Frontière Egypte-Israël |
Tout le monde se souvient du dicton qui dit que l’on reconnait ses
amis dans la diversité ou dans le malheur. L’armée égyptienne n’avait pas
apprécié que Hosni Moubarak n’ait reçu aucun soutien américain lorsqu’il était
dans la détresse alors qu’il avait joué à plein la carte américaine. Elle n’avait
pas apprécié non plus le soutien affiché aux Frères musulmans à l’avènement de
Mohamed Morsi, caractérisé par une totale neutralité durant le soulèvement de la
population pour s’opposer au régime islamique. L’armée égyptienne qui fait face
à de sérieux troubles dans le Sinaï a donc discrètement décidé de remplacer les
Américains par les Israéliens comme alliés dans la région, au moins comme
alliés militaires.
Djihadistes dans le Sinaï
Les djihadistes
infiltrés depuis de longs mois au Sinaï, équipés par le matériel en provenance
des arsenaux libyens et renforcés par des militants du Hamas et des combattants
étrangers en rupture d’alliance depuis la chute de Mohamed Morsi, ont décidé de
mener des actions terroristes pour déstabiliser le nouveau régime égyptien avec
l’espoir de le faire tomber pour remettre Mohamed Morsi au pouvoir.
Frontière de Rafah |
D’ailleurs des explosions ont eu lieu le 11 septembre dans le
désert égyptien. Deux attentats à la bombe ont visé l'armée égyptienne dans le
Sinaï, où les militaires ont lancé ces derniers jours une offensive contre des
groupes d'insurgés islamistes. Un premier engin a provoqué une «puissante
explosion » devant le quartier général des services de renseignements
de l'armée à Rafah, la ville-frontière avec le territoire palestinien de la
Bande de Gaza. Quelques minutes après, une seconde détonation a touché un poste
militaire de contrôle routier dans la même ville, forçant l’armée à fermer le
point de passage pour plusieurs jours. Les attaques visant les forces de
l'ordre se sont multipliées dans le Sinaï. L'armée a riposté en y lançant une
offensive d'envergure il y a plus d'une semaine, bombardant
quasi-quotidiennement les repaires d'insurgés djihadistes qu'elle considère
comme des «terroristes».
Opération égyptienne |
Collaboration israélienne
Israël sait que
l’anarchie qui règne au Sinaï pourrait avoir des répercussions sérieuses sur sa
sécurité à la frontière sud avec des éventuelles attaques au sol et des tirs de
missiles sur la ville balnéaire d’Eilat. Si la situation empirait, il n’aurait
d’autre solution que d’envoyer les tanks israéliens pour nettoyer les nids de
djihadistes qui ont été réactivés après plusieurs mois de présence dormante.
Mais il préfère que les Égyptiens s’en chargent eux-mêmes, d’une part pour ne
pas créer de situation irréversible en réoccupant le Sinaï et d’autre part,
pour redorer le blason d’une armée qui subit des pertes importantes à l’occasion
d’attentats sanglants.
Ville balnéaire d'Eilat |
C’est pourquoi
une nouvelle coopération entre les deux armées s’est installée. Elle existait d’ailleurs
selon les termes mêmes du traité de paix de 1979 mais elle prend aujourd’hui
plus d’ampleur et revêt un sens politique profond. Les deux parties veulent
ignorer les termes du traité de paix qui limitent la présence militaire
égyptienne au Sinaï. Les services de renseignements collaborent. Les satellites
israéliens diffusent les images d’une zone sous contrôle djihadiste. Les drones
israéliens complètent de manière précise les mouvements des terroristes entre
leurs caches. Cette coopération s’effectue sans l’arbitrage des États-Unis qui
ont été mis volontairement hors course par les Égyptiens. Certes Barack Obama a
maintenu totalement l’aide militaire mais il semble écarté de la stratégie de
sécurité régionale.
États-Unis hors course
Les États-Unis n’ont
pas senti venir les révolutions arabes et se sont complètement trompés dans la
gestion de ces changements brutaux. Ils semblent désemparés devant une évolution qu'ils ne contrôlent plus. Leur ignorance de la véritable situation
les a écartés de la gouvernance des régions qui ont subi des changements
sismiques. Ils ont perdu leur crédibilité à la fois auprès des Égyptiens mais
aussi des Israéliens et ce n’est pas le traitement de la crise syrienne qui va rehausser
l’image de marque américaine.
Alors le Caire et Jérusalem, sans faire de
publicité démesurée et dans le silence des quartiers généraux militaires, ont
préféré régler en amis les problèmes qui secouent la région. D’ordinaire les Américains
servaient d’intermédiaires dans les relations froides entre les anciens belligérants
mais ils ont à présent décidé de prendre en mains leur avenir et leurs
relations militaires.
