LE QUAI D’ORSAY PERSISTE ET SIGNE
Par
Jacques BENILLOUCHE
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La
tribune du Monde, signée par un collectif d’ambassadeurs, symbolise le
retour aux relents anti-israéliens du Quai d’Orsay et ne reflète pas simplement une
opinion parmi tant d’autres. Le «la» avait été donné par le ministre
Laurent Fabius qui a voulu exister parce qu’il n’avait pas réussi à imprimer sa
marque dans le processus de paix israélo-arabe d’où John Kerry l’avait écarté. Il
semble qu’il ait envoyé à la rescousse ses obligés car sa démarche a été
écartée d’un revers de main par les Américains.
En
effet, sa dernière menace de reconnaissance de l’État de Palestine avait choqué
car, unilatérale, elle fustigeait uniquement l’État juif en exonérant les
Palestiniens de toute responsabilité dans l’échec des négociations. En fait, à quelques exceptions notables, le Quai
n’a pas changé depuis l’arrivée du Général de Gaulle au pouvoir.
Ces
quelques ambassadeurs inconnus du grand public, en mal de notoriété, justifient ainsi les attaques au couteau parce
qu’elles traduisent, selon eux, «la frustration et l’humiliation ressenties
après près de cinquante ans d’occupation militaire et policière par Israël… La
répression de ces actes par Israël entraîne, selon l’usage, beaucoup plus de
victimes qu’ils n’en font… Un statu quo perdure, qui cache une mainmise sans
cesse accrue par Israël sur la portion de Palestine concédée aux Palestiniens
depuis 1967». Ces diplomates, qui ont l’habitude de peser chaque mot n’hésitent
pas à utiliser des termes violents,
unilatéraux, comme «la construction d’un mur spoliateur», «l’enfermement
de Gaza» sans les justifier par des impératifs de sécurité mais plutôt par
des objectifs d’apartheid.
Ils
feignent d’ignorer que, depuis la construction du mur, les attentats perpétrés
par les terroristes de Cisjordanie sont devenus une exception et que la liste
des morts civils israéliens a été réduite. Ils oublient que plusieurs milliers
de missiles ont été envoyés depuis Gaza sur une population civile entraînant la
fin de l’entrée d’ouvriers gazaouis qui apportaient avec eux la haine et le sang.
Les
ambassadeurs signataires ont toujours été affectés dans des pays arabes ce qui
explique qu’ils soient imprégnés de la dialectique arabe et même de leur
philosophie. Leur passé diplomatique démontre
qu’ils sont disqualifiés pour émettre un jugement objectif ou désintéressé. Ils
ne représentent pas une opinion neutre. Ces diplomates retraités ont peu de
scrupules quand il s’agit de mesures de rétorsion contre Israël. À savoir :
- Reconnaissance immédiate de
l’État palestinien
- Suspension du traité d’association
entre Israël et l’Union européenne
- Fin de la coopération
économique et scientifique avec Israël
Les
Palestiniens n’ont plus besoin de faire d'effort de paix. Il leur suffit d’attendre
que le couperet tombe pour récolter les dividendes de leur passivité. Israël
paiera la note. Parmi les signataires de la tribune figurent d’obscurs
ambassadeurs qui n’ont pas marqué le Quai d’Orsay de leur présence mais ils
rêvent de côtoyer les grands noms de la politique diplomatique pro-arabe.
Yves Aubin de La Messuzière |
Yves
Aubin de La Messuzière a occupé des postes à Amman, à Sanaa, à Damas, à Rabat,
au Caire et à Tunis sans jamais prendre le pouls de la situation à Tel Aviv. Il
a également siégé au conseil d'administration de l’Institut du monde arabe à
Paris.
Denis
Bauchard a été ambassadeur de France en Jordanie, directeur pour l’Afrique
du Nord et le Moyen-Orient au ministère des Affaires étrangères puis directeur
du cabinet du ministre des Affaires étrangères, Hervé de Charrette. Il a été à bonne école auprès de son ministre
qui le 24 mars 2010, s’en était pris à Bernard Kouchner à l’Assemblée Nationale
à l’occasion des questions au gouvernement. Son réquisitoire contre Israël a
été jugé excessif selon les propres termes du ministre des affaires étrangères
qui faisait implicitement référence à Talleyrand qui avait dit : «Tout ce
qui est excessif est insignifiant». Il avait commencé son interpellation
par : «jusqu’à quand l’Europe et avec elle la France vont-elles continuer de
supporter sans réagir la politique réactionnaire du gouvernement israélien à
l’égard du peuple palestinien». Le
ton était donné. L’élève cherche à présent à s’élever au niveau du professeur.
