NETANYAHOU VEUT JOUER LA CARTE DE MOHAMED DAHLAN
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
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Haniyeh, Abbas et Dahlan |
Nous avons soulevé à plusieurs reprises le cas de Mohamed Dahlan pressenti comme recours pour jouer à nouveau un grand rôle au sein de l’Autorité palestinienne. Avec la chute des Frères musulmans au Caire et l’affaiblissement du Hamas à Gaza, l’ancien dirigeant palestinien estime qu’il est temps pour lui de refaire surface sur la scène politique. Il avait été, durant plusieurs années, ministre et haut responsable de la sécurité de l’Autorité palestinienne. Le premier ministre Benjamin Netanyahou semble à présent vouloir jouer la carte de Mohamed Dahlan pour de débarrasser de Mahmoud Abbas.
En tant que combattant
du Fatah, il avait connu les prisons israéliennes où il a appris couramment
l'hébreu ce qui lui facilite les contacts avec le gouvernement israélien.
Longtemps homme fort à Gaza, il est qualifié d’habile politicien et de rempart
contre les islamistes qui le considèrent comme l’homme à abattre. Il avait été
sacrifié par Mahmoud Abbas sur l’autel de la réconciliation avec le Hamas et
avait été contraint à l’exil en Jordanie en 2011. Depuis il vit dans un exil
doré entre Amman, le Qatar et les Émirats.
Mohamed Dahlan, symbole
de la collaboration arabo-américano-israélienne, rêvait d’occuper le poste de
vice-président qu’il n’a jamais obtenu. Il sort à présent de l’ombre car il
sent que la situation pourrait tourner en sa faveur devant la montée des
mécontentements à la fois en Cisjordanie et à Gaza. En effet la fermeture partielle
du passage de Rafah, la destruction des tunnels de contrebande et l’isolement
du Hamas ont créé une situation économique dramatique qui est pour l’instant
sauvée par une collaboration économique tacite avec Israël.
Après avoir gardé le silence durant plusieurs années, il a publié plusieurs
communiqués où il accuse le Hamas de se présenter comme «seul représentant
du peuple palestinien et de vouloir éliminer le Fatah et l’OLP de la scène
internationale». Il pense que le pourrissement de la situation risque
d’offrir «la possibilité au Hamas d’annoncer la création d’un émirat dans la
bande de Gaza».
Il s’estime seul capable, avec ses miliciens formés par la CIA en Jordanie, d’éradiquer le Djihad islamique au Sinaï et à Gaza. Il dispose en effet d’une structure paramilitaire financée par George W. Bush, la CIA et même le Mossad. C’est pour cela que Mohammed Nazal, membre du bureau politique du Hamas, l’accuse de travailler pour les services de renseignements israéliens et de leur transmettre des informations sur certains membres du Hamas à Gaza.
Il s’estime seul capable, avec ses miliciens formés par la CIA en Jordanie, d’éradiquer le Djihad islamique au Sinaï et à Gaza. Il dispose en effet d’une structure paramilitaire financée par George W. Bush, la CIA et même le Mossad. C’est pour cela que Mohammed Nazal, membre du bureau politique du Hamas, l’accuse de travailler pour les services de renseignements israéliens et de leur transmettre des informations sur certains membres du Hamas à Gaza.
Expert illuminé
Mohamed Dahlan
est un nationaliste convaincu que le régime de Gaza nuit aux intérêts de tous
les palestiniens en maintenant une partition entre la Cisjordanie et Gaza. Il
justifie donc son activisme pro-occidental par la nécessité de donner à
l’Autorité les moyens financiers et militaires pour étendre son pouvoir à Gaza.
Certains le considèrent comme un illuminé parce qu’il avait, en tant que
ministre, présenté à son comité central un plan d’invasion de Gaza pour
restaurer le pouvoir de l’Autorité palestinienne grâce à la collaboration avec
les experts sécuritaires jordaniens, israéliens et même égyptiens.
