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samedi 25 février 2023

Judée-Samarie ou Galilée ou Néguev


JUDÉE-SAMARIE OU GALILÉE OU NÉGUEV


Par Jacques BENILLOUCHE

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Un bulldozer sur un chantier de construction à Ramat Shlomo

          Le gouvernement israélien vient d’approuver la construction de 9.000 nouveaux logements en Cisjordanie et vient d’y reconnaitre officiellement neuf nouvelles villes. Ces nouveaux logements se répartissent ainsi : 1.100 à Ma'ale Adumim, 600 à Tel Zion, 500 à Givat Ze'ev et 400 à Kedumim et Elazar. Des appels d’offres seront publiés pour 2.377 nouveaux logements supplémentaires. La décision a été prise par le ministère de l’intérieur ; il ne reste plus qu’à l’appliquer. Par ailleurs, il est question de réunir plusieurs implantations pour créer une nouvelle ville, entre Etz Efraim, Sha'arei Tikva, Oranit et Elkana qui comprennent ensemble 22.000 habitants. Le but est d’occuper tous les espaces libres entre ces villes pour créer une continuité.


La ministre des Affaires étrangères du Canada, Mélanie Joly,


Le ministère des finances a trouvé les millions de shekels pour investir dans ces nouveaux projets. Les conséquences politiques d’une telle construction sont ignorées pour satisfaire les intérêts non stratégiques des implantations. La levée de boucliers à l’étranger est unanime. Les principaux pays européens dénoncent cette décision israélienne de construire en Cisjordanie : «Nous - les ministres des Affaires étrangères de la France, de l'Allemagne et de l'Italie, le ministre des Affaires étrangères du Royaume-Uni et le secrétaire d'État des États-Unis - sommes profondément troublés par l'annonce du gouvernement israélien selon laquelle il avance près de 10.000 unités de colonisation et a l'intention d’entamer un processus de normalisation de neuf avant-postes qui étaient auparavant considérés comme illégaux par la loi israélienne. Nous nous opposons fermement à ces actions unilatérales qui ne feront qu'exacerber les tensions entre Israéliens et Palestiniens et saper les efforts visant à parvenir à une solution négociée à deux États. Nous continuons à soutenir une paix globale, juste et durable au Moyen-Orient, qui doit être réalisée par des négociations directes entre les parties. Israéliens et Palestiniens méritent tous deux de vivre en paix, avec des mesures égales de liberté, de sécurité et de prospérité. Nous réaffirmons notre engagement à aider les Israéliens et les Palestiniens à concrétiser la vision d'un Israël pleinement intégré au Moyen-Orient vivant aux côtés d'un État palestinien souverain et viable. Nous continuons de suivre de près les développements sur le terrain qui ont une incidence sur la viabilité de la solution à deux États et stabilité dans l'ensemble de la région».

            Mais la question fondamentale qui se pose est l’urgence à judaïser la Galilée et le Néguev pour accroître la population juive dans des régions à majorité arabe. Cette politique de «judaïser la Galilée» fut approuvée pour la première fois par le cabinet israélien en mars 1949. Au début des années 1950, l'Agence Juive et Tsahal avaient coordonné leurs efforts pour augmenter le nombre de Juifs vivant en Galilée, pour y créer une majorité juive, pour réduire l’influence arabe et pour empêcher la formation d'un noyau de nationalisme arabe au sein de l'État juif. Cela avait incité le gouvernement à créer la nouvelle colonie juive de Nazareth Illit, et la nouvelle ville juive de Carmiel.

 est une ville israélienne de population arabe et druze


            Le gouvernement avait alors fait de sérieux efforts pour attirer la migration juive dans les zones ciblées par la politique de judaïsation ; les ressources publiques ont été mobilisées pour offrir des incitations sous forme d'allégements fiscaux, de subventions foncières et de logement, de prêts à faible taux d'intérêt et d'aide au loyer. Des subventions directes d'établissement ont également été offertes et des infrastructures régionales ont été développées pour soutenir les localités juives établies. Ce projet a été renouvelé dans les années 1970. Mais l’économie d’Israël n’était pas encore florissante comme aujourd’hui et faute d’investissements et d’emplois, le résultat fut un échec et cela aggrava la croissance continue de la population arabe.

chantiers de construction autour de Givat Zeev et Ramat Givat Zeev en Cisjordanie


            Les efforts de judaïsation en Galilée et au Néguev se sont poursuivis au milieu des années 1990 car au cœur de la Galilée, les Arabes représentaient encore 72% de la population. Le Conseil régional de planification avait à nouveau appelé en 1995 à augmenter la population juive pour «perturber toute continuité géographique palestinienne». Mais le gouvernement n’avait pas prévu que la croissance de communautés mixtes arabo-juives allait faire capoter les projets. Les Israéliens prospères quittèrent la Galilée pour être remplacés par des Arabes qui ont pris possession des logements destinés aux Juifs, dès lors que ces derniers ne se sont pas installés dans la région comme prévu. Les Arabes, qui subissaient des restrictions dans leurs propres villages, ont acheté de plus en plus d’unités dans les villes juives, 20% à Hof Hagalil (ex-Nazareth Illit) et 10% à Carmiel.

