UNE KNESSET DIVISÉE DANS UNE SITUATION BLOQUÉE
Par Jacques BENILLOUCHE
Les débats d’idées ont
disparu de la campagne pour scinder les électeurs en deux clans, pour ou contre
Netanyahou. C’est bien maigre pour faciliter la décision. Bien qu’il ait récolté
le plus grand nombre de députés, 30 sur 120, il existe une grande incertitude
sur ses possibilités de constituer une coalition viable. Les dirigeants sont
plus divisés que jamais sans qu’ils puissent vraiment aborder les programmes
politiques qui les distinguent. Même si un gouvernement est constitué sans armature solide, avec un faible écart de majorité, il restera
soumis à des tensions qui le détruiront de manière interne.
Mais l’émiettement des
partis ne permet pas d’avoir un consensus sur le nom d’un éventuel premier
ministre et chaque parti, même avec un nombre de députés faible, pose ses conditions
qui ne sont pas toujours réalistes. Il est triste de voir que, bien que l’avenir du pays soit en jeu, les intérêts personnels priment sur l’intérêt national au
point que les députés ont des intérêts suicidaires pensant faire mieux aux
prochaines élections. On ne comprend pas ce qui distingue les sionistes
religieux de Yamina, Netanyahou de Saar et surtout Meretz des Travaillistes
sinon que chacun de leur dirigeants veut être président.
Des rumeurs avaient
couru sur des propositions qui avaient été mises sur la table afin de
satisfaire les désidératas de chaque clan. La logique voudrait que Yaïr Lapid,
arrivé premier immédiatement après Netanyahou avec 17 sièges, soit désigné pour
constituer le gouvernement si Netanyahou n’y parvient pas. Mais Naftali Bennett,
avec ses 7 députés met la barre très haute en voulant être premier ministre
sachant que ses sièges valent de l’or. Bien que les questions de personnes ne soient
pas la préoccupation majeure de Lapid, il est normal qu’il trace de manière
précise le plus petit programme commun face à un idéologue qui menacera à tout
moment de rejoindre le Likoud. Il est vrai que Bennett est courtisé par les
deux bords qui sont prêts à mettre le prix pour avoir son soutien. Mais même s’il
rejoignait Netanyahou, cela ne suffirait pas à atteindre les 61 sièges sachant
que Saar est ferme dans son refus de rejoindre le Likoud. Cependant, Bennett et
Mansour Abbas suffisent à atteindre la majorité si les questions d’idéologie
sont absentes du débat sachant que Bennett est partisan d’une annexion des
implantations à laquelle s’oppose Abbas qui refuse de siéger avec l’extrême-droite de Smotrich et Ben Gvir.
Lapid peut atteindre le consensus avec ses valeurs libérales et sa volonté de protéger le système juridique et la Cour suprême dans sa structure actuelle ainsi qu'avec son ouverture possible à un compromis territorial avec les Palestiniens. Alors, comme Netanyahou a ouvert la porte à une participation arabe au gouvernement, à gauche on presse Lapid à inviter tous les partis arabes dans la coalition et à ne pas s’allier avec Bennett qui risque en cours de route de rejoindre le Likoud, une fois nommé premier ministre et une fois Netanyahou écarté. Le leader de Yamina n'est pas fiable; il fait monter la pression sur Lapid pour obtenir plus de Netanyahou. Il n'a pas l'intention de rejoindre la coalition de gauche et du centre.
Une coalition
avec les Arabes, Meretz, Avoda, Lapid, Gantz, Lieberman et Saar atteindrait 61
députés. Saar a un compte à régler avec Netanyahou et est prêt à s’allier avec
le diable pour l’éliminer du gouvernement. C’est aussi le cas d’Avigdor Lieberman qui ne
s’oppose plus à une collaboration avec les Arabes pourvu que les Juifs
orthodoxes soient écartés. La
détestation de Netanyahou a pris le pas sur la coopération avec les Arabes qui
depuis les accords israéliens avec les pays arabes sont prêts à rejoindre les
partis «sionistes». Cela explique que tous les leaders juifs,
Lapid, Gantz, Michaeli aient rencontré les leaders arabes. L’adjonction de toute
la liste arabe à une majorité supprimerait toute réticence de Mansour Abbas à
devenir ministre.
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L'hyperactivité de Netanyahou |
Bien sûr, une coalition de bric et de broc n’aurait pas une durée de vie longue, mais elle permettrait d’éliminer Netanyahou du paysage politique. Bennett sait à présent qu’il aurait beaucoup à perdre alors que Yaïr Lapid lui a fait un pont d’or en lui permettant d’être premier ministre de rotation s’il s’engageait durant toute la législature à ne pas rejoindre le Likoud. D’ailleurs des rumeurs ont transpiré de la part de l’opposition sur l’option d’un nouveau gouvernement idéal qui comprendrait :
Premier ministre : Yaïr LAPID
Premier ministre de rotation et ministre de la Défense : Naftali
BENNETT
Président de la Knesset : Benny GANTZ
Ministre des Finances : Gideon SAAR
Ministre de l’Intérieur : Avigdor LIEBERMAN
Ministre des Affaires arabes ; Mansour ABBAS
Ministre de la Justice : Ayelet SHAKED
Ministre de la Sécurité : Eléazar STERN
Ministre de l’Intégration : Pnina TAMANO-SHATA
Ministre du Travail : Merav MICHAELI
Ministre des Communications : Yoaz HANDEL
Ministre de la Culture : Nitzan HOROWITZ
Ministre des Affaires stratégiques : Michael BITTON
Ministre de la Santé : Ahmed TIBI.
Le ministère des Affaires
étrangères est laissé en discussion pour l’affecter si nécessaire à Yaïr Lapid
s’il acceptait de céder sa première rotation à Bennett.
Toutes ces hypothèses
de travail dépendent du bon vouloir des dirigeants israéliens qui doivent enfin
comprendre que le pays a beaucoup de défis à relever : sanitaire et
économique face au covid-19, sécuritaire face à l’Iran et politique internationale
depuis l’avènement de Joe Biden à la Maison Blanche. Il suffit qu’ils mettent
leur égo de côté pour que le pays retrouve sa vitesse de croisière.
3 commentaires:
Le leader de chacun des 13 partis se prend pour le seul premier ministre , en attendant les prochaines élections pour encore quelques années. Démocratie qui détruit l'état en danger, l'espoir renaît chez les ennemis. Jouer avec les allumettes dans une raffinerie.
Cher monsieur Benillouche,
En somme, si je vous lis bien, toute la classe politique israélienne d'un bord à l'autre de l'échiquier politique, est prête à se renier jusqu'au ridicule, dans le seul espoir de pouvoir éliminer Benjamin Nethaniahou ?
Reste-t-il un espoir que j'aie mal compris ?
Très cordialement.
Madame Arnaud , vous avez tout compris !
Ils ne veulent pas un gouvernement pour
(diriger le pays selon leurs idées )
mais contre
( Netanyahou) et c’est leur idée fixe !
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