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dimanche 27 octobre 2019

Les Arabes, vainqueurs des élections israéliennes


LES ARABES, VAINQUEURS DES ÉLECTIONS ISRAÉLIENNES

Par Jacques BENILLOUCHE
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Députés arabes
            
            On peut triturer les résultats des élections dans tous les sens, les Arabes israéliens sont les vrais vainqueurs des élections du 17 septembre 2019. Il ne s’agit pas seulement de calcul mathématique qui a placé la liste arabe comme troisième formation avec 13 députés mais d’analyse politique. Les Arabes sont à présent entrés de plain-pied dans le jeu politique parce que, d’une part le rassemblement de quatre entités en une seule a gonflé leur effectif à la Knesset et que d’autre part les analystes politiques sont convaincus qu’en remportant plus de sièges, ils ont bloqué la trajectoire de Netanyahou. 



Liste arabe unifiée

      On comprend mieux pourquoi les listes arabes s’étaient associées au Likoud pour voter la dissolution de la Knesset afin d’augmenter la participation arabe aux élections et donc aux résultats. Ils ont ainsi réussi à changer la carte politique car les statistiques ont toujours démontré que le Likoud bénéficiait de deux à trois sièges de la part du vote arabe. L'augmentation du taux de participation arabe a empêché Netanyahou d'arriver en tête et de former une nouvelle coalition.
            Ils ont réussi à ce qu’on parle d’eux, qu’on les consulte même alors que, jusqu’à présent, ils étaient considérés comme citoyens de deuxième zone malgré les 10% d’électeurs qui les ont désignés. En fait un grand changement a été initié, non pas par les dirigeants de la minorité mais par la population arabe qui a imposé aux partis leur intégration dans la vie politique israélienne parce qu’ils sont citoyens à part entière, ce que leur contestent les militants d’extrême-droite.


            Benny Gantz a effectivement la tâche difficile pour réunir une majorité si le Likoud persiste dans son entêtement à imposer la participation de son leader dévalorisé et des partis orthodoxes anachroniques. Il a montré un nouveau visage dans ses récents discours, plus ferme, plus convaincant et plus résolu. Il s’est beaucoup inspiré de la posture d’Yitzhak Rabin avec qui il se trouve des convergences. Il donne à penser qu’il ne renoncera jamais à sa mission et qu’il ira jusqu’au bout. Il espère qu'au final cela bouge au sein du Likoud ; les frondeurs s’affirment mais ne sont pas encore arrivés au point de trahir ouvertement. Ils attendent le moment le plus opportun, celui où on fera appel à eux. Déjà, ils diffusent une affiche qui met en relief Gideon Saar en présence dans l’ordre, des ministres Youval Steinitz, Guilad Erdan et Israël Katz sous l’intitulé ambigu «retourner le Likoud au pays». Une affiche qui en dit long par l’absence de Netanyahou.

            Les négociations sont en cours mais si le Likoud persiste dans son blocage il ne restera plus comme solution à Gantz que de former un gouvernement minoritaire sachant qu’Avigdor Lieberman prendra acte que le Likoud refuse l’union et qu’il finira par rejoindre Gantz. Avec seulement 55 sièges l’opposition ne pourra jamais faire voter de motion de censure.
            Mais les Arabes ne sont pas unanimes ce qui est normal en période de tractations et de marchandages. Le chrétien Mtanès Schéhadé, député président du parti Balad a laissé entendre que son parti de trois députés ne soutiendrait pas automatiquement la mise en place d'un gouvernement minoritaire, sauf dans l'hypothèse où toutes ses demandes seraient acceptées. Mais on voit mal les partis arabes retourner aux élections en mars 2020 avec l’assurance de perdre des plumes alors qu'ils détiennent aujourd'hui des opportunités qu'ils n'ont jamais eues. Ils risquent de perdre la seule chance qui leur permet de peser politiquement.
       L’idée que les partis arabes puissent soutenir un gouvernement, sans même y participer, fait frémir la classe politique de droite et bien sûr les nationalistes. Il n’est pas entré dans les mœurs israéliennes que les Arabes puissent collaborer avec le premier ministre. Pourtant ces partis arabes existent légalement et participent au vote démocratique sans que la Knesset ou la Cour Suprême n’aient eu à s’opposer. Si l’on estime que ces partis n’ont pas le droit d’exister, alors il faut légiférer pour les interdire ce qu’aucun gouvernement de droite n’a jamais songé à faire. D'ailleurs, dès lors qu’on autorise des listes de Juifs orthodoxes, toutes les listes communautaristes ont droit de cité.
Samer Haj-Yehia

            On note un changement notable du comportement des partis arabes qui ne sont plus dans la dénégation de l’existence de l’État d’Israël ; aucun ne prône son éradication. Ayman Odeh a ouvertement annoncé que la liste arabe unifiée, exception faite de Balad, serait prête à soutenir la coalition. Il a rejoint en cela les souhaits de la population arabe qui a exigé de ses dirigeants un changement de discours pour s’intégrer à la société israélienne. 
          Les Arabes ont évolué ; on les trouve dans les hôpitaux et dans les pharmacies, presque en majorité. Ils sont leaders dans les entreprises de construction, très souvent à haut niveau. De nombreux diplômés occupent de grands postes à l’instar de Samer Haj-Yehia, nommé président de la première banque israélienne, la Bank Leumi. La liste est longue de ceux parmi les Arabes qui dirigent des startups. La grande majorité des Arabes israéliens joue le jeu et ne collabore pas avec les terroristes à la grande différence de ceux qui vivent en Cisjordanie. Ils ne s'expliquent pas les procès d'intention qu'on leur fait.
            Ces nouveaux décideurs du pays ne comprennent pas les campagnes d’incitation à la haine à leur encontre. Ils savent que leur participation, d’une manière ou d’une autre, à la gouvernance du pays apporterait beaucoup à leurs villages qui ont besoin d’investissements et de structures nouvelles pour améliorer le sort des habitants. C’est pourquoi, ils ont fait des offres officielles de services : «Dès que le parti bleu et blanc nous approchera, nous aurons une discussion approfondie et démocratique à ce sujet et nous prendrons une décision». 
Diplômés arabes israéliens

