L’ÉCHIQUIER GAUCHE-DROITE S’EST INVERSÉ POUR GAZA
Par Jacques BENILLOUCHE
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Cabinet de sécurité israélien |
A lire les réactions des uns et des autres dirigeants politiques, on ne comprend plus la stratégie des partis politiques. Un renversement de tendance a fait bouger la gauche traditionnelle vers les options de droite tandis que la droite s’est retrouvée dans la ligne de conduite gauchiste. Les troubles de Gaza de 2018 ne finissent pas d’étonner par l’ampleur des conséquences.
Destructions à Gaza |
Alors que des
centaines de roquettes ne cessaient de pleuvoir sur tout le sud du pays,
Benjamin Netanyahou n’envisageait pas d’opération à Gaza pour privilégier un
cessez-le-feu au détriment de la crédibilité de l’armée et de la capacité de
dissuasion du pays. La gauche exigeait en revanche une action décisive de Gadi
Eizenkot et de son État-major, plus compétents en la matière. Effectivement, les tiroirs de la
Kyria sont pleins de projets d’intervention échafaudés par les experts
militaires de Tsahal qui sont exclusivement aux ordres du pouvoir civil.
La
première Intifada, la Guerre des pierres, fut un soulèvement de la
population palestinienne contre Israël qui a débuté le 9 décembre 1987 et qui a
pris fin en 1993 lors de la signature des accords d'Oslo. Contrairement à la
réputation de défaitiste affublée à la gauche, et de complicité avec les Palestiniens,
le gouvernement travailliste s’était montré ferme pour éviter d’afficher une
quelconque faiblesse qui pouvait revigorer les émeutiers. Le premier ministre
travailliste de l’époque, Yitzhak Rabin avait déclaré à la Knesset : «Nous
imposerons la loi et l'ordre dans les territoires occupés, même si cela doit se
faire dans la douleur. S'il le faut, brisez-leur les bras et les jambes».
À la suite de l'échec
des forces régulières, les gardes-frontières, les bérets verts, avaient d’abord
été appelés par le gouvernement israélien pour mettre un terme à la révolte
populaire, certes parfois avec brutalité. Mais l'engagement des bérets verts ne
changea pas la situation sur le terrain. L'armée fut alors autorisée à ouvrir
le feu en cas d'attaque par une personne de plus de 12 ans, âge considéré comme
adulte pour un manifestant. A ce moment
il avait été décidé de créer deux nouvelles unités, composées d’arabisants, qui ont opéré en Cisjordanie et à Gaza. Rabin
voulait prouver que la terreur pouvait être vaincue par une intervention
militaire. La gauche, qui a toujours été accusée d’avoir capitulé à Oslo, a prouvé
qu’elle savait faire preuve de fermeté contre les
émeutiers, quand la situation l’exigeait.
Aujourd’hui la droite
au pouvoir a revêtu les habits pacifiques de la gauche après avoir affirmé :
«La paix se fait avec nos ennemis. Nous devons épuiser toutes les
possibilités; rien ne sert de se battre, car on finira par se retrouver au même
endroit». En revanche, la gauche s’est parée de ses habits militaires pour
exiger une opération à Gaza, même s’il fallait passer par des morts des deux
côtés. En fait les questions politiques ont dominé car cette attitude est purement
anti-Netanyahou, sans référence ni à la stratégie militaire, ni aux intérêts de
l’État.
Distribution de dollars à Gaza |
Benjamin Netanyahou a
opté pour une politique de retenue. Certains médias israéliens s’étonnent des
efforts de paix affichés ces dernières semaines. Ils avaient même critiqué la
décision du premier ministre d’autoriser le Qatar à acheminer 15 millions de
dollars afin de payer les salaires des fonctionnaires dans la bande de Gaza. Il
avait justifié cette décision en arguant que cela contribuerait à ramener le
calme : «Je ne reculerai pas
devant une guerre nécessaire mais je veux l’éviter si elle n’est pas
indispensable». C’est un peu comme si le Likoud s’était réincarné en La
Paix maintenant, le mouvement pacifiste israélien.
