L’ÉTAT ISLAMIQUE S’INSTALLE EN AFRIQUE DU NORD
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
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L’État islamique est une lèpre qui se répand au-delà du Levant où il
était censé uniquement s’installer selon son intitulé initial EIIL (État islamique
de l’Irak et du Levant). Après avoir investi le nord du Sinaï, cette
organisation djihadiste est en pleine expansion pour s’étendre à travers toute
l’Afrique du nord.
La Tunisie a été l’objet d’une opération terroriste. 22 personnes, dont 20 touristes et deux membres des forces d'intervention, ont trouvé la mort dans l'attaque du Musée du Bardo, les deux assaillants ont tués. L'assaut s'est produit en fin de matinée à proximité du Musée du Bardo, mitoyen du Parlement. Selon des témoins, des assaillants armés de kalachnikovs auraient d'abord pris pour cible un bus de touristes avant de pénétrer à l'intérieur du musée.
Le tort des Occidentaux, comme naguère avec Mein Kampf, est
de ne pas croire aux écrits des illuminés. On a parlé des assassins des
journalistes de Charlie Hebdo et des Juifs dans le hyper cacher, mais on passe
sous silence les vrais responsables qui se terrent dans leurs bunkers à
l'étranger.
La Tunisie a été l’objet d’une opération terroriste. 22 personnes, dont 20 touristes et deux membres des forces d'intervention, ont trouvé la mort dans l'attaque du Musée du Bardo, les deux assaillants ont tués. L'assaut s'est produit en fin de matinée à proximité du Musée du Bardo, mitoyen du Parlement. Selon des témoins, des assaillants armés de kalachnikovs auraient d'abord pris pour cible un bus de touristes avant de pénétrer à l'intérieur du musée.
L’État islamique n’est pas
parvenu au sommet des organisations terroristes islamiques par défaut. Son
théoricien Abou Moussab Al-Souri et son adepte qui s’est inspiré de son
idéologie, Abou Bakr Al-Baghdadi, ont été les artisans de l’implication au
niveau international du petit mouvement islamiste. L'Occident semble soudain
découvrir un mouvement terroriste alors qu’Al Souri avait tout prévu et tout
planifié. Les Occidentaux l’ont peu lu et surtout sous-estimé. Ainsi la
réussite de l’E.I n’est pas le fruit du hasard mais d’une stratégie patiemment
élaborée dont on a minimisé l’impact.
Principal idéologue de la
troisième génération du djihad salafiste, Al-Souri est entré sur la voie du
djihad en tant qu'expert militaire. Personne ne sait où il se cache depuis
qu’il a été libéré par Bachar Al-Assad en pleine guerre civile, en décembre
2011. Certains pensent qu’il s’est réfugié au Yémen alors qu’il est resté
probablement en Syrie, dans son pays natal.
Né en 1958 dans une famille
bourgeoise d’Alep, de son vrai nom Mustafa Setmariam Nasar, il a suivi un
cursus classique d’étudiant ingénieur en mécanique avant de rejoindre en 1980
une cellule islamiste, une émanation des Frères musulmans. La répression féroce
par le régime syrien du soulèvement armé de Hama, en 1982, le poussa à entrer
en dissidence et à s'entraîner dans des camps secrets en Jordanie puis en
Égypte.
Son esprit illuminé l’incitera en 1985 à refaire le parcours mythique des conquérants musulmans en se rendant en terre d’Andalousie où il épousera une gauchiste Elena Moreno qui se convertit à l'islam et avec qui il a eu quatre enfants. Il voyagea au Pakistan et en Afghanistan dès 1987 pour organiser des camps d'entraînement pour les moudjahidines qui combattaient les Soviétiques. Selon son biographe, le chercheur norvégien Brynjar Lia, il est considéré comme le véritable «architecte du djihad global» car c’est un «dissident, un esprit critique, un intellectuel au sein d'un courant idéologique».
Son esprit illuminé l’incitera en 1985 à refaire le parcours mythique des conquérants musulmans en se rendant en terre d’Andalousie où il épousera une gauchiste Elena Moreno qui se convertit à l'islam et avec qui il a eu quatre enfants. Il voyagea au Pakistan et en Afghanistan dès 1987 pour organiser des camps d'entraînement pour les moudjahidines qui combattaient les Soviétiques. Selon son biographe, le chercheur norvégien Brynjar Lia, il est considéré comme le véritable «architecte du djihad global» car c’est un «dissident, un esprit critique, un intellectuel au sein d'un courant idéologique».
Il avait exposé sa doctrine dans
un livre publié sur Internet en décembre 2004, l'Appel à la Résistance
islamique globale. Sa véritable bible de 1.600 pages du djihadisme, une
sorte de manuel d’endoctrinement, a jeté les réelles bases de l’État islamique
et a inspiré le jordanien Abou Moussab al-Zarqaoui, le Français Mohamed Merah
ou les frères Tsarnaev, Américains d'origine tchétchène auteurs présumés de
l'attentat de Boston en avril 2013, et même le Norvégien Anders Behring
Breivik.
