pacifique parce que les populations sont
lasses de la guerre. Ceux qui viennent travailler en Israël pourraient convaincre
leurs semblables en Cisjordanie qu’ils feraient mieux de retrousser leurs
manches au lieu d’affûter leurs couteaux. Le gouvernement semble avoir compris
que manier la carotte est plus efficace que de brandir le bâton. En attendant,
il sera toujours temps de trouver une solution honorable du conflit.
A Bar Ilan en 2009 |
Benjamin
Netanyahou avait défendu, le 14 juin 2009 dans son discours à l’université Bar
Ilan, dans la banlieue de Tel-Aviv, son projet de paix par l’économie : «Je
lance un appel à la coopération des pays arabes avec les Palestiniens et avec
nous pour promouvoir une paix fondée sur la croissance économique. La paix
économique n’est pas un substitut à la paix politique, mais elle joue un rôle
important pour parvenir à cette dernière. Ensemble, nous pouvons entreprendre
des projets susceptibles de surmonter les pénuries de notre région, tels le
dessalement de l’eau, en maximiser les atouts, tels l’exploitation de l’énergie
solaire, du gaz et du pétrole, les moyens de transport entre l’Asie, l’Afrique
et l’Europe». Il faut donc agir agir dans le sens voulu par le premier ministre.
Les
Américains l’ont compris puisqu’ils soutiennent toutes les initiatives des hommes
d’affaires des deux camps, seuls capables de faire bouger les lignes. Ils ont
offert à l’Autorité palestinienne une aide supplémentaire de 4 milliards de
dollars sur trois ans avec l’objectif de réduire le chômage, d’augmenter les
salaires et de favoriser le tourisme en Cisjordanie. Mais les Palestiniens
restent sceptiques, non pas sur l’intérêt des développements des relations
économiques, mais sur le déblocage d’un accord de paix qui tarde à venir en
raison d’une Knesset qui virent de plus en plus à droite.
Il
est vrai aussi que les Palestiniens adoptent toujours une position négative
vis-à-vis de toute proposition de paix. Mais justement il faut compter sur la
population pour faire entendre raison à Mahmoud Abbas. Le rêve d’une «paix
par l’économie» fait son chemin et semble prendre le dessus sur les
réticences des dirigeants politiques. La rue palestinienne bouge, qui envisage
sérieusement avec l’aide de la Jordanie, de l’Égypte et du Qatar de trouver un
remplaçant au terne Mahmoud Abbas. Il faut donc aider cette évolution en donnant des cartes au remplaçant.
L'argent c'est le nerf de la guerre... Les simples gens n'ont rien a fou... de la politique. Ils veulent manger et nourrir leurs familles.
RépondreSupprimerMais, me semble-t-il, les palestiniens jusqu'alors ont toujours travailler en Israël. Et pour autant la paix n'a jamais été au rendez-vous. Par ailleurs les USA et l'Europe entretiennent par des subsides confortables ces derniers. Qu'en font-ils? La paix ne viendra que par l'économie, oui, mais plutôt qu'incriminer Israël, ne faut-il pas au préalable que les grandes puissances mettent en place des dirigeants palestiniens réalistes qui persuadent leur population à une vraie paix bénéfique à leur bien-être. C'est la conclusion de votre article et j'y adhère, mis à part le fait que l'Occident doit y prendre une part active et ne pas laisser les seuls états dont vous parlez décider seuls ce genre d'initiative. Tout un programme.....
RépondreSupprimerBien cordialement
Véronique Allouche
La population arabo palestinienne avide de se nourrir en Israel doit d'abord elle meme et également ses dirigeants etre capables de prendre leurs distances de façon claire avec l'islam anti juif"enseigné" par les imams qui ont pignon sur rue.
RépondreSupprimerAinsi le cheikh Al Karni (ce n'est pas le seul à l'affirmer) : " Tout accord de paix signé avec les juifs est « nul et non avenu » selon la loi islamique, a précisé le cheikh.
En second lieu ce n'est pas la première fois dans l'histoire d'Israel que les Palestiniens viennent masse y travailler, cela fait des années sans qu'aucun changement ne se produise en raison de cet obstacle de fond religieux que les bonnes ames refusent d'évoquer sans comprendre que leur raisonnement logique d'occidental ne s'applique nécessairement à leurs "partenaires".
Les arabes travaillant dans le Goush Katif ont revé de l'expulsion des Juifs jusqu'au dernier bien qu'étant bien nourri. Aprés l'expulsion qu'ils ont souhaité ardemment ils appellent en Israel de Gaza pour solliciter leurs anciens employeurs de leur trouver un job. Mais ils souhaitent aussi ,il faut noter l'ambigueté persistante éradiquer ce pays.
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerQuand je lis aujourd'hui que pour la première fois depuis deux ans, le Hamas (ou sa branche armée) a mis à mort trois hommes, à Gaza, contre l'avis du Président Abbas, "pour préserver le tissu social". Et que depuis 2007, date à laquelle il a pris le contrôle de la bande de Gaza, il a liquidé, "hors de tout cadre judiciaire", 67 suspects accusés d'avoir trahi au profit d'Israël, je ne peux m'empêcher d'être dubitative sur votre "rêve d'une paix par l'économie".
Très cordialement.
Bonjour Jacques ton analyse est fondée mais incomplete car en ce qui concerne les Ukrainiens ce ne sont pas des maçons ou des manoeuvres de bas niveau qui vont venir travailler en Israel mais des personnels qualifiés car vu l'evolution des normes de securité particulierement incendie imposées dans la construction en Israel il faut de plus en plus de plombiers ,electriciens et electroniciens pour installer ces dispositifs ce ne sont pas les palestiniens qui peuvent assurer ces taches et malheureusement l'education nationale israelienne ne forme pas assez de techniciens qualifés ils preferent former des chercheurs de haut niveau !!! d'ou le manque de main d'oeuvre qualifié d'autrepart de nombreux Ukrainiens non juifs ont de la famille ou des amis vivant en Israel et ils n'auront pas de mal a s'integrer meme temporairement avec peu de problemes pour la langue le russe est la troisieme langue du pays !!!. C'est le meme phenomene que nous connaissons en France avec les travailleurs polonais ou roumains . C'est par contre exact que c'est par l'economie et l'education que l'on se rapprochera d'un etat de paix .Chabbat chalom
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