Par Jacques
BENILLOUCHE
Copyright
© Temps et Contretemps
Il
n’est jamais trop tard pour bien faire en politique. Le président Mahmoud Abbas
songe, enfin, à des élections en Cisjordanie alors que les Palestiniens en ont été privés depuis 13 ans. Mais il n’est pas certain qu’il parvienne à surmonter
tous les obstacles. Il a peu de chances de les organiser à Gaza tant que le
Hamas y est au pouvoir. Bien qu’il ait pourtant affirmé que «les élections
palestiniennes devraient avoir lieu en Cisjordanie, à Jérusalem et dans la
bande de Gaza», il est improbable qu’il ait le pouvoir d’assurer des
élections ailleurs qu’en Cisjordanie, à Jérusalem certainement pas puisque la zone-Est a été annexée par Israël.
Bien sûr il souhaite des élections à Jérusalem où résident 360.000 Palestiniens parce qu’il
s’agit d’une partie de la ville qu’il se réserve comme capitale de son futur
État palestinien. Alors des idées sont lancées pour contourner l’interdiction
israélienne, comme celle de placer des isoloirs en dehors des frontières
actuelles d'Israël. Cette solution avait été testée en 2006 lorsque des bureaux
de vote avaient été installés dans la ville palestinienne d’Ar Ram, au nord-est
de Jérusalem. Mais cela décourage les électeurs contraints de parcourir une
longue distance.
L’Autorité
envisage éventuellement un vote en ligne en attribuant des codes spéciaux aux
habitants de Jérusalem sachant que tous les résidents palestiniens de Jérusalem,
âgés de plus de 18 ans, sont automatiquement inscrits sur les listes
électorales palestiniennes.
Jérusalem |
La
question de Gaza est complexe. Le blocus israélien y rend physiquement difficile
la tenue d’élections sans la coopération du Hamas et de l'Autorité palestinienne puisque les déplacements sont très limités avec la Cisjordanie, centre officiel du comité des élections. Le fossé idéologique entre
les clans du Fatah et du Hamas est tel que tout devient impossible. Depuis
2007, plus de cent morts tués dans des combats fratricides empêchent toute
réconciliation. Or la réussite des élections passe par la participation active
du Hamas qui n’est pas du tout acquise. De nombreuses tentatives de
réconciliation ont toutes échoué. Plusieurs accords ont été signés dans
l’euphorie mais ils n’ont jamais été suivis d’un début de réalisation, chacun
restant sur ses positions idéologiques.
Mohammad Shtayyeh |
Cependant,
Mahmoud Abbas ne désarme pas. Il a lancé le mois dernier un appel solennel à
des élections législatives depuis la tribune de l’Assemblée de l’ONU. Le
premier ministre Mohammad Shtayyeh, a fait le voyage au Caire à la tête d’une
délégation pour obtenir la caution égyptienne pour la tenue d’élections. Mais
le Hamas continue à faire obstacle à des élections présidentielles sous le prétexte
fallacieux qu'il exige des élections législatives et présidentielles simultannées. C’est pourquoi Mahmoud Abbas s’est rabattu sur de simples élections
législatives. Mais on voit mal comment le Hamas pourrait accepter la mainmise de
l’Autorité «dans le cadre d'un système politique palestinien unique, d'une
seule autorité légitime, d'une loi et d'une arme légitime». Le Hamas tient
à son indépendance et à ses propres forces militaires indépendantes de
l'Autorité palestinienne.
Sur
le plan international, le blocage concernant le Hamas, considéré comme une
organisation terroriste, est latent, a fortiori lorsque cette organisation est soutenue militairement et financièrement par l’Iran, pays voyou. Aucun pays donateur ne
peut envisager de poursuivre son aide à une Autorité dans laquelle serait
impliqué ouvertement le Hamas.
Ces obstacles concourent à bloquer tout calendrier pour des élections
législatives. Pourtant il devient indispensable de faire participer les
Palestiniens aux décisions prévisibles qui risquent d’intervenir dans un
éventuel processus de paix sous l’égide des États-Unis.
Mais
le Hamas refuse à présent la tenue d'élections législatives avant les
présidentielles. Mouchir Al-Masri, dirigeant du Hamas, a confirmé que son
mouvement exigeait la simultanéité des deux scrutins : «Notre position,
et celle de tous les Palestiniens, est que nous ne voulons pas d’élections
incomplètes ou sélectives et tout ce que nous demandons c’est le respect des
lois et des accords palestiniens. La loi fondamentale palestinienne est claire,
elle stipule que les élections présidentielles et législatives doivent se tenir
le même jour». Le Hamas soutient l’initiative lancée par huit factions
palestiniennes, qui avaient appelé à la tenue d’élections législatives et
présidentielles simultanées.
Mouchir Al-Masri |
Le
président Abbas avait chargé le président de la Commission centrale des
élections, Hanna Nasser, d’entamer des contacts avec toutes les factions
concernées pour la tenue d'élections législatives, qui devraient être suivies,
quelques mois plus tard, par des élections présidentielles. Il a affirmé que
son parti saluait l’initiative du président Abbas de «renouveler la
légitimité des institutions palestiniennes, loin de toute velléité sélective».
L’initiative des huit factions avait pour but de mettre fin à la division et de
promouvoir, une fois de plus, la réconciliation interne.
Hanna Nasser |
Cette
nouvelle initiative s’articule autour de quatre recommandations majeures,
mettant l’accent sur les accords de réconciliation précédents, comme référence
pour mettre un terme à la division. Elle appelle à la réforme des organes de
l’OLP et à considérer la période s’étendant entre octobre 2019 et juillet 2020,
comme une période transitoire, en vue de la réalisation de l’unité nationale. La
dernière recommandation propose la tenue d’élections présidentielles et
législatives à la mi-2020. Une recommandation, comme tous les autres projets
palestiniens, qui risque de rejoindre les précédentes, au rebut de l’Histoire.
On en rirait si ce n'était pas pathétique. Le plus intelligent serait de déclarer l'Autorité Palestinienne en faillite et laisser Bibi se débrouiller avec ça mais il n'aura jamais le courage de le faire.
RépondreSupprimer