DAESH FAIT DIVERSION EN FRANCE POUR SQUATTER LA LIBYE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Convoi de Daesh en Libye |
L’État islamique n’est pas parvenu au sommet des organisations terroristes islamiques par défaut. Son théoricien Abou Moussab Al-Souri et son adepte qui s’est inspiré de son idéologie, Abou Bakr Al-Baghdadi, ont été les artisans de l’implication au niveau international du petit mouvement islamiste. La réussite de l’E.I n’est pas le fruit du hasard mais d’une stratégie patiemment élaborée dont on a minimisé l’impact. Daesh s’intéresse peu aux pays occidentaux, sauf pour faire diversion, car son objectif principal consiste à islamiser les pays musulmans en y appliquant la charia à la lettre. Il vise essentiellement les pays faibles ou en phase de décomposition. C’est le cas de la Libye.
Hollande au stade de France |
La
théorie de la prise de pouvoir de l’État islamique se fonde sur trois étapes qui
ont été décrites par Al Souri et qui sont actuellement appliquées en Libye pendant que les regards des
Occidentaux sont tournés vers Paris. Il s’agit d’une véritable réussite dans la
diversion. Les djihadistes ont d’abord attaqué les centres villes de la Libye, pour
obliger les dirigeants locaux à y organiser la répression tandis que la
périphérie devenait une proie facile.
Ils ont alors poursuivi avec la deuxième phase consistant à se lancer dans des massacres d’une rare sauvagerie pour forcer les populations à rejoindre les djihadistes, les seuls à rétablir selon eux la paix civile dès lors que les gouvernements locaux auront échoué. La cruauté n’est pas gratuite mais considérée comme la seule voie pour mener à la victoire. Ainsi les djihadistes en Libye, fidèles à leurs penchants barbares pour asservir les récalcitrants, ont décapité et accroché à des croix douze combattants locaux, dont des salafistes, qui voulaient les déloger de Syrte. L’exemple est donné, les civils tremblent et les moins téméraires se rallient en nombre.
Ils ont alors poursuivi avec la deuxième phase consistant à se lancer dans des massacres d’une rare sauvagerie pour forcer les populations à rejoindre les djihadistes, les seuls à rétablir selon eux la paix civile dès lors que les gouvernements locaux auront échoué. La cruauté n’est pas gratuite mais considérée comme la seule voie pour mener à la victoire. Ainsi les djihadistes en Libye, fidèles à leurs penchants barbares pour asservir les récalcitrants, ont décapité et accroché à des croix douze combattants locaux, dont des salafistes, qui voulaient les déloger de Syrte. L’exemple est donné, les civils tremblent et les moins téméraires se rallient en nombre.
Enfin la
dernière étape a pour but le rétablissement du califat qui s’appuie sur le
rejet de la démocratie, du nationalisme et de l’Occident. Fondé sur un islam
rigoriste, le califat peut alors s’installer dans la durée en créant les
structures d’un État qui s’appuie sur de nouveaux juges et une nouvelle police.
En contrepartie, il organise la vie sociale et les aides à une population
soumise par la force et qui, de toute façon, se contente de dons matériels à
défaut de liberté.
Cependant,
lorsque les dirigeants occidentaux parlent de démonstration de force pour
détruire Daesh, ils font allusion à la Syrie et l’Irak parce que la moitié du
pays est envahie par les djihadistes. Mais ils négligent l’impact des filiales
autonomes de l’État islamique installées au Yémen, dans la péninsule du Sinaï, et
en Algérie même, faisant d’ailleurs concurrence à Al-Qaeda qui perd de plus en
plus de son influence.
Mais
Daesh veut à présent masquer auprès de l’Occident ses réelles intentions ;
celles qui concernent la prise de la Libye en commençant déjà avec trois
provinces envahies par plus de 3.000
combattants aguerris qui n’ont rien à voir avec les «petites frappes» de
Paris. En fait l’État islamique profite des divisions politiques et du chaos
généralisé en Libye pour renforcer sa présence à l’est et à l’ouest du pays. Un
an après l’allégeance d’un petit groupe islamiste libyen au «califat»,
les djihadistes sont à présent bien implantés. Ils représentent les nouvelles
structures d’un État qui a disparu dans les décombres de la guerre civile. Les arsenaux de Kadhafi, dont il reste encore
quelques fusils à roquette, aident les terroristes dans leur conquête.
