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mardi 17 novembre 2015

Les terroristes ont changé de tactique



LES TERRORISTES ONT CHANGÉ DE TACTIQUE

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps

            
Les terroristes de Paris

          Les terroristes sont passés du stade artisanal au mode industriel en préparant avec soin leurs attentats du 13 novembre 2015. Ils ont démontré qu’ils n’étaient plus quelques loups solitaires dans une guerre asymétrique. Ils constituent véritablement une armée en mouvement qu’il faut dorénavant traiter comme telle. Pour preuve les attaques sanglantes bien préparées, coordonnées pour frapper simultanément en plusieurs endroits de la Capitale et affoler les forces de l’ordre.  



           Ces tueurs froids ont certainement bénéficié d’un soutien de membres de la population française qui leur ont apporté un soutien logistique dans leur plan d’action : location de véhicules, stockage des armes de guerre, ceintures d’explosif, locaux de repli et d’entraînement. Cette organisation bien huilée leur a permis d’assassiner un maximum de victimes alors qu’ils n’étaient que sept individus. À présent que le manuel d’utilisation a été testé, cette opération risque de se renouveler là où on l’attend le moins.

Commandos de guerre


            Il s’agit véritablement d’opérations de commandos de guerre qui nous éclairent sur la capacité de Daesh à lancer des attaques massives, demain, dans n’importe quelle ville de France ou d’Europe. Ces tueurs froids ont démontré qu’ils étaient bien préparés et qu’ils pouvaient compter sur un soutien local logistique et matériel sans faille. Ils étaient disciplinés comme tous les soldats d’une armée régulière mais surtout capables de ne pas flancher au dernier moment alors qu’ils savaient que leur chance de survie était mince. Leur suicide était une décision inébranlable et irrévocable.
            Les terroristes, d’origine maghrébine, de nationalité belge ou française, non issus de l’immigration clandestine, disposaient de la citoyenneté avec tous les droits afférents. Les autorités françaises sont enfin persuadées qu’il ne s’agit pas d’une poignée d’individuels agissant pour leur compte mais de terroristes faisant partie d’une organisation complexe avec des ramifications qui vont au-delà des frontières, d’une organisation capable de fournir des fonds, des armes et des passeports. La théorie du loup solitaire ne tient plus.

            La guerre est déclarée avec des djihadistes sans foi ni loi avec qui il faut cesser de se comporter en puriste du droit. Alors il faut d’abord nettoyer la France de ses scories, de ses bataillons dormants qui n’attendaient que le signal pour agir. Une sorte de simili Bataille d’Alger doit être lancée, avec peut-être ses excès, mais avec tous les moyens militaires pour éradiquer les terroristes de nombreuses zones de non-droit. Il faut encercler les quartiers, fouiller appartement par appartement, cave par cave et tirer à vue sur tous les récalcitrants armés. La sécurité intérieure l’exige. Il ne faut plus faire preuve de faiblesse en minimisant sans cesse l’impact de la situation. Il ne s’agit pas d’un problème de droite ou de gauche mais d’une question de survie du système occidental.

Folklore
 
Horst Seehofer
            Le folklore d’une manifestation unitaire bon enfant est dépassé. Après ces attentats, l’Europe s’inquiète et d’ailleurs les Allemands se réveillent au bruit des kalachnikovs. Horst Seehofer, président des démocrates-chrétiens de la CSU a donné le ton en insistant sur la nécessité d'un «contrôle plus fort des frontières extérieures de l'Europe, mais aussi des frontières nationales. Il faut rétablir l'ordre en Europe». Les dirigeants européens ont compris que les terroristes ne ciblent plus uniquement les Juifs mais frappent les espaces publics, les restaurants, les stades et les salles de concert pour faire le maximum de victimes.
            Mais ces attentats risquent de pousser les Européens à modifier leur stratégie favorable aux migrants après avoir constaté que l'un des assaillants de Paris circulait avec un passeport en provenance de Syrie. Les dirigeants européens s’ouvrent enfin au danger terroriste. On ne peut pas dire qu’ils ignoraient les énormes risques de sécurité. Ils ont compris qu’il s’agit d’une lutte mondiale contre un fléau qui nécessite l'unité réelle des forces de l'ensemble de la communauté internationale. La thèse que celui qui sème le Coran récolte le djihad est dépassée.

