MANŒUVRES POUR
LA NOMINATION DU CHEF DE TSAHAL
Par Jacques
BENILLOUCHE
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Contretemps
Le scénario se répète tous les trois ou quatre ans pour la nomination du nouveau chef d’État-Major dont le mandat n’excède pas quatre ans. Mais d’ordinaire le choix se faisait dans le secret des couloirs de l’HaKirya, à la rigueur autour de la table feutrée du Cabinet de sécurité. Or cette fois, la rue a eu son mot à dire dans une nomination essentiellement technique, qui n’a rien de politique. Un groupe de parents endeuillés de soldats de Tsahal tombés au combat veut s’interposer sur le choix du prétendant et interdire en particulier la nomination du général de division, Yaïr Golan. Quatre généraux figurent sur la liste finale, Eyal Zamir, Yaïr Golan, Aviv Kohavi, et Nitzan Alon.
Yaïr Golan, né en 1962, qui parle parfaitement l’anglais, est
titulaire d’un doctorat de l’université de Harvard. En 1997, il avait été
blessé mais avait continué à commander une fusillade contre des combattants du
Hezbollah. Officier très estimé au sein de l’armée, il a occupé de nombreux
postes à responsabilité pendant ses 37 ans de carrière. Il avait rejoint la
brigade des parachutistes en 1980, en tant que combattant puis officier de
l’unité. Dans les années 1990, il avait suivi les cours de l’école des officiers pour ensuite diriger un bataillon, avant de remplir différentes fonctions dans l’armée,
notamment à la tête de la brigade Nahal, de la division de Cisjordanie à la fin
de la seconde Intifada, à la direction de la Défense passive puis du
Commandement du Nord, avant d’être nommé chef d’État-major adjoint en décembre
2014.
Eyal Zamir, né en 1966, avait commandé la 7ème brigade
blindée d’août 2003 à septembre 2005. Il avait servi comme secrétaire militaire
du Premier ministre du 26 novembre 2012 à 2015, puis a occupé le poste de chef
du Commandement de la région sud, du 14 octobre 2015 au 6 juin 2018. Il est en
instance d’affectation d’un nouveau poste.
Aviv Kohavi, né en 1964, a été enrôlé dans l'armée israélienne en
1982, comme volontaire dans la brigade des parachutistes. En 1985, il est
devenu officier d’infanterie après avoir terminé l’école des officiers. Au
cours de sa carrière, Kohavi a dirigé la compagnie antichar de la brigade et
plus tard le 101ème bataillon de parachutistes «Peten» dans
des opérations de contre-guérilla au Sud-Liban. Par la suite, il a commandé une
brigade régionale au sud du Liban et une brigade de parachutistes de réserve. Il
a dirigé la 35ème brigade de parachutistes pendant la Deuxième Intifada. Par la
suite, il commanda la 98ème division des parachutistes et la division de Gaza
pendant le désengagement. Plus tard, il a été chef de la division des
opérations et chef de la direction du
renseignement militaire, de novembre 2010 à septembre 2014. En novembre 2014, il
a été nommé commandant de la région nord. Le 11 mai 2017, le général Aviv Kohavi a pris ses fonctions de chef
d'Etat-major adjoint de Tsahal.
Nitzan Alon est né en 1964. Entre 1984 et 1998, il a été affecté au
sein de l’unité d'élite Sayeret Maatkal, dépendant directement du chef d’État-major,
pour en devenir son commandant en 1998. Il a reçu plusieurs citations pour
missions secrètes. En 2003, il a été nommé commandant de la 551ème brigade et
en 2005, commandant de la brigade régionale Etzyon au sein du commandement de
la région du centre. En 2007, il a été nommé chef de la division des opérations
de renseignement de la défense israélienne. De 2009 à octobre 2011, il a occupé
le poste de commandant de la division Judée-Samarie. En 2012, il est devenu
chef du commandement de la région du centre ce qui lui a valu des critiques de la
part des organisations de droite et des habitants des implantations de Cisjordanie,
qui ont été jusqu’à attaquer sa jeep militaire à la jonction de Tapuah. En 2015, il prit la direction des opérations
militaires de l’État-Major qu’il quitta en 2018 pour devenir le premier
directeur d’un projet spécial de Tsahal visant à coordonner toutes les
questions liées à la bataille contre l’Iran.
