DEUX VISIONS DU VOYAGE DE
NETANYAHOU
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
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Réunion de l'Aipac |
Lundi 2 mars, il s’est adressé aux délégués de la conférence annuelle de l'Aipac, le plus puissant groupe de pression pro-israélien où il a bénéficié d’un a priori favorable car l’Aipac a toujours soutenu les gouvernements israéliens, quelle que soit leur couleur politique. Le test n’était pas dans cette enceinte. Le discours du 3 mars face aux deux Chambres du Congrès, est considéré comme la mesure des conséquences de la polémique qui a éclaté entre Barack Obama et le Congrès. Le secrétaire d’État John Kerry a cherché à arrondir les angles et, en bon diplomate, il a déclaré que «Benjamin Netanyahu était évidemment le bienvenu pour parler aux États-Unis».
Aucune surprise
Il n’y a aucune surprise à
attendre devant le Congrès américain. Il est certain que Netanyahou n'aura pas le même accueil à l'applaudimètre, avec des congressistes debout. On décèlera certainement une tension qui
atteindra son paroxysme lorsque le premier israélien prononcera son discours. Tout
a déjà été dit à ce sujet. Barack Obama n’a pas apprécié qu’on le contourne et,
de ce fait, il a décidé de ne pas recevoir Netanyahou pour marquer son
exaspération.
Ce sera la première fois qu’un premier ministre israélien,
en déplacement aux États-Unis, ne sera pas volontairement reçu par le
président. Susan Rice, qui conseille Barack Obama pour les questions de Sécurité
nationale, a qualifié l’initiative israélienne de «destructrice pour la
relation entre les deux pays», bien que Netanyahou ait répondu à une
invitation des élus républicains du Congrès, certes sans en référer à la Maison
Blanche.
Interdiction de marcher sur la pelouse |
Ceux qui ne veulent pas voir une
démarche électorale expliquent que les Israéliens veulent peser sur les
négociations sur le nucléaire iranien qui seraient sur le point de se
concrétiser. Il s’agit pour Netanyahou d’encourager le Congrès à maintenir,
sinon amplifier, les sanctions contre l’Iran. Mais Barack Obama a estimé que
les pressions subies sont inadmissibles d’autant plus qu’il juge que les
tensions sont attisées pour des raisons purement électorales.
L’opposition israélienne crie au
scandale car ce discours intervient à deux semaines du scrutin au moment où le
Likoud ne décolle pas dans les sondages et où certains medias le placent même
en deuxième position, lui enlevant ainsi le droit prioritaire à la constitution
du gouvernement.
Le centriste Yaïr Lapid, leader de Yesh Atid, a accusé le premier ministre de mettre en danger Israël. Il condamne son entêtement qui ouvre la voie à la signature d’un accord sur le nucléaire iranien. Affichant ouvertement son mépris envers Netanyahou qu’il rend responsable de l’escalade du conflit avec le gouvernement américain, Yaïr Lapid dénonce la possible désaffection et le retrait possible du soutien américain à l’État juif.
La gauche critique le fait que les relations avec les États-Unis soient mises en danger pour des raisons intérieures. Le gouvernement estime le voyage indispensable pour agir immédiatement afin d’empêcher tout accord avec l’Iran. Mais si ses adversaires lui donnent raison sur le problème de l’Iran, ils le condamnent quand il cherche à affronter Obama.
Le centriste Yaïr Lapid, leader de Yesh Atid, a accusé le premier ministre de mettre en danger Israël. Il condamne son entêtement qui ouvre la voie à la signature d’un accord sur le nucléaire iranien. Affichant ouvertement son mépris envers Netanyahou qu’il rend responsable de l’escalade du conflit avec le gouvernement américain, Yaïr Lapid dénonce la possible désaffection et le retrait possible du soutien américain à l’État juif.
La gauche critique le fait que les relations avec les États-Unis soient mises en danger pour des raisons intérieures. Le gouvernement estime le voyage indispensable pour agir immédiatement afin d’empêcher tout accord avec l’Iran. Mais si ses adversaires lui donnent raison sur le problème de l’Iran, ils le condamnent quand il cherche à affronter Obama.
Juifs en position délicate
Les Juifs américains sont en
position délicate car ils n’aiment pas ces querelles qui les mettent en
position d’arbitres alors qu’ils sont profondément des défenseurs d’Israël. L’opinion
est partagée entre ceux qui défendent leur président malmené par les Israéliens
et ceux qui comprennent, à juste titre, la problématique du nucléaire iranien.