Le centre et la gauche
ont alors arboré leurs treillis militaires. En visite dans les villes situées à
la frontière avec Gaza, les dirigeants de l'opposition, l'Union sioniste et
Yesh Atid, avaient insisté pour que le gouvernement soit plus sévère face aux
attaques et maintienne la dissuasion israélienne adopter une ligne de conduite
plus dure contre la bande de Gaza face au bombardement implacable
de roquettes. Après s'être rendu dans la ville d'Ashkelon et avoir passé une
bonne partie de la nuit dans des abris anti-bombes, le leader travailliste Avi
Gabbay a critiqué Netanyahou pour son «échec à rétablir le calme».
Il a estimé qu'Israël devait adopter une approche à deux volets à Gaza : «Frappez
le Hamas d'une main, mais cherchez de l'autre une solution diplomatique qui
mette fin à cette escalade».
Avi Gabbay et Amir Peretz à la frontière de Gaza |
Yair Lapid, dirigeant
du parti Yesh Atid, a déclaré qu'un accord avec le Hamas ne devrait être conclu
«qu'après le rétablissement de la dissuasion. Le seul travail du
gouvernement est d'assurer la tranquillité des enfants de la périphérie de
Gaza, d'assurer la tranquillité du sud, et cela ne sera possible qu'après le
renouvellement de la dissuasion. Le premier ministre a déclaré il y a quelques
jours à Paris qu'il n'y avait pas de solution pour Gaza. C'est sans précédent,
pour un premier ministre, de dire qu'il n'y a pas de solution, lorsque des
milliers de nos enfants de la périphérie de Gaza sont dans des abris
anti-bombes et que, dans les médias, nous voyons le chef du Hamas Ismail
Haniyeh se promener librement dans les rues de Gaza. Il existe une solution :
frapper durement les terroristes de Gaza et c’est après que nous aurons
retrouvé la dissuasion, que nous pourrons revenir à parler d’un accord».
Tamar Zandberg |
Seul le parti Meretz à
l’extrême-gauche, qui se dit le tenant de la gauche historique depuis que les
travaillistes se sont déportés vers le centre, reste fidèle à sa tradition. En
effet, sa présidente Tamar Zandberg ne transige pas : «Nous ne pouvons
pas avoir une autre guerre. La guerre signifie plus de soldats morts et plus
d'enfants dans des abris, et à la fin, nous serons de retour là où nous avons
commencé. Le gouvernement doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour
parvenir à un cessez-le-feu dès que possible, puis rechercher une plus grande
solution diplomatique». Elle a d’ailleurs reproché à Gabbay et à
Lapid d'avoir «rejoint les belligérants» après avoir
critiqué Netanyahou pour son attitude moins sévère à l'égard du Hamas et pour
l'avoir poussé à la guerre. Elle a poursuivi : «Il est tentant de
s'attaquer à l'hypocrisie de Bibi concernant le Hamas. En effet, Lapid et
Gabbay n'ont pas résisté à la tentation, rejoignant les bellicistes et essayant
de l'attaquer de la droite».
Lieberman en 2015
La position du
ministre de la défense étonne aussi car on l’accuse d’avoir montré une telle
indécision et un tel aveu d'impuissance que l’adversaire ne le respecte plus et
ne craint plus la force. Le Lieberman de
2015 n’est plus celui d’aujourd’hui puisqu’il avait déclaré : « Quand je serai ministre de la Défense, ça sera la fin du Hamas». Ne voulant pas se démarquer de ses prises de positions antérieures, le ministre de la Défense a convoqué une conférence de presse surprise, le mercredi 14 novembre, pour annoncer sa démission du gouvernement et donc forcer des élections législatives anticipées.
Le Cabinet de sécurité, sur pression de Netanyahou, a approuvé dans sa majorité sa décision de cessez-le-feu avec le Hamas. Les ministres nationalistes, qui avaient proposé des plans alternatifs durs, se sont pliés aux injonctions du premier ministre. Il en a été ainsi de Naftali Bennett, d’Avigdor Lieberman mais aussi de Yuval Steinitz, de Ze'ev Elkin et d’Ayelet Shaked qui ont fini par exprimer leur soutien en faveur du cessez-le-feu.