Mais le coup d’État des islamistes, en 2007 à Gaza, fut un échec cuisant et la fuite des généraux du Fatah vers l’Égypte n’avait pas été perçue comme une preuve de courage. Dahlan avait alors engagé ses troupes dans une guerre de renseignements contre Al-Qaeda pour s’attirer les faveurs américaines.
Coup d'Etat du Hamas en 2007 |
Mais le coup d’État des islamistes, en 2007 à Gaza, fut un échec cuisant et la fuite des généraux du Fatah vers l’Égypte n’avait pas été perçue comme une preuve de courage. Dahlan avait alors engagé ses troupes dans une guerre de renseignements contre Al-Qaeda pour s’attirer les faveurs américaines.
Aujourd’hui des
informations en provenance du Fatah confirment que plusieurs militants ont poussé le président Mahmoud Abbas à modifier sa position vis-à-vis de Dahlan. Par ailleurs, les Émirats arabes unis et l’Égypte
ont joué les médiateurs pour les réconcilier car ils pensent que Dahlan est celui qui pourrait apporter un
changement à Gaza. Dans une vidéo postée sur You Tube le 28 octobre 2013, Mohamed Dahlan vient de confirmer que trois
personnalités de premier plan ont servi d’intermédiaires : Yasser Abed
Rabbo, secrétaire du Comité exécutif de l'OLP, Said Khoury, homme d'affaires
palestinien installé aux Émirats arabes unis, et l'ambassadeur de Libye en
Jordanie.
Réconciliation
pour motif financier
Mahmoud Abbas
ne se plierait pas à cette réconciliation de bonne grâce car la rancune est
tenace mais il aurait besoin des Émirats, où Dahlan est installé, pour obtenir
un financement des riches Arabes du Golfe. L’autorité palestinienne traverse
une crise financière grave parce que tous les engagements économiques pris par
les États du Golfe, à l’occasion des sommets de la Ligue Arabe, n’ont pas été
respectés.
Dahlan, grâce à son expérience dans la gestion sécuritaire, est devenu un conseiller officiel des Émirats et en particulier de Moubarak Al Nahyan, héritier au trône d'Abou Dhabi et commandant adjoint des forces armées des Émirats Arabes Unis. Par ailleurs les Égyptiens pensent qu’il est l’expert militaire capable de résoudre les problèmes sécuritaires au Sinaï et l’homme fort pour verrouiller la frontière avec Gaza.
Moubarak Al Nahyan |
Dahlan, grâce à son expérience dans la gestion sécuritaire, est devenu un conseiller officiel des Émirats et en particulier de Moubarak Al Nahyan, héritier au trône d'Abou Dhabi et commandant adjoint des forces armées des Émirats Arabes Unis. Par ailleurs les Égyptiens pensent qu’il est l’expert militaire capable de résoudre les problèmes sécuritaires au Sinaï et l’homme fort pour verrouiller la frontière avec Gaza.
Dahlan décoré par le président serbe en tant que représentant des Emirats |
Il n’est pas
certain que les ennemis de Dahlan au sein du Comité central du Fatah faciliteront son retour parce que les
appétits politiques se font plus intenses face à la succession ouverte de
Mahmoud Abbas à la tête de l’Autorité. Mais Dahlan a l’avantage d’être à la
fois un expert politique et militaire qui pourra sortir l’Autorité des sentiers
politiques habituels. Il a l’oreille des Américains et des Israéliens et
représente la nouvelle vague des dirigeants palestiniens. Il rappelle souvent
avec fierté les onze arrestations qu’il a subies de la part des forces israéliennes
même s’il a choisi de trouver un arrangement avec Israël.
