Israël élections avril 2019
BENNY GANTZ
PRÉPARE L’ÈRE POST-NETANYAHOU
Par Jacques
BENILLOUCHE
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Benny Gantz qu’on critiquait d'être silencieux a fini par prendre la
parole au soir du 29 janvier au Parc des expositions de Tel-Aviv. Ceux qui
attendaient un programme détaillé en ont été pour leurs frais. Il s’agissait
pour lui de lancer sa campagne avec celui qui sera son partenaire, Moshé
Yaalon, son ancien chef et son ancien ministre. C’est une première prise de contact avec les électeurs après une
période stratégique de mutisme. Il a abordé les grandes lignes de sa campagne
sans entrer dans le détail, se bornant simplement à préciser qu’il constituera
un gouvernement nouveau, antithèse de l’actuel, qu’il veut débarrassé de la
corruption et axé sur la sécurité du pays. Il a surtout dit ce qu'il ne ferait pas. Son gouvernement ne critiquera pas Tsahal et son chef, la police, le procureur, la Cour suprême et le président de l'Etat. Bref il respectera les corps constitués.
Un premier meeting n’a pas pour but de détailler un
programme de gouvernement mais de donner la ligne directrice dans lequel il sera mené. Gantz
a d'abord établi un état critique des
lieux avant de définir précisément sa future tâche. Il serait prétentieux de croire
que quelques dizaines de minutes suffisent à tracer les lignes d’un programme
de quatre années. Cela ne pourrait être envisagé que lorsque la
liste complète des candidats sera connue le 21 février afin de cerner les personnalités qui agiront auprès de
Benny Gantz et qui insuffleront l’orientation politique, économique,
diplomatique et sécuritaire du prochain gouvernement.
Une fois les grandes lignes définies, Benny Gantz a prévu d'organiser plusieurs meetings avec, pour chacun, un thème particulier. Il faudra plus de
dix réunions pour finaliser le programme définitif. Les militants du Likoud, dans une sorte de méthode Coué, l’accusent déjà maladroitement d’avoir un programme vide et crient victoire sur la seule
base de ce premier meeting de présentation. Ils restent confiants que Gantz ne
dépassera pas les 14 sièges qui lui ont été attribués par les sondeurs, comme si la campagne électorale ne servait à rien.
Gantz est convaincu «qu’un mauvais vent se lève en
Israël et que le gouvernement crée un facteur de division dommageable pour le
pays». Dès son entrée il a annoncé la couleur : «en dehors de ma
famille, rien ne m'est plus cher que l'État d'Israël. J'aime Israël, j'en suis
fier et engagé. Pour moi, Israël passe avant tout. Citoyens d'Israël ici ou
chez eux, je le répète: je ne m'engage que pour vous».
Il a affirmé qu’il
voulait sortir des clivages pour rassembler large. «Je suis ici ce soir
parce que je crains pour Israël. La nation est forte, le pays est incroyable,
mais un vent mauvais souffle. Le conflit entre la gauche et la droite nous
déchire; le choc entre religieux et laïcs nous divise. La tension entre
Juifs et non-Juifs nous menace. L'arène politique est empoisonnée. À mon avis,
les dirigeants actuels sont obsédés par eux-mêmes, ni par vous, ni par nous. Faites-moi
confiance, je suis fier de mon pays, mais ces derniers temps, de plus en plus
de gens, de gauche à droite, éprouvent un profond embarras à la lumière du
fonctionnement du gouvernement. Un gouvernement fort rassemble et ne divise pas et
ne conquiert pas. Au lieu de servir la population, il ne voit pas l'individu,
le coût de la vie élevé et les jeunes qui n'ont pas les moyens d'acheter un
logement. Aucun dirigeant israélien n'est roi; l'État c’est nous tous. Je suis
ici aujourd'hui, quatre ans après mon mandat de chef d’État-major, et sollicite
votre confiance afin que je puisse diriger l'État d'Israël. Le 9 avril, je
mettrai en place un gouvernement patriotique, fort et responsable».
Le
général a assuré qu’il bloquerait les manœuvres contre l’État d’Israël de la
part du président iranien Hassan Rouhani, du chef des Gardiens de la révolution
iranien Qassem Soleimani, du chef militaire du Hamas Yahya Sinwar et du
secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah en hypothéquant d’ailleurs leur
vie. Il a tenu à préciser qu'Israël n'avait pas l'intention de menacer la
souveraineté iranienne mais ne tolérerait aucune menace. Il a également précisé qu'il autoriserait l'aide humanitaire à Gaza. Sur le plan sécuritaire,
il veut plus d’actes et moins de mots, tout en étant discret sur les solutions
sécuritaires qui ne doivent pas être annoncées à tout vent.
Benny
Gantz espère que d’autres partis le rejoindront, comme par exemple Yesh Atid de Yaïr
Lapid ou Orly-Abecassis transfuge du parti d'Avigdor Lieberman, et que d’autres individualités viendront renforcer son équipe en songeant
à Gabi Ashkenazi. C'est la seule chance de parvenir à la première place et d'être désigné pour constituer le nouveau gouvernement. De nombreux noms circulent à des places éligibles comme Yoaz
Hendel, journaliste, Zvi Hauser, ancien secrétaire du gouvernement de
Netanyahou, Hili Tropper, éducatrice, Michael Biton, ancien maire de Yerucham,
Alon Schuster, ancien président du conseil régional de Shaar Hanegev, Miki
Haimovich présentatrice de télévision et Asaf Zamir, ancien premier adjoint au maire de Tel
Aviv. Il veut un monde politique nouveau. En revanche, la diversité de ces candidats montre que Gantz refuse d’être classifié
à droite ou à gauche alors que le Likoud l’a déjà catalogué comme «gauchiste»
en compagnie d’ailleurs du président Rivlin.
Il a
donné quelques pistes sécuritaires : «Nous allons préserver la
responsabilité de la sécurité sur l'ensemble de la Terre d'Israël, mais nous ne
pouvons pas nous transformer en un État binational. Nous préserverons les
hauteurs du Golan, qui resteront entre nos mains pour toujours. Jérusalem
restera pour toujours la capitale de l’État d’Israël et du peuple juif».
Yaalon et Gantz |
Dans
son discours il n’a jamais attaqué nominativement Benjamin Netanyahou disant
simplement que «Netanyahou n'est pas un roi, son gouvernement sème et incite à la division. Il ne peut rester en place s’il est mis en
accusation. Un
premier ministre ne peut pas présider Israël lorsqu'un acte d'accusation a été
déposé contre lui». Gantz prévoit qu'un
gouvernement qu'il présiderait «s'efforcera d'atteindre la paix et ne
manquera pas une occasion de parvenir à la paix dans la région».
Benny Gantz semble pour l’instant refuser
d’accueillir sur sa liste d’anciens députés, à la manière d’Emmanuel Macron qui
n’a choisi que des hommes neufs à l’Assemblée. Cela risque d’être une erreur
car la Knesset a besoin de députés expérimentés qui pourront former les
débutants. Le gouvernement doit disposer de grosses pointures pour la diplomatie et les finances. Il a déclaré que la loi devrait «exprimer le lien profond
et inséparable entre les communautés juive et druze israéliennes, et pas
seulement au combat, mais dans la vie aussi, pas seulement dans les
difficultés, mais dans les bons moments aussi. Nous le ferons ensemble». Il
a donc assuré qu’il apporterait des modifications à la loi sur l’État-nation.
Enfin il a assuré son auditoire que sa
campagne sera propre et qu’aucune attaque nominative ne sera tolérée de la part
de son entourage, préférant se placer sur le registre du combat des idées. Le
défi est grand pour lui. Ou bien il consolide l’élan de renouveau exigé par la
population et rassemble largement pour se hisser comme premier parti après les
élections afin d'acquérir le droit de constituer un gouvernement, ou bien il
finira comme ceux qui l’ont précédé comme force d’appoint à un gouvernement de
droite ou comme chef de l’opposition.
Les sondages montrent qu’une grande force
regroupant Gantz, Yaalon, Lapid, Livni, Gabbay et Barak pourrait enlever 40
sièges face à un Likoud de 29 députés. Il n’est pas interdit de rêver. Tout
dépendra du programme précis qui sera établi et des hommes et femmes qui le
mettront en place. Encore faudrait-il que les ego soient rangés dans les oubliettes.
Langue de bois que tout cela ! Est-ce que Gantz saura, comme Bibi l'a fait, parler (presque) d'égal à égal avec les présidents des grandes puissances actuelles ? Rien ne le prouve. Est-ce qu'il serait capable d'être aussi pédagogique que Bibi, démontrant devant les parlementaires américains à Washington, la politique génocidaire de l'Iran ? Rien ne le prouve. Les Israéliens, qui n'ont aucun recul sur leur actualité, et dont la culture politique est très superficielle, sont une proie facile pour les médias, qui leur ont vendu, avant même que la justice ait fait son travail, la culpabilité de Nétanyahou. Les prochaines élections seront un test de la naïveté électorale des Israéliens. En attendant, une large majorité silencieuse de citoyens pschoutim, qui n'ont pour tout compas que leur profond bon sens, sauront renouveller leur confiance à celui que tous cherchent à salir et à démoniser. Ils refuseront de cautionner la démarche aussi masochiste qu’irresponsable de ceux qui appellent au "changement"....
RépondreSupprimerTel que Lapid, et les quelques autres avant lui, il fera 1 ou 2 mandat (Et pas en tant que 1er ministre) et hop, on n'en entendra plus parler.
RépondreSupprimerLes médias israéliens (Superficiels au possible) nous sortent toujours de leur chapeau leur "Messie" et grâce a D. ça se transforme toujours en soufflet. A bon entendeur...