Pages

vendredi 1 avril 2022

Négociations avec l'Iran, Washington joue à la roulette russe par Francis MORITZ

  

 

 

NÉGOCIATIONS AVEC L’IRAN, WASHINGTON JOUE À LA ROULETTE RUSSE


Par Francis MORITZ

 


Raïssi menace de vengeance les responsables américains de la mort de Soleimani


On n’a pas fini de parler de l’effet Poutine. Après son départ catastrophique d’Afghanistan, l’administration américaine veut tellement parvenir à conclure avec l’Iran qu’elle est prête à toutes les compromissions. On sait à quel point Israël s’y oppose et qui démontrerait l’incompréhension américaine en matière de politique étrangère, contrastée pour le moins.  Comme pour les négociations menées pendant des mois avec les Talibans, sans la participation du gouvernement afghan de l’époque, les négociations de Vienne réunissent différents participants, sauf Israël relégué à la périphérie, alors que pour le régime perse l’État juif doit disparaître. Ce qu’on n'a jamais vu ailleurs. Mais hormis des déclarations, de principe, cela ne dérange personne.


 


Jérusalem s’oppose à Washington, manifestement prêt à accepter toutes les concessions possibles en vue d’un accord soi-disant favorable et passe de la résignation au renoncement, plutôt que d’imposer ses exigences, même si les signaux donnés par les États-Unis sont contradictoires sinon contrastés, peut-être s’agit-il d’une façon de communiquer, laisser entendre une chose et son contraire.

Selon le porte-parole du département d'État, Ned Price, a déclaré le 21 mars «qu'un accord, sur le nucléaire iranien n'était ni imminent ni certain et a averti que Washington était prêt à prendre des "décisions difficiles" pour ramener le programme nucléaire iranien à ses limites dans le cadre de l'accord sur le nucléaire». Il a en outre déclaré que Washington se préparait également à des scénarios avec et sans retour mutuel à la pleine mise en œuvre de l'accord nucléaire.  

Mais ce n’est pas tout. La diplomatie américaine est prête à lâcher une autre bombe sur la région, celle-là au moins aussi dangereuse que la précédente, sinon plus. Les États-Unis semblent disposés à retirer de la liste des organisations terroristes les tristement célèbres Gardiens de la Révolution en échange d’une «déclaration de désescalade» dans la région, alors qu’on accepte tout aussi allégrement que le régime de Téhéran proclame le plus officiellement du monde son intention renouvelée par une loi explicite qui crée l’obligation aux dirigeants d’éliminer Israël d’ici 2024. C’est un sinistre marché de dupes, pour ceux qui veulent bien se laisser duper ou s’agit-il d’une forme de duplicité dont le sens échappe au commun des mortels ?

L’Amérique, qui s’est auto-érigée en parangon de vertu, ne rencontre apparemment aucune difficulté à envisager de s’accommoder du régime iranien contrôlé d’une main de fer par la clique mafieuse des Gardiens de la révolution qui détiennent tous les leviers du pays. On peut d’ailleurs en dire autant de plusieurs pays européens impatients de reprendre les relations avec ce régime, les affaires sont les affaires. Et puis, ce pays produit du pétrole, alors…

Toutefois il y a plusieurs listes d’exclusion qui n’ont pas toutes les mêmes sanctions. On rappelle à cette occasion que le Hezbollah est totalement interdit en Allemagne et dans d’autres pays, alors qu’en France, si sa branche armée l’est, sa branche politique a pignon sur rue. Donc, selon la liste, les Gardiens seraient ou pas exclus de telle ou telle activité. On se rappelle la célèbre formule de feu Coluche «Blanc je connais mais plus blanc que blanc je ne connais pas». On apprend qu’il y a plusieurs catégories de terroristes. Il fallait y penser, le département d’État s’y essaye. Pour résumer, la branche Al Qods de l’organisation apparaît en 2007 sur la liste du département du trésor qui fait un distinguo subtil entre les Gardiens eux-mêmes et la force Al Qods, classée terroriste. Le président actuel Ebrahim Raïssi auteur de crimes contre l’humanité n’a rien d’un criminel, comme il s’en trouve à Moscou ou à Minsk ou ailleurs au Moyen Orient.  Si on avait un doute, Washington l’a levé et quelques européens aussi.

En juin 2011 les Gardiens sont accusés de violations des droits de l’homme. En 2017 les Gardiens toutes branches confondues sont classés organisation terroriste et inclus dans la liste du département d’État en 2019. Or l’administration américaine envisage sérieusement de retirer les Gardiens de cette liste des organisations terroristes (Foreign Terror Organization) du département d’État ; mais le même groupe figurerait sur d’autres listes. Les retirer de cette liste ouvre la porte aux transactions, hommes d’affaires ou États avec les terroristes, On a bien compris que la main droite veut ignorer ce que fait la main gauche, tout en feignant également d’ignorer que les deux appartiennent au même état terroriste.

On ne peut s’empêcher de trouver de très fortes similitudes entre deux situations très similaires, le conflit en cours avec l’Ukraine et le comportement hégémonique de l’Iran et ses attaques incessantes par Hezbollah et Houtis interposés contre Israël, contre l’Arabie saoudite et d’autres. Alors milice pour milice, on voit bien la similitude entre le groupe Wagner et le Hezbollah à la botte des Gardiens de la révolution. Là où les choses se compliquent, au niveau des partenaires à cet accord, c’est la position russe qui a des liens avec l’Iran et refuse absolument que des sanctions viendraient brouiller ses relations avec Téhéran dont les négociateurs n’ont jamais cessé d’indiquer que l’objectif des négociations est exclusivement la réactivation de l’accord de 2015, donc pas question de terrorisme, quel terrorisme ? pas de financement de milices diverses au Moyen Orient, pas les droits de l’homme, pas les armements et notamment les missiles à longue portée, ceux que l’Iran agite constamment pour indiquer qu’il peut les envoyer sur Tel Aviv.



Le sénateur Républicain Bill Hagerty a déclaré lundi que «réactiver le désastreux accord nucléaire avec l’Iran» était un projet issu de la vanité de John Kerry (ancien secrétaire d’État) et du président Joe Biden. Ils sont en train de faire passer les intérêts américains dans le rétroviseur arrière afin d’obtenir un accord avec l’État qui est le plus grand soutien du terrorisme.  Il est de moins en moins sûr que le président Biden puisse reprendre à son compte le YES WE CAN d’Obama.

Alors que Washington veut imposer à l’Europe de décider un embargo sur le gaz et le pétrole russe, les États-Unis sont auto-suffisants en gaz, pétrole et blé, mais ont cependant contacté le Venezuela grand producteur de pétrole ?  S’il continue à fournir du gaz, Poutine demande à être réglé en roubles. Un autre des effets Poutine pourrait être une pénurie de blé dans différents pays et des troubles sérieux en vue.

 Au Conseil de Sécurité, la Russie est un des cinq membres permanents avec droit de véto. Dans la négociation sur l’Iran c’est un des partenaires. En Europe c’est un menteur et un criminel. Le président américain et ses alliés et partenaires n’ont pas répondu à la question, comment peut-on traiter le régime russe de criminel et l’accuser de crimes contre l’humanité et traiter avec le régime iranien et ses criminels au pouvoir pendant qu’on va l’aider à financer le terrorisme en levant les sanctions que seule une partie des grands pays respectaient. Décidément, cela se confirme en permanence, les gouvernements n’ont pas d’amis mais seulement des intérêts CQFD.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire