LA
LIBANISATION DU LIBAN
Par Jacques
BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
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Le mot libanisation est entré dans le vocabulaire courant pour exprimer un processus de fragmentation d'un État, résultant de
l'affrontement entre diverses communautés de confessions diverses. Le Liban a
déjà connu ces dérives dans les années 1980 et il semble qu’il renoue avec ce
malheur alors que l’espoir avait envahi les hommes politiques de la région.
Trente années plus tard, la guerre civile s’installe à nouveau, avec son
cortège d’assassinats politiques, de discours haineux et de divisions
communautaires.
Assassinats
Durant
cette dernière décennie, au moins dix assassinats politiques ont été perpétrés avec
quatre pour la seule année 2005. Les
leaders des différentes communautés usent de propos guerriers incitant à la
haine ou à la violence car la population est actuellement divisée en deux clans
principaux, pro ou anti Assad.
La
guerre civile est à nouveau en marche. L’ancien ministre Mohamed Shatah avait eu
le nez fin quand il avait annoncé que «nous allons de crise en crise avec un
calme superficiel entre deux. Mais les crises se rapprochent pour fusionner en
une seule crise dévorante». Le 27 décembre 2013 il a payé de sa vie cette
prédiction dans un attentat qui a tué sept autres personnes. Alors que le bain
de sang continue en Syrie, dans l’indifférence générale, plus d’un million de
syriens, le quart de la population du Liban, ont traversé la frontière pour
modifier l’équilibre fragile des communautés. D'ailleurs on s'en prend actuellement au symbole de la culture chrétienne en incendiant les bibliothèques.
La
guerre entre clans religieux, qui s’était atténuée après les drames de 1975 et
1990, s’est accrue au paroxysme avec la haine entre sunnites et chiites. Bachar Al-Assad compte sur ce moyen pour
assurer sa mainmise sur le Liban tout en coordonnant ainsi, par procuration, la
lutte entre l’Iran et l’Arabie saoudite. Entre ces deux communautés, les
Chrétiens paient le plus lourd tribut en devenant minoritaires et en ne
trouvant leur salut que dans la fuite vers l’étranger.
La main de l’Iran
Israël
avait lancé de multiples mises en garde au monde occidental sur la capacité de
nuisance des Gardiens iraniens de la Révolution qui arment, financent et entrainent
le Hezbollah devenu le bras armé du régime d’Assad. En sauvant le régime de
Damas au prix de la mort de 500 de ses combattants, la milice islamiste s’est rendue indispensable en Syrie tout en cherchant à consolider
sa position devenue précaire au Liban. Elle a écrasé toutes les têtes qui dépassaient parmi les
sunnites libanais qui ont été réduits à un rang négligeable parce qu’ils ne
disposent pas de milice armée, à l’exception des quelques combattants qui ont traversé la
frontière pour prendre les armes du côté des rebelles.
Alliance du 14 mars |
Les
Chrétiens sont à présent noyés dans la masse musulmane. Seule l’Alliance du 14
mars réussit encore à subsister en tant qu’entité active. Cette coalition
politique regroupe les personnalités et les mouvements politiques qui ont pris
part à la Révolution du Cèdre suite à l’assassinat, le 14 février 2005, de
l’ancien premier ministre Rafiq Hariri. L’appellation «14-Mars» fait
référence à la date de la grande manifestation qui a regroupé à Beyrouth, en
2005, plus de 1,3 million Libanais réclamant le retrait des troupes syriennes
du pays et la pleine lumière sur l’assassinat de Rafiq Hariri.
Mohamed Chatah |
Le
ministre assassiné Shatah était l’un des leaders de ce groupe et le
représentant officiel de Saad Hariri en exil à Paris pour des raisons
sécuritaires. Peu connu en Occident avant sa mort, Mohamed Chatah, était un adversaire résolu
du Hezbollah. Il se rendait à une réunion politique lorsque son convoi a été la
cible d’un attentat. Moins d’une heure avant de mourir, Mohamed Chatah avait publié un
message accusant le Hezbollah de chercher à prendre les commandes au Liban :
«Le Hezbollah exerce une grosse pression pour disposer, en matière de
sécurité et de politique étrangère, de pouvoirs similaires à ceux détenus par
la Syrie au Liban pendant 15 ans».