La question fondamentale ne sera
pas le contenu et les mots du discours qui sera lisse devant le Congrès, pour
ne pas choquer et pour ne pas créer de rupture définitive. En revanche, on se
polarisera sur le nombre de parlementaires démocrates qui seront présents. Les
élus juifs ont déjà décidé d’être présents pour honorer le premier ministre.
Mais les responsables américains bouderont la réunion. Le vice-président Joe
Biden s’est trouvé un voyage en Amérique centrale pour justifier son absence
tandis que John Kerry s’est envolé pour la Suisse, pour affaires urgentes
dit-il.
Joe Biden |
Le discours face à l’Aipac a déjà donné la tendance. Netanyahou ne cherchera
pas l’affrontement et il continuera à
souligner que «l'amitié entre les États-Unis et Israël devient de plus en
plus forte.» Il a déjà mis en garde contre toute interprétation prématurée
de son discours devant le Congrès : «Mon discours ne vise pas à manquer
de respect à Obama. L'Amérique et Israël sont plus que des amis, nous sommes comme une famille.
Les désaccords dans la famille sont toujours inconfortables, mais nous devons
toujours nous rappeler que nous sommes une famille».
Les États-Unis savent que Netanyahou n’a aucun pourvoir pour infléchir la
volonté de Barack Obama et certainement pas au moyen de pressions publiques
jugées déplacées. Ils mettent ce déplacement sur le compte des élections du 17
mars. Le premier ministre veut prouver aux indécis qu’il est le seul garant de
la sécurité d’Israël et que, contrairement aux accusations, il reste toujours
ami des Américains malgré l’impression d’isolement diplomatique international d’Israël
soulevée par la gauche.
Les termes du discours devant le
Congrès ressembleront à ceux devant l’Aipac avec une petite note de dramaturgie
pour marquer les esprits sur le danger que court Israël. Barack Obama s’est
depuis longtemps fait sa religion. Il veut renouer avec l’Iran chiite pour
stopper l’expansion de Daesh et lui laisser le soin d’éradiquer le danger
djihadiste. Il sait par ailleurs, et les
chefs sécuritaires israéliens l’ont suffisamment martelé, qu’Israël n’est pas
en mesure d’intervenir contre l’Iran sans le concours logistique et
diplomatique américain. Le danger nucléaire iranien est devenu pour lui
secondaire par rapport au danger de l’État islamique.
C’est pourquoi l’on pense dans
les milieux diplomatiques que ce voyage n’aura aucune incidence sur les
décisions américaines déjà arrêtées. D’ailleurs Barack Obama a prévenu qu’il
opposerait son veto contre de nouvelles sanctions décidées par le Congrès à l’encontre
de l’Iran.
Jeffrey Goldberg |
Mais un résultat symbolique sera
porté au crédit israélien. Le célèbre chroniqueur américain Jeffrey Goldberg,
proche des démocrates et fervent critique de Netanyahou, s’est finalement rangé
à l’avis israélien sur la menace iranienne. Il avait dirigé la campagne visant
à empêcher le premier ministre israélien de s’exprimer devant le Congrès, mais
il a finalement estimé que l’accord prévu avec l’Iran était risqué et que les
mises en gardes israéliennes étaient «crédibles».
- Je crois qu'il est temps de discuter - Parfait mais d'abord soit sympa et passe-nous cette clé |
En fait ce voyage est risqué à
double titre. S’il a été décidé pour s’opposer à la nucléarisation de l’Iran,
il est fort probable que l’échec sera au rendez-vous car Netanyahou aura peu de
chances de bloquer les décisions américaines. S’il s’agissait d’une péripétie
de la campagne électorale, les experts vont calculer l’écart entre les voix
obtenues par le discours devant le Congrès et celles perdues en raison de la
détérioration des relations bilatérales. Aucun expert ne sera capable de s’exprimer
à ce sujet avant le 17 mars.
En s'exprimant aux uS, et pas devant le parlement chinois, russe ou français, Netanyahou va symboliquement montrer qu'Obama fait passer, en poursuivant un accord alambiqué avec l'Iran, les US de grande puissance ayant une vision pour le monde libre, à une puissance en déclin isolationniste et dont le rêve de liberté s'envole devant une supposée real politik. Je ne voterai pas Bibi, mais il se bat, là où d'autres ont honte.
RépondreSupprimerJe reconnais son courage,a t-il raison je ne suis pas suffisamment bon analyste pour cela,mais peut-être n'a t-il pas complètement faux !
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