            Le gouvernement français ne peut pas nier que les services de renseignements occidentaux, israéliens en particulier, l’avaient mis en garde. Depuis le raid commando commis par un groupe djihadiste à Mumbai, il y a huit ans, durant lequel 166 personnes avaient trouvé la mort, les Occidentaux jugeaient les menaces comme des fausses alertes. Et pourtant, la vulnérabilité de l'Europe était clairement évidente puisque la guerre civile syrienne  était à sa porte. 

            Il était difficile de ne pas qualifier les djihadistes de Daesh comme des fous plus puissants que ceux d’Al-Qaeda. Les prétentions de l’État islamique à établir un califat ont été sous-estimées ainsi que son habileté à utiliser les medias au profit de sa cause. Il a réussi,  à travers des vidéos sanglantes, à exacerber un nouvel idéal chez les jeunes musulmans européens.

Bombes humaines


            On s’est peu étonné de la facilité avec laquelle des jeunes recrues ont obtenu des billets pour la Turquie afin de rejoindre le bastion de Daesh à Raqqa. Puis surtout de la facilité à retourner dans leurs foyers, après quelques années de formation brutale, pour devenir eux-aussi des formateurs ou des guerriers dormants.  Il est légitime de se poser des questions sur les lacunes des services de renseignements et de la police. Et pourtant ces bombes humaines ne représentent que quelques centaines d’individus déterminés, fréquentant souvent des mosquées pour y enrôler des candidats au djihad parmi une population radicale.
            On évite aussi les problèmes diplomatiques en ne pointant pas du doigt la Turquie qui reste la plate-forme financière de Daesh en écoulant son pétrole, ses phosphates et son coton  confisqués en Irak et en Syrie. Or la puissance de Daesh est dépendante de sa puissance financière.  
            On ignore encore le parcours des auteurs des attentats du 13 novembre mais la coordination minutieuse et l'efficacité impitoyable de l'opération, donnent à penser qu’ils avaient reçu une formation dans un camp de Syrie ou du Yémen, pour ensuite bénéficier du soutien et de l’infrastructure de cellules organisées. Or rien n’a transpiré de cet énorme complot qui a pourtant nécessité repérages, simulations, locations de voiture, communications et transferts d’armes. Le 19 janvier 2015, notre article pointait sur la nécessité de moyens plus musclés contre les terroristes [1], suggéré par des experts sécuritaires israéliens. Il ne semble pas, pour des lourdeurs juridiques et en l’absence de lois, que les services français aient été autorisés à collecter les «bavardages» entre terroristes. Trop de droit tue le droit. D'ailleurs le ministre israélien de la Défense Yaalon a estimé que l'Europe devait placer les besoins de sécurité en priorité aux droits humains.

Ami Moyal et son équipe

            Il est vrai que les terroristes ont évolué sur le plan technologique. Ils savent à présent exploiter les techniques de cryptage des téléphones que l’on trouve librement dans les commerces. Mais les techniques exclusives du professeur israélien Ami Moyal de l’université d’Afeka [2], d’ailleurs utilisées par le NSA, ne semblent  pas être appliquées en France, les seules à contourner ces difficultés techniques.
            La France compte sur la fin de la guerre en Syrie et sur l’éradication du califat de Daesh pour mettre fin au terrorisme. Cela prendra du temps car beaucoup de pays y trouvent leur intérêt. Mais dans l’immédiat, la circulation des armes en Europe doit faire l’objet d’un contrôle européen afin d’empêcher l’approvisionnement des bandes organisées.  Une certaine panique pourrait s’emparer des citoyens dans les gares, les stades, les lieux de divertissement et les restaurants. Cela risque d’entraîner des conséquences économiques qui donneront l’impression aux terroristes d’avoir gagné, au moins dans ce combat spécifique. Tout dépendra de l’efficacité des services de renseignements qui devront prendre langue avec le Mossad au lieu de contrôler l’étiquetage des produits en provenance des implantations. 
          Il est certain que la méthode forte paiera tant contre les terroristes en France que contre les troupes de Daesh en Syrie. Il semble que la France s'oriente à présent dans cette voie puisque le 15 novembre au soir elle a bombardé massivement le quartier général et le fief de Daesh à Raqa.




