INITIATIVE ARABE SECRÈTE CONTRE BDS
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Millenial Gloucester Hotel |
Cela bouge politiquement avec les pays arabes. En effet, trente
personnalités de 15 pays arabes différents se sont rassemblées, les 19 et 20
novembre 2019, à Londres au Millenial Gloucester Hotel, pour combattre le
mouvement BDS (Boycott, désinvestissement et sanction). BDS a eu accès aux
campus universitaires américains et, pire encore, aux églises. Cette initiative
avait pour but d’appeler à des relations civiles directes entre l'État juif et
leurs sociétés respectives. La réunion au départ secrète avait été
révélée par le quotidien américain New York Times.
Dennis Ross |
L’initiative a été prise par Dennis Ross, directeur du
Centre des Contacts pour la Paix, dont le siège se trouve aux États-Unis. Sous
les mandats de George W. Bush et de Bill Clinton, ce diplomate avait été chargé
de faire avancer la normalisation arabe avec Israël. Selon le Centre, à la suite de cette
rencontre, un Conseil arabe pour l'intégration régionale a été créé avec pour
mission de réaliser des progrès dans le processus de normalisation des
relations arabes avec Israël. Les personnalités ont parlé des relations avec
Israël et de le nécessité de les renouveler. Ils ont aussi discuté des moyens
pour s’opposer au mouvement de boycott BDS.
Parmi les invités arabes figuraient des délégués de
l’Algérie et du Yémen qui n’entretiennent pas de lien avec Israël. Figurait aussi l’algérienne Saida Gharibi, connue pour ses positions
controversées dans son pays. Aucun invité israélien n’était
volontairement présent afin que certains délégués arabes ne soient pas accusés de
normalisation avec leur «ennemi». En effet certains participants auraient
pu faire l'objet de poursuites dans leur pays d'origine pour le «crime»
de normaliser leurs relations avec Israël. Pourtant les organisateurs avaient clairement
annoncé que la conférence était «une initiative civile dans laquelle aucun
gouvernement n'aurait eu la main».
Mohamed Anouar Sadate |
Le neveu du président égyptien Anouar Sadate, Mohamad Anouar
Sadate, chef du parti de la réforme et du développement de son pays, faisait
partie des invités ainsi que l'ex-ministre koweïtien de l'Information, Sami
Abdul-Latif Al-Nisf, qui a parlé avec passion des «erreurs» commises
dans le conflit israélo-arabe, l’avocate égyptienne vivant à Londres Ijlal
Ghita, la caricaturiste saoudienne Wadad al-Bakr, la chercheuse irakienne et
doctorante Sana Wajd Ali, le Palestinien Mohamad Dajjani Dawoudi qui travaille
pour l’Institut Washington pour la politique au Proche-Orient, et le soudanais
Ibrahim Sayed Ahmad.
Imam Chalghoumi |
Deux personnalités religieuses
importantes, Hassen Chalghoumi, tunisien basé à Paris, et l’imam libanais Saleh
Hamed, qui avaient tous deux dû faire face à de graves problèmes de sécurité
personnelle. Chalghoumi affiche ouvertement ses relations
avec les milieux juifs et israéliens en France. D’ailleurs il s’est souvent
rendu en Israël, en voyage officiel, pour appeler à normaliser les relations avec
l’État juif.
À l'issue de cette conférence de deux jours à Londres, le
groupe a pris le titre de Conseil arabe pour l'intégration régionale. L’objectif
est de mieux intégrer les pays du Moyen-Orient, notamment en ce qui concerne
leurs relations avec l'État d’Israël. Sami Abdul-Latif Al-Nisf, a fait une
confession profonde en déclarant : «C'est une erreur d'insister pour dire qu'Israël
est un État d’apartheid raciste quand ce n'est clairement pas le cas».
Sami Abdul-Latif Al-Nisf |
Dennis Ross, s’est adressé par vidéoconférence au Conseil
en déclarant : «Vous représentez les voix qui disent assez. Plus il y a de
voix comme la vôtre qui sont prêtes à parler, plus vous construisez votre voix
lorsque vous parlez avec Israël et plus vous influencez les dirigeants
d'Israël. Vous représentez une lueur d’espoir».
Les délégués ont abordé les problèmes soulevés dans les
traités de «paix froide» entre Israël et l'Égypte, ainsi qu'entre Israël
et la Jordanie, et ont exprimé l'espoir que la coopération future se
poursuivrait ailleurs dans la région.
Les participants venaient de tout le monde arabe et
étaient jeunes et âgés, hommes et femmes, diplomates, personnalités des médias
et du monde de l'art, souvent en contradiction avec les dirigeants de leurs
États, mais prenant une approche nuancée et indépendante pour parler de la
résolution du conflit israélo-arabe.
Mohamed Dajani à Auschwitz |
Certains des délégués, tels que Mohammed Dajani, un
universitaire palestinien qui avait choqué le monde arabe en emmenant un groupe
de ses étudiants à Auschwitz, étaient déjà bien connus des Israéliens. Mais
beaucoup d'opinions étaient hautement significatives, non seulement parce
qu'elles étaient de la musique aux oreilles des Juifs et des Israéliens, mais
aussi parce que c'était la première fois que de telles déclarations étaient
faites en public.
Par coïncidence, cette réunion a eu lieu à l'occasion de
l'anniversaire de la visite historique en Israël, de 1977, du président
égyptien Anwar Sadat. De nombreuses histoires personnelles sur les bonnes
relations avec les Juifs ont été rappelées ainsi qu’un appel de plusieurs
participants à l’intention des Juifs pour qu’ils retournent dans les pays
arabes et y travaillent pour la réconciliation. Le professeur Dajani a suggéré
que le nouveau Conseil arabe réunisse et publie des récits d'interactions
étroites avec les Juifs. Une condamnation de la «politisation» de
l'islam a été lancée ainsi que celle du libanais Saleh Hamed, qui a demandé à
l'Europe de réprimer les mosquées dans lesquelles des imams prêchaient la
haine.
L'événement était parrainé par le Center for Peace
Communications basé aux États-Unis, dont le conseil d'administration est dirigé
par Dennis Ross. Le PCC se décrit comme «un groupe d'Américains qui croient
que la sécurité et la prospérité au Moyen-Orient et en Afrique du Nord exigent
une paix entre les peuples».
L’ex-émissaire du Moyen-Orient et Premier ministre
britannique, Tony Blair, a fait une apparition surprise par liaison vidéo à la
fin de l’événement pour saluer la conférence et ses objectifs.
Les organisateurs ont clairement annoncé
que le boycott «bloquait également les espoirs de paix entre les peuples
israélien et palestinien : empêchés d'engager directement l'un ou l'autre des
deux peuples, les Arabes étaient incapables de cultiver des liens qui auraient
pu nous permettre de favoriser la conciliation et le compromis des deux côtés.
En résumé, le boycott a accru les souffrances de nos sociétés et affaibli nos
capacités».
Il est encore difficile de mesurer l’impact que vont
avoir ces personnalités au sein de leurs pays respectifs mais elles
représentent un symbole d’une brèche dans le mur d’incompréhension entre Arabes
et Israéliens. Une initiative à suivre de près sur le terrain.
Bonne nouvelle même si pas reprise par la presse internationale
RépondreSupprimerExcellente initiative en effet. Bravo !
RépondreSupprimerDe plus, des bonnes relations et des échanges avec Israël favoriseraient l'essort technologique dans les pays arabes.
RépondreSupprimerCe genre d'information devrait faire la une de tous les journaux occidentaux