Restaurant Buri à Akko après sa destruction par la foule arabe israélienne, le 13 mai 2021


            La Galilée est très vaste, encadrée par les villes du Golan, de Bet-Shean, d’Akko et de Safed. Les Juifs représentent 43.4% de la population et 34% sans Bet-Shean et le Golan. Majoritaires, les Arabes ne s’identifient pas à l’État d’Israël, se plaignant d’un vide étatique qui empêche les villes et villages arabes de ressembler aux villes juives. Une certaine anarchie administrative y règne puisque les constructions s’effectuent sans permis et que les travaux d’aménagement urbain sont au point mort. C’est dans ce terreau que le mouvement islamique israélien a prospéré parce que les disparités juifs-arabes créent des tensions permanentes.

            La question cruciale se pose donc de savoir s’il faut concentrer les efforts sur les villes de l'Israël historique avant de développer des nouvelles villes en Cisjordanie. Pour cela il faut débloquer des investissements et favoriser des incitations fiscales et financières, les mêmes qu'en Cisjordanie, pour amener des Juifs dans de nouvelles villes de développement franches où la vie serait moins chère. En négligeant l’Israël historique, on risque de perdre des pans entiers de villes entièrement arabisées avec le risque de les voir aux mains des intégristes, à l’instar de Oum El-Fahm où aucun Juif ne s’y aventure. La Galilée comporte pourtant d’énormes potentiels industriels, de l’espace et un passé pionnier qui a fait les belles heures de l’Histoire d’Israël.

Rahat, ville arabe Negev


            Le Néguev est dans la même trajectoire. Il constitue 60% de la surface de l'État d'Israël mais n'abrite que 8% de sa population, dont une forte communauté de Bédouins (25% de la population régionale) qui représentent 160.000 personnes. Rien n’a été fait en 2005 pour créer une ville nouvelle qui aurait pu recevoir les évacués de Gaza qui tenaient à se retrouver ensemble. Certains, et ils sont nombreux, s’entêtent à vivre dans des caravanes à la limite de Gaza alors qu’avec les nouvelles techniques israéliennes de l’eau, la place était large pour reconstituer leurs serres dans un espace illimité. Ils auraient pu être suivis par de nombreux Juifs tentés par une nouvelle vie pionnière, loin de l’agressivité de la vie citadine et dans un environnement conforme à leurs revenus.

            Ben Gourion avait été un prophète en s’installant le premier au Néguev, à Sde Boker. Visionnaire, il avait compris que l’avenir et la sécurité du pays passaient par le développement du désert israélien. Et pourtant à l'époque, le confort de la vie n’avait pas été amélioré grâce à l’électricité solaire, aux climatiseurs ainsi qu’aux techniques nouvelles israéliennes pour exploiter au mieux l’agriculture avec les eaux saumâtres.  Certes l’armée a décidé de transférer toutes ses bases et services de Tel-Aviv vers le Néguev mais cela doit s’accompagner par un déménagement de certaines administrations civiles pour meubler le désert et par des constructions de logements pour les civils.

Ben Gourion à Sdé Boker


            Le gouvernement doit satisfaire, avant tout, les désiderata de ses nationalistes, les religieux sionistes et orthodoxes, qui pour des raisons opposées misent sur la Cisjordanie. Cela signifie également un énorme investissement budgétaire israélien en Cisjordanie. Mais les ministres n’ont pas seulement un aveuglement nationaliste ; leur sentiment anti-arabe est poussé au paroxysme au point de ne pas mesurer le danger d’abandonner une grande partie du pays à la seule communauté musulmane au détriment de la judéité de certaines régions. À force de développer la Cisjordanie, on régresse en Israël. Pourtant, l’urgence est de consolider notre pays avant de se disperser ailleurs.

  

7 commentaires:

  1. Excellente analyse.
    Le problème ultra existentiel en Israël est la démographie. C'est la clé de voute d'un état juif dans la région.
    Comme vous le dites si bien, Jacques, il faut peupler prioritairement ces 2 régions avant d'aller s'aventurer en Judée/Samarie.

    Le pragmatisme et la raison doivent l'emporter sur l'idéologie !
    Autrement, la majorité juive actuelle deviendra rapidement une minorité juive...