Al-Sissi |
Le président
Barack Obama ne voit pas d’un bon œil cette mise sur la touche par ses deux
alliés dont l’un, l’Égypte, ne se considère plus comme tel. Israël est en train de bâtir un partenariat
sécuritaire et politique avec le général Abdel Fatah Al-Sissi qui a compris que
son régime ne sera définitivement consolidé qu’après l’éradication de l’abcès
djihadiste au Sinaï. Il a compris que les intérêts avec Israël était communs et
que l’imprimatur américaine n’était plus d’actualité. Il a surtout compris qu’il
ne risquait pas un revirement d’attitude de la part de son partenaire comme
celui auquel il avait assisté du temps de Moubarak. Après la froideur des
accords de 1979 qui freinaient la résolution des problèmes locaux, une nouvelle
ère s’ouvre entre l’Égypte et Israël.
Moyens militaires accrus
Renforts égyptiens au Sinaï |
Les deux
nouveaux partenaires vont d’abord régler le problème du Sinaï qui connait une insurrection
de grande ampleur mettant en danger le gouvernement et la sécurité du pays en
entier et celle d’Israël. Il n’est pas impossible que l’Égypte décide de s’occuper
ensuite de la situation à Gaza où des dirigeants des Frères musulmans se sont
enfuis pour continuer le combat en suscitant des troubles au Sinaï. L’objectif
d’Al-Sissi est d’éradiquer toute contestation venant de la bande. Il pourrait
se servir de la carte de l’ancien homme fort du Fatah à Gaza, Mohamed Dahlan,
qui piaffe d’impatience avec ses miliciens formés en Jordanie par la CIA et qui
cherche à reprendre le pouvoir dans son fief de Gaza dès qu’on lui en donnera l’ordre.
Hélicoptère Apache |
Israël a
accepté les demandes égyptiennes d’accroitre les moyens militaires au Sinaï
interdits par le traité de paix. Une division de 5.000 hommes est entrée avec
de nouveaux tanks, de nouveaux avions et de nouveaux hélicoptères Apache qui
contrôlent et surveillent le Sinaï et la bande de Gaza. Israël compte sur ces nouvelles forces pour
tarir la contrebande d’armes et de missiles qui traversaient les tunnels de
Gaza.
Les Égyptiens songent aussi, avec l’aide israélienne, de remettre en cause la présence inutile américaine au Sinaï de la Force Multinationale d’Observateurs (MFO) dont le rôle était précisément de veiller au respect du traité de 1979. Cette force est fragile car elle reste une cible pour les djihadistes et elle a souvent subi des attaques sans pouvoir riposter.
Le secrétaire d'Etat américain visite la MFO |
Les Égyptiens songent aussi, avec l’aide israélienne, de remettre en cause la présence inutile américaine au Sinaï de la Force Multinationale d’Observateurs (MFO) dont le rôle était précisément de veiller au respect du traité de 1979. Cette force est fragile car elle reste une cible pour les djihadistes et elle a souvent subi des attaques sans pouvoir riposter.
Israël et l’Égypte s’estiment grands aujourd’hui pour régler leurs
problèmes bilatéraux sans l’aide d’un tiers.
http://www.tribunejuive.info/israel/lune-de-miel-entre-israel-et-legypte
http://www.tribunejuive.info/israel/lune-de-miel-entre-israel-et-legypte
Bon article.
RépondreSupprimerVoilà des très bonnes nouvelles.
Il faut souhaiter que cette coopération se poursuive et s'etende aussi à d'autres voisins que l'Egypte afin que les peuples de la région deviennent plus autonomes en évacuant doucement mais sûrement les impérialismes d'hier (c'est quasiment fait pour la France et la GB) soucieux de leurs intérets qui ne coincident plus vraiment avec les nôtres.
D'autres partenariats pourraient etre plus fructueux avec l'Asie hors d'une main mise politique et économique de plus en plus pesante.
RépondreSupprimerNest-il pas dangereux de faire des accrocs dans le traité de paix entre l'Egypte et Israel? Souhaitons que non , et souhaitons que nous ne servions pas seulement à sortir les marrons du feu
,
RépondreSupprimerCher monsieur Benillouche,
Pendant que le monde entier a les yeux rivés sur la Syrie, voilà que vous nous apprenez que Israël et l'Egypte vont coopérer, hors des influences étrangères, pour régler les problèmes qui se posent à leurs deux nations.
On ne peut que leur souhaiter tout le succès que leur courage mérite.
Très cordialement.
Bonne nouvelle, merci
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