         Ils ont compris que pour réduire la violence dans la société arabe il devait collaborer avec l’État d’Israël. D’ailleurs durant les deux campagnes électorales, aucune profession de foi n’a comporté le terme «Palestine» car ils ont compris que ce n’était pas de ce côté qu’ils pourraient résoudre les problèmes d’infrastructure, de logement et surtout de violence. Les partis arabes s'étaient déjà intégrés au jeu politique en 1992, lorsqu’ils avaient recommandé Yitzhak Rabin au poste de Premier ministre et avaient soutenu son gouvernement sans y participer. L’homme qui semble vouloir suivre ses traces aujourd'hui a déjà annoncé qu’il aurait au moins un ministre arabe. Il faut se rappeler que le gouvernement d'Ariel Sharon comptait, en 2001, un ministre arabe, Salah Tarif. Par ailleurs, Oscar Abou Razaq fut nommé Directeur Général du ministère de l'intérieur en mars 2005 ce qui prouve que les Arabes n'ont pas toujours fait peur. 
Gouvernement Rabin 1992

          Les Arabes attendent de Gantz des gestes non politiques pour leur communauté. Ils ne voudraient pas un changement de ton avec la même musique. Ils souhaitent que les aides et subventions reçues par les conseils locaux juifs soient étendues à toutes les localités arabes ce que Rabin avait d’ailleurs promis pour obtenir la neutralité des députés arabes. En effet, en 1992 le gouvernement minoritaire Rabin s’appuyait sur la participation des travaillistes (44 sièges) et Meretz (12 sièges) avec la neutralité des 5 députés arabes. Il a été vite rejoint par les 4 députés Shass. Gantz voudrait appliquer le même scénario en espérant être vite rejoint par des députés qui boucleront sa majorité de 61 députés.

            En raison des problèmes sécuritaires depuis la création d’Israël, la situation d’exclusion de la minorité arabe dans la société israélienne est une réalité, certains mouvements nationalistes juifs allant jusqu’à exiger son expulsion. Pourtant les exigences arabes sont purement sociales et non politiques. Les gouvernements Likoud ont toujours négligé les particularités économiques arabes. Ainsi le manque d’écoles et de classes dans le secteur de l’éducation arabe est aggravé par un manque chronique de moyens (matériel de laboratoire et bibliothèques) qui entraîne une faiblesse du niveau d’enseignement. Or, l’idéologie de la droite est la primauté de l’élément juif sur tous les autres éléments; l’idéologie sioniste reste l’élément moteur. Négliger 20% de la population est une situation complexe.

            Cette opportunité de gouvernement minoritaire fait réfléchir ceux du Likoud qui ont longtemps été écartés de la gouvernance par Netanyahou. Certains ont assimilé l’idée que Netanyahou n’est plus le meilleur candidat pour garantir le maintien au pouvoir de leur parti. Ils songent en coulisses à son remplacement parce qu’ils ne veulent pas renoncer au plaisir du pouvoir. Ils ne se voient pas passer plusieurs années sur les bancs de l’opposition alors que la porte leur est grande ouverte par Bleu-Blanc et qu'ils ont subi la vindicte de leur leader.
Lapid et Shelah

            Il serait illusoire de penser que Benny Gantz va s’orienter vers des élections. Ofer Shelah qui dirige les négociations pour Bleu-Blanc est formel : «Un troisième tour d'élections pourrait marquer une crise de confiance dans la démocratie israélienne. C'est pourquoi je pense que tous les efforts doivent être déployés pour examiner toutes les options. Si cela signifie d'éviter une nouvelle élection, aucune option ne devrait être exclue. Il y a bien sûr un gouvernement qui pourrait durer jusqu'à la fin, soit un gouvernement composé de nous et du Likoud. Nous insisterons pour que ce gouvernement soit formé à la suite d'un processus dans lequel nous rencontrons le Likoud, discutons et fixons des lignes directrices. Ce n’est qu’alors que d’autres partis pourraient adhérer, sur la base d’un accord, et non en bloc. Benny Gantz assumera les fonctions de Premier ministre pendant les deux premières années, laissant ainsi à Netanyahou le temps de traiter de ses problèmes juridiques. S'il surmonte les défis auxquels il est confronté, il sera alors Premier ministre deux ans plus tard. Si ce n'est pas le cas, quelqu'un du Likoud remplira les fonctions de Premier ministre».
            La balle est dans le camp des militants du Likoud qui peuvent décider, soit de partager le pouvoir et de rester dans l'action, soit alors de rejoindre l’opposition qui fera dorénavant abstraction des partis arabes avec le risque d'attendre longtemps avant de retrouver la gouvernance de l'Etat d'Israël.

1 commentaire:

  1. Cette victoire est la conséquence de la division de la classe politique de l’état nation Juif/Israel, la présence d’un parti religieux si contraire à la Halakah et à la Bible (Torah) où le sacré et séparé du profane. La religion détruit la société civile et le progrès - Pour vous convaincra regardez ce qui se passe dans les pays voisins de culte islamique !

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