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jeudi 20 novembre 2014

FATAH ET HAMAS : LA WORLD COMPANY




FATAH ET HAMAS : LA WORLD COMPANY

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps



          Il est légitime de se poser la question pourquoi le Fatah et le Hamas hésitent à s’engager vers la voie d’une paix réelle. Le Hamas persiste à prôner la guerre et la destruction d’Israël plutôt que la paix, malgré ses défaites durant les trois guerres qu’il a engagées avec l’État juif. A priori, aucune raison idéologique ne justifie cette volonté d’entretenir en permanence le conflit, sauf à nourrir le terreau dans lequel prospèrent la haine, l’intransigeance et les intérêts financiers. Le seul alibi de la nécessaire création d’un État palestinien ne tient pas.






Chaque guerre avec Israël est l’occasion pour les Palestiniens de recevoir des dons de tous les pays arabes et même de l’Union européenne. Il est donc normal que le Hamas envoie, de manière cyclique, des roquettes sur le sud du pays pour provoquer des représailles. D'ailleurs le Hamas ne désarme pas. Il a repris la fabrication de ses roquettes et selon Tsahal, il vient de procéder le 20 novembre à des essais en lançant quatre roquettes en direction de la mer.
Tant que dure la guerre, ses principaux dirigeants s’enrichissent et accumulent des trésors pendant que les Palestiniens souffrent de restrictions qui n’ont rien à voir avec un quelconque blocus. Rien n’a été fait pour améliorer leur sort et orienter les masses de dollars vers une utilisation sociale pour la construction de logements décents et pour le développement d’activités industrielles et de services capables de résorber le chômage. Moussa Abou Marzouk a le culot d'annoncer que «la situation à Gaza est sur le point d’exploser»


Jackpot palestinien 


          Les dirigeants palestiniens ont pris exemple sur Yasser Arafat qui avait amassé des milliards de dollars pour servir à son maintien au pouvoir. Une partie de sa fortune a d'ailleurs été détournée impunément par sa femme. Un clan palestinien contrôle l'activité économique, une «super-entité» qui n'est pas sans rappeler le trust inventé par les auteurs des Guignols de l'info, la fameuse World Company.

Septembre 1993 accords d'Oslo

          Les Palestiniens ont compris, depuis les accords d’Oslo, que l’Autorité nouvellement créée pouvait constituer pour eux une source inépuisable de revenus. Ils se sont alors inspirés des méthodes en vigueur dans les pays arabes féodaux. Un gouvernement centralisé couvre d’un voile pudique la corruption généralisée surtout si l’on y ajoute une dose de népotisme qui offre à quelques familles privilégiées de disposer de monopoles d’État sur les services et les matières premières.

Soutien financier de l’UE à l’Autorité palestinienne 

          L’Autorité a touché le jackpot avec le budget généreux de l’Union européenne. Ainsi entre 1995 et 2005 les Palestiniens, comptant une population de 4 millions d’âmes, ont absorbé en vain huit milliards de dollars censés financer des projets d’infrastructure industrielle qui n’ont jamais vu le jour. Avec sa naïveté coutumière, l’UE pensait générer des emplois et améliorer le niveau de vie de la population. Or les fonds ont servi à enrichir des poches privées ou ont été dilapidés pour créer des milices privées chargées de sauvegarder les intérêts d’une minorité.
          Les proches et les amis du premier ministre se sont réparti les monopoles de pétrole, de gaz, de cigarettes et de téléphone. Mohamed Dahlan, ancien chef de la sécurité du Fatah et homme fort de Gaza, avait découvert le pot aux roses alors qu’il n’était pas né de la dernière pluie. Mais, ayant été écarté de la distribution de cette manne, il avait soulevé ce problème de corruption qui gangrenait la direction palestinienne. 


