JUDAÏQUES FM
LES MOUVEMENTS EXTRÉMISTES JUIFS ET LES IMPLANTATIONS
Jacques BENILLOUCHE
Au micro de
Eva SOTO
Jeunes des collines |
Il
faut tout d’abord préciser que le monde religieux en Israël est très diversifié
et qu’il se répartit en plusieurs catégories : les orthodoxes séfarades du
Shass et les orthodoxes ashkénazes de Yaadouth HaTorah. Ce sont des pacifiques
qui participent aux affaires de l’Etat bien qu’une bonne partie d’entre eux
refusent encore de faire le service militaire national.
Cliquer sur la suite pour entendre l'émission
Pour
justifier le crime de la Gay Pride, il a été dit que l’assassin faisait partie
des Netutei Karta. Cela n’est pas exact. Les Neturei Karta, les «Gardiens de
la Cité» en araméen, représentent une secte d’ultra-orthodoxes antisionistes. Mais ce ne
sont pas des violents même si la secte souhaite la création d'un État
palestinien à la place d'Israël.
Pour eux Israël représente «ce qu'il y a de
plus pécheur» parce qu’ils ne peuvent admettre la création d'un État juif avant l'apparition
du Messie. C’est pourquoi ils entretiennent une relation privilégiée avec les Iraniens qui appellent ouvertement à «rayer Israël de la carte».
Ils défilent dans Jérusalem en arborant l'étoile jaune et l'uniforme des
déportés parce qu’ils se croient persécutés
par Israël. Leur porte-parole, le rabbin Israël Hirsch estime que le
sionisme a coupé le peuple juif de la Torah et de la Doctrine du mont Sinaï.
Rabbin Hirsch |
La
plupart sont arrivés de Lituanie depuis 150 ans, pour être plus proches de
Dieu. Ils sont venus pour prier et non pas pour fonder un État. Ils vivent de donations qui viennent en
grande partie des États-Unis puisqu’ils ne travaillent pas. Leur vie, leur quotidien,
est dédié à l'étude de la Torah. Ils sont totalement déconnectés de l'Etat d’Israël
qu’ils refusent de nommer autrement que sous l'expression «entité sioniste». Quand les
enfants naissent, ils ne sont pas enregistrés et donc ne disposent pas de la
carte d'identité israélienne. Ils ne s'engagent pas dans l'armée et
pire, ils exigent d’être rattachés à une nation palestinienne, en quelque sorte
un État palestinien pour deux peuples.
Les
terroristes juifs font partie d’une autre catégorie. Il y a quelques mois près
de Naplouse, des inconnus ont tagué une mosquée, ont incendié des voitures et déraciné
des oliviers, geste lâche car on détruit le gagne-pain de civils arabes. Des
graffiti en hébreu ont été inscrits: «le prix à payer». Une mosquée près
de Ramallah, a été la cible d’une tentative d’incendie. Des tapis ont été
partiellement brûlés. Plusieurs mosquées de Cisjordanie ont été vandalisées.
Ces attaques relèvent d’une politique de représailles dite du «Tag Mehir», le
«prix à payer». A chaque mesure prise par le gouvernement israélien contre les
implantations sauvages, des Juifs extrémistes se vengent et attaquent des
cibles palestiniennes.
Mais,
ces individus radicaux ont franchi une ligne rouge, en s’attaquant à l’armée
israélienne, chaque fois que la Cour Suprême confirme l’évacuation de poste
avancé illégal. Une cinquantaine de jeunes avaient même pénétré dans une base
militaire, près de Naplouse. Ils ont insulté et attaqué à coups de pierres des
soldats, des jeunes de leur âge, puis ont saboté plusieurs
véhicules militaires. C’est un véritable affront fait à Tsahal, émanation du peuple pour protéger tout Israélien de ses ennemis.
La
classe politique israélienne a vivement condamné les auteurs du «Tag Mehrir»
car selon elle il faut lutter contre cette secte terroriste qui ne respecte
plus ni la loi civile ni la loi juive. Les autorités israéliennes pensent «qu’il ne s’agit que d’un petit noyau qui
ne représente pas la majorité des habitants de Cisjordanie, qui sont loyaux
envers l’Etat et ses lois et dénoncent les atteintes à l’ordre public».