11 commentaires:

  1. Bonne analyse,je ne peux qu'être d'accord avec vous!

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  2. Jeremy MORGENSTERN15 novembre 2015 à 22:09

    Qu'ils virent les imams salafistes pour commencer vous verrez qu'avec des imams de la republique qui surveillent leurs ouailles c'est meilleur c'est sarkozy qui nous avait imposé son CFCM financé par le Qatar et largement salafiste

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  3. La semaine dernière, le Figaro évoquait la perspective d;attentats en France et un général demandait , face a cette situation,de nouveaux budgets pardessus les excuses de budget. Il y avait de la fumée avant le feu.

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  4. Monsieur Benillouche:
    Bravo pour votre billet
    Particulièrement clairvoyant et de votre analyse très objective de la situation de guerre dramatique en France.

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  5. Faites publier dans Slate et d'autres journaux français pour avoir une vraie caisse de résonance.

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  6. Pour une fois une analyse qui semble intéressante et qui confirme l’adage :

    Ton interprétation d’un texte en dis plus sur toi que sur le contenu du texte ….

    http://edition.cnn.com/2015/11/15/opinions/moghul-isis-muslims/index.html

    En conclusion cela revient toujours au même il n’y a que les musulmans eux même qui peuvent en finir avec cette monstruosité qu’ils ont engendré en réaction contre les abus de l’occident ….

    C’est l’éternelle histoire de l’apprenti sorcier …. Mans quand le grand sorcier viendra ‘t il remettre l’ordre.

    rgds
    Andre Gotlieb

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  7. Véronique ALLOUCHE16 novembre 2015 à 08:26

    La Tour Eiffel, symbole de la France, a éteint ses lumières.
    L'état d'urgence est décrété jusqu'à nouvel ordre.
    Paris pleure ses morts.
    Des perquisitions sont menées.
    Ce cauchemar n'aurait pas eu lieu si depuis plus de trente ans, au vu et au su de tous, les gouvernements successifs avaient eu le courage d'éradiquer cette vermine qui fait la loi dans les banlieues françaises.
    Aujourd'hui il est bien tard et ce n'est pas faute d'avoir été prévenu.
    A moins d'envoyer les blindés détruire cette fourmilière, comme tu le dis dans ton article. Dernier espoir pour sauver ce pays qui se réveille dans l'effroi.
    "Le but de l'éducation totalitaire n'a jamais été d'inculquer des convictions mais de détruire la faculté d'en former aucune." - Hannah Arendt, Les Origines du totalitarisme
    Bien à toi

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  8. Cher monsieur Benillouche,

    Jusqu'à 16 heures, où le Président Hollande va prendre la parole devant le Congrès réuni à Versailles, il nous est est permis de rêver !
    Rêver que le Président va demander l'expulsion des dizaines, peut-être plus d'une centaine, d'imams islamistes radicaux qui prêchent le djihad à nos jeunes laissés en déshérence par l'Education nationale.
    Rêver que le Président va enfin demander à l'armée d'investir les caves des banlieues où sévit le trafic d'armes et le trafic de drogues, ainsi que l'avait réclamé haut et fort Samia Ghali, sénateur de Marseille, et qui avait été vilipendée pour cela.
    Rêver que le Président va enfin admettre ce que tout le monde sait : ce sont nos "amis" Saoudiens, Qataris, Koweitiens, qui financent à coups de pétro-dollars tous ceux qui à l'étranger et en France ont décidé d'abattre notre République.

    Très cordialement.

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  9. D'accord avec vous, mais surpris de votre soudaine radicalité.

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  10. Jacques BENILLOUCHE17 novembre 2015 à 15:58

    @Jean

    Je ne suis pas un idéologue et je n’agis jamais selon ce que me prescris un quelconque gourou.

    Je sais évoluer en fonction des événements.

    Quand il y a 130 morts dans le pays qui m’a offert sa culture, la plupart des jeunes qui avaient l’avenir devant eux, la modération avec des barbares devient anachronique. On remise alors les bons sentiments.

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  11. Toujours d'accord avec vous, peut-être comprendrez-vous un peu mieux B.NETHANYAOU?

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