LES ISRAÉLIENS ONT ÉTÉ BERNÉS PAR LE GAZ DE TAMAR
Par Jacques BENILLOUCHE
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Contretemps
La découverte de gaz au large de Haïfa avait suscité un espoir immense en Israël parce que, d’une part le pays était censé ne plus dépendre de l’extérieur pour son approvisionnement énergétique et d’autre part, il devait recevoir des royalties qui devaient améliorer le budget de l’État. Mais en fin de compte, les Israéliens ont été bernés car ils ne voient rien venir dans leur poche ou dans l’escarcelle du gouvernement. Le silence autour de l’accord gazier est d’ailleurs inquiétant. L’exploitation de Tamar-2 avait commencé en mars 2013. Cette découverte constituait un événement économique important car Israël était jusqu'alors dépourvu de ressources naturelles majeures. Le ministre israélien de l’énergie de l’époque, Yuval Steinitz, avait estimé en 2017 que les quatre champs gaziers devraient rapporter 87 milliards d'euros. On en est très loin.
Le gouvernement avait signé, le
22 mai 2016, un accord sur le gaz naturel entre Israël et le consortium entre
Noble Energy (américain) et Delek Drilling (israélien). Cette nouvelle version avait tenu compte des
objections soulevées par la Cour suprême qui avait pointé du doigt un élément
du contrat protégeant le consortium. Dans une clause jugée abusive par la Cour
Suprême, l’État s’engageait à ne rien modifier de sa politique énergétique. Si
l’accord reconnaissait la nécessité de créer «un environnement régulateur favorable aux investissements des sociétés
étrangères et nationales», l’État se réservait le droit de revoir les
contrats d’exportation du gaz en fonction de l’évolution du marché
international et de gérer la répartition des royalties entre l’État et les
investisseurs. Il était prévu que le prix du gaz serait rapporté à un index du
coût de l'énergie entre le public et le privé, ce qui devrait signifier une
baisse des tarifs par rapport aux accords antérieurs passés avec Noble Energy
et Delek Group.
Youval Steinitz |
Mais le prix du gaz payé par les
consommateurs israéliens est déterminé par le contrat de 2012 entre Tamar et la
société d'État Electric Corporation, dans lequel les prix sont liés à l'indice
américain des prix à la consommation. Mais cinq années plus tard, les Israéliens
n'ont rien vu des promesses du gouvernement. Benjamin Netanyahou avait alors
affirmé, lors de la signature de l’accord, que «cet argent bénéficiera à l'éducation, la santé, la sécurité sociale et
autres besoins nationaux». La création d’un fonds souverain à l’étranger
n’a pas été concrétisée car les revenus n’ont pas atteint les prévisions. L’accord
devait faire baisser les prix or, les consommateurs israéliens continuent à
payer des coûts d'électricité élevés alors même que les prix du pétrole et du
gaz sont à la baisse depuis plusieurs années. Les politiciens ont promis des
richesses qui ne viennent toujours pas.
Certes il y a eu des avancées
politiques avec Chypre, la Grèce, l’Égypte et la Jordanie. Israël exporte pour 15 milliards de dollars à
l’Égypte et 10 milliards à la Jordanie. On ignore la destination de ces fonds. Mais
le gazoduc Eastmed, qui a créé de fortes tensions avec la Turquie, pourrait
être remis en question si les prix du gaz restent bas et si l'Europe accélère
sa transition vers les énergies renouvelables. Les redevances pétrolières et
gazières perçues par Israël sont négligeables, 250 millions de dollars par an soit
1% du dernier budget national du pays qui s’élève à 135 milliards de dollars.
L’ex-ministre de l'Énergie, Yuval Steinitz, qui avait négocié l’accord de 2015, avait estimé que les prix devaient baisser de «près de 25% ». Cela est vrai pour les nouveaux contrats mais pour les anciens les plus importants, les prix sont liés à l'indice américain des prix à la consommation qui ont régulièrement augmenté depuis 2015.
Orit Farkash-Hacohen |
Orit Farkash-Hacohen, ministre Kahol-Lavan
des affaires stratégiques puis ministre du tourisme, était présidente de
l'Office de l'électricité au moment de la négociation. Elle avait attiré
l’attention du gouvernement sur le mécanisme de tarification injuste pour les
consommateurs. Elle avait exigé que l’accord soit modifié pour que les prix
soient indexés sur un panier international. Mais c’était trop pour le
gouvernement qui l’avait écartée de son poste ce qui avait entrainé des manifestations de
rue. Mais fidèle à sa stratégie habituelle, Netanyahou avait invoqué «des considérations de sécurité nationale»
pour ne rien changer. Pourtant Farkash-Hacohen avait insisté : «lorsque vous avez affaire à un monopole de l'électricité,
vous réglez ses prix pour ne pas abuser de son pouvoir. En ce sens, c'était une
occasion manquée qui a malheureusement affecté le coût de la vie des habitants
de l'État d'Israël».
En fait, malgré l’effondrement
des prix de l’énergie dans le monde, les Israéliens paient le prix de l’énergie
trois fois plus cher. Les revenus excédentaires du gaz israélien étaient censés
aller dans un fonds souverain pour investir à l'étranger, afin de disposer d’une
réserve internationale pour protéger Israël d’une grave crise économique
imprévisible. Mais ce fonds, dédié aux générations futures, a atteint à peine
290 millions de dollars face aux milliards de vente de gaz et ne devrait
néanmoins pas être opérationnel avant 2022 dans le meilleur des cas.
Leia Max : un scandale de plus à l'actif de Bibi et du Likoud ! En plus, ils nous polluent !
RépondreSupprimerEt au-delà du scandale financier bénéficiant à Noble Energy et Delek (Tshuva), vient également se greffer le scandale sanitaire et environnemental de Tamar dont les émissions cancérigènes rejetées sont égales aux émissions provenant de 570 importantes usines industrielles de tout le pays – avec notamment les raffineries pétrolières de Haïfa.
RépondreSupprimerLe taux de cancer relevé à Ashdod est ainsi supérieur à 30% de la moyenne nationale...
ce qui n’a pas empêché le gouvernement Netanyahou d’installer une autre plateforme (Léviathan) encore plus proche des côtes (une dizaine de km de la plage de Dor).
Au lieu d’abandonner l’exploitation de son gaz offshore à des compagnies internationales, Israël aurait pu contrôler lui-même tout le processus, notamment l’extraction, la production et le stockage : il suffisait de fonder une société nationalisée pour effectuer toutes ces opérations. Certains experts font remarquer que les investissements nécessaires à cela n’auraient représenté que 4 % des réserves de la Banque d’Israël, évaluées à 126 milliards de dollars en décembre 2019. Restant propriétaire de ses ressources, l’Etat hébreu aurait pu alors, à l’exemple des monarchies du Golfe ou de la Norvège, devenir une super puissance énergétique. Et faire économiser 15 à 20 milliards de shekels par an aux ménages israéliens. Mais la soumission de nos dirigeants à l’idéologie de l’ultralibéralisme, qui prône la privatisation de toutes les activités économiques, a exclu cette possibilité...
RépondreSupprimerpetit rectificatif: Les revenus excédentaires du gaz d’Israël étaient censés affluer dans un fond souverain pour des investissements à l’étranger. Or le fond n’a pas encore atteint le milliard de shekels (290 millions de dollars) nécessaires pour commencer à investir. Il semble que pour le moment il plafonne a 250 millions de dollars. Mais prochainement, les revenus de Tamar auront depasse deux fois son investissement et au lieu de payer 30% royalties plus impots compris, Israel touchera 60%.
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