LES LIBANAIS RENFORCENT LE POUVOIR ISLAMIQUE
Par
Jacques BENILLOUCHE
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Le secrétaire général du Hezbollah Cheikh Naim Kassem vote |
L’ex-petite suisse du Moyen-Orient progresse à pas de géant vers un pouvoir
islamique. Les électeurs, maîtres de leur voix, en ont ainsi décidé. Deux clans
se sont affrontés, les Forces libanaises proches de l’Arabie saoudite contre les
chiites du Hezbollah et de Amal soutenus par l’Iran, sur fond d’une abstention
massive. Moins de la moitié des Libanais, 49,2% ont participé au vote dans le
cadre d’un scrutin proportionnel.
Aux
élections de 2009, la coalition du 14 mars soutenue par l’Arabie saoudite
disposait de 71 députés, dont 24 députés du parti de Harari, et la coalition du
8 mars soutenue par l’Iran de 57 députés dont 12 députés du Hezbollah. Aujourd’hui
la coalition du 8 mars peut compter sur 70 à 80 sièges, inversant ainsi
l’équilibre politique.
L’échec
de Saad Hariri a été acté. Les Etats-Unis et l’Arabie n’ont pas réussi à isoler
ou affaiblir le Hezbollah ; au contraire les islamistes sortent renforcés
avec 26 sièges sur 27 réservés à cette communauté sur les 128 du parlement
alors qu’ils n’en avaient que 12. Les 2.000 morts du Hezbollah en Syrie et la
crise économique frappant les classes moyennes et défavorisées chiites n’ont
pas influé sur le vote. Le mode de scrutin a fait basculer le rapport de force, faisant
du Hezbollah un partenaire incontournable dans les prises de décision au Liban.
Il peut compter sur des alliés sunnites indépendants pour constituer un groupe
de 42 députés.
Mais
à l’autre bout de l’horizon politique, les Chrétiens des Forces Libanaises de
Samir Geagea, proches des Saoudiens et des Américains, sont aussi les gagnants
des élections en doublant le nombre de leurs députés, 15 députés. Ils
deviennent le deuxième parti chrétien pour équilibrer la puissance des Druzes
de Walid Joumblatt et constituent une réelle force d’opposition contre le
Hezbollah.
Saad
Hariri est le grand perdant des élections puisque son Mouvement du Futur passe
de 31 à 21 mandats. Certes son parti reste le plus important bloc sunnite mais
les autres sunnites se renforcent à son détriment. Puisque la loi impose un
sunnite comme premier ministre, il reste certes favori pour se succéder à
lui-même dans une position cependant moins confortable. Il devra, pour
constituer une nouvelle coalition, accepter de fortes concessions s’il veut
parvenir à un accord global.
Il
aura du mal à imposer ses réformes économiques pour obtenir l’aide des
donateurs internationaux qui s’étaient réunis le 6 avril à Paris pour soutenir
l’économie libanaise en grande difficulté par une importante levée de fonds
d’investissements. L’État est presque en faillite avec une dette représentant 150%
de son produit intérieur brut (PIB). L'économie du Liban est en panne à la
suite des crises politiques à répétition et du conflit syrien qui a entraîné l'afflux
de 1,5 million de réfugiés, dans un pays de six millions d'habitants. Le FMI
exige un «plan de consolidation fiscale» à savoir, en termes
plus simples, faire rentrer l’argent dans les caisses de l’État et maîtriser la
dépense publique.
Or,
le Liban n’en prend pas le chemin avec une embauche de 26.000 nouveaux
fonctionnaires et une hausse des salaires du secteur public. L’économie
libanaise qui croissait à un rythme annuel moyen de 6% atteint entre 1% à 2%
aujourd’hui. La situation a généré une évasion fiscale 4,2 milliards de dollars
ne permettant plus un équilibre budgétaire et une très forte corruption. La
conférence Cèdre estimait les besoins à 14 milliards de dollars pour financer
250 projets mais le Liban est prêt à se contenter de 4 à 6 milliards. Cependant avec
le résultat de ces élections, le pessimisme va dominer car on ne voit pas bien
d’où pourrait venir l’argent dès lors que les Etats-Unis et l’Arabie ont été
désavoués. Les élections ont consacré l’influence sans partage du tandem
Hezbollah-Amal sur la communauté chiite. Hariri devra faire avec.
On
ne peut pas dire que la nouvelle soit bonne pour Israël car il s’agit d’une victoire spectaculaire sans conteste de l’Iran qui
va consolider sa position au Liban et aggraver les risques de conflit. Mais Tsahal a déjà
pris des mesures préventives pour assurer