BIDEN VEUT IMPOSER À L’ARABIE LA NORMALISATION
AVEC ISRAËL
Par Jacques BENILLOUCHE
accords d'Abraham |
La guerre
d’Ukraine a entrainé la hausse des cours mondiaux de l’énergie qui donne à MbS
une position de force sur le plan économique. Mais il sait que sa position
politique est faible et même contestée tandis que sa structure militaire est
fragile, voire défaillante, surtout face à l’Iran. Les États-Unis négocient un
accord entre l’Arabie, l’Égypte et Israël. L’accord
vise à transférer, du Caire à Riyad, deux îles stratégiques de la mer
Rouge pour susciter des arrangements en matière de
sécurité entre Israël et l’Arabie saoudite et créer des liens chaleureux entre
les deux pays. Le problème reste que l’Arabie a adopté pour principe
inébranlable de n’établir des relations avec Israël qu’au lendemain d’un
solution politique acceptée par les Palestiniens.
Le
coordinateur pour le Moyen-Orient de la Maison-Blanche, Brett McGurk, négocie le
transfert de l’Égypte à l’Arabie saoudite des deux îles Tiran et Sanafir, situées à un point
stratégique entre les ports d’Aqaba et d’Eilat. Ces îles avaient été
occupées par Israël lors de la guerre des Six-Jours en 1967, puis remises à
l’Égypte en 1982 à l’occasion des accords de paix de camp David. L’Arabie saoudite revendique depuis longtemps la
propriété de ces îles qu’elle s’est engagée à ne pas militariser et à garantir
la liberté de navigation. Il y a eu déjà des avancées puisqu’Israël utilise l’espace
aérien d’Arabie pour écourter les vols vers l’Inde, la Thaïlande et la Chine
tandis que l’Arabie saoudite autorise les vols directs entre les deux pays
pour transporter les pèlerins de la Mecque.
Les
relations entre Biden et MbS se sont refroidies le jour où l’Arabie saoudite a
été qualifiée «d’État paria» après que la CIA a imputé à MbS le meurtre
du journaliste du Washington Post, Jamal
Khashoggi. Le président américain voudrait étendre les accords d’Abraham de
2020 qui avaient concrétisé la normalisation entre Israël et les Émirats arabes
unis, Bahreïn, le Maroc et le Soudan.
Si
l’on écoute l’ancien conseiller à la Maison-Blanche, Jared Kushner, la
normalisation entre l’Arabie saoudite et Israël est «en vue après avoir
observé les derniers vestiges de ce qu’on appelle le conflit israélo-arabe». Le
ministre saoudien des Affaires étrangères Fayçal ben Farhan estime que l’accord
de normalisation avec Israël serait «extrêmement utile et très
avantageux» pour le Moyen-Orient, mais que cela ne pouvait se faire que si
on réglait «le problème des Palestiniens». Les responsables
saoudiens persistent à vouloir conditionner la reconnaissance d’Israël à la
création d’un État palestinien indépendant. Israël est encore loin d’adopter
cette stratégie compte tenu de la radicalisation de l’opinion.
Mais
les contacts de l’Arabie avec Israël sont permanents, toujours secrets. En novembre 2020, le prince héritier saoudien avait
rencontré secrètement Benjamin Netanyahou qui s’était déplacé dans le royaume. En
revanche, Donald Trump n’avait pas réussi à faire signer un accord entre
l’Arabie et Israël.
En
fait, aujourd’hui la situation s’est inversée car l’Arabie impose à présent ses
règles. La pénurie de carburant et la hausse des cours de pétrole à la suite de
la guerre d’Ukraine donnent du poids à MbS qui est sollicité pour accroître la production de pétrole afin de compenser le pétrole russe. Mais
il fait la sourde oreille car il veut utiliser l’arme arme pétrolière pour que
Biden le réhabilite et lui redore son blason à Washington. Mais, le président
américain ne peut pas se déjuger et se soumettre à un autocrate impitoyable.
C’est pourquoi il refuse tout déplacement en Arabie jusqu’à ce qu’il soit
certain d’annoncer une décision historique. La normalisation avec Israël
est le prix à payer par MbS pour sa politique aventureuse au Yémen et ses
atteintes aux droits de l’homme. En revanche, les lobbies juifs à Washington
font tout pour réhabiliter l’image du prince héritier et de l’ancien ennemi israélien
devenu le plus grand propagandiste de l’Arabie à Washington. Mais on
ne voit pas comment MbS peut normaliser sans porter atteinte aux droits des
Palestiniens. La quadrature du cercle. Par ailleurs, MBS veut que Biden
s’engage à soutenir ses prétentions au trône à la mort de son père car les
États-Unis doivent donner leur imprimatur face à une famille royale divisée. Il
veut aujourd’hui que les Américains s’engagent à garantir la sécurité du pays
contre toutes les menaces étrangères et exige un accès préférentiel à
l’équipement et à la technologie de l’armée américaine. Biden doit résoudre ce
dilemme et prendre des décisions rapides.
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