Les arabes de jérusalem ne jouent pas le jeu électoral
Par Jacques BENILLOUCHE
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Les Arabes de Jérusalem ont des droits qu’ils ne semblent pas vouloir défendre. Les élections municipales auront lieu en Israël le 30 octobre 2018,
y compris à Jérusalem-Est mais des leaders influents palestiniens appellent la
population arabe à les boycotter. La démocratie locale en prend un coup et cela
donne des arguments aux nationalistes juifs de Cisjordanie pour justifier la mise à l'écart des Arabes de la gouvernance.
Sheikh Muhammad Hussein |
À Jérusalem-Est, 360.000
habitants ont le statut légal de résidents permanents, soit environ 40% des
habitants de la ville et 200.000 d'entre eux disposent depuis 1967 du droit de
vote uniquement pour les élections locales et non pas pour les députés de la
Knesset.
Des hauts responsables palestiniens, parmi eux d’éminents religieux, ont
pris position pour empêcher une participation arabe aux élections. Sheikh
Muhammad Hussein, grand mufti de Jérusalem et autorité palestinienne reconnue,
a publié une fatwa (décision religieuse) interdisant la participation aux
élections du maire. Sheikh Ikrima Sabri, prédicateur de la mosquée Al-Aqsa, a
annoncé qu'il était interdit de participer aux élections car Jérusalem est une «ville occupée» et que la participation des habitants de Jérusalem-Est aux
élections signifierait «reconnaître la légitimité de l’occupation».
Sheikh Ikrima Sabri |
Enfin Saëb Erakat, chef du Comité exécutif de l'OLP, a annoncé que le
Comité exécutif s'opposait aux élections qui devaient être boycottées. Il s’est
déclaré contre la participation aux élections locales pour s’opposer à la
légitimité d'Israël puisque «la municipalité de Jérusalem est l’une des
armes du gouvernement israélien». Les mêmes recommandations avaient été
prises aux précédentes élections municipales de 2013 qui ont vu seulement 1,6%
des habitants de Jérusalem voter.
La coercition physique ou psychologique est forte puisque selon un sondage
de Haaretz du 14 février 2018, 60% des Palestiniens de la ville sont favorables
à participer aux élections pour devenir des acteurs locaux capables d’améliorer
le sort de la ville et de ses habitants de l’Est. A condition bien sûr qu'on ne les y empêche pas. Bien que ce soit la première
année où plusieurs listes palestiniennes aient été déposées pour le Conseil
municipal, la menace des éléments nationaux et islamiques est forte et elle
décourage les citoyens arabes de faire leur devoir civique.
Le Conseil suprême de l'autorité religieuse en Palestine est l'autorité
suprême de l'Autorité palestinienne. Il a été fondé en 1994 conformément à une
directive présidentielle du président de l'AP. Le conseil se compose d'une
vingtaine de religieux musulmans de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Il est
dirigé par le grand mufti Muhammad Hussein. Il donne des réponses et publie des
fatwas sur des questions islamiques, diffuse la conscience islamique, et supervise
les massacres rituels selon l'islam.
Ce Conseil a publié le 30 juillet 2018 une interdiction de voter aux élections de Jérusalem car les dommages résultant de la
participation aux élections sont plus importants que les avantages qui
pourraient en découler. Il se justifie en précisant que la participation aux
élections pourrait entraîner «une identification avec la partie
israélienne et aider Israël à établir sa politique et à gérer ses complots en
ce qui concerne l'application de son contrôle sur Jérusalem. La participation
aux élections aidera à judaïser la ville et à changer ses caractéristiques
historiques et religieuses avec les mesures prises par la municipalité». Pour
le Grand mufti la participation aux élections contribue à légitimiser «l’occupation».
Mais ce Conseil fait un contresens total dans son justificatif car la
municipalité n’a que des compétences locales limitées. Les les questions
stratégiques liées à la ville, telles que le plan d'ensemble et les plans de
construction dépendent du gouvernement et ne relèvent pas du tout de la
compétence de la municipalité élue.