Sa théorie avait été écrite dans
une perspective intellectuelle pour prôner le combat afin de renforcer l'usage
de la violence politique par les djihadistes. Disposant de connaissances sur
l’islam, mais pas suffisamment pour être considéré comme théologien, il s’était
inspiré des guérillas de gauche pour les refondre dans l’idéologie islamiste. Il
avait suggéré de créer de petites cellules autonomes, capables de se financer
et de s'armer tout en restant indépendantes les unes des autres pour échapper
aux polices antiterroristes. Cela a été le cas du groupe qui a égorgé en
Algérie le français Gourdel pour se financer. Son comportement d’illuminé le
menait à des fantasmes extrêmes puisqu’il préconisait une guerre chimique et
même l’utilisation de bombes à composants radioactifs sur le sol américain.
Pour lui, il fallait : «Une bombe sale pour un pays sale».
Théorie
de prise du pouvoir
La théorie de sa prise de
pouvoir se fonde sur trois étapes qu’Al Souri a parfaitement détaillées dans sa
bible. Les djihadistes ont d’abord attaqué les centres villes des pays ciblés
pour les obliger à y organiser la répression tandis que la périphérie devenait
une proie facile. C’est dans ce cadre, utilisé en Syrie et en Irak, que la
deuxième phase s’appuya sur les massacres d’une rare sauvagerie pour forcer les
populations à rejoindre les djihadistes, les seuls à rétablir selon eux la paix
civile dès lors que les gouvernements locaux auront échoué. La cruauté n’est
pas gratuite mais considérée comme la seule voie pour mener à la victoire. Aujourd’hui
ils ont investi la Libye et ce qui est le plus grave la Tunisie selon le même
principe.
La dernière étape est le
rétablissement du califat qui s’appuie sur le rejet de la démocratie, du
nationalisme et de l’Occident. Fondé sur un islam rigoriste, le califat
s’installe alors dans la durée en créant les structures d’un nouvel État en
s’appuyant sur de nouveaux juges et une nouvelle police. Il organise la vie
sociale et les aides à une population soumise par la force et qui, de toute
façon, apprécie les dons matériels à défaut de liberté. L'Appel à la Résistance
islamique globale d’Al Souri avait tout prévu mais l’Occident a mésestimé la
puissance du texte fondateur des djihadistes. Il en paie aujourd'hui les
conséquences.
Combats contre l'armée tunisienne |
En s’appuyant sur les fondements
de cette stratégie, le groupe est entré en Tunisie. C’est une réalité dans un
pays faible militairement parce que Bourguiba et Ben Ali avaient volontairement
réduit l’armée au minimum pour ne pas être détrônés par un jeune colonel fougueux.
L’Afrique du Nord est un terrain de prédilection pour les djihadistes puisqu’il
s’agit d’une vastes zones désertiques propices pour camoufler des
unités armées. On sait que plus de
3.000 jeunes tunisiens ont déjà été enrôlés dans l’EI ce qui fait de la Tunisie
le premier pays exportateur de combattants islamistes vers la Syrie après avoir
été une source importante de recrutement
pour les djihadistes en Afghanistan et pour ceux qui avaient décidé de
combattre leurs armées nationales dans une tentative d’islamiser les pays de la
région.
La Tunisie, qualifiée de pays
modéré, est en proie à une déstabilisation islamique. Elle suit l’Égypte devenue
une cible des activités djihadistes bien avant les «printemps arabes»,
avec des opérations qui ciblaient d’abord les sites touristiques avant une
escalade pour s’en prendre à l’armée égyptienne avec des attaques épisodiques
de roquettes sur Israël. Face à la détermination de l’État juif, ces groupes
ont compris le danger de s’en prendre à Tsahal et ils ont reporté leur combat sur
les forces égyptiennes devenues leur ennemi principal.
Action
progressive
Ces groupes extrémistes ont agi
selon une stratégie progressive. Il ont d’abord opéré dans l’ombre en Libye.
Ils ont profité de l’anarchie qui y régnait pour prendre le contrôle de villes et de
routes stratégiques qui relient la Méditerranée au désert du Sahara. La chute de
Kadhafi a entraîné l’absence de forces capables d’imposer une autorité réelle
sur le pays. Cette présence de l’EI en Afrique du Nord n’est pas nouvelle
puisque l’on sait à présent que des éléments algériens, tunisiens et libyens
ont fait serment d’allégeance à l’EI depuis un certain temps maintenant. Le 12
septembre dernier, un groupe de militants extrémistes. Les Brigades al-Furqan, opérait sous la
bannière d’AQMI. En Tunisie, le «Bataillon Uqba bin Nafe» dirigé par l’algérien
Luqman Abu Sakhr, allié du groupe tunisien Ansar al-Sharia dirigé par Abou
Ayyad a fait allégeance à l’EI.
L’Afrique du Nord sombre à nouveau au cœur des conflits internationaux
qui servent de cadre à la guerre contre le terrorisme. La responsabilité
incombe aux Occidentaux qui ont manipulé les gouvernements des pays
faibles pour justifier la création de bases militaires entrant dans le cadre de
leur stratégie militaire propre. Mais la Tunisie est trop faible militairement
pour supporter le choc du terrorisme qui détruit l’une de ses principales
ressources, le tourisme. Elle subit la première phase des djihadistes.
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