Blocage politique
Le
Liban n’a toujours pas de gouvernement après la démission de Najib Mikati qui
dirige un gouvernement intérimaire car l’obstruction du Hezbollah est vive sur fond
de répartition des postes ministériels. Le combat politique a dégénéré en
violence avec plus de 100 morts dans des attentats contre des mosquées sunnites
et contre l’ambassade d’Iran.
Les Sunnites ont réagi à leur tour en attaquant les miliciens du Hezbollah et en entrainant une chaine de violence qui supprime toute chance de coexistence entre communautés. Les Chrétiens sont à présent convaincus que l’alibi du Hezbollah tendant à faire croire qu’il existe pour résister et combattre «l’occupation israélienne de la Palestine» ne tient plus alors qu’en fait ses armes sont dirigées contre les populations libanaises.
Attentat contre une mosquée |
Les Sunnites ont réagi à leur tour en attaquant les miliciens du Hezbollah et en entrainant une chaine de violence qui supprime toute chance de coexistence entre communautés. Les Chrétiens sont à présent convaincus que l’alibi du Hezbollah tendant à faire croire qu’il existe pour résister et combattre «l’occupation israélienne de la Palestine» ne tient plus alors qu’en fait ses armes sont dirigées contre les populations libanaises.
En
fait la survie du régime de Bachar Al-Assad passe par une escalade de la
violence au Liban. L’assassinat du dirigeant de la coalition sunnite libanaise,
Mohamed Chatah, entre dans sa stratégie d’enflammer le Liban. Il ne fait aucun
doute que les commanditaires, sinon les exécutants de l’attentat, appartiennent
au Hezbollah. L’ex-premier ministre, Fouad Siniora, en est convaincu : «Le meurtrier est le même, celui
qui est assoiffé de sang syrien comme de sang libanais de Beyrouth à Tripoli et
dans l’ensemble du Liban, le meurtrier est le même, lui est ses alliés
libanais, de Deraa, à Alep, à Damas, à toute la Syrie».
Dans cette anarchie, les Iraniens continuent à attiser une situation qui vire au désordre et à la violence. Ils visent toutes les personnalités charismatiques capables de diriger efficacement le Liban. Les économistes, les anciens diplomates en poste aux États-Unis, les fonctionnaires du FMI et les anciens ministres restent donc dans la ligne de mire des tueurs du Hezbollah.
Dans cette anarchie, les Iraniens continuent à attiser une situation qui vire au désordre et à la violence. Ils visent toutes les personnalités charismatiques capables de diriger efficacement le Liban. Les économistes, les anciens diplomates en poste aux États-Unis, les fonctionnaires du FMI et les anciens ministres restent donc dans la ligne de mire des tueurs du Hezbollah.
Mais le paradoxe tient dans
le fait que les autorités du Liban, et les Chrétiens en particulier, continuent
de vouer Israël aux gémonies au lieu de rechercher des alliances parmi les
défenseurs de l’Occident. Ils ne se rendent pas compte qu’ils font le jeu du Hezbollah et de
l’Iran qui poursuit ses gesticulations politico-médiatiques. L'accord sur le nucléaire conclu à Genève constitue l'amorce
d'un processus qui a pour finalité de faire passer l'Iran du stade d'un État terroriste,
prônant l'extrémisme et le fondamentalisme, au stade d'un pays moderne, ouvert
sur le monde. Mais le Hezbollah ne suivra pas l’Iran dans cette voie car sa
vocation est de propager la mort. Israël en est conscient, surtout que le danger est à
ses frontières.
Le monde occidental assiste impuissant à la mort du Liban .Par la terreur la Hezbollah impose sa loi criminelle élaborée par les non moins criminels iraniens !
RépondreSupprimerExcellent titre en tous cas!... Mais le terme "libanisation" montre bien que s'il est un pays illégitime dans cette région c'est d'abord le Liban. Pourtant dans les instances internationales et à l'UE, personne ne " délégitimise " le Liban. On ne pense qu'à déligitimer Israël. Et l'on n'entend qu'un seul son de cloche: " sauver l'unité du Liban"... Quelle foutaise! Comme la société palestinienne de 1948, la société libanaise est une société clanique. Les moeurs y sont féodales et maffieuses. L'illusion de la bi-confessionalité n'aura duré qu'une trentaine d'années. Il n'y a que deux nations véritables dans cette région: l'Egypte et israël. Tous les autres pays ne sont que des mosaïques artificielles d'agrégats ethniques.
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