Il avait même déposé une plainte internationale contre Mahmoud Abbas qu’il accusait de vol. Il avait exigé des explications sur les 1 à 2 milliards de dollars du Fonds d’investissement palestinien, envolés à la mort de Yasser Arafat, et qui auraient été transférés en 2005 à Mahmoud Abbas. Mohamed Dahlan, l’homme de la CIA et du Mossad, se présente aujourd’hui comme le chevalier blanc, le seul capable de remplacer Mahmoud Abbas et de mettre fin aux méthodes mafieuses de l’Autorité. Mais pour cette incartade, il a été banni de la direction palestinienne et exilé en Jordanie et au Qatar. 
          Le Hamas n’a pas bénéficié des largesses de l’Autorité qui espérait lui faire perdre le pouvoir à Gaza en l'asphyxiant économiquement. Mais cela ne l’a pas empêché de créer ses propres collectes de fonds pour financer sa politique islamique. Il a taxé les Frères musulmans dont il partage la même idéologie et il a prélevé des fonds auprès des musulmans d’Arabie saoudite, du Koweït et du Qatar au nom de son combat contre Israël. 


 À chaque attentat qu’il organisait, il était gratifié en espèces, sous forme de dons religieux, après s’être inspiré de la boîte bleue du KKL. Le musulman, étant tenu de donner l’aumône aux plus pauvres, alimentait la Zakat placée dans les bureaux islamiques en Cisjordanie et à Gaza. Mais le Hamas récupérait ces dons à son profit. Alors effectivement les barbes et les djellabas rassuraient car des hommes pieux craignant Dieu, inspirent le respect et la confiance. 
Abou Marzouk et Mechaal


Mais l’on oublie l’autre facette odieuse de la médaille. Tout en prônant la prière et le Djihad, les dirigeants islamistes se comportent en parfaits hommes d’affaires capables de concurrencer les financiers de la City de Londres. Le chef du bureau politique Khaled Mechaal vit dans l’opulence au Qatar mais il ne bénéficie pas seulement du financement de ce pays. 

Moussa Abou Marzouk, numéro deux du Hamas, en exil au Caire, est l’homme des collectes internationales auprès des donateurs musulmans aux États-Unis et en Europe. Il savait utiliser l’argument qu’il fallait sauver le Hamas et aider au développement des infrastructures de Gaza. Mais c'était souvent de la poudre aux yeux. Il n’a pas hésité à se servir grassement au passage au point de s’être constitué un empire financier hors de toute science-fiction. Il en est de même de tous les dirigeants de Gaza qui jonglent avec la rhétorique religieuse mais qui n’excluent pas l’enrichissement personnel. La plupart disposent de parts dans des entreprises privées et des supermarchés et ils monnayent leurs services auprès de citoyens crédules.


Contrôle de Gaza


          Lorsque le Hamas a pris le contrôle de la bande de Gaza en 2007, des masses d’argent avaient été envoyées par les pays islamiques avec, en contrepartie, l’injonction d’instituer la charia à Gaza. Moussa Abou Marzouk avait alors obtenu des centaines de millions de dollars de collectes de fonds aux États-Unis et en Europe, transférés sous prétexte d’indemniser les familles des kamikazes et de financer les terroristes invalides. Il a d’ailleurs été inquiété en 1995 par la justice fédérale du Texas pour transferts illégaux de fonds et enfermé en prison pendant deux ans. Il avait été accusé de complot visant à violer les lois des États-Unis qui interdisent les transactions de fonds au profit des terroristes. Il avait profité en fait de sa position pour réaliser des investissements personnels évalués aujourd’hui à près deux milliards de dollars. 

Hôtel à Gaza

          Tandis que Moussa Abou Marzouk était incarcéré aux États-Unis jusqu’en 1997, Khaled Mechaal avait pris la suite de ses affaires. Lui aussi ne s’est pas privé d’entasser une fortune comparable, durant son séjour à Damas de 1999 à 2012. Il a ainsi investi des sommes colossales dans les États du Golfe, dans les banques égyptiennes et dans de gros projets immobiliers. Il vient d’ailleurs de construire quatre tours et un centre commercial de 20 étages à Doha, au Qatar, dont les propriétaires sont officiellement des membres de sa famille. Et pendant ce temps les Palestiniens de Gaza souffrent de misère, par la volonté d’Israël bien sûr.

