DÉPUTÉS ARABES : CITOYENS OU CINQUIÈME COLONNE
Par Jacques BENILLOUCHE
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Ayman Odeh |
La déclaration du président de
la liste commune arabe, Ayman Odeh, selon laquelle il serait prêt à siéger, sous
certaines conditions, dans une coalition de centre-gauche a relancé le débat
sur la place des Arabes en Israël. Pour certains, ce sont des citoyens à part
entière et pour d’autres, des éléments antisionistes d’une cinquième colonne.
Cette déclaration a suscité des remous dans la classe politique sachant qu’Ayman
Odeh n’a pas exclu de recommander Benny Gantz comme premier ministre auprès du
président de l’État. Le parti Bleu-Blanc est prudent d’une part parce qu’il
pourrait s’agir d’une manipulation électorale au profit du Likoud et d’autre
part pour ne pas décourager les éventuels dirigeants arabes qui font un effort
de s’intégrer.
Yoaz Hendel |
Le député Yoaz Hendel, a tenu à
faire une mise au point précise : «Bleu-Blanc veut mettre en place un
vaste gouvernement d'union nationale et nationale. Nous respectons les citoyens
israéliens arabes et les considérons comme des citoyens ayant droit à tous les
droits, sauf ceux parmi les partis arabes qui nient fondamentalement l'existence
d'Israël en tant qu'État juif».
Il n’y a pas d’unanimité au sein de la
liste arabe qui comprend quatre partis. Le président du parti Balad, Antas
Shahada, a déclaré : «Je pense que la déclaration d’Ayman Odeh est une
déclaration misérable qui ne représente pas la position de la liste commune.
Nous ne l’acceptons pas. Cette position représente probablement sa position et
peut-être celle de Hadash. En aucun cas la liste commune pourrait faire partie
de la coalition soutenant Gantz». Ahmed Tibi de Hadash est lui-aussi
réticent : «Bleu-blanc et Gantz ne sont pas notre tasse de thé, ils
sont loin de répondre à nos exigences et ils s’efforcent en général de former
un gouvernement d’union avec le Likoud».
Le camp démocratique est le seul à avoir eu une réaction positive et encourageante :
«Ayman Odeh comprend que la perception doit changer: dans la démocratie
véritable, tous les citoyens ont leur place à la table, même à la Knesset, même
au gouvernement. C’est le moyen de garder Israël à la fois sioniste, équitable
et démocratique. Pour le dire clairement après 70 ans et commencer à aller de
l'avant, c'est du courage».
En fait il faut savoir si les
Arabes sont qualifiés pour participer à la gestion du pays car, dans le cas
contraire, il faudrait purement et simplement interdire leurs partis et les
forcer à se présenter uniquement au sein des partis «sionistes».
Pourtant en 1992 Yitzhak Rabin
avait négocié avec les Arabes leur neutralité pour son gouvernement minoritaire
en échange d’avantages économiques spéciaux. Aujourd’hui ils ont à nouveau des
revendications qu’ils pourraient facilement obtenir. Ils souhaitent créer une
nouvelle ville, un hôpital et une université arabes. Ils voudraient obtenir une
augmentation de l'emploi arabe dans le secteur public, sans exiger forcément un
ministère.
Les militants du Likoud lancent
des cris d’orfraies à l’idée que les Arabes puissent entrer dans un
gouvernement de coalition. Pourtant, les statistiques officielles ont établi qu’aux
dernières élections, les électeurs arabes dans leurs villages ont voté à 35%
pour le Likoud. On n’a pas entendu le Likoud rejeter ces voix car elles lui ont
permis d’arriver au sommet. C’est un fait avéré mais aussi un paradoxe qui s’explique
soit par la mauvaise humeur de l’électorat arabe qui n’a pas accepté la
scission de la liste unique en deux entités concurrentes, soit par la volonté de
maintenir un statu quo qui convient bien à la communauté arabe.
Bien qu’ils représentent 20% du corps électoral, les
Arabes sont délaissés par les partis politiques, à l’exception de Meretz, le
seul qui place dans sa liste un Arabe en position éligible. Ils sont considérés
comme des citoyens à part sous prétexte qu’ils ont de la sympathie pour leurs
familles de Cisjordanie, voire de Gaza. Pourtant, ils sont de plus en plus
impliqués dans la vie économique du pays puisqu’un Arabe, Samer Haj-Yehia, vient en effet de
prendre la présidence de la plus grande banque israélienne, la Bank Leumi.
Cependant ni Bleu-Blanc et ni le Likoud ne leur ont laissé une place éligible dans leurs listes ; certains craignent un conflit avec leurs éléments nationalistes juifs.
Cependant ni Bleu-Blanc et ni le Likoud ne leur ont laissé une place éligible dans leurs listes ; certains craignent un conflit avec leurs éléments nationalistes juifs.
Il est difficile d’ignorer une liste de députés qui
pèse entre 11 et 12 sièges, voire plus si les Arabes se déplacent cette fois en
masse dans les bureaux de vote. Netanyahou n’est pas étranger à cette mise à
l’écart d’une communauté qui est systématiquement vouée aux gémonies. Il a
érigé son slogan «Bibi ou Tibi» en épouvantail contre «les Arabes qui
se rendent aux urnes en hordes. Les organisations gauchistes les amènent en bus !». Certains médias participent à la campagne contre Benny Gantz en
publiant des sondages où trois clans sont définis, le Likoud, Lieberman et le «clan
arabe de gauche» incluant Benny Gantz pour bien montrer que voter pour
Gantz était synonyme d’un vote pour les Arabes.
Nombreux sont les
Arabes qui sont convaincus d’être les laissés pour compte de la société israélienne
en raison de la prolongation du conflit israélo-palestinien qui ne fait
qu’aggraver une hostilité réciproque. Les nationalistes juifs considèrent les
Arabes restés dans les frontières de l’État juif comme des Palestiniens faisant
partie du monde arabe, voire une cinquième colonne en puissance.
Diplômés arabes israéliens |
Malgré cela, sur la base de critères
mesurables (revenu, éducation, infrastructures, emploi, justice, services
sociaux), les Arabes israéliens ont comblé une grande partie du retard par
rapport à leurs concitoyens juifs bien qu’ils soient exclus des centres de
pouvoir et fortement sous-représentés au sein des institutions gouvernementales. Cependant les Israéliens assimilent tous les Arabes à des terroristes. Mais il existe une certitude, quel que soit le nombre de députés arabes élus,
ils influeront de manière notable sur les possibilités de coalition
gouvernementale et seront les faiseurs de roi. Si Benny Gantz arrive en tête, il pourrait constituer un gouvernement minoritaire avec la neutralité des Arabes en attendant que quelques éléments de droite le rejoignent. Sinon la situation restera bloquée.
Tu remets les pendules à l'heure dans un article bourré d'informations.
RépondreSupprimerJ'avoue que j'ai du mal avec le racisme en général alors je n'arrive pas à comprendre qu'on puisse généraliser et considérer que tous les citoyens arabes d'Israël doivent être considérés différemment (sauf ceux qui votent Likoud :D et dont les mêmes qui les rejettent, se gardent bien de jeter le bout de papier qui fait office de bulletin de vote et s'empressent de le comptabiliser).
Heureuse cependant de voter pour le seul parti qui met un arabe en position éligible :)