Le Cabinet de sécurité, sur pression de Netanyahou, a approuvé dans sa majorité sa décision de cessez-le-feu avec le Hamas. Les ministres nationalistes, qui avaient proposé des plans alternatifs durs, se sont pliés aux injonctions du premier ministre. Il en a été ainsi de Naftali Bennett, d’Avigdor Lieberman mais aussi de Yuval Steinitz, de Ze'ev Elkin et d’Ayelet Shaked qui ont fini par exprimer leur soutien en faveur du cessez-le-feu.
Mais on s’étonne du
silence gouvernemental. Dans un pays démocratique où la liberté de la presse
est reine, les seules informations diffusées proviennent du Hamas. Netanyahou suit effectivement les recommandations des
services sécuritaires et de l’armée qui ne sont pas favorables à une
intervention terrestre à Gaza. En réalité, aucun des deux protagonistes du
conflit n’a intérêt à une nouvelle guerre. Les Israéliens sont convaincus que
tout passe par l’allègement de la pression sur la population palestinienne.
Quant au Hamas, malgré les roquettes tirées pour affirmer son pouvoir auprès
des masses sensibles à la notion de résistance, il sait qu’il ne pourra
continuer à gouverner que s’il répond d’abord aux besoins primaires de sa
population soumise à une crise économique terrible. D’ailleurs Yahya
Sinwar, chef du Hamas à Gaza, avait affirmé début octobre au quotidien La
Repubblica : «Je ne dis pas que je ne me battrai plus. Je dis que je ne
veux plus de guerres. Je veux la fin du siège».
Haniyeh et Sinwar |
Loin est le temps où
les journalistes et intellectuels de gauche étaient persuadés qu'il était
impossible de vaincre le terrorisme, puisque selon eux les exemples venaient
des Américains au Vietnam, des Soviétiques en Afghanistan, des Français en
Algérie et même des Israéliens au Liban. Loin est le temps où la gauche israélienne s’opposait à l’entrée de troupes à
Gaza, à Djénine ou à Naplouse. La situation s’est inversée.
pour un homme qui se definit a droite en Israel il est difficile de comprendre Natanyahou .
RépondreSupprimerSa vision a long terme est peut etre ce que vous avez ecrit dans un excellent article precedent c est a dire la separation de Gaza du reste de l AP ?
En attendant dans les prochains jours une nouvelle attaque des terroristes de gaza!
J ai perdu confiance dans Bibi
Tout ça n’est que de la politique !!! C’est trop facile pour la gauche de dire qu’ils auraient voulu entrer en guerre.
RépondreSupprimerD’autre part, une guerre oui c’est certain mais certainement pas en envoyant nos enfants dans la gueule du loup !! Mais plutôt une guerre aérienne ou on ne risque pas la vie de nos enfants et ça, ni la droite et encore moins la gauche ne feraient une chose pareille !!
En faisant une vraie opération aérienne, nous pourrions leur montrer une fois pour toute la force de notre armée et de notre état et ça les calmerait !!! C’est sûr qu’il y aurait des morts mais après tout il ne faut pas oublier que nous avons affaire à des terroristes !!!
RépondreSupprimerS il y avait des élections anticipées je ne suis pas sûr que la gauche l emporterait .
RépondreSupprimerBien sûr tout le monde y compris la gauche souhaitait une bonne Leçon au Hamas .
Mais je crois que les choses sont devenues très complexes . Il n y a plus unanimité des pays de la région contre Israël . Auparavant les décisions étaient faciles à prendre. On y va quoiqu il arrive et c était la gauche au pouvoir .
Aujourd hui Israël ne craint pas les gazaouis et est trop fort. Une petite tape suffit et c est ce que l armée a fait . De bonnes destructions mais pas de victimes .
Hypothèse: on détruit gaza. C est facile . On a gagné et après ? Chacun peut imaginer la situation
Et même si nous sommes un État fort ce n est qu à l échelle de la région .
Pas d excès de confiance qui pourrait mal tourner.
Nous n avons pas d espace stratégique ,
nous sommes armés
Mais pas pour projeter une force .
Il y a des tas de paramètres que nous ne connaissons pas et donc nous ne pouvons avoir une idée précise de la situation .
Après réflexion je pense que Netanyahu soutenu ,je crois par l état major de l armée, prend les bonnes décisions .
Le danger actuel c'est de se battre sur deux fronts. Le front le plus dangereux est celui du Hezbollah - libanais qui contrôle le pays du Cèdre ! Le reste n'est que politique du pire !
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