L’Occident
considère que cette avance irrémédiable est neutralisée par les combats entre
factions rivales. Or Daesh puise auprès de combattants désarçonnés un nouveau
vivier de jeunes subjugués par les réussites de Daesh rapportées par les medias
internationaux. Les groupes islamistes concurrents se vident de leurs meilleurs
éléments qui préfèrent rejoindre ceux qui sont censés les mener à la victoire
plus vite.
Daesh
contrôle la ville de Syrte et la grande partie de la côte-est. Cette ville
côtière, qui comptait 75 000 habitants et où était né Kadhafi, est aux mains de
Daesh depuis juin. Par ailleurs l’État islamique a réussi à diviser la ville de
Benghazi en se substituant aux autres groupes extrémistes. Il est un fait que
les attentats de Paris, comme d’autres victoires sur le terrain en Syrie,
galvanisent des candidats à l’aventure islamiste. De nombreux étrangers, tunisiens,
algériens, égyptiens rejoignent les djihadistes parce qu’ils ne supportent pas les
autres groupes islamistes trop timorés. D’ailleurs l’État islamique, qui vise
ouvertement la Libye, conforte son implantation en y envoyant ses nouvelles recrues
étrangères venant de Syrie et d’Irak.
Ce pays
devient la plaque tournante du djihadisme mondial dans l’indifférence totale de
l’Occident. Il dispose d’une forte capacité de nuisance dans le monde musulman,
tout en étant à quelques centaines de kilomètres de l’Europe. S’il explose ou
se décompose, les conséquences rejailliront sur tout le continent européen,
sans compter l’envoi de terroristes déguisés en migrants qui affluent pour
constituer la cinquième colonne. Daesh a compris que celui qui contrôle les
côtes libyennes contrôlera en fait le flux migratoire vers l’Occident.
Mais
l’Europe ne sera que secondairement touchée. Daesh utilisera la tête de pont
libyenne pour menacer les pays voisins faibles comme la Tunisie et d’une
certaine manière l’Algérie. D’ailleurs il est déjà établi que les terroristes
qui ont attaqué les centres touristiques tunisiens ont été formés en Libye,
dans les camps djihadistes. L’Occident, s’il le décide, n’a qu’un seul moyen pour
freiner l’expansion en Libye en soutenant les nombreuses tribus qui
constituaient jadis l’ossature du régime de Kadhafi. Elles ne sont pas prêtes à
abandonner leur mainmise sur les zones dont elles ont le contrôle. Cette
structure clanique, qui a freiné l’unité du pays, est la seule aujourd’hui qui
pourrait s’opposer à l’État islamique pour l’instant rejeté.
Kurdes |
Mais
encore faut-il que l’Occident se comporte mieux qu’avec les Kurdes qu’il a
abandonnés alors qu’ils étaient les seuls à occasionner des pertes sévères aux
djihadistes. Les tribus libyennes ont beaucoup appris du déroulement des faits en
Syrie et ils veulent protéger avec toute leur énergie les puits de pétrole pour
empêcher le financement des troupes de Daesh. Seul le chaos en Libye pourrait
servir de catalyseur à Daesh pour s’emparer du pays à moins que les Occidentaux
n’aident ces tribus par des frappes aériennes plus nombreuses et plus ciblées.
Mais pour l’instant les Rafale visent les bases de l’État islamique en Syrie en
occasionnant peu de pertes puisqu’elles sont toutes souterraines.
Wissam Najm al-Zoubaïdi |
Les
Américains, qui se sont brusquement réveillés de leur léthargie, ont bien lancé
le 13 novembre 2015 un raid aérien contre Daesh, à Derna dans l’Est-libyen, qui
a permis d’éliminer le chef local de l’État islamique, l’irakien Wissam Najm
al-Zoubaïdi (Abou Nabil), ancien membre d’Al-Qaeda. Mais l’effet sera
temporaire. Sa mort va réduire la capacité de l’organisation à procéder en
Libye au recrutement de nouveaux membres, à la création de nouvelles bases et
la planification d’attentats à l’extérieur. Cela ne dissuadera pas l’implantation
de Daesh en Libye puisque les rangs des djihadistes, qui ne cessent de grossir,
compteraient aujourd’hui plus de 5.000 hommes, avec des combattants étrangers venus
de Tunisie, du Soudan et du Yémen.
Un
rapport de l’ONU du 16 novembre 2015 précise que «des groupes armés ayant
prêté allégeance à Daesh ont pris le contrôle et consolidé leur emprise sur des
portions du territoire libyen commettant
des abus graves dont des exécutions sommaires sur la base de leur religion».
Un proverbe tunisien de circonstance prétend que «ne ressent la brûlure de la braise que celui qui marche dessus». La brûlure n’a pas encore atteint les Occidentaux.
Un proverbe tunisien de circonstance prétend que «ne ressent la brûlure de la braise que celui qui marche dessus». La brûlure n’a pas encore atteint les Occidentaux.
Terrifiant .
RépondreSupprimerMerci pour cette analyse .
Quelle serait l antidote à ce poison ?
Terrifiant!
RépondreSupprimerMerci pour cette analyse .
Quelle pourrait être l antidote à ce poison ?
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerA mon tour de m'étonner qu'un article aussi important, bien documenté et didactique, ne soit pas publié par Slate.fr !
Il est vrai que la plupart des journaux français publient aujourd'hui, à leur UNE, la photo de Abaaoud, présenté comme le "cerveau" des attentats de Paris, qui a "fini de nuire", ce qui ne manquera pas d'en faire un héros, et lui créera des émules, alors que votre article tend à n'en faire qu'une "petite frappe de Paris", parmi les autres.
Très cordialement.
En Algérie, les gens ayant combattu les terroristes, c'est à dire cette ossature même au sein de la population qui a tenu bon et a empêché le pays de basculer dans le néant en dépit du fait qu'un pan entier de cette population, comme les moutons de Panurge, fut de "mèche" avec l'intégrisme islamique, ne sont pas prêts à accepter l'aventure de ces criminels de l'EI. S'agissant des "moutons de Panurge", ils ont fait leur "primo infection" du suivi aveugle fait en direction des criminels islamistes. C'est 200 000 morts, la suspicion, la haine et 30/40 ans de régression.
RépondreSupprimerAbaaoud a "réussi" une opération terroriste de grande envergure : Stade de France, Bataclan et terrasses de café en plein Paris. C'est sans doute pour vous une " petite frappe " mais pas pour nous .
RépondreSupprimerIrak, Syrie, Libye ...c'est le Moyen Orient qui se décompose et les européens feraient mieux de ne pas y envoyer des troupes. Qu'ils s'entretuent, qu'ils installent des régimes islamistes et la charia en loi suprême, ils ne méritent pas mieux. Les américains qui n'ont plus besoin de pétrole se sont détournés d'eux et je partage le point de vue de Michel Onfray : les européens feraient mieux de fermer leurs frontières et nettoyer les poches où se sont réfugiés les dealers, les petits caïds, et toute la pègre .Notre mission : redonner à la République les couleurs de la France.
@André
RépondreSupprimerAbaaoud est une "petite frappe", une cervelle de moineau à qui les ordres de ces massacres en France ont émané depuis la Syrie.
Pour venir un jour à bout des attentats, il est impératif de faire des opérations militaires dans ce pays et dans bien d'autres si vous ne voulez pas que la France tombe un jour sous le califat.
Quant à la Libye, on peut "remercier" Nicolas Sarkozy pour sa "clairvoyance" politique en ayant éliminé khadafi, laissant une place vacante à Daesh.
La liberté monsieur, passe par une lutte sans merci contre ces djihadistes, à l'intérieur de la France comme à l'extérieur. Que vous le vouliez ou non.
Sans oublier Véronique qu'avant de s'occuper de Daesh il faudrait d'après Fabius que Bachar s'en aille. et pour mettre qui à sa place: Daesh?
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