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  2. Tous ces plans d'urbanisme et d'implantations de'Israeliens juifs se basent sur des considerations bibliques. Le Neguev n'a jamais ete juif du temps de la Bible et les Juifs de Galilee etaient soupconnes de tous les maux et de deviations religieuses.
    Si bien que malgre l'implantation massive dans la region cotiere (ancienement philistine) et a Jerusalem centre du nationalisme juif, politique et religieux, il ne restait plus que la Cisjordanie (La Judee et la Samarie n'etant pas annexees par Israel, il faut appeler un chat un chat) a peupler massivement. Les prix exorbitants des logements dans la region cotiere pousserront tres certainement pas mal de gens a s'installer a bas prix dans ces nouvelles colonies.
    Le probleme que les religieux, qui ne sont pas de veritables nationalistes mais qui se basent sur des references bibliques et talmuiques) ont, plus ou moins conscemment sacrifieer la Galilee et le Neguev. Et vu la politique israelienne systematique de ne pas accorder des permis de construire aux citoyens arabes, ceux ci ont trouve le moyen pour tourner le probleme: ils achetent aux Juifs installes dans ces regions leurs proprietes et deja certains villages galileens comportent en leur sien de novelles populations arabes, comme Poriya Ilit et Moshavat Kinneret (villages voisinsqui pourront etre facilement relies pour consituer un centre urbain rivalisant avec Tiberiade et rendant difficile la coexistence avec les kibboutzim de la Vallee du Jourdain.
    Dans le Neguev, les Bedouins entretiennent conscieusement l'insecurite afin de decourager toute judaisation.

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  3. David,

    Avec Smotrich et Ben Gvir au pouvoir, on peut s'attendre a des actios violentes des juifs implantes dans les territoires. Rien qu'aujourd'hui l'evacuatuin d'une vigne a cree de vives tensions avec Bibi, avec menace de ne plus soutenir la rforme judiciaire destinee essentiellement a innocentr Bibi, Derhy et autres malfrats politiques, ni plus ni mons!!!

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  4. Description et analyse d'une donnée historico-demographique très instructive et fondamentale, apparemment mal connue, qui mériterait d'être plus largement communiquée au grand public, comme aux décideurs

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  5. Une très bonne analyse ,mais le problème est plus profond .Le réservoir aux candidats de l'alyah est presque vide ,et n'iront jamais en Galilée ou Néguev ,ni en Cisjordanie ,ou Judée Samarie .Et pendant ce temps les arabes sont toujours de plus en plus nombreux ,et tout le monde s'en tape ,comme le vivre ensemble est dernière nous .

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  6. Nous sommes d'accord : l'Etat n'a pas su réaliser entièrement ses objectifs en Galilée et au Néguev. Il serait assez naïf de croire que l'on pourra facilement "corriger" ce qui a été gauchi dans ces deux régions : la correction se fera d'elle-même au fil du temps, ou elle ne se fera pas. Par contre, l'urgence actuelle est de prendre place en Judée et Samarie. Faute de quoi, cet espace sera occupé par d'autres. C'est comme aux échecs : en avançant d'entrée de jeu plusieurs pions de deux cases, et en les protégeant sur leurs arrières, on décourage l'adversaire de s'avancer. En fait, la comparaison avec le jeu d'échecs n'est pas pertinente. Ce que nous essayons de faire en Judée-Sam s'apparente davantage au jeu de go (voyez Wipipédia si vous ignorez tout de ce jeu qui nous vient de l'extrémité de notre continent).

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  7. @G.Kabi : Vous écrivez "Avec Smotrich et Ben Gvir au pouvoir, on peut s'attendre a des actios ["n" oublié ! Relisez-vous avant d'envoyer !] violentes des juifs implantes dans les territoires". Ce à quoi je réponds : et alors ? Croyez-vous donc que les premières implantations du peuple juif (qui s'appellent maintenant Jerusalem, Tel-Aviv, Haïfa, Sfat, Nahariya, Beer-Sheva, Pardess-Hanna, etc..) se sont faites dans le chalom, avec l'assentiment joyeux de nos voisins ? La guerre d'indépendance n'est pas finie. Un changement de politique s'accompagne toujours de turbulences. Mais ces turbulences ne signifient pas que le changement initié est infondé.
    Autre chose : pourquoi refusez-vous d'appeler la Judée-Samarie par son nom ? En préférant l'appellation de "Cisjordanie", vous rejoignez tous les antisémites-antisionistes qui nous accusent de vouloir voler un pays qui ne nous appartient pas. Cette accusation a été réfutée il y a dix siècles par Rachi, dans son commentaire sur le premier verset de la Tora (Béréchit 1,1) : "Quand les nations diront à Israël "Vous êtes des voleurs car vous avez acquis ces terres par la violence..." les juifs leur répondront "Toute la terre appartient à D.ieu, Il l'a créée, et Il l'a donnée à qui est droit à Ses yeux. Il la leur a donnée [à d'autres peuples] et par Sa volonté Il la leur a reprise et nous l'a donnée." N'ayons pas honte d'être juifs ! Acceptons que deux mille ans d'exil nous ont déjudaïsés ! Arrêtons de juger Israël en utilisant les concepts de nos ennemis ! Ayons l'humilité de reconnaître que nous savons bien peu de choses sur l'identité et la mission d'Israël ! Et arrêtons de critiquer ceux qui essaient de réaliser la Promesse que cette terre est bien à nous !

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