Hervé de Charette |
Bertrand
Dufourcq, a été ambassadeur à Moscou, puis a tiré les ficelles en tant que directeur
des affaires politiques au Quai d’Orsay. Il a toujours vécu avec le complexe d’être
l’époux d’une ministre qu’il n’a pas été. Alors il veut sortir de l’ombre.
Christian
Graeff a été premier conseiller en
Syrie, ambassadeur en Libye, au Liban, et en Iran. Sa dernière affectation auprès des mollahs donne l’étendue de sa soumission
aux États voyous.
Patrick
Leclercq a été conseiller
diplomatique du président Valéry Giscard d'Estaing, ambassadeur en Jordanie et en Égypte.
Jacques-Alain de Sédouy,
ancien ambassadeur en Jordanie est coutumier des pétitions engagées
unilatérales. Il avait signé en 2010, déjà dans le Monde, une lettre
ouverte au président de la République Nicolas Sarkozy exprimant sa
préoccupation sur le conflit israélo-palestinien sans donner de recettes pour
le résoudre.
Ces
ambassadeurs ont le droit de fustiger l’État d’Israël mais le jeu de la
démocratie n’autorise pas le parti-pris car les critiques perdent alors de leur
force exemplaire si elles ne sont pas accompagnées de solutions originales pour
résoudre le problème israélo-arabe. Les condamnations, déversées dans la haine
et non justifiées de propositions, sont stériles. Or ces diplomates ne semblent pas avoir laissé un souvenir impérissable dans une fonction où ils avaient autorité
pour faire avancer le débat israélo-arabe. L’Histoire, ou plutôt le Parlement,
n’a aucune trace d’une quelconque initiative de leur part dans ce domaine. Il
est vrai que, pour certains, leur nomination doit plus aux subtils
accommodements au sein de la droite qu'à un génie particulier pour gérer les
affaires internationales du monde.
On
ne sait pas s’ils ont été envoyés au feu par leur ministre Fabius car il n’y a
pas d’explication à leur soudain intérêt pour une région où même les Grands se
sont cassé les dents. Leurs états de services prouvent que leur intervention a perdu
de sa neutralité et surtout de sa crédibilité puisqu’il s’agit, sans aucun doute, d’une activité de lobbying pro-arabe développée en France. Ils reprennent la
tradition du Quai d’Orsay qui, à toutes les époques et sous différents régimes,
a entretenu à l’égard d’Israël une haine permanente. On peut remonter à 1947
pour rappeler en effet que le ministère des affaires étrangères français de l’époque
s’était opposé à la création d’un État juif en proposant au gouvernement
l’abstention lors du vote historique à l’ONU du 29 novembre. Nous devons à Léon
Blum d’avoir fait infléchir la décision finale.
Abba Eban et Couve de Murville |
Mais,
alors que les États-Unis et l’URSS avait reconnu l’État d’Israël dès le 15 mai
1948, le ministère français avait attendu le 29 janvier 1949 pour envoyer une
missive officielle de reconnaissance. Cette carence sélective n’avait pas
empêché l’avènement d’une période idyllique, s’étendant de 1956 à 1967, entre
la France et Israël malgré l’animosité qui imprégnait les sentiments du Quai
d’Orsay. Les relations se sont cependant aggravées à l’arrivée au pouvoir du
Général de Gaulle. Son ministre Couve de Murville décida de vider le Quai des
amis d’Israël et il recruta des diplomates, issus de la vieille aristocratie
catholique à particule, profondément pro-arabes, qui réussirent à défaire en
quelques mois les liens amicaux tissés avec l’État juif pendant dix ans.
Ces
ambassadeurs qui reviennent au devant de la scène, oubliés par l’Histoire, n’avaient pas besoin de passer par une tribune
sournoise, teintée d’un militantisme pro-arabe exacerbé, pour stigmatiser le
seul Israël dans un conflit complexe qui nécessite que les pays étrangers
fassent preuve d’un souci d’équilibre pour être entendu par l’une ou l’autre
des parties. Il ne sert à rien de mettre de l’huile sur le feu alors que toutes
les énergies sont nécessaires pour convaincre les antagonistes de se
rencontrer. Mais ils ont dû agir sur ordre.