Aziz Abu Sarah |
Le 5 septembre 2018, Aziz Abu Sarah, résident de Wadi Joz à Jérusalem-Est, s’est porté candidat à la
mairie de Jérusalem, à la tête d’une nouvelle liste appelée Al-Quds Lana
(Notre Jérusalem). Cet homme d'affaires de 38 ans vivant aux États-Unis et à
Jérusalem, est propriétaire d'une agence de voyage organisant des visites en
Israël et en Cisjordanie. Son frère est décédé lors de la première Intifada, ce
qui l’a poussé à devenir actif auprès des familles endeuillées. Résident
de Jérusalem-Est, la loi ne le considère cependant pas comme citoyen de l'État
d'Israël et interdit aux Palestiniens de Jérusalem-Est de briguer le poste de
maire, car, ils ne sont que des résidents privilégiés.
Par conséquent, Abu Sarah a décidé de poursuivre le
gouvernement israélien devant la Haute Cour israélienne pour s’opposer à cette
loi : «Israël prétend être une démocratie. Pourtant, nous, les
Palestiniens, représentons 40% des habitants de Jérusalem et nous ne sommes pas
autorisés à briguer le siège le plus important de la ville». Mais
il a trouvé auprès de la population arabe beaucoup de détracteurs. Abou Sarah s'est récemment fait lancer des œufs par un
groupe de jeunes Palestiniens qui l'accusaient d'être un «traître»
alors qu'il prononçait un discours devant l'hôtel de ville. Il pense que son élection
est le «contraire» de la normalisation : «La
normalisation, c'est accepter la réalité telle qu'elle est et ne rien faire
pour la changer. Quand vous ne faites que boycotter les élections, vous rendez
service à Israël. Vous lui donnez un chèque en blanc pour faire ce qu'il veut
dans notre ville».
Mais en fin de compte, il a
décidé d’abandonner la course à la mairie de Jérusalem de crainte d’une révocation
par les Israéliens de son statut de résident et de son droit de vivre à
Jérusalem mais aussi et surtout, face à l'opposition des Palestiniens
pro-boycott qui n’ont pas apprécié sa candidature. En effet, le prédicateur de
la mosquée Al-Aqsa, Cheikh Ikrima Sabri, a souligné que la participation des
habitants de Jérusalem aux élections signifierait la reconnaissance de la
légitimité de «l'occupation». Selon Sabri, il est interdit de
participer aux élections municipales car Jérusalem en tant que ville occupée est
interdite. La tenue d'élections est donc un acte illégal pour lui.
Les Arabes de Jérusalem ne comprennent pas que leur
attitude leur est préjudiciable et qu’elle les empêche d’avoir une
participation active au Conseil municipal donc de peser sur les décisions locales
à Jérusalem-Est que certains jugent abandonnée par la Mairie. Plus ils
participent aux instances politiques du pays et plus leur présence s’affirme et
plus leur avis ne pourra pas être ignoré. Les absents ont toujours tort.
6 bureaux de vote pour 360 000 personnes.
RépondreSupprimer"180 bureaux de vote et chaque bureau de vote situé dans un quartier juif servira à approximativement 20 000 électeurs contre 40 000 personnes par bureau dans les quartiers arabes.
Trois bureaux de vote seront ouverts dans le quartier juif-arabe de Beit Safafa, ce qui signifie que les trois autres destinés aux électeurs arabes, situés dans la Vieille Ville, Sheikh Jarrah et Jabal Mukkaber, serviront environ 80 000 électeurs chacun.
Les autres quartiers arabes ne devraient pas être dotés de bureaux de vote au mois d’octobre et certains électeurs devront parcourir au moins 5 kilomètres pour mettre leur bulletin dans l’urne."
A quoi sert de mettre des bureaux de vote pour des gens qui ne votent pas? Et bien, ça s'appelle la démocratie. Aux dernières nouvelles on n'a pas réduit les bureaux de vote dans les quartiers juifs pour cause d'abstentionnisme (+ de 50% parfois) aux dernières élections. C'est un déni de droit. Tous les citoyens (quel que soit leur statut) doivent être égaux pour exercer leur droit de vote.
Le droit de vote est une composante essentielle d’une démocratie.
RépondreSupprimerIls y renoncent, soit alors qu’ils aillent jusqu’au bout de leur démarche et qu’ils renoncent à tous les autres droits et avantages que leur octroie l’Etat d’israël.