Cette
politique de représailles a été attribuée aux jeunes des collines. Ils ont
entre 15 ans et 30 ans et vivent sur les collines de Cisjordanie. Ils seraient plus d’un millier. Ils font partie des quelque 5.000
personnes qui vivent dans près d'une centaine d'implantations sauvages, illégales au
regard de la justice israélienne, installées sur des terres domaniales ou
palestiniennes.
Ils
incarnent la deuxième génération d’habitants des implantations. Pour la
plupart, ce sont les enfants ou petits-enfants des premiers pionniers implantés
en Cisjordanie après la guerre des Six Jours de 1967. Quelques-uns ont
abandonné leurs racines citadines pour s’installer sur les terres fertiles de
Cisjordanie, au sommet de collines, dans des zones arides, inhabitées,
désertiques. Ils y plantent des tentes, et vivent dans de simples
caravanes.
C’est
à la fin des années 1990 que le mouvement est apparu. En 1998, un pionnier du
nom de Avri Ran a créé Givat Olam («les collines du monde»), un domaine
agricole dans la région de Naplouse. Dans sa ferme, cet ancien officier de
l’armée accueille des jeunes désorientés qu'il compte réinsérer en les mettant au travail dans la construction et dans les champs. Les premiers «jeunes
des collines» ont obtenu leur nouvelle identité. Puis, cette mouvance sociale s’est développée pendant la
seconde intifada. Les attentats palestiniens les ont désemparés et
traumatisés, les forçant ainsi à quitter leur foyer pour de nouveaux horizons. Ils se sont retrouvé en rébellion ouverte contre
Dieu, la famille ou encore le système scolaire, ce qui a poussé certains à sombrer dans la
drogue.
Avri Ran |
D’autres
sont allés plus loin dans la mystique religieuse et dans l’idéologie politique
de droite. Ils ont multiplié les avant-postes sauvages pour maintenir une présence à travers toute la Cisjordanie. Ces jeunes estiment
désormais que l’Etat et les autorités rabbiniques ne sont plus assez puissants
pour défendre la terre d’Israël. Religieux alors que souvent leurs parents ne
l’étaient pas, ils en expriment le symbole en se laissant pousser les papillotes, signe anachronique des temps anciens. Ils sont agriculteurs, bergers
ou étudiants en quête de mysticisme à la recherche d'une nouvelle voie spirituelle pleine de naïveté puisqu'ils pensent qu'un mode de vie ascétique, loin du
modernisme des grandes villes, les réconciliera avec la nature.
Nostalgiques de l’époque pionnière des kibboutzim et du
collectivisme, les jeunes se sont remis à la culture de la
terre en choisissant des espaces en dehors des implantations légales. Ils y élèvent des moutons, uniquement pour vivre sur la terre des ancêtres afin de restituer l'esprit des temps bibliques. Ils se sont adaptés à une vie de méditation, de prières, de chants et de danses jusqu'au moment où des gourous leur ont appris le maniement des armes pour s'en prendre aux Palestiniens.
La
politique du gouvernement à leur égard est ambiguë. Ils vivent en hors-la-loi dans des implantations
sauvages interdites selon la loi israélienne. Mais sur le terrain, l’armée
laisse faire et semble avoir reçu des ordres d'encourager implicitement ces constructions en faisant preuve de passivité. La jeunesse des collines est devenue un «mélange de culture hippie et de
racisme violent» en raison de leur idéologie radicale. Elle s'estime dotée de la mission de peupler
la Cisjordanie parce qu'ils ont reçu un commandement divin.
Se voulant visionnaires, les jeunes des Collines sont tombés dans l'anarchie. Ils sont prêts à tous les excès pour défendre le dogme du «Grand Israël», que certains nationalistes ont abandonné depuis longtemps. Ils s'opposent au gel des constructions juives en
Cisjordanie et se croient en mission divine lorsqu'il s'agit de combattre ceux qui leur barrent la route. Négocier la terre contre la paix est devenu pour eux un péché. Ils préparent l’avènement des temps messianiques ce qui implique que la création d’un Etat palestinien est une hérésie. Ils s'estiment donc en devoir de lutter contre le terrorisme
palestinien.