Excellent article. Très bonne idée d'avoir fait un profil des signataires. Ironique et cinglant. A noter que d'un côté on célèbre en fanfare la fin du boycott de l'Iran, pays sponsor du terrorisme qui ne renie rien. Mais de l'autre on appelle à établir un boycott avec Israël (et pas seulement sur les produits des territoires) Ce qui est très gênant c'est aussi une libération publique de la parole anti-israelienne maintenant au niveau officiel; fini le devoir de réserve. Cette parole s'évertue à singulariser Israël, et à préparer progressivement l'opinion à l'idée d'un boycott qui pourrait être mis en place d'ici 5 ans en Europe au train où vont les choses.
RépondreSupprimerBravo et merci pour cette excellente analyse
RépondreSupprimerSur ordre.....de paiement?le lobbyisme est remunere au USA ou aupres des commissions europeennes.
RépondreSupprimerA la suite de cet article qui résume bien les choses. Il serait intéressant de faire une psychanalyse de la France à la lumière du dernier livre de Benjamin Stora qui conclut justement la France n'est toujours pas sortie de la guerre d'Algérie et de son complexe colonial. Il devient tellement évident de travailler avec Israël plutôt que ces états épouvantables du Golfe.
RépondreSupprimer"Yves Aubin de la Massuzière": son nom à rallonge sonne le rappel du vieil antisémitisme catholique hautain du Quai d'Orsay, seule administration française à n'avoir point subi l'épuration à la Libération.
RépondreSupprimerLe Quai reste truffé de cette sale engeance de diplomates énarqués issus de grandes familles (de collabo).
Ils poursuivent sans rémission leur tradition antisémite par le biais de l'antiisraélisme ou du palestinisme exacerbé dans le cadre continu de la politique arabe de la France ... avec le résultat que l'on connait aujourd'hui.
Celui qui souhaite en savoir plus dans le cadre d'une lecture passionnante peut, outre les excellents articles de Jacques Bénillouche, également se reporter sur ce sujet encore brulant, à l'excellent livre de David Pryce Jones :"la diplomatie française et les Juifs" "un siècle de trahison" aux Editions Denoel Impact .
Un bijou de lecture instructive pour comprendre les ressorts de la haine antiisraélienne et anciennement antijuive de la part de ce bastion d'Etat dans l'Etat qui fait la politique étrangère de la France ayant retrouvé souffle et energie sous De Gaulle.
Le quai d'Orsay, par la menace de reconnaître officiellement l'état de Palestine si une paix unilatérale n'est pas signée dans les prochaines semaines, laisse à penser implicitement à la reconquête des voix musulmanes gagnées par la gauche en 2012.
RépondreSupprimerLa droite n'a pas de telles ambitions car cet électorat ne lui est pas favorable. Je parle bien sûr de la droite traditionnelle.
Cordialement
Veronique Allouche
L'analyse est certainement très bonne , mais elle ,non plus ne résout pas le problème " intime " des Israéliens et Palestiniens L'anti israélisme perturbera tant que nous d'abandonnerons pas notre politique colonialiste et ainsi aggravons nos relations avec le reste du monde ,et aussi,malheureusement ,le nombre de victimes innocentes ne fera qu'accroître
RépondreSupprimerJ'ai une question toute simple à M. BENILLOUCHE. Est-ce que la France n'a pas honte de perdre la face, pendant 60 ans depuis DE Gaule à Fabius, devant un mini-État Israel qui à chaque fois la provoque et l'envoie ballader. Et à date la France avec toute sa puissance militaire économique et diplomatique comme membre permanent du conseil de sécurité de l.ONU n'a jamais réussi à faire plier Israel sur quoique ce soit. Mais on dirait que les arabes n'exigent pas plus et sont très heureux avec les gesticulations musclées de la France.
RépondreSupprimerQuand diplomatie rime avec sectarisme, discrimination , machiavelisme et démesure. Tradition politique marquée par un aristocratisme glacé, hautain, antidémocratique, imprégné de cet enseignement du mépris dont parlait l'historien Jules Isaac. Sentiment de honte.
RépondreSupprimerJ'ai bien aimer votre article,ce pays qui est aussi le mien me fait honte trop souvent !
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