L’ÉTAT ISLAMIQUE :
LA VÉRITABLE MENACE
Par
Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
Le monde a toujours connu des poussées extrémistes et islamistes, en son temps Al-Qaeda par exemple, qu’il a plus ou moins enrayées mais jamais une organisation terroriste n’a été aussi puissante que l’État islamique. La question qui se pose est la source de cette puissance qui pousse à une recomposition du paysage du Moyen-Orient avec, comme corollaire, une évolution forcée des alliances.
Méthodes de
Mahomet
La réussite de l’État islamique n’est
pas étonnante dans le contexte actuel. Elle s’explique d’une certaine manière
parce qu’il est le seul à se présenter ouvertement comme le défenseur de
l’islam sunnite, en Irak en particulier. Il s’est inspiré des méthodes
guerrières de Mahomet qui a tout islamisé sur son passage lorsqu’il avait donné
l’ordre de combattre les mécréants jusqu'à ce qu'ils aient été soit tués, soit
convertis à l'islam, soit dans un état d'asservissement permanent sous la
domination musulmane.
Mahomet n’avait pas accepté que des gens d'une autre
confession vivent leur foi de façon indépendante de l'autorité islamique. Le
Coran (9 :29) avait institué la règle immuable dans ce domaine : «Combattez ceux qui ne croient ni en Dieu ni
au Jour dernier, ceux qui ne s’interdisent pas ce que Dieu et Son Prophète ont
déclaré interdit, ceux qui, parmi les gens d’Écriture, ne pratiquent pas la
vraie religion. Combattez-les jusqu’à ce qu’ils versent directement la
capitation en toute humilité !». Dans le verset 9:5 le Coran complète les instructions : «À l’expiration des mois sacrés, tuez les
polythéistes partout où vous les trouverez ! Capturez-les ! Assiégez-les !
Dressez-leur des embuscades ! S’ils se repentent, s’ils accomplissent la salât,
s’ils s’acquittent de la zakât, laissez-les en paix, ils deviendront vos frères
en religion».
Genghis Khan |
L’État islamique n’a donc rien inventé
des
méthodes violentes, cruelles et sanguinaires pour terroriser ses opposants. Il
s’est aussi inspiré de l’exemple de Genghis Khan, le chef mongol, qui a tué
beaucoup de ses compatriotes avant de tuer des millions de personnes dans le
cadre de sa politique basée sur «le choc
et la terreur». Mais cette organisation terroriste a trouvé un terrain
favorable, un terreau qui lui a permis de prospérer dans la plupart des pays musulmans
où elle a infiltré les populations. Elle a profité de l’échec des révolutions arabes qui n’ont pas
réussi à instaurer la démocratie et la justice sociale ni à rétablir la fierté
d’un monde arabe en décomposition. Au
lieu d’offrir la gloire à des populations déçues, des dictatures se sont
substituées à d’autres dictatures avec la complicité passive de l’Occident qui a
voulu se protéger en faisant capoter ces révolutions.
Puissance financière
Un vide s’est ainsi créé qui a été vite comblé
par des organisations islamiques extrémistes à l’image aussi du Front
Al-Nostra. À Saddam Hussein et au colonel Kadhafi, qui tenaient bien leurs
troupes par la violence, a succédé l’État islamique qui s’est attaqué aux
pays faibles en contrôlant le quart de l’Irak et le tiers de la Syrie. Il a
appliqué le principe du bâton et de la carotte. Ceux qui ont enduré des années
de chaos sanglant, de corruption et de répression ont accepté de les suivre en gagnant
au change puisqu’ils ont bénéficié d’aides sociales auxquelles ils n’auraient
jamais rêvé.
Camp d'entrainement |
La violence exercée par l’État islamique lui
a permis d’assurer ses «frais de
fonctionnement» de manière autonome puisqu’il s’est servi en armes auprès
de l’armée irakienne qui a tout abandonné sans combattre et auprès de l’Armée
syrienne libre qui disposait de matériels de pointe fournis par les Américains. Le butin pris sur l'armée irakienne après ses victoires dans les provinces de Ninive et Saladin ont quitté l'Irak pour entrer en Syrie. Il a pillé les banques des villes qui se soumettaient. Ce succès le faisait prospérer parmi une jeunesse musulmane frustrée d’avoir été mise à
l’écart par des dictateurs sans vergogne. L’État islamique n’a eu que
l’embarras du choix pour recruter plus de 50.000 jeunes musulmans, gonflés par
les victoires d’une organisation qui redorait le blason de peuples musulmans qui ont vécu
le dos courbé.
