NETANYAHOU, SARKOZY : LE ROUND DE TROP
Par Jacques BENILLOUCHE
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Netanyahou et Sarkozy
sont des jumeaux en politique car ils ont puisé, dans leurs traversées du
désert et leurs disgrâces, l'énergie pour prendre le pouvoir. Rarement
similitude de trajectoire politique n'aura été aussi flagrante entre deux personnages
d'origine et de formation si différentes. Benjamin Netanyahou adorait se
comparer à Nicolas Sarkozy. L'histoire s'était imprimée, au début pour les
deux, sur un échec cinglant hypothéquant alors toute ascension politique qui
les a menés jusque devant la justice implacable.
Netanyahou et Sharon |
Netanyahou n'avait pas
résisté aux coups de butoir du nouveau parti Kadima créé par Ariel Sharon, qui
avait laminé le Likoud. De son côté Sarkozy, directeur de campagne de Balladur,
avait assisté à l’élimination de son mentor au premier tour puis avait été
battu lui-même à la présidentielle de 2012. Mais contrairement aux dirigeants
anglo-saxons et malgré les échecs, ils n'avaient pas estimé devoir quitter la
politique car seule la politique pouvait les quitter.
Les deux leaders ont gardé de leurs mésaventures
respectives un relent d'aigreur et une sensation de gâchis et d'injustice qui
ont accru leur volonté de combat. Benjamin Netanyahou s’était inspiré de la
réussite du président français qui est revenu au sommet après sa mésaventure au
sein de l’équipe Balladur. Il n'a cessé d'écouter les conseils de celui qu'il
qualifie d'ami et de frère en politique. À force de s'inspirer de son modèle,
il en est presque devenu son clone politique. Sarkozy lui a appris à tirer
d'excellents enseignements de l'échec et à imiter sa stratégie dès son arrivée
au pouvoir. Il lui a suggéré de briser les murailles, d'ouvrir les portes, de
vivifier l'air et d'insuffler de nouvelles méthodes politiques comme lui-même
l'avait fait.
Fillon, Sarkozy, Balladur |
Ils ont utilisé la même technique du baiser mortel
pour étouffer leurs adversaires plutôt que de prendre le risque de les
combattre. Soumis tous les deux à la pression de l'extrême droite, ils ont tout
fait pour assécher leur électorat soit en épousant leurs idées et leur
dialectique soit, en offrant une place préférentielle aux plus virulents
d'entre eux. Le Pen et le Front National constituaient pour Sarkozy le même
risque que les nationalistes des implantations et les extrémistes religieux
pour Netanyahou. Ils ont préféré soit les intégrer, soit épouser leurs idées
pour garantir la pérennité de leur gouvernement.
Les deux hommes ont dicté leur attitude sur le seul
sentiment qui les a rongés durant la traversée du désert et qui les ont habités
encore après leur victoire : la rancune. Sarkozy savait que sa mort politique
avait été programmée en haut lieu, tout comme Netanyahou qui a compris qu’il
fallait attribuer des portefeuilles placard, sans réelle influence, à ses
adversaires pour les condamner au silence. La nomination du journaliste
politique Yaïr Lapid aux finances était un exemple de cadeau empoisonné. Lapid ne lui a jamais pardonné.
Les deux dirigeants, enfin, ont instrumentalisé la
peur dans leur conduite du pouvoir. Tandis que l'un exploitait le thème de la
sécurité et du combat contre la délinquance, contre l’immigration et l’islamisme,
le second agitait le spectre du terrorisme arabe comme repoussoir des tenants
de la gauche. Ils ont réussi à persuader leurs électeurs, pourtant souvent
ancrés à gauche, à s'initier aux thèmes fétichistes de la droite.
À tour de rôle, ils se sont entraidés car ils
étaient constitués de la même cuirasse. Sarkozy était venu en Israël, en
février 2005 et en mai 2013, pour courtiser Netanyahou et obtenir les voix
juives ou pro-israéliennes. Netanyahou a usé de la même tactique en se montrant
sans cesse aux côtés de son ami pour obtenir, en décembre 2008, l'imprimatur du
chef de l'État français dans une sorte de retour d'ascenseur pour l'aide
directe qui a permis à Sarkozy de siffler 80% des voix de la communauté juive,
en France et en Israël.
Mais la question a été posée sur l’opportunité d’un dernier
combat, le combat de trop. Après un quart de siècle au pouvoir durant lequel
Netanyahou a favorisé la montée de l’extrême-droite pour neutraliser la gauche,
il s’est trouvé prisonnier des monstres qu’il a enfantés qui l’ont ensuite empêché
de constituer un gouvernement de coalition. La lassitude de la population arabe
face au blocage du processus de paix a entraîné un réveil du nationalisme
palestinien et fait réfléchir les adeptes d’une solution modérée. Cette
lassitude s’est retournée contre le premier ministre Likoud qui a vu d’ailleurs
sa popularité décliner et les 30% de voix d'électeurs arabes habituelles fuir son camp.
