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mardi 27 octobre 2015

Extrait de Mein Kampf, histoire d'un livre d'Antoine Vitkine



EXTRAIT DE MEIN KAMPF, HISTOIRE D'UN LIVRE

Par Antoine VITKINE

Antoine Vitkine, journaliste bien connu, réalisateur, écrivain et fin connaisseur du monde arabe et de la Libye en particulier publie sa prise de position concernant les Arabes et la Shoah. Elle a l’avantage d’être factuelle et fondée sur des éléments historiques confirmés. Il nous a paru utile d’en faire profiter nos lecteurs qui se feront ainsi leur propre religion sur le débat ouvert par le premier ministre israélien.
Antoine Vitkine

En référence à la polémique déclenchée par Netanyahou, il s’agit évidemment de propos totalement stupides et d’une instrumentalisation scandaleuse de l'Histoire à des fins politiques peu glorieuses. Mais dire cela n'empêche pas d'être exact, alors que se multiplient les condamnations a priori. Alors, pardon, je m'auto-cite, p 271 de mon livre [1] :
Al-Husseini et Himler

Le grand mufti de Jérusalem, Amin al-Husseini, partisan du panarabisme, adversaire acharné de la présence juive en Palestine, est l’un des hommes clefs du rapprochement arabo-allemand et participe tôt à la diffusion du livre dans l’ensemble du Moyen-Orient. Il est ainsi à l’origine de la publication des extraits de Mein Kampf, en 1934, dans le journal Le Monde arabe de Bagdad. Ayant fui en Irak en 1937, le mufti aide à la mise en place du régime pro-allemand de Rachid Ali. La rébellion se maintient au pouvoir quelques mois, le temps d’un pogrom contre les Juifs, auquel participe Husseini.
La collaboration du grand mufti avec les nazis ne sera pas sans conséquences. Celui-ci se réfugie en 1941 en Allemagne et rencontre Hitler. Dans ses mémoires, Husseini relate : «La condition fondamentale que nous avons posée aux Allemands pour notre coopération était d’avoir les mains libres dans l’éradication de tous les Juifs, jusqu’au dernier, en Palestine et dans le monde arabe. J’ai demandé́ à Hitler qu’il me donne son engagement explicite pour nous permettre de résoudre le problème juif d’une façon conforme à̀ nos aspirations nationales, correspondant aux méthodes scientifiques inventées par l’Allemagne pour son traitement des Juifs. J’obtins la réponse suivante : “Les Juifs sont à̀ vous.” » 
Un dialogue confirmé par une note du ministère allemand des Affaires étrangères, qui, quelques mois avant la rencontre, mentionne précisément les attentes arabes : «Résoudre la question des éléments juifs qui résident en Palestine et dans les autres pays arabes conformément aux intérêts ethniques et nationaux des Arabes et au règlement de la question juive en Allemagne et en Italie».
Paul Schmidt entre Édouard Daladier et Adolf Hitler à la conférence de Munich (septembre 1938)

Selon l’interprète de la rencontre, Herr Schmitt, Hitler répond à Husseini que l’attitude de l’Allemagne est sans ambiguïté́ : «Une guerre sans compromis contre les Juifs et naturellement une opposition active au Foyer national juif en Palestine, qui n’est rien d’autre qu’un centre, sous forme d’État, servant à̀ l’influence destructrice des intérêts juifs». Il s’engage à apporter son aide aux Arabes, soulignant qu’en apparence il s’agit d’un conflit entre l’Angleterre et le Reich, mais qu’idéologiquement c’est en fait un combat entre le national-socialisme et les Juifs. «Le combat en cours décidera aussi du destin du monde arabe», déclare-t-il encore à son interlocuteur.
Hormis la création d’une division SS musulmane en Bosnie, ainsi qu’une légion arabe intégrée à la Wehrmacht au Maghreb, la discussion ne débouche pas sur grand-chose, la priorité́ pour les Allemands n’étant pas la politique arabe que, de surcroît, les échecs de l’Axe au Maghreb et au Proche-Orient rendront vite obsolète. Hitler refuse une déclaration publique pour ne pas mécontenter le régime de Vichy qui a des intérêts au Levant. Il fait seulement à Husseini la promesse que le moment venu, l’Allemagne l’aidera à la destruction des Juifs du monde arabe.
Al Husseini en Bosnie

L’intérêt du Führer pour la question arabe perdurera jusqu’aux derniers jours du Reich. En 1945, dans son bunker berlinois, Hitler dicte à son fidèle Martin Bormann un testament politique dans lequel il ne renie rien et où il fait un bilan de sa carrière. De nombreux passages sont consacrés aux Arabes. Il y avoue un regret : avoir trop écouté les Italiens et les diplomates qui conseillaient de ménager les intérêts français au Levant et au Maghreb. «C’est ce qui nous a empêchés, en Afrique du Nord, par exemple, de faire une politique révolutionnaire. [...] Seuls, nous aurions pu émanciper les pays musulmans dominés par la France. Cela aurait eu un retentissement énorme en Égypte et dans le Proche-Orient asservis par les Anglais. D’avoir notre sort lié à celui des Italiens, cela rendait une telle politique impossible. Tout l’islam vibrait à l’annonce de nos victoires. Les Égyptiens, les Irakiens et le Proche-Orient tout entier étaient prêts à se soulever. Que pouvions-nous faire pour les aider, pour les pousser même, comme c’eut enté notre intérêt et notre devoir ? [...] Il y avait une grande politique à faire à l’égard de l’islam. C’est raté. [...] Cette politique aurait suscité́ l’enthousiasme dans tout l’islam. C’est en effet une particularité́ du monde musulman que ce qui touche les uns, en bien ou en mal, y est ressenti par tous les autres, des rives de l’Atlantique à celles du Pacifique». Surtout, Hitler dit à̀ Bormann, à l’heure où la bataille est perdue : «Les peuples régis par l’islam seront toujours plus proches de nous que la France, par exemple, en dépit de la parenté du sang qui coule dans nos veines». Husseini fuit la défaite allemande et retourne à Jérusalem, où il mène la lutte contre les sionistes. Il ne reniera jamais ses engagements pronazis.
Or il y a là une ironie : les soutiens arabes à la politique nazie et à la persécution des Juifs ne voient pas que ce sont ces mêmes persécutions qui poussent de nombreux Juifs vers la Palestine et entraîneront bientôt la création de l’État hébreu.


[1] Mein Kampf, Histoire d'un livre, par Antoine Vitkine Flammarion, 2009

1 commentaire:

  1. Je ne connaissais pas les derniers propos de Hitler à Martin Bormann. Son idée d'une action au Moyen Orient n'apparait nulle part ailleurs. Je crois qu'il ne l'a pas envisagé au début de la guerre. Il réalise son erreur après sa défaite. S'il avait poursuivi l'occupation de la France par un débarquement en Afrique dès 1940 il aurait été accueilli à bras ouverts et avancé comme dans du beurre jusqu'à Téhéran. L'URSS était prise en tenaille, il aurait gagné la guerre et nous ne serions pas là pour en parler. El hond allah, il en fut autrement. Le mufti dans son journal rapporte une rencontre avec Himmler à une réception fin 42, je crois. Himmler lui dit: Nous avons déjà tué 2 millions de juifs. À une époque où le monde ignorait tout.

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