L’IRAN DURCIT SA POLITIQUE ÉTRANGÈRE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Hossein Amir-Abdollahian |
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Jawad Zarif |
Mohammad Jawad Zarif était l’homme fort du ministère
iranien des Affaires étrangères au cours des huit dernières années. Il parlait
un anglais impeccable, avait acquis des diplômes d'universités américaines
prestigieuses et avait l’expérience de plusieurs décennies dans la représentation
de l'Iran aux Nations Unies. La politique américaine n’avait pas de secret pour
lui. Son remplaçant est plutôt un militant de la «résistance» axée sur le
renforcement des partenaires anti-américains de l'Iran au Moyen-Orient, la
fameuse politique Negah Beh Sharq
(Regard vers l'Est).
Né à Dāmghān en 1964, Amir-Abdollahian est un
diplomate de carrière. A la Shahid Beheshti University, il s’était orienté vers
les sciences de laboratoire, mais en 1990 il avait choisi un baccalauréat en
affaires internationales de la School of International Relations (SIR) d’Iran. En
1996, il avait obtenu une maîtrise en affaires internationales et un doctorat en relations internationales du SIR en 2010. Sa thèse
sur «Les facteurs sociologiques de l'échec de l'initiative du Grand
Moyen-Orient» a porté sur les erreurs de la stratégie américaine au
Moyen-Orient après le 11 septembre 2001. Il avait alors attribué aux États-Unis
le mépris des facteurs liés à la culture et à l'identité. Parlant couramment
l'arabe mais un anglais hésitant, Amir-Abdollahian s'est concentré sur la
politique arabe régionale allant jusqu’à publier de 2009 à 2011 trois articles
universitaires sur l'Irak, la Syrie et Bahreïn.
Il avait commencé sa carrière diplomatique officielle en
1992 en tant qu'analyste politique à la division du golfe Persique du ministère
des Affaires étrangères. Il s’était fait remarquer en 2007 en tant que
participant junior aux pourparlers américano-iraniens chaperonnés par l'Irak à
Bagdad. De 2007 à 2010, il a été ambassadeur d'Iran à Bahreïn et aurait
contribué à apaiser les tensions avec la monarchie minoritaire sunnite de ce
pays.
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Amir-Abdollahian embrassant la tête de Soleimani |
De 2011 à 2016, Amir-Abdollahian a été vice-ministre
des Affaires étrangères pour les Affaires arabes et africaines sous Ali Akbar
Salehi, et était responsable des activités dans les zones de guerre en Irak, en
Syrie et au Yémen. À ce titre, il est devenu très proche du Corps des Gardiens
de la révolution islamique (IRGC). Dans une interview en avril, Zarif avait
affirmé qu'il avait donné les coordonnées d'Amir-Abdollahian à l'ancien
secrétaire d'État John Kerry pour coordonner un cessez-le-feu au Yémen avec le
commandant de l'époque de la Force Qods du CGRI, Qasem Soleimani.
Amir-Abdollahian a également participé aux négociations
avec le P5+1 (États-Unis, Russie, Chine, Grande-Bretagne, France et Allemagne)
sur l'avancement du programme nucléaire iranien, mais avait été écarté après
l'élection en 2013 du président Hassan Rouhani. En 2016, Zarif avait démis
Amir-Abdollahian de son poste de vice-ministre et lui avait offert l’ambassade à
Oman qu'il avait refusé, devenant conseiller du président conservateur du
parlement et ancien maire de Téhéran, Mohammad Baqer Qalibaf.
Son licenciement avait a priori été exigé par les
cheikhs arabes du golfe Persique en signe de bonne foi du président Rouhani
mais il semble plutôt que son «langage dur» envers les pays arabes en
était la vraie raison d’autant plus que Zarif avait dit de lui : «il parle
trop et aime trop la caméra». Comme de nombreux conservateurs iraniens, il
privilégie une politique plus proche de la Chine que des États-Unis et de
l'Europe. En février 2021, il l’avait confirmé à la télévision iranienne : «il
faut garder à l'esprit que nous sommes situés en Asie. Les experts pensent que
les prochaines décennies appartiennent à l'Asie et les puissances émergentes,
en particulier les puissances économiques, ont créé ce trait que nous devons
re- définir nos relations avec les pays influents». Il a fait valoir que
même l'Occident et les États-Unis avaient tourné leur attention vers l'Est mais
l'Iran devrait conserver son indépendance politique dans les affaires
étrangères.
Lors de sa confirmation le 22 août, Amir-Abdollahian
a affirmé que la priorité de la politique étrangère d’Ebrahim Raïssi est une
approche centrée sur le voisinage et sur l'Asie : «En Asie occidentale,
nous cherchons à institutionnaliser les réalisations de l'«Axe de la
résistance» et, à l'Est, nous cherchons à utiliser les capacités des puissances
économiques émergentes pour développer notre économie et notre commerce
international».
Sa nomination s’inscrit dans le contexte de la
désillusion iranienne vis-à-vis du Plan d'action global conjoint (JCPOA) de
2015. Il a exprimé sa frustration face à l'échec de l'Europe à indemniser
l'Iran après le retrait unilatéral en 2018 de l'administration Donald Trump. Il
a aussi taclé les Européens au sujet des négociations avec eux : «malgré
les subtilités des Européens, la levée des sanctions contre l'Iran doit être retardée
et reportée autant que possible. Ils apportent une excuse pour reporter la
discussion à la prochaine réunion… ils l'ont répété trois fois».