Malgré la qualité intrinsèque de
chaque candidat il semble que la course ne soit pas aussi ouverte. Les parents
endeuillés s'opposent à la candidature de Golan parce que, à l’occasion de la
journée de la Shoah de 2016, il avait comparé des tendances de la société
israélienne à celles de l'Allemagne des années 1930 : «si quelque chose me
fait peur dans le souvenir de la Shoah, c’est d’identifier des processus
atroces qui ont eu lieu en Europe il y a 70, 80, 90 ans et se rendre compte
qu’ils existent toujours de nos jours, en 2016». Sa critique visait le
soutien de la société israélienne aux extrémistes juifs. Il a défendu sa
position en expliquant «qu’Israël, en tant que lumière des nations, a la
responsabilité de maintenir une supériorité morale». Ses chances sont devenues minces.
Malgré ses états de service, l'ancien
commandant de Sayeret Maatkal, Nitzan Alon, ne semble pas un candidat de
premier plan en raison de son attitude réservée et de son physique juvénile. En conséquence, le général Aviv Kohavi semble être le mieux placé car il a occupé
tous les plus hauts postes de l’armée : commandant de la brigade de parachutistes,
commandant de la Division du secteur de Gaza, chef de la direction du
renseignement militaire, commandant de la région nord, chef d'Etat-major adjoint de Tsahal.
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Etat-major au complet |
Mais comme toujours dans les
courses, un cheval d’un tiercé millionnaire, peut surgir au moment où on
l’attendait le moins pour coiffer sur le poteau tous les favoris. Eyal Zamir,
officier du corps des blindés, au parcours moins illustre, peut être nommé pour
des raisons politiques. Il est très proche de Lieberman et de Netanyahou dont il a été son
secrétaire militaire.
Mais se profilent de nouvelles
élections anticipées au début de 2019 qui pourraient pousser le gouvernement à
en attendre les résultats avant de nommer le nouveau chef de Tsahal. Gadi
Eizenkot, contre sa volonté, sera contraint d’accepter la prolongation de mon
mandat de quelques mois jusqu’à la nomination d’un nouveau gouvernement. Sa
mission se termine normalement le 1er janvier 2019. Toutes les cartes seront
alors rebattues.
Mais si les difficultés persistaient, le gouvernement pourrait se tourner vers des généraux qui viennent de prendre la retraite du service actif. Ce fut le cas
de Gabi Ashkenazi qui fut l’adjoint du chef d’État-major de 2002 à 2005 et qui
n’avait pas été choisi pour remplacer le général Moshe Yaalon. On lui avait
préféré le commandant de l’armée de l’air, Dan Haloutz, ce qui avait poussé
Ashkenazi à prendre sa retraite de l’armée. Après les ratés de la guerre du
Liban de 2006, il avait été rappelé pour devenir le chef de Tsahal le 14
février 2007.
Mais si les difficultés persistaient, le gouvernement pourrait se tourner vers des généraux qui viennent de prendre la retraite du service actif.
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A gauche la Mégère apprivoisée, à droite Crimes et châtiments - Tu ne penses pas que tu fais erreur sur le livre à lire |
Ces gesticulations au grand jour
pour le poste de chef de Tsahal font mauvais effet au moment où l’armée doit
montrer sa cohésion. Il s'agit de nommer le responsable de la sécurité du pays, le chef qui organisera l'armée pendant les prochaines années, le conseiller militaire du gouvernement et surtout l'homme qui décidera ou non de la guerre sous les ordres du pouvoir civil. Ces bisbilles entre le gouvernement et des groupes de pression politiques, au
grand jour, tandis que des civils interfèrent dans le processus de désignation,
plombent la dissuasion militaire
d’Israël.
1 commentaire:
Nitsan Alon c est une bombe..
Quels états de service !! Quant à Golan.. un grand..
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