Comité central du Fatah |
Deux clans antagonistes
Mohamed Rashid |
Les guerres intestines au sein du peuple palestinien risquent d’être un blocage pour son retour. Par ailleurs un certain nombre de dirigeants palestiniens corrompus ne souhaitent pas perdre leur part de gâteau à l’instar de Muhammad Rashid, condamné par contumace pour avoir détourné 34 millions de dollars à l’Autorité palestinienne. The Sunday Times a révélé par ailleurs le 13 octobre 2013 que 2,3 milliards d’euros ont été transférés de l’Union Européenne aux Palestiniens, sans que soit contrôlé leur usage. Les contrôleurs de la Cour des comptes accusent l’Union européenne, qui connait le «très haut niveau» de risque de corruption de l’Autorité palestinienne, de n’avoir pris aucune mesure pour vérifier que les fonds versés étaient utilisés selon le programme planifié.
Cour des comptes de l'UE |
Mohamed Dahlan est à nouveau dans l’attente que son rôle de recours
soit reconnu. Son avenir politique dépend en particulier de l’état d’avancement
des pourparlers israélo-palestiniens qui, selon les dernières indiscrétions,
sont dans l’impasse au point que Saeb Erakat, le négociateur palestinien, ait
présenté puis retiré sa démission.
Mahmoud
Abbas a anticipé l’arrivée éventuelle de Dahlan en écartant ses partisans dans les
services de sécurité, les ambassades et les ministères. Il a donné ordre de
limiter leurs déplacements à l’étranger, au Liban en particulier, et dans les
camps de réfugiés. D'ailleurs la femme de Dahlan, Jalila, n’a pas été autorisée à entrer dans un camp
palestinien au Liban. Bref tous les
sympathisants de Dahlan sont tricards dans les rouages de l’Autorité palestinienne.
Mais
la force de Mohamed Dahlan est que, contrairement à Mahmoud Abbas, il dispose
de nombreux relais parmi les Palestiniens de l’étranger qui n’apprécient pas la
corruption généralisée des dirigeants de l’intérieur. Il peut compter sur le
soutien important de Marwan Barghouti, emprisonné en Israël, qui dispose
toujours d’une grande influence en tant qu'ancien chef armé du Fatah. Il est persuadé qu'il pourra obtenir des Israéliens son élargissement pour constituer avec lui un duo solide capable de faire avancer les négociations.
Les
tentatives de réconciliation ayant échoué, les attaques fusent de plus belle. Dahlan
a accusé Abbas «de ne pas s'acquitter de ses responsabilités envers les
Palestiniens et de les laisser se vautrer dans la pauvreté, ce qui oblige
certains d'entre eux à travailler dans la construction de colonies israéliennes».
Il se considère le plus qualifié pour occuper la présidence de l’Autorité en
tant qu’ancien proche de Yasser Arafat, alors que tous les membres fondateurs
du Fatah sont morts. Contrairement à Abbas, il est sûr de pouvoir apporter à la fois la
sécurité en Cisjordanie et à Gaza et surtout l’argent nécessaire pour remonter
l’économie palestinienne. Il estime que le président actuel est trop faible pour s’opposer
aux constructions israéliennes dans les territoires.
Les
dissensions internes au Fatah s’expriment à présent au grand jour puisque deux
clans se sont créés en raison de la rivalité d’Abbas et de Dahlan ce qui fait l’affaire
du Hamas qui montre une organisation unie et disciplinée. Nul ne sait qui sortira vainqueur d'un combat qui ne pourra être arbitré que de l'étranger.
Ceci n'empêche pas de penser que Dahlan soit un politicien ambigüe et ambitieux. Mais est-il le seul en Palestine ?
RépondreSupprimerLa gestion des conflits politiques par la kalachnikoff n'est pas très... disons, démocratique.
Toujours cette puérile recherche d'un "roitelet indigène" vénal et corrompu qui serait à notre botte ... Un fantasme qui retarde d'un siècle sur l'Histoire.
RépondreSupprimerPeut importe la personne, ils sont tous déterminer à ne jamais vouloir la paix ...
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