Les
jeunes des collines constituent un monde à part : ils ne votent pas, rejettent l’autorité étatique et beaucoup
d’entre eux ne font pas l’armée qui souvent les rejette parce qu’ils ont un casier judiciaire. Ils n'hésitent pas à faire face à Tsahal en s’interposant avec des armes pour empêcher la destruction d'une implantation sauvage. Mais ils ne
sont pas le reflet de toute la population juive de Cisjordanie, plus pacifique, plus disciplinée et plus respectueuse de Tsahal auquel ils participent. C’est une minorité
idéaliste et marginale qui représente cependant une bombe à retardement.
Les
dirigeants du pays se rendent bien compte du danger de ces incendies de
mosquées et de maisons qui peuvent conduire à une guerre civile entre Juifs et Arabes. La démocratie israélienne est en danger. Il y a une nécessité impérieuse de prendre les mesures
draconiennes pour en venir à bout afin de pas donner naissance à une OAS juive. Il est étonnant que les autorités sécuritaires sachent tout sur les mouvements terroristes palestiniens et qu'elles négligent d'infiltrer les mouvements juifs au point de se trouver démunies pour réclamer l'aide de la population.
... sauf le respect que je suis loin de lui devoir, monsieur le soi-disant Rabbin Hirsh, harnaché de son fragon d'ilbimène (c'est un mot à moi pour désigner un leader extrémiste ), et de ses papillotes, devrait prendre le chemin de Gaza, suivi de toute sa clique de débauchés fainéants, incultes et chômeurs à plein temps d'un monde réaliste...
RépondreSupprimer... Qu'ils aillent donc attendre le Messie auprès des palestiniens !
Je suis outré de la part d'un Rabbin "postiche", et de ces jeunes qui le suivent un bandeau sur les yeux !!!! Pendant que Tsahal continue de veiller charitablement à leur sécurité..
Claude
Un poison venant de l'intérieur. Comme si Israël n'avait pas assez d'ennemis à l'extérieur! Il fallait rendre tous les territoires après la guerre des six jours. A l'époque Israël était glorifié de toute part et n'a pas su en tirer bénéfice.
RépondreSupprimerLe résultat n'est pas brillant.
Cordialement
Véronique Allouche
Au moins avoir une vision claire de l'avenir, et penser en terme démographique un projet vivable et acceptable par les arabes et par les juifs. C'est cette absence de vision ou cette vision erronée de la réalité qui a crée la situation actuelle.
RépondreSupprimerOn a pu dire la même chose de la France en Algérie qui n'a pas su prévoir ni gérer.
Oui,souvent vient à l'esprit la comparaison avec la politique algérienne de la France ,les tergiversations des gouvernements ,l'aveuglement des Pieds noirs et l'extrémisme de l'OAS,
RépondreSupprimerChoqués, pour le moins comme une majorité de citoyens en Israël, autorités comprises, j'adhère entièrement à tout ce qui a été exprimé.
RépondreSupprimerJe reviendrai cependant sur un point précis: l'OAS juive. Pour avoir subit l'OAS en Algérie, je crois pouvoir dire qu'elle existe déjà en Israël, peut-être pas encore complètement structurée mais ça vient. Ce qui me gène dans votre analyse c'est de dire que l'on encourt un risque de guerre civile entre Israéliens et Palestiniens.
Je m'inscrit en faux, n'y sommes nous pas déjà? Le risque est aussi entre Israéliens laïques et religieux extrémistes qui à coup sûr anéantirait l'État d'Israel. La "Guerre des Juifs" représente un risque extrêmement dangereux.
Et puisque j'en suis aux comparaisons avec l'Algérie, je pense à CAMUS et me demande qui est capable aujourd'hui de lancer comme lui un appel à la trêve pour faire cesser ce qu'il a si bien appelé "les noces sanglantes du terrorisme et de la répression"
Où sont les autorités morales , les intellectuels, et plus généralement les "humanistes"??? Leur silence est assourdissant.