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jeudi 26 mars 2020

Info ou intox politique en Israël


INFO OU INTOX POLITIQUE EN ISRAËL

Par Jacques BENILLOUCHE
Copyright © Temps et Contretemps
            
          De nombreuses informations circulent dans les réseaux sociaux qui s’apparentent moins à de l'information qu'à de la pure intoxication. Alors que les conséquences du vote du 2 mars 2020 ne sont pas encore suivies d'effet, des sondages sont publiés sur une éventualité d’un quatrième scrutin, très défavorable à Bleu-Blanc, 30 sièges contre 40. Il s’agit d’une méthode classique d’intoxication d’un institut inconnu pour forcer Benny Gantz à transiger et à accepter un gouvernement d’union sous l’égide de Netanyahou pour lui éviter de perdre tous ses acquis de ces derniers mois.




            Il est vrai que l’opinion israélienne est lasse du blocage de la situation politique en pleine crise économique et sanitaire.  Gantz veut bien d'un gouvernement d'union nationale avec une rotation à condition qu’il soit le premier à gouverner le pays pendant deux ans, le temps que la situation judiciaire du premier ministre s’éclaircisse. Netanyahou exige d’être le premier mais, à voir les méthodes actuelles du gouvernement qui bloque le système judiciaire et qui ferme les travaux de la Knesset, Gantz peut difficilement lui faire faire confiance, a fortiori lorsque le principe de la rotation n’est pas inscrit dans les Lois fondamentales. Un coup de force vient d’avoir lieu, et il est inimaginable de penser que des tanks pourraient se diriger vers la Knesset pour forcer les dirigeants à respecter la démocratie. Si déjà les lois qui font fonction de constitution ne sont pas respectées, comment un simple document signé pourrait faire foi.
Knesset avec peu de participants

            Alors après l’intox du sondage, on fait courir des rumeurs que les principaux points de la négociation sur une union nationale étaient pratiquement résolus, que quelques éléments de discorde mineurs subsistaient et que la décision est à présent dans le camp de Gantz qui dément qu'un quelconque agrément a été trouvé. De la pur spéculation de la part de Netanyahou. La question principale reste l’ordre dans lequel la rotation s’effectuera. Point fondamental, Kahol-Lavan craint que si Netanyahou est au pouvoir au début de la rotation, la Knesset ne soit dissoute avant l’entrée en vigueur de la rotation, soit après deux années pour empêcher Gantz d'être aux affaires.  Netanyhou avait innové en 2019 en dissolvant la Knesset une minute avant que Gantz ne soit désigné pour constituer un gouvernement.   
            S’il existe peu d'objections sur la répartition des portefeuilles, Gantz n’est pas prêt à offrir le portefeuille de la justice au Likoud après les méthodes utilisées par le ministre actuel, Amir Ohana, pour verrouiller l’institution judiciaire, voire pour démanteler purement et simplement la Cour Suprême, seule garante actuelle de la démocratie.
Il faut l'hospitaliser!

            Des rumeurs, dont on se doute de l'origine, prétendent que Yaïr Lapid et Moshé Yaalon ne souscrivent pas à ce gouvernement d’unité et que Gantz rejoindra le gouvernement de Netanyahou avec 18 députés de son parti. Ces informations, plus du domaine de la méthode Coué et de l'imagination de certains dirigeants du Likoud, ont pour but de briser l'unanimité au sein de Kahol-Lavan. Une prétendue demande de délai supplémentaire présentée par Gantz au Président Rivlin cherche à donner plus de crédit à ces allégations qui prétendent par ailleurs que le parti Bleu-Blanc est à la veille d’un éclatement.
Combat à la Knesset

            Il ne s’agit plus de politique fiction tendant essentiellement à mettre Netanyahou, protégé par son immunité de premier ministre, à l’abri de ses problèmes judiciaires. Les manœuvres de droite ont pour but de refuser de donner à la Knesset les moyens de juger, de voter et de décider. Il veut créer une sort de Knesset-bis avec une commission réduite où il aurait la majorité pour décider. Or il est indispensable qu’elle fonctionne normalement pour résoudre l'impasse politique. L’Italie avec près de 3.405 morts, l’Espagne 767 morts, et la France avec 372 morts ont toujours leur parlement actif. Le fonctionnement normal du Parlement permettrait de prendre les mesures sanitaires et économiques indispensables et surtout de désigner un nouveau gouvernement, même minoritaire. En Israël, avec 1 mort, Netanyahou a bloqué les institutions pour pouvoir rester indéfiniment au pouvoir, contre toutes les règles démocratiques.
            Pour un pays qui a été à la pointe de la démocratie, on ne comprend plus les agissements de certains dirigeants au pouvoir. Le coronavirus a bon dos. La fermeture de la Knesset, qui empêche de voter des lois et des motions et qui fait perdurer la mainmise de Netanyahou sur le pays, ne semble pas inquiéter outre mesure le clan de la droite. Il n’est pas exagéré de dire que la démocratie est en danger en Israël et que seule la Knesset a le droit de statuer en toute liberté. La peur du jugement des députés, voire des députés arabes, ne justifie aucune dérive. Israël n’a pas la culture du désordre politique menant à l’aventure. 
Dois-je me joindre à un cockpit de deux personnes ou aller en quarantaine avec un cockpit à quatre

