ISRAËL ASSURE DÉFINITIVEMENT SES BESOINS EN EAU
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Cet article
fait écho à l’émission de mon ami Jean Corcos sur Judaïques 94.8 FM, dimanche 1er
juin à 9h30 heure française. Il interrogera Norbert Lipszic, ingénieur,
spécialiste en environnement, sur l’eau en partage entre Israéliens et
Palestiniens.
Usine de dessalement de Hadera |
La question de
l’eau est un élément récurrent dans les discussions sur le processus de paix
israélo-palestinien. Le Proche-Orient est une zone géographique, qualifiée selon les
experts en situation de «stress hydrique» en raison d’un déséquilibre
structurel entre ses ressources limités et la consommation, en très forte
croissance face à l’évolution démographique et au développement économique. Dans
cette région au climat semi désertique, les pluies sont inexistantes d’avril à septembre,
avec des températures oscillant entre
30°C et 50°C, entrainant une pénurie d’eau. Il en résulte des répercussions
politiques importantes dans le processus de paix israélo-palestinien. Seuls le
Liban et la Turquie sont dotés d’un potentiel hydraulique qui les met à l’abri
du besoin d’eau.
Ressource rare
L’eau devient
une ressource rare en raison de sa surexploitation et des surconsommations chroniques. Heureusement, la prédiction de
1995 du vice-président de la Banque Mondiale pour les questions de
développement durable, Ismail Serageldin : «les guerres du prochain siècle
auront l’eau pour objet», ne s’est pas réalisée. La FAO (Food and
Agriculture Organization) estime que la quantité d’eau potable de bonne qualité
disponible par personne et par an est de 250m3 en Israël, 85m3 dans les
Territoires palestiniens et 200m3 en Jordanie. L’eau, considérée «ressource
stratégique sous contrôle militaire israélien», fait l’objet d’une
législation rigoureuse. En effet une loi de 1959, étendue aux Territoires
palestiniens, stipule qu’elle est une propriété publique soumise au contrôle de
l’État.
Nappes phréatiques |
Jusqu’à ces
dernières années, les disponibilités en eau étaient très préoccupantes car les prélèvements dépassaient les
ressources tandis que les nappes souterraines étaient surexploitées. En effet
les nappes phréatiques, d’un accès facile et peu coûteux, sont trop souvent
surexploitées entraînant une salinisation des eaux. Quand elles sont proches du
littoral, l’appel du vide pousse l’eau de mer à s’y introduire entraînant les
exploitants à pomper dans les puits de l’eau salée ou saumâtre.
Traitement eaux usées |
Mais Israël a
investi de gros moyens pour résoudre ses problèmes d’eau afin de compenser les hivers peu pluvieux. Il a
recyclé les eaux usées et construit de nouvelles usines de dessalement d’eau de
mer qui ont placé le pays parmi les plus hydratés de la région. Il a appris à ne
plus compter que sur la pluie qui ne couvre que la moitié des besoins en eau. La
région nord par exemple, habituellement bien arrosée, a connu cette année une
pluviométrie qui n’a atteint que 50% de
la moyenne annuelle des précipitations. Par ailleurs, de grands progrès ont été
réalisés sur le recyclage de 90% des eaux usées qui permettent de satisfaire une grande partie des besoins des infrastructures agricoles.
Usines de
dessalement
Le plan de
dessalement a été tardif puisqu’il ne date que de 2005 et l’on s’étonne
d’ailleurs que l’on n’ait pas pensé plus tôt car le manque d’eau était
chronique. Mais depuis lors, cinq usines de dessalement fournissent 35% de
l’eau potable utilisée en Israël avec un objectif de parvenir à 70% aux
environs des années 2050. Le modèle d’usine est Soreq, l'usine de dessalement
la plus grande du monde, située à 15 km au sud de Tel Aviv, qui a développé
l’utilisation de membranes d'osmose inverse (RO) de 16 pouces. Ces membranes
permettent de produire jusqu'à 150 milliards de litres d'eau potable par an
avec un coût de production le plus bas du monde.
Accord sur l'eau entre Israël, la Jordanie et l'Autorité palestinienne |
Ces cinq usines
ont rendu Israël indépendant en eau tout en écartant tout risque de guerre à
cause de l’eau. Israël souhaite apporter son expertise auprès des pays régionaux dans le cadre d’un
traité de paix afin que l’eau ne soit plus une source de conflit. Il pourrait
proposer ses techniques de dessalement et ses méthodes avancées de
réutilisation des eaux usées. D’ailleurs, un accord a déjà été signé avec la
Jordanie pour la construction d’une usine commune de dessalement d’eau de mer
dont une partie de la production serait mise à la disposition des Palestiniens.
Cet accord pourrait s’étendre à court terme à Chypre et à l’Égypte.
Cibles du
Hezbollah
Mais ces usines
ont accru la vulnérabilité d’Israël en cas de conflit ou de frappes de missiles
car elles peuvent être de nouvelles cibles pour ses ennemis, le Hezbollah en
particulier qui avait déjà essayé de les viser lors de la guerre du Liban en
2006. Israël a introduit ce risque dans sa doctrine de défense et a pris des
mesures radicales pour la protection des sites de dessalement. Ainsi l’usine de
Soreq est très protégée physiquement par des clôtures et des caméras de
sécurité, par des systèmes antimissiles, mais aussi par l’absence de connexion
à Internet pour éviter toute attaque cybernétique.
L’augmentation
des ressources en eau d’Israël permettra aussi de résoudre la baisse dramatique
du niveau de la Mer Morte. Si Israël parvient à couvrir ses besoins en extrayant
moins d’eau du lac de Tibériade, cela permettrait un débit plus rapide des eaux
du Jourdain et à terme, on peut penser que le Jourdain pourra à nouveau
alimenter, ou réalimenter, le mer Morte.
Israël assure à
présent définitivement ses besoins en eau. Il appartient à présent aux Palestiniens
d’exploiter les moyens mis à leur disposition par l’Union européenne pour
parvenir aux mêmes résultats. L’argent ne manque pas sinon la volonté.
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