Les deux personnages se sont retrouvés dans une
situation similaire sans être sûrs de gagner les élections. Le paradoxe a voulu
que le danger se situait au niveau de leurs amis, de l’intérieur de leurs rangs,
du clan avec qui ils ont gouverné en bonne entente durant des années «Seigneur,
Protège-moi de mes amis ! Mes ennemis, je m'en charge». Naftali Bennett,
son ancien directeur de cabinet et chef des sionistes religieux a estimé que
Netanyahou avait fait son temps et qu’il pouvait devenir calife à la place du
calife. Le quadra, mis sur les rails politiques par son mentor Netanyahou, voulait
dorénavant voler de ses propres ailes et il a réussi à force de persévérance.
Avigdor Lieberman, qui avait fait liste commune avec
le Likoud en 2013, a repris sa liberté et a tourné casaque en présentant son
propre projet de paix avec les Palestiniens dans le but d’acquérir les voix du
centre. Comble pour un nationaliste, il a accepté de monter une coalition TSN, tous
sauf Netanyahou, avec les centristes et les travaillistes et même les Arabes. La
situation ne s’est alors jamais éclaircie pour celui qui a surfé au sommet des
sondages plaçant son parti le Likoud en tête. Certains transfuges de son propre
parti, à l’instar de Gideon Saar, se sont présentés devant les électeurs sous
leurs propres couleurs jusqu’à le faire perdre. Netanyahou le devra à ses
anciens amis et collaborateurs intimes. Aux dernières élections, des membres du
comité central étaient inquiets et ne croyaient plus à sa victoire au point d’envisager
une manœuvre pour propulser un autre dirigeant au poste de premier ministre afin de sauver ce qui pouvait être encore sauvé.
Sarkozy- le Maire |
Pour Nicolas Sarkozy, qui bénéficiait de sondages
positifs, le danger était aussi venu de ses propres rangs. Il avait reçu un
avertissement à l’occasion de l’élection à la présidence du parti UMP. Un jeune
concurrent, Bruno le Maire, un ministre qu’il avait imposé à son gouvernement
lui a siphonné 30% des voix du parti, ce qui l’a poussé à réfléchir sur
l’ingratitude en politique. Il se retrouve dans la position de Netanyahou avec
Bennett, son ancien poulain. Les ambitions de ses amis étaient toujours vives
et pas loin d’un TSS, tous sauf Sarkozy. Ses adversaires les plus virulents n’étaient
pas les socialistes mais les hommes de son camp, François Fillon son ancien
premier ministre, Alain Juppé le gardien du temple gaulliste et l’ancien
ministre centriste Jean-Pierre Raffarin qui s’étaient rangés aux côtés d’eux.
Certains de ses proches, voyant le vent tourner, avaient décidé de quitter le
navire pour des horizons plus accueillants.
Contrairement aux anglo-saxons, ces deux monstres de
la politique n’ont pas su mettre un terme à leur carrière politique quand il était
encore temps, en pleine ascension politique et en pleine gloire. Ils se sont accrochés
aux quelques restes de pouvoir qui maintenaient leur flamme et n’ont pas su,
comme les Grands Hommes, tirer un trait sur leur vie politique pour devenir des
Sages et participer au renouvellement des générations. On peut tout dire de Le
Pen et de Begin, mais ces dirigeants de droite ont tiré leur révérence au sommet
de leur réussite pour laisser les jeunes prendre en mains les destinées de leur
pays.
Sarkozy entrant au tribunal |
Les deux dirigeants ont
été rattrapés par la Justice. Sarkozy a été condamné, lourdement, même s’il n’entrera
pas en prison pour purger sa peine. Netanyahou passe devant ses juges qui
statueront en dernier ressort. Mais Netanyahou et Sarkozy ont mal mesuré le
risque de mener le dernier round d’un match qui n’était pas gagné d’avance. Après
leur échec, l’Histoire oubliera ce qu'ils ont réalisé et ne retiendra d’eux que
la décision des juges et des électeurs. Ils n’ont pas résisté au combat de
trop. Il est triste que ces deux dirigeants, qui disposaient de tous les
pouvoirs entre les mains, aient fini devant la justice.
Netanyahou au Tribunal |
les attentats ont toujours eu lieu et existeront toujours. Il n'y a aucune solution a ce probleme, tous les politiciens des 2 camps ont utilise cet outil et continueront de le faire.
RépondreSupprimerEt paradoxalement il y eut moins d'attentats avec Bibi qu'avec Rabin ou Peres Mais les guerres (on prefere appeler cela des "operations" ont succede aux campagnes de terreur et personne n'y trouvera de solutions meme avec un Arabe israelien dans la coalition.
Et Bibi n'a toujours pas compris que son destin politique est derriere lui. Il esperait, et il espere toujours que la justice l'innocentera. C'est possible, en Israel, tout est possible, mais cela ne le remettra pas en selle. Yair, son fils, devra commencer a chercher un boulot.
Arrêtes ton char! Georges.
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