TSAHAL EST LE NOUVEAU BOUC ÉMISSAIRE POLITIQUE
Par
Jacques BENILLOUCHE
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C’est toujours ainsi. Les langues des ministres se délient une fois qu’ils
quittent leurs fonctions. Cela dénote leur courage quand ils se taisent pour ne
pas perdre leur portefeuille. Depuis sa démission, Avigdor Lieberman lance des
piques sur les uns et les autres, de manière régulière, en cherchant à faire
endosser à Tsahal les carences du pouvoir politique. Il n’ignore cependant pas
que l’armée est aux ordres du pouvoir civil, comme dans toutes les démocraties,
et qu’elle ne fait qu’exécuter les directives du gouvernement. Ainsi toute
critique sur le comportement politique du chef d’État-major est superflue, voire
irresponsable.
Avigdor Lieberman a ainsi critiqué
Gadi Eizenkot sur la chaîne-2 israélienne en l’assimilant à un dirigeant de la Paix
Maintenant, l’ONG de gauche qui prône la création d’un État palestinien aux
côtés d’Israël. L’ancien ministre de la défense est donc revenu sur le
traitement du conflit de Gaza en accusant le chef d’État-major de mollesse. Le
chef militaire a effectivement toujours exprimé son opposition à une opération terrestre dans
la bande de Gaza, parce que, selon lui, «une telle opération n'a
aucune justification, car elle ne sert à rien». Il estime que le danger est ailleurs et qu'Israël est confronté aux Gardiens iraniens de la révolution islamique, qui se renforcent de l'autre côté de la frontière syrienne, ainsi qu'au Hezbollah qui a pris du galon depuis son intervention armée au Liban, au Hamas et au Djihad islamique à Gaza,
Rien
n’empêchait Lieberman, en tant que ministre de tutelle, d’exiger une telle
action mais il a été mis en minorité dans le cadre d’une réunion militaire en
comité restreint durant laquelle aucun officier supérieur présent, ne l’a
soutenu au point de lui faire dire : «Je me sens parfois ici comme si
j'étais en discussion avec les dirigeants de La Paix Maintenant». Insulte
suprême !
Les relations entre Lieberman et
Eizenkot ont été conflictuelles car ils divergeaient sur la plupart des
questions militaires tant en ce qui concerne les tunnels au Nord que sur
l’attitude à adopter avec le Hamas. En septembre 2018, le ministre de la
défense avait même réclamé l’intervention des services secrets pour faire cesser les
fuites provenant du cabinet de sécurité, après la diffusion de propos
confidentiels sur les risques d’une flambée de violences en Cisjordanie. Le
général Eizenkot avait prévenu le cabinet de sécurité que les Territoires
palestiniens, y compris la Cisjordanie, risquait de connaître prochainement un
accès de tension. Lieberman avait alors soupçonné Eizenkot d’être à l’origine
de ces fuites : «Les fuites du cabinet sont interdites et
dangereuses. Faire fuiter des propos du chef d’état-major revient à franchir
une ligne rouge et représente un réel danger pour la sécurité de l’État».
Gadi Eizenkot avait en effet proposé au
cabinet de sécurité de renforcer l’aide économique aux Palestiniens en
Cisjordanie, de trouver des solutions pour mettre fin à la crise humanitaire à
Gaza et surtout pour concentrer les troupes combattantes vers le nord, sans
avoir à faire appel aux réservistes en cas de conflit. Il avait décidé de
porter toute son attention sur le Hezbollah qui agissait à l’ombre de la FINUL
en construisant des tunnels transfrontaliers pour attaquer par surprise les
habitants israéliens en Galilée. Tsahal suivait depuis longtemps l’avancement
des travaux de la milice chiite libanaise mais n’approuvait pas le tintamarre
médiatique fait autour de la découverte de deux tunnels qui semblait tomber
bien à propos pour camoufler l’inculpation de corruption, de fraude et d'abus
de confiance du premier ministre.
Ces gesticulations verbales s’expliquent
par l’approche des élections prévues en 2019 et par la nécessité des leaders
politiques de prendre leurs marques. Mais impliquer Tsahal dans le débat
politique risque d’être dangereux pour l’unité du pays. L’armée occupe une
place centrale dans la vie publique d’Israël, parce qu’elle a mené sept grandes
guerres et plusieurs offensives et opérations militaires, souvent avec l’aide de
conscrits, ces jeunes qui servent sous l’uniforme pendant trois ans. Aujourd'hui elle est confrontée à plusieurs défis. Il s’agit
d’une l’institution nationale qui est tenue en haute estime par la population
israélienne.
Aujourd’hui le premier ministre est devenu, selon la loi parce que le poste est vacant, le ministre
de la défense, de quoi se construire une image de commandant en chef. Il n’est
pas question pour lui de nommer un nouveau ministre de la défense qui serait sous le feu des projecteurs et qui risque de devenir, en cette période de
tension sécuritaire, un rival potentiel. En tant qu’ancien de Sayeret Maatkal,
l’Unité d’élite de reconnaissance de l'État-major, il s’estime qualifié pour le
poste.
Malgré cela il ne porte pas trop dans son cœur les militaires depuis les
accords d'Oslo, auxquels il était profondément opposé, et qui avaient vu de
nombreux généraux participer à la négociation. De cette période, date la rupture
entre Netanyahou et Tsahal. Mais ce n’est pas une raison pour que l’armée
devienne le bouc émissaire dans les combats politiques.
2 commentaires:
Jacques, en tant que journaliste, tu essaies de ne pas prendre parti, mais moi en tant que lecteur, je le peux.
D'abord je crois que Bibi est capable de tout sacrifier pour eviter d'etre inculpe, Etat d'Israel compris!
Ensuite, il y a, depuis quelques annees, un changement complet de personnel dans Tsahal, surtout au niveau du commandement secondaire. Les kibboutznikkim ont disparu, renplaces par les jeunes issus du sionisme-religieux. Ce qui fait que Tsahal a change de bord, politiquement parlant, d'ou les amenagements que Liebermann, Bibi et Bennet peuvent faire sur son dos. Gadi Eisenkott est probablement, meme si il ne l'a jamais dit, favorable au Likoud. Cela pourrait expliquer les "fuites" de Liebermann.
L'évolution de Tsahal vers le sionisme religieux se fait au niveau -si je puis dire- populaire dans la jeunesse qui intégre l'armée.
On la retrouve en nombre chez les soldats, sous officiers et officiers dans les excellentes unités de Golani entre autres et notamment.
Mais cette tendance ne se refléte pas encore chez les généraux ainsi qu'on a pu le constater depuis des décennies.
Quant à avancer que Gadi Eisenkott serait favorable au Likoud cela n'engage à rien car comme le rappelle avec justesse Jacques Benillouche le Likoud dirigé par Natanyahou décide seul .Or ce Likoud sous l'emprise de son dirigeant se montre peu favorable à prendre le risque de sortir du statu quo et donc bloque toute initiative militaire susceptible de remise en cause.
Que cela plaise ou non, telle est la realité meme si elle se cache sous des mensonges -hypothétiques ou avérés?-destinés a temporiser en utilisant le péril iranien que Natanyahou agite depuis des années.
En vérité Natanyahou est terrorisé à l'idee de renverser le Hamas aboutissant à une situation qui profiterait à l'olp d'Abou Mazen lui permettant de s'installer à Gaza tout en poussant à la creation d'un Etat Palestinien avec l'aide de la "communauté internationale" sous l'égide d'une ONU complaisante antiisraélienne dominée par les pays arabes et le tiers monde bien sur avec la bénédiction de la France toujours prete à nuire à Israel en compagnie de quelques pays de l'UE.
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