          Nous laisserons à l'ancien ambassadeur d'Israël, Arié Avidor, le dernier mot de cette chronique :
          « Face à la tentative de coup d’État de Netanyahou et de ses partisans, la semaine qui vient risque de sceller le destin de la démocratie israélienne. Hier, lors d’une réunion du gouvernement de transition sur l’adoption de mesures d’urgence face à l’épidémie de coronavirus, les proches de Netanyahou ont proposé d’inclure la fermeture pure et simple de la Knesset parmi ces mesures !            Seule l’opposition ferme du conseiller juridique du gouvernement, Avihai Mandelblit, rappelant les principes de séparation des pouvoirs et l’indépendance du législatif par rapport à l’exécutif a pu éviter ce coup de force.                    D’aucuns n’hésitent pas à évoquer comme le sentiment de revivre les derniers jours de la République de Weimar. Hors de toute analogie au plan idéologique et simplement au vu de la gravité des agissements dont nous sommes témoins, nul ne pourra leur en tenir rigueur ni qualifier leur réaction d’excessive. En l’occurrence, c’est à chacun d’entre nous qu’il appartient d’empêcher un remake de l’incendie du Reichstag. Le travail d'un Parlement est vital pour le bon fonctionnement d'une démocratie, surtout en période de crise et d'urgence, affirme Chen Friedberg de l'Université d’Ariel».

9 commentaires:

Elizabeth GARREAULT a dit…

La première dictature Corona - la démocratie israélienne vient de mourir

Les gouvernements dans de nombreuses démocraties émettent maintenant des décrets d'urgence. C 'est bien. Mais en Israël, une prise de contrôle antidémocratique vient de se produire. Quand Angela Merkel émet des décrets d'urgence, elle le fait comme leader démocratiquement élue de l'Allemagne. Mais en Israël, Netanyahu n'est pas un leader démocratiquement élu. Il a perdu les récentes élections, et ses rivaux ont maintenant une majorité au parlement pour former un nouveau gouvernement. Donc sous prétexte de lutter contre le Corona, Netanyahu a fermé le parlement israélien, a ordonné aux gens de rester dans leur maison et émet tous les décrets d'urgence qu'il souhaite. Cela s'appelle une dictature.
Yuval Noah Harari

Nicole BENICHOU a dit…

Je pressentais que le retrait de Bibi serait long et difficile. Il est écœurant de voir comment il se sert d'une catastrophe pour s'approprier l’État et le pouvoir. Gantz ne doit pas mollir , il mérite le pouvoir et Kahol Lavan ne doit pas partager le pouvoir avec Bibi avec le Likoud oui mais avec Bibi non

Albert LEZMY a dit…

Un matin nous allons nous réveiller avec une Cour suprême et une knesseth dissoutes, un régime totalitaire à vie et héréditaire et un conseil des sages dirigé par Arié Derih et Yaacov Litzman..

Marianne ARNAUD a dit…

Cher monsieur Benillouche,

J'ai bien peur que l'idée que vous vous faites du fonctionnement du Parlement français, ne soit pas aussi idyllique que vous semblez le croire :

https://www.marianne.net/societe/c-est-confirme-la-loi-urgence-coronavirus-va-revenir-sur-les-droits-aux-conges-les-35-heures

Très cordialement.

mmaiman a dit…

Monsieur Benillouche et les partisans de Gantz qui s'apprête à convier les terroristes Islamistes et gauchistes pour démolir de l'intérieur le seul état juif est ahurissant. 3 ex chef d'état major ligués avec le support des "pseudo elites" de ce pays pour abattre le plus grand premier ministre qu'Israel a eu en 70 ans. Quelle tristesse ?

Véronique Allouche a dit…

@marianne
En situation de crise sanitaire mondiale et qui débouchera inexorablement sur une crise économique, il ne me semble pas excessif d’offrir une semaine de ses congés payés sur le temps imparti au confinement actuel.
Sachant qu’en France les salariés disposent de 5 semaines, voire 6 pour certains, et des fameuses 35 h , ce n’est pas cher payé. Cette loi si elle est votée, ne durera pas ad vitam aeternam comme l’ insinue le lien que vous avez donné car les français dans ce cas n’hésiteraient pas longtemps avant de faire savoir leur désapprobation dans la rue.
Bien cordialement

andre a dit…

Je n’arrive pas à comprendre !
Il y a des négociations entre le Likoud et Kahol Lavan ou plutôt il y a des pourparlers ente Gantz et Netanyahu . C’est un fait incontestable .
Pourquoi en parler sous le titre «  info ou intox ? »
Différents arrangements sont envisagés ... lequel sera adopté? Celui ci ou celui là ou peut être aucun ...
Pourquoi fulminer ?
Temps et Contretemps est le blog de Jacques Benillouche ...
.... pas celui de Lapid !

Andrè Mamou
Tribune juive

Marianne ARNAUD a dit…

@Véronique Allouche

Je vous lis bien, et vos arguments sont recevables. Sauf que, légiférer par ordonnances sans date limite de validité, ne peut pas être un modèle de "fonctionnement normal d'un Parlement", comme l'article le laissait entendre du parlement français.

Bien à vous.

MD546 a dit…

En fait Gantz il a peur de quoi . Faisons un peu de politique fiction, c'est ce que vos faites en vous projetant dans deux ans, comme le fait Gantz, : Vous dites "quand arrivera le moment de la rotation Gantz a peur que Bibi dissolve la Knesset " Mais il a peur de quoi et pour qui pour lui ou pour Medinat Israël? Je vous le demande !!
Il aura eu 2 ans à un poste clé au gouvernement pour imprimer sa marque et infléchir la politique de Bibi avec le pouvoir de dissolution que l'accord reposant sur l'appui des "beu et Blanc "lui confère . De plus s'il s'avérait que la politique de Bibi soit si mauvaise pour le peuple d'Israël le pays saurait en tirer les conclusions qui s'imposent en cas de dissolution. Pour l'heure il apparaît que ce sont des intérêts de clans et d'ego qui guident non pas les "bleu et Blanc" mais leurs quatre dirigeants