Mufti d'Arabie saoudite |
Les
pays arabes ont mis beaucoup de temps à réagir, bercés par les promesses des
Occidentaux qui défendaient en priorité leurs intérêts. Parce que le danger
était aux portes de l’Arabie saoudite, son grand mufti, Cheikh Abdel Aziz
Al-Cheikh, s’est trouvé contraint de tirer, tardivement certes, la sonnette
d’alarme : «l’extrémisme et les
idéologies des groupes comme l’État islamique et Al-Qaïda constituent l’ennemi
numéro un de l’islam. Ces groupes extrémistes n’ont pas leur place dans l’islam».
Il a été jusqu’à inciter ses ouailles à commettre des meurtres car «il est permis d’un point de vue de l’islam
de tuer les membres d’Al-Qaïda et de l’État islamique parce qu’ils sont un
prolongement des Kharijites, la secte hérétique du temps des débuts de
l’Islam».
Les Occidentaux peuvent
difficilement vaincre une organisation qui possède une telle foi dans sa victoire. Les États-Unis combattent
Al-Qaeda, en vain, depuis vingt ans alors que es militants étaient autrement moins
structurés que la nouvelle lèpre islamiste. Les pays arabes sont tétanisés par le
nouveau danger qui se répand dans leurs structures. Ainsi selon un récent
sondage, 92% des jeunes Saoudiens soutiennent l’État islamique, son idéologie
et ses actions. La menace a grandi car des annexes de cette organisation ont
été créées avec succès à travers le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, et même
en Cisjordanie où l’Autorité palestinienne est ébranlée.
Djihadiste tué en Cisjordanie |
Alors des alliances bizarres se créent face
au danger. Des pays autrefois rivaux se liguent. L’Iran chiite qui voit ses
plate bandes piétinées, l’Arabie saoudite qui a généré le monstre, l’Irak et la
Syrie se retrouvent dans une nouvelle alliance hétéroclite. Ce développement sans précédent ne permet pas
d’entrevoir plus de succès que les efforts fournis précédemment par les pays
arabes dans leur lutte contre le terrorisme d’Al-Qaïda. Ces alliances contre
nature pourraient difficilement durer car elles n’ont pas de bases solides. On
se souvient que les groupes islamiques djihadistes s’étaient alliés avec les
Occidentaux pour bouter les Soviétiques hors de l’Afghanistan puis se sont retournés
contre leurs alliés. On se souvient qu’en Libye, les rebelles ont combattu
Kadhafi avec l’aide des avions de l’OTAN mais ont été ensuite bombardés de la
même manière.
La nouveauté du danger de l’État
islamique réside dans sa propagation rapide avec une menace réelle pour
l’Europe et les États-Unis qui se croient à l’abri. Le sang qui coule dans les
assassinats d’Européens est une mise en garde contre les pays occidentaux qui
cherchent à s’opposer à eux. Ils prônent la liberté d'action de la part de ceux qui les gênent.
La stratégie de l’État islamique est
d’abord de gangrener les terres arabes en éliminant les dirigeants actuels. L’Irak et la Syrie dans un premier temps, puis le Liban et la Jordanie ensuite.
C’est la raison des combats féroces qui opposent les terroristes à l’armée
régulière syrienne au Golan, à la frontière israélienne.
Mais les terroristes sont conscients qu’ils ne peuvent pas ouvrir un front risqué contre Israël car c’est un adversaire de taille. Ils ont d'autres priorités qui laissent un peu de répit aux Israéliens. Ni la Syrie et ni l’État islamique n’ont intérêt à envenimer une situation déjà compliquée. Pas un seul coup de feu n’a été tiré depuis 1973 à travers cette frontière et il est probable, sinon certain, qu’il en sera de même dans l’avenir proche. Certes des balles perdues, sans une réelle volonté de le toucher, ont atteint Israël qui, conscient de la réalité des faits, restera en dehors du conflit.
Israël observera les combats sans y prendre part car il n’est pas encore une cible désignée. Il ne veut pas être le gendarme du Proche-Orient car il appartient aux Occidentaux d’éradiquer rapidement un fléau s’ils ne veulent pas qu’il se répande chez eux. L’État islamique a fort affaire dans les pays arabes affaiblis pour se mesurer à un adversaire israélien déterminé, qui a préféré régler rapidement le conflit avec Gaza pour se consacrer à la défense de sa frontière nord. Le seul casus belli qui sortira Israël hors de sa neutralité serait la mise en danger du régime de Jordanie car alors le flanc ouest du pays serait fragilisé. Les djihadistes ont mesuré ce risque.
Frontière de Kuneitra |
Mais les terroristes sont conscients qu’ils ne peuvent pas ouvrir un front risqué contre Israël car c’est un adversaire de taille. Ils ont d'autres priorités qui laissent un peu de répit aux Israéliens. Ni la Syrie et ni l’État islamique n’ont intérêt à envenimer une situation déjà compliquée. Pas un seul coup de feu n’a été tiré depuis 1973 à travers cette frontière et il est probable, sinon certain, qu’il en sera de même dans l’avenir proche. Certes des balles perdues, sans une réelle volonté de le toucher, ont atteint Israël qui, conscient de la réalité des faits, restera en dehors du conflit.
Israël observera les combats sans y prendre part car il n’est pas encore une cible désignée. Il ne veut pas être le gendarme du Proche-Orient car il appartient aux Occidentaux d’éradiquer rapidement un fléau s’ils ne veulent pas qu’il se répande chez eux. L’État islamique a fort affaire dans les pays arabes affaiblis pour se mesurer à un adversaire israélien déterminé, qui a préféré régler rapidement le conflit avec Gaza pour se consacrer à la défense de sa frontière nord. Le seul casus belli qui sortira Israël hors de sa neutralité serait la mise en danger du régime de Jordanie car alors le flanc ouest du pays serait fragilisé. Les djihadistes ont mesuré ce risque.
Pour qui ? D'abord pour tous ceux qui l'ont sponsorisé....Qatar, Arabie saoudite , Iran, Turquie....
RépondreSupprimerles chiens finiront par mordre la main qui les a nourris.
Gengis Khan, lui au moins, ne massacrait pas au nom de la religion.
RépondreSupprimerIl était animiste et son peuple pratiquait toutes sortes de religions, bouddhisme, christianisme nestorien (persécutés par les catholiques et accueillis en Asie) etc.
On est en droit de s’interroger sur le rôle des monothéismes dans les massacres au nom de la religion : juifs de l’antiquité, chrétiens et bien sûr musulmans.
Gengis Khan fut aussi un défenseur des droits des femmes (bien en avance sur son temps) : interdiction du kidnapping, interdiction de vendre des femmes à des époux, tous les enfants nés d’une femme ou d’une concubine devaient être reconnus comme héritiers légitimes (seulement sous la révolution en France), possibilité pour les femmes d’être militaire.
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerVous avez tout à fait raison, la véritable menace que l'Occident va avoir à subir est bien celle de l'EI, sauf que pour nos amis américains, il ne semble constituer de véritable menace que lorsqu'on leur décapite un journaliste.
Le reste du temps ce qu'ils considèrent comme leur véritable menace c'est la Russie de Poutine qui a l'outrecuidance de vouloir les empêcher de faire cette Europe américaine "censée s'étendre du Potomac au Don tranquille".
Barroso, au moment de quitter ses fonctions, n'a-t-il pas brandi la menace d'un"point de non retour", au cas où la "crise ukrainienne se prolongerait ?
Très cordialement.
Ces Islamistes font exactement la contradiction de la fâtiha, qui dit "bismi llah errahmân errahîm ! Au nom de Dieu clément et miséricordieux !
RépondreSupprimerSi ces gens pensent que Dieu est miséricordieux et clément, c'est que rien n'a de sens. La nihilitude et contradiction profonde de tous les fascismes et nazismes, c'est de prôner tout et son contraire pour anéantir toute logique morale et éthique. La bravoure, c'est de tuer des civils sans défense ! Nous sommes une race supérieure, donc nous éliminons tous ceux qui nous sont inférieurs pour être finalement supérieurs à rien et à personne.
La violence de la phrase fondatrice "Viva la Muerte" est au fond de cette perversion.