Tunnel de Gaza

          Chaque clan du Hamas a obtenu ses propres ressources. Le bras armé du Hamas, les brigades Ezzedine Al-Qassam ont organisé la contrebande à travers les milliers de tunnels reliés à l’Égypte en échappant aux taxes versés aux frontières israélienne et égyptienne. Tous les ministres, et Ismaël Haniyeh en premier, ont tiré profit de cette manne de taxes occultes prélevées par les brigades dans le cadre d’un système mafieux. Chaque commandant de zones prélevait sa quote-part et remontait les fonds aux différents échelons qui se servaient au passage.



Économie parallèle



          Si les taxes étaient certes inférieures aux taxes officielles, elles étaient élevées en ce qui concerne les produits alimentaires, la viande, la volaille, le ciment, le béton, les meubles, l'huile, l'essence et le matériel médical. Une voiture de contrebande était soumise à un impôt de 25% de sa valeur alors que près de 200 voitures étaient introduites en contrebande chaque jour. Des milliers de dollars entraient ainsi dans les poches et les caisses du Hamas. Du côté égyptien les «douaniers» complices prélevaient leur dîme. Ainsi Khairat Al-Shater, dirigeant des Frères musulmans, était un partenaire de choix dans ces échanges alors que Raed Al-Atar, dirigeant du Hamas officiait du côté de Rafah en récoltant des millions de dollars. 

Khairat Al-Shater

          Une nouvelle classe de millionnaires, qui ont engrangé dans ces échanges un milliard de dollars par an, a émergé. Les anciennes implantations du Goush Katif ont été vendues à des constructeurs palestiniens pour y construire des logements mais la majeure partie de ces fonds est allée directement dans la poche des dirigeants du Hamas.
          Les fonds islamiques issus de collectes ont afflué à Gaza sans compter les énormes les dons et contributions venant d’Iran, du Qatar, d'Arabie saoudite et des États du Golfe au nom de la Muqawama, la résistance islamique. Mais, contrairement aux fonds de l’UE, les dons en provenance des pays arabes sont difficiles à tracer, donc plus facilement détournés. S’ils arrivent en espèces, ils sont souvent «confisqués» par les dirigeants du Hamas. On cite le cas des 250 millions de dollars transférés en février 2013 dont on a perdu la trace. À la chute du président Morsi en juillet 2013, le Qatar s’est substitué à l’Égypte en envoyant 450 millions de dollars directement à Ismaël Haniyeh. L’ancien malheureux réfugié du camp d’Al Shati pèse aujourd’hui quatre millions de dollars, sans compter les terres et les maisons distribuées aux membres de sa famille. Mais il n’est pas le seul puisque d’autres ministres ont des trains de vie qui dépassent leurs seuls revenus officiels.

Villa de Mahmoud Abbas à Gaza

           La population de Gaza reste indifférente au contraste entre la vie luxueuse des chefs du Hamas à l’étranger et la misère endémique des populations de Gaza. Nul ne prend le risque de dénoncer cette corruption au risque d’être passé par les armes pour «collaboration» avec Israël. On se souvient que, durant l’opération «bordure de protection», une vingtaine de «collaborateurs», la plupart étant des opposants politiques, ont été exécutés en public sans procès.

Exécution à Gaza

          La World Company n’est pas un leurre chez les dirigeants palestiniens. Ils entretiendront le conflit avec Israël tant que des sommes immenses continueront à parvenir dans la région et tant que la misère volontaire subsistera au sein des populations palestiniennes victimes de dirigeants sans scrupules.
   

1 commentaire:

  1. excellente synthèse de Black jack. Instructif et édifiant!

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