Les Occidentaux traitent Amir-Abdollahian d’anti-occidental
mais la réalité est plus nuancée car pour lui «le pouvoir est l'essence de
la politique étrangère et des affaires internationales». Selon son opinion,
«si les États-Unis agissent équitablement, nous ne disons jamais que nous ne
coopérerons ni ne négocierons. C'est l'autre partie qui doit corriger son
chemin. Les négociations avec les États-Unis n'ont jamais été un tabou».
Amir-Abdollahian devrait se concentrer sur le
renforcement des relations de l'Iran avec des partenaires régionaux tels que la
Syrie et les milices soutenues par l'Iran en Irak et au Yémen. Grâce à ses
relations étroites avec le CGRI et son approche d’axe de résistance, il devrait
réduire l'écart entre le ministère iranien des Affaires étrangères et l'État. Contrairement
à son prédécesseur marginalisé par les pasdarans, il faut s'attendre à plus de
collaboration avec les diplomates proches de la Force Qods qui occupent des
postes influents dans les missions diplomatiques iraniennes dans la région du
Moyen-Orient. Le commandant de la Force Qods, Qasem Soleimani, les avait
presque tous nommés et avait insisté en 2013, auprès de Zarif, pour maintenir
Amir-Abdollahian à son poste. Mais leur collaboration fut de courte durée
puisque le 19 juin 2016, il fut destitué. Amir-Abdollahian devint alors conseiller
du président du parlement Ali Larijani pour les affaires internationales en
tant que diplomate du camp militaire et admirateur de Soleimani.
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Khamenei, Nasrallah, Soleimani |
L'arrivée d'Amir-Abdollahian à la tête du ministère
des Affaires étrangères montre que la politique étrangère de Raïssi se
concentrera probablement sur l'amélioration des relations avec l'Est et le
rapprochement avec les pays de la région, avec peut-être moins de priorité sur
le dossier nucléaire. L’approche probable de l'administration Raïssi en matière
de politique étrangère suivra plus étroitement que jamais celle du Guide
suprême, l'ayatollah Ali Khamenei. Le dossier nucléaire sera exclusivement de
la responsabilité du Conseil suprême de sécurité nationale. Le rôle du
ministère des Affaires étrangères sera abaissé à celui de coordonnateur des demandes
des responsables militaires du CGRI. Le nouveau ministre des Affaires étrangères
ne jouera pas un rôle similaire à celui de Zarif. Il aura moins de présence
dans les forums internationaux et moins de contrôle sur les questions sensibles
du pays.
4 commentaires:
Il est très important de rectifier une erreur communément admise qui consiste à croire que les Iraniens, du fait qu'ils sont musulmans, appartiennent au peuple arabe. Les Arabes sont issus de notre patriarche Avraham.
Or les Iraniens n'ont rien à voir avec les Arabes. Ce sont des Perses. Selon la Torah, souvenez-vous, Noé avait trois fils : Chem, 'Ham et Yaphet. Les Perses sont issus de la descendance du dernier fils de Yaphet, qui s'appelais Tiras. (Tout cela est expliqué dans Béréchit, chap.10, verset 2). "Très bien, me direz-vous. Et alors ?" Eh bien justement, écoutez la suite : peu avant la Seconde guerre mondiale, des responsables Iraniens (après avoir lu Mein Kampf et les théories raciales nazies) ont pris contact avec leurs homologues du parti national-socialiste allemand pour leur expliquer justement qu'ils n'étaient pas des Arabes, mais des Aryens. D'ailleurs, il y a une parenté phonétique entre le mot "aryen" et le mot "Iran". Cette tentative de conjonction n'a pas eu de suite parce qu'Hitler était occupé à autre chose. Mais cette parenté demeure et elle doit nous permettre de comprendre la motivation profonde de la menace iranienne d'une nouvelle manière. L'appel au génocide du peuple juif par les ayatollahs d'aujourd'hui vient reprendre et poursuivre la solution finale nazie. Les Iraniens d'aujourd'hui, qui se définissent comme des Aryens, continuent la politique antijuive initiée par Hitler. Je souhaite que cette analyse parvienne jusqu'au premier de nos responsables. Du fait que cette thèse s'appuie sur des preuves linguistiques, historiques et religieuses, celui qui porte ostensiblement une kippa à l'occiput devrait y être attentif, non ? Et en tirer les conséquences qui s'imposent. A savoir que dans le cadre d'un conflit, un juif ne devrait pas gérer un nazi de la même manière qu'on répond à un ennemi musulman.
Après la prise de Babylone par les Perses, l'empereur Cyrus II libère les Juifs et leur donne la mission de retourner dans leur pays
On peut étudier l'histoire, et on peut aussi lire Mein Kampf, si on a du temps à perdre.
Le résultat n'est pas le même.
Cher courageux anonyme, vous voulez nous faire croire que les Perses d'aujourd'hui sont les dignes continuateurs pro-juifs et pro-sionistes de Cyrus ?
Les Iraniens sont des Aryens.
[Définition de ARYEN, YENNE, adj. A. − Qui a rapport aux Aryas, peuple très ancien, nomade et pasteur, que l'on croit être venu de l'Iran en Europe vers 2000 avant Jésus-Christ (d'apr. Perraud 1963).]
La religion a deux visages dans toutes les cultures :
un côté punitif et un côté festif.
Quand on regarde ces hommes en noir qui ressemblent à des croque-morts, on se demande où est passé le coté festif de tout culte.
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