L’UKRAINE, LES JUIFS ET
ISRAËL
Par Jacques BENILLOUCHE
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Benjamin Netanyahou rencontre le président ukrainien Volodymyr Zelensky |
Par son
voyage en 1999, Netanyahou avait tout fait pour consolider des liens forts entre
Israël et l’Ukraine d’où sont d’ailleurs originaires de nombreux immigrants
israéliens. En rencontrant le président Volodymyr Zelensky il avait affirmé :
«Nous pouvons nous emparer de l'avenir séparément, mais nous pouvons mieux
le faire ensemble». Avant la
Shoah, une majorité de la population ukrainienne était juive. D’ailleurs le
président est lui-même d’ascendance juive, même s'il estime qu’il s’agit pour
lui d’une affaire privée, ainsi que son premier ministre Volodymyr Groïsman. Le
mémorial de Babi Yar est là pour rappeler que 33.000 Juifs ukrainiens y avaient
été assassinés en avril 1941. Les deux
pays se sont reconnus de facto le 11 mai 1949 sous le régime soviétique et ont
établi des relations diplomatiques de jure le 26 décembre 1991.
L’Ukraine est devenu un lieu de
tourisme pour les Israéliens alors que les relations économiques et militaires
se resserrent. En effet, Israël vend du matériel militaire à l’Ukraine à
travers la société Elbit dans les
domaines des systèmes de communication, de surveillance et de reconnaissance
terrestres et aériennes, des stations radars, des équipements pour la
protection portuaire et pour la modernisation des véhicules blindés. En 2015, Netanyahou avait signé des accords
dans le domaine du hightech, de la recherche scientifique de la sécurité, des
transports et de l’agriculture. De son côté l’Ukraine exporte vers Israël des céréales,
des métaux, des graines et oléagineux et des machines électriques.
Des membres des Forces de défense territoriale ukrainiennes, des unités militaires volontaires des Forces armées, s'entraînent dans un parc de la ville de Kiev, en Ukraine, le 22 janvier 2022 |
L’Ukraine
a poussé son amitié jusqu’à exprimer son désir d’installer son ambassade à
Jérusalem, située pour l’instant à la rue Yirmeyahu à Tel-Aviv. Mais Israël se
trouve aujourd’hui devant un choix cornélien. En raison de ses bonnes relations
avec la Russie, le gouvernement israélien n’envisage pas de s’interférer dans
ce conflit mais au contraire d’intervenir comme arbitre et même comme
conciliateur entre les deux belligérants, voire entre la Russie et l’Europe. Par
ailleurs il n’a pas échappé à Israël que l'Ukraine est soutenue par l'allié le
plus puissant d'Israël, les États-Unis.
Fidèle à sa mission de protéger les
Juifs partout dans le monde, Israël anticipe une éventuelle conflagration en se
préparant à accueillir des réfugiés juifs. Mais il en profite surtout pour
convaincre ls 48.000 Juifs, qui vivent encore en Ukraine, à faire leur alyah
avant toute déflagration, 70.000 si l’on tient compte des ressortissants non-juifs
éligibles en vertu de la loi du retour (grand-parent ou conjoint juif). La
population juive d'avant-guerre était d’environ 1,5 million de personnes et a été
pratiquement anéantie lors de la Shoah.
L’alyah
ukrainienne ne s’est jamais arrêtée : 2.971 en 2020 et 3.080 en 2021,
beaucoup plus que l’alyah française. C’est de bonne guerre sachant que seul le
danger pourrait convaincre les indécis. Tous les ministères concernés et l’Agence
juive ont été mobilisés lors d’une réunion le 23 janvier. Une deuxième réunion
est planifiée pour le 1er février afin d’évaluer les nouvelles options
dans un contexte d'aggravation de la crise russo-ukrainienne. Selon le ministre
de la diaspora Nahman Shai : «L'État d'Israël a la responsabilité
morale d'aider les Juifs en détresse. Nous avons prouvé par le passé que nous
assumons cette responsabilité et, si nécessaire, nous agirons à nouveau.
Néanmoins, cela ne signifie pas qu'il y aura des avions qui voleront d'Ukraine
en Israël immédiatement demain matin. Nous examinerons les circonstances et
trouverons les moyens d'aider de toutes les manières possibles».
L’invasion russe, que certains
estiment imminente, n’aura certainement pas lieu car toutes les parties auraient
beaucoup à perdre d’une guerre. Il s’agit en effet d’un rapport de forces
classique où le chantage et la menace constituent l’unique stratégie des
dirigeants. Les diplomates trouveront certainement une solution qui satisfasse toutes les parties et ménage la susceptibilité de chacun. Cependant, si Israël veut rester neutre, il n’a pas oublié les récentes
manifestations des nationalistes ukrainiens vénérant l’Allemagne nazie au point
que les protestations de l'ancien ambassadeur d'Israël en Ukraine Joel Lion, qui
avait critiqué cette attitude nationale et officielle, avaient suscité des
réactions glaciales de Kiev. Des jeunes militants nationalistes en armes et
portant des uniformes SS ont défilé à Lvov.
Rassemblement de membres des partis d’extrême droite Svoboda, à Kiev |
Certes le
président Volodymyr Zelensky a tendu la main à Israël à plusieurs reprises :
«Nous savons ce que c'est que de ne pas avoir son propre État . Nous savons
ce que cela signifie de défendre son propre État et sa terre les armes à la
main, au prix de nos propres vies». Il a même demandé à Naftali Bennett d’intercéder
en son nom auprès de la Russie et d’envisager une médiation avec Moscou. Mais
Poutine a rejeté cette proposition.
Par ailleurs Israël ne fera rien
contre la Russie car ses relations avec Moscou sont de la plus haute importance
stratégique et sécuritaire. Il ne s’agit pas de rompre les canaux de
communication entre les deux armées concernant l'espace aérien syrien. Moscou
reste un élément clé contre l’Iran en Syrie sachant surtout que la Russie est membre
du Conseil de Sécurité au moment où des pourparlers nucléaires avec l’Iran. Les relations diplomatiques et de sécurité
bilatérales sont une priorité absolue pour le gouvernement israélien. Si Israël
devait choisir, le choix est déjà fait.
Excellente analyse.
RépondreSupprimerJacques, tu as raison, une fois de plus. Quelques detais ont ete oublies. Lesplus importants sont dans l'ordre historique et economique: Les troupes sovietiques qui combattaient les nazis durent batailler contre les nationalistes ukrAiniens jusqu'en 1953.
RépondreSupprimerLa plupart des Juifs "ukrainiens" sont les ancetres de la plupart des Juifs ashkenazes.
De 1880 a 1900, 2 millions de Juifs ukrainiens immigrerent vers des cieux plus clements.
Deuxieme sujet: Poutine a-t-il des reves de retablir l'Union Sovietique dans sion immeb=nsite territoriale? Probablement que oui.
Troisiemme sujet et peut etre le plus important: le gaz russe! Celui-ci transite principalement par l'Ukraine et celle-ci veut (a juste titre que les Russes paient un "loyer" des terres ukrainiennes utilisees par les gazoducs russes.