LA TUNISIE À LA POINTE DU COMBAT DES DJIHADISTES
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Djihadistes tunisiens |
Pendant de longues années on parlait de la Tunisie comme du pays le plus modéré des États arabes. Elle était un exemple pour les Occidentaux et pourtant il s’agissait paradoxalement de l'époque de Bourguiba et de Ben Ali qui n’étaient certainement pas des exemples vivants de démocrates. Aujourd’hui cette qualification est illusoire tant la Tunisie fait parler d’elle dans les pages noires des médias. Même si l’on se réfère à la période de la guerre d’Indépendance, les fellaghas avaient mené une guerre relativement modérée face à celle qui avait ensanglanté l’Algérie et celle qui touche aujourd’hui l’Irak.
Ratés de la vie
La Tunisie est à présent à la pointe du
combat aux côtés des djihadistes figurant dans des photos ensanglantées montrant
des miliciens tunisiens sur les deux fronts syrien et irakien. La question se
pose de savoir ce qui pousse des jeunes, d’ordinaire à la réputation pacifique,
à se transformer en tueurs sans scrupules. La plupart sont des ratés de la vie,
issus des quartiers déshérités du bled, qui se sont trouvés marginalisés parce
que l’État tunisien n’a rien pu faire pour eux. Ils avaient cru en la révolution
qui devait changer leur vie mais ils n’ont hérité que de désespoir qui les a
poussés entre les mains des extrémistes religieux. Ils leur ont fait miroiter un
avenir meilleur qu’ils ne pourront atteindre que dans un combat contre les
ennemis de l’islam au nom d’Allah, de son prophète et de sa religion.
Jeunes tunisiens |
Les Salafistes ont réussi à leur faire
croire qu’ils pouvaient réaliser les promesses restées lettres mortes par les
révolutionnaires. Il leur était donc facile d’agréger autour d’eux les chômeurs
et les Sdf qui avaient atteint le paroxysme de l’aigreur. L’argent en
provenance des États du Golfe a alors servi à les endoctriner grâce à l’afflux
de biens matériels et avec l’assurance d’obtenir rapidement un statut social et
surtout l’estime de ceux qui les avaient rejetés. Ils ont été convaincus qu’ils
menaient un djihad au nom de l’islam et que tuer un autre musulman était une
véritable consigne de Dieu
Leaders chez les djihadistes
Des études menées par la présidence de
la République tunisienne, donc à priori fiables, révèlent que de nombreux
Tunisiens sont aux commandes de l’EIIL et que 14 autres se sont fait exploser
comme kamikazes en Irak. Parce qu’ils étaient considérés comme les plus
expérimentés dans le maniement des armes et des explosifs, ils ont atteint des
postes de commandement de très haut niveau. Mais le risque de ces combattants
réside dans leur projet de mettre à feu et à sang la Tunisie, une fois que leur
combat sera terminé en Irak et en Syrie et une fois acquise l’expérience des
grands combats contre une armée régulière.
Lotfi Ben Jeddou |
Le ministre tunisien de l’intérieur,
Lotfi Ben Jeddou, a évalué le 24 juin à 2.400 le nombre de Tunisiens qui
combattent aux côtés des djihadistes. Ce chiffre, qui se répartit à 20% pour
ceux qui combattent chez Jabat al-Nosra et 80% pour l’EIIL, démontre que la
Tunisie est le pays le plus touché par le phénomène des mercenaires islamistes. Le ministre vient aussi de révéler qu'un camp d'entrainement de djihadistes a été découvert, masqué sous forme de camp de scouts.
Les Tunisiens ont été les premiers étrangers en 2011 à rejoindre la rébellion en Syrie et cette antériorité leur a donné le droit d’accéder à des postes de premier plan qui leur donnent la responsabilité d’être plus cruels que de nature. On les voit ainsi, dans une vidéo, exécuter cinq prisonniers chiites avec une barbarie non conforme à la tradition pacifique à laquelle la Tunisie nous avait habitués.
Mais une nouvelle mission leur a été conférée consistant à étendre la violence dans leur pays d’origine. Ainsi le ministère de l’Intérieur tunisien a révélé que 400 djihadistes sont rentrés pour mener des actions de grande ampleur afin de déstabiliser le régime actuel. Ils ont d’ailleurs été très vite en besogne puisqu’ils ont mené une attaque contre le domicile personnel du ministre de l’intérieur à Kasserine, au pied du Mont Châambi où de nombreux djihadistes s’attaquent à l’armée régulière en lui occasionnant plusieurs pertes. Parmi les terroristes impliqués dans cette opération
figurent Fathi Hajji, terroriste en provenance du Mali, Mourad Gharsalli, qui avait
participé à l’opération d’égorgement des soldats au Mont Châambi, ou encore, l'algérien Abou Sakhr Chaïb impliqué dans l’assassinat d’Anis Jelassi en
décembre 2013.
Les Tunisiens ont été les premiers étrangers en 2011 à rejoindre la rébellion en Syrie et cette antériorité leur a donné le droit d’accéder à des postes de premier plan qui leur donnent la responsabilité d’être plus cruels que de nature. On les voit ainsi, dans une vidéo, exécuter cinq prisonniers chiites avec une barbarie non conforme à la tradition pacifique à laquelle la Tunisie nous avait habitués.
Soldats égorgés au Djebel Châambi |
Mais une nouvelle mission leur a été conférée consistant à étendre la violence dans leur pays d’origine. Ainsi le ministère de l’Intérieur tunisien a révélé que 400 djihadistes sont rentrés pour mener des actions de grande ampleur afin de déstabiliser le régime actuel. Ils ont d’ailleurs été très vite en besogne puisqu’ils ont mené une attaque contre le domicile personnel du ministre de l’intérieur à Kasserine, au pied du Mont Châambi où de nombreux djihadistes s’attaquent à l’armée régulière en lui occasionnant plusieurs pertes.
Une nébuleuse
très active
La Libye, aux portes de la Tunisie, est
aussi entrée dans cette vague de violence avec des groupes terroristes financés
par les États du Golfe qui se déploient à travers toute la région. L’EIIL est
dans une phase d’expansion tendant à dépasser la maison mère d’Al-Qaeda dirigée
par l’égyptien Zawahiri et sa filiale AQMI sous le commandement de l’algérien
Droukdel, en pleine perte d’influence et isolées dans les régions montagneuses
à la frontière tuniso-algérienne. Cette faiblesse a poussé d’ailleurs des forces terroristes de
différentes obédiences, portant
le nom de «Mourabitouns», à faire sécession pour rejoindre l’EIIL en plein potentiel de réussite. Ils ne
se contentent plus de petites attaques éphémères mais développent une stratégie
de ralliement autour de l’EIIL, pour prendre le contrôle d’un territoire complet avec
une volonté d’en assurer la mainmise à long terme.
Rassemblement d'Ansar Al-Charia |
Le groupe Ansar Al-Charia qui est actif en
Tunisie et en Libye est sur le point de rejoindre la coalition pour constituer
une organisation unique et puissante avec comme objectif de renforcer l’axe
tuniso-libyen et d’étendre ensuite le
pouvoir terroriste à l’Algérie grâce aux effectifs aguerris de retour de Syrie. Dans un communiqué en date du 14 juin 2014, Abu
Iyadh Al-Tunsi, leader d'Ansar Al-Charia en Tunisie, a félicité la nation
musulmane pour les récentes victoires de l´EIIL en Irak et a appelé à profiter de ces exploits pour unifier le
mouvement djihadiste mondial. Plus précisément, il exhorte le chef d´Al-Qaïda, Ayman Al-Zawahiri, et le chef de Jabhat Al-Nusra, Abu Muhammad Al-Joulani, à féliciter publiquement l’EIIL et mettre fin aux combats internes qui opposent les combattants djihadistes en Syrie
L’action est déjà amorcée avec l’organisation d’un plan d’émeutes dans le sud tunisien, à Ben Gardanne. L’État tunisien est de plus en plus affaibli par la recrudescence de la violence, sous le regard passif des Occidentaux qui ne cillent pas alors qu’ils savent que les pourvoyeurs de fonds de l’EIIL sont justement les monarchies du Golfe. Certains observateurs en sont à penser que ces groupes terroristes entrent dans la stratégie occidentale parce qu’ils légitiment le maintien dans la région de l’Africom chargée de combattre le terrorisme.
L’action est déjà amorcée avec l’organisation d’un plan d’émeutes dans le sud tunisien, à Ben Gardanne. L’État tunisien est de plus en plus affaibli par la recrudescence de la violence, sous le regard passif des Occidentaux qui ne cillent pas alors qu’ils savent que les pourvoyeurs de fonds de l’EIIL sont justement les monarchies du Golfe. Certains observateurs en sont à penser que ces groupes terroristes entrent dans la stratégie occidentale parce qu’ils légitiment le maintien dans la région de l’Africom chargée de combattre le terrorisme.
Quant
à la classe politique tunisienne, elle reste inerte face au danger, se bornant à
s’essayer au jeu de la démocratie dans le cadre des élections à venir. La Tunisie agonisante, censée être dirigée par des technocrates, a seulement réussi à exporter le terrorisme plutôt que le phosphate ou l'huile d'olive. Mais
comme dit le proverbe tunisien : «l’eau
coule sous ton siège mais tu ne sembles pas voir le danger.»
une bonne leçon de chose en temps réels pour la France
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