Pages

dimanche 5 avril 2015

IRAN : LES CLAUSES D’UN ACCORD A MINIMA


IRAN : LES CLAUSES D’UN ACCORD A MINIMA

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps

            

          Selon les différents bords politiques, les avis divergent sur la qualification de l’accord qui a été signé entre les puissances 5+1 et l’Iran. Certains le trouvent moins pire que prévu. Cet accord est a minima pour les Israéliens car selon le porte-parole du premier ministre, Mark Regev : «un meilleur accord est un accord qui démantèle de façon significative les infrastructures nucléaires militaires de l'Iran, qui exige de l'Iran qu'il change de comportement, qu'il cesse ses agressions dans la région, qu'il arrête de soutenir le terrorisme dans le monde entier, et qu'il cesse ses appels répétés à la destruction d'Israël».





Mark Regev

          Israël s’oppose donc radicalement aux clauses de ce qui, selon lui, va mener à une «crise majeure». L’Arabie saoudite s’inquiète de tout traité signé avec le régime des mollahs. Les Iraniens estiment que l’accord va dans le sens de leurs intérêts et ils le prouvent en dansant dans la rue. Une seule certitude, la diplomatie a fonctionné à plein rendement pour parvenir à un accord-cadre, 42 heures après la date limite du 31 mars. Il s’agit d’une première étape qui sera finalisée en juin prochain.


Accord historique

            Étonnamment il ne s’agit pas d’une énumération de principes flous pour noyer la réalité du programme nucléaire iranien.  Barack Obama avait exigé des négociateurs un texte suffisamment précis pour convaincre le Congrès de reporter son vote du 14 avril sur de nouvelles sanctions. Le président américain est conscient que l’accord ne sera «historique» que si les clauses étaient «scrupuleusement appliquées». C’est à présent en effet que débute la négociation difficile sur les détails techniques  et rien n’indique qu’elle ne capotera pas ou que l'Iran ne demandera pas à nouveau des délais de réflexion. 


            L’accord est fondé sur la nécessité d’étendre le délai de production de matière fissile pour du nucléaire militaire, actuellement de quelques mois, à au moins un an pour ensuite le proroger pendant une dizaine d’années. Pour cela deux clauses prévoient d’une part la réduction des centrifugeuses d’ancienne génération de 19.000 à 6.000 et l’interdiction de l’installation de nouvelles centrifugeuses d’un modèle plus évolué durant au moins dix ans. Toutes les recherches nucléaires seront soumises à l’agrément de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) qui les cautionnera sous l’égide de l’ONU.
            L’usine de Fordow, inexpugnable sous la montagne et inaccessible par l’aviation, cessera tout enrichissement et sera transformée en centre de recherche civil. L’usine aura l’interdiction de produire toute matière fissile durant quinze années tandis que parallèlement l’Iran diminuera son stock d’uranium enrichi de 10.000 à 300 kg durant cette même période. Il est prévu que la Russie reçoive ce stock pour retraitement.
Arak

            Les usines à plutonium sont aussi concernées par cet accord. Le réacteur à eau lourde d’Arak sera modifié et son noyau d’origine sera détruit pour ne plus produire de plutonium pendant 15 ans. L’Iran s’engage par ailleurs à ne pas construire de réacteur à eau lourde durant cette période.

Scepticisme

Parchin

            Le scepticisme de certains observateurs est dû aux méthodes d’inspection et de vérification car dans le passé l’Iran avait caché l’existence des usines d’enrichissement de Natanz et Fordow qui ont été découvertes par les services de renseignements occidentaux. C’est pourquoi les négociateurs ont donné aux inspecteurs de l’AIEA le droit d’inspecter toute installation qu’ils souhaitent visiter, figurant ou non dans la liste officielle des installations. Cependant l’accord pèche par l’absence de références au contrôle des usines militaires comme le site de Parchin. Le complexe militaire de Parchin est une base militaire, située à environ 30 kilomètres au sud-est de Téhéran. Depuis 2005, l'AIEA a demandé des inspections du site  dont l’accès lui a été refusé par le gouvernement iranien. On soupçonne l’Iran d’y mener des activités liées au développement d'armes nucléaires, en particulier, la recherche et le développement sur «des composants explosifs élevés pour une arme nucléaire à implosion».  
Je m'inquiète qu'il n'y ait qu'un seul pilote dans le cockpit

          Par ailleurs les Iraniens refusent tout contact avec le physicien et officier de la Garde révolutionnaire, Mohsen Fakhrizadeh, responsable de la recherche et du développement des armes nucléaires. Les efforts de l'AIEA pour interviewer d'autres scientifiques et ingénieurs iraniens ont également été bloqués. L’Iran se serait engagé verbalement à permettre ce genre de contrôle lorsque les éléments de l’accord seront mis en place. Mais les Occidentaux doutent de la bonne volonté iranienne car la Garde révolutionnaire est en charge du contrôle des sites militaires et pourraient en interdire l'accès.

Technologies sensibles


            La levée des sanctions pourrait permettre le transfert et l’acquisition de technologies «sensibles» entrant dans le cadre nucléaire. C’est ce qui inquiète Benjamin Netanyahou qui considère qu’il s’agit  d’un «mauvais accord qui menace la sécurité mondiale et qui ouvrirait la voie à un risque de prolifération nucléaire et d’une guerre horrible».  Youval Steinitz, ministre des affaires stratégiques et du renseignement a menacé les mollahs en précisant que «toutes les options sont sur la table».  
Cette même inquiétude est partagée par l’Arabie saoudite. Selon l’analyste saoudien, Abdul Aziz al-Sagr, le royaume «ne restera pas les bras croisés» si l’Iran se dote de l’arme nucléaire. L’Arabie saoudite qui voit l’intervention de l’Iran au Yémen d’un mauvais œil est persuadée que l’accord signé ne sera pas respecté.
Les chefs des partis politiques israéliens

            Hormis la diplomatie, on ne voit pas cependant la solution qui s’ouvre aux Israéliens dont l’inquiétude est légitime en raison des déclarations iraniennes qui persistent à prôner la destruction d’Israël. Benjamin Netanyahou place tous ses espoirs dans le Congrès puisque des discussions sont prévues pour parvenir à un accord définitif dans trois mois. L’Iran pourra toujours trouver des arguments pour s’en désengager. Toute solution de rechange impliquerait la guerre à laquelle les États-Unis n’y participeraient que si l’accord était bafoué par les Iraniens et si le programme nucléaire était poursuivi dans la clandestinité. Une équation à résoudre par la nouvelle coalition qui arrivera aux affaires à la suite des élections du 17 mars 2015.



7 commentaires:

  1. Très bonne synthèse à ce stade, Jacques ... J'ai été heureusement surpris par certaines clauses (le démantèlement de facto du réacteur à eau lourde dont j'avais parlé dans un article ; l'envoi du stock d'uranium enrichi "au frigo" pour un long moment) ; mais il est clair que l'option militaire est "out" ; et si Bibi joue uniquement les pleureuses, tout le monde l'interprétera comme une défaite d'Israël, et cela affaiblira encore plus le pays. J'espère qu'il se trouvera des bons conseillers à ce stade, vraiment difficile.

    RépondreSupprimer
  2. Un minima qui dépasse cependant de loin le prévisible !

    RépondreSupprimer
  3. Bernard ALLOUCHE3 avril 2015 à 16:02

    Merci Jacques pour ton article il est vrai que le nouveau gouvernement est face à une tâche très difficile et peut être encore jamais rencontrée par l'état d'Israël, alors porter un jugement sur les pleurnicheries de Netanyahou selon le commentaire de M. Corcos me semble déplacé vu la situation et pas d'actualité.
    Bernard Allouche

    RépondreSupprimer
  4. comment accepter cette comedia dellarte
    les etats menaces par l iran ne sont pas presents aux negociations??et une partie de l accord est orale et confidentelle c est a dire que les etats menaces restent dans l ignorance!!
    de plus coment obama et les autres discutent avec un etat terroriste islamiste qui envahit d autres etats ??
    ils sont fous!!
    comment s en sortir ??
    comment securiser le monde??

    RépondreSupprimer
  5. Marianne ARNAUD4 avril 2015 à 11:18

    Si j'ai bien compris, l'accord est tellement "à minima", qu'en fait il n'y a pas d'accord du tout. Seule la rupture a été évitée. Il va falloir reprendre un nouveau cycle de pourparlers à l'été. C'est un bien maigre résultat pour John Kerry qui n'était pas loin d'exaspérer le Congrès américain.
    Attendons la suite.

    RépondreSupprimer
  6. tout le monde a l'air satisfait, monsieur Kerry, monsieur Fabius, les russes, les chinois, les allemands, l’Europe, les britanniques et bien sure les Iraniens. ces derniers célèbrent leur première victoire et vont savourer leur deuxième réussite, en marquant leur hégémonie belliqueuse sur l'ensemble du moyen orient. ( aucune parole du financements de leurs groupes terroristes dans les négociations, cela n'intéresse personne, cela ne fait pas gagner d'argent...)

    pour Obama c'est une grande réussite, il est très content Obama, il est même fier de lui. avec leur "reconnaissance" internationale, les ayatollahs vont pouvoir financer des armes sophistiquées pour "pourrir" la vie de millions de personnes du moyen orient.

    les iraniens n'ont jamais digéré leur humiliation, au 8 ème siècle, quand les sunnites, simples hommes du désert, qu'ils considèrent comme des traînes savates, sans culture, sont venu sur leur terre leur infliger une sévère défaite, à eux les Perses, royaume millénaire, et leur imposer leur alphabet. ( la perse écrit avec l'alphabet des arabes , des traînes savates sans culture, cela me fait sourire)...

    aujourd'hui,un marché de 80 millions de consommateurs avec un pays plein de ressources naturelles, cela ouvre l’appétit, donne des envies de se goinfrer. c'est moins austère que notre matza. toutes les compagnies, idolâtres de l'argent, ont commencé à faire leurs incantations en dollars.
    la cupidité est plus forte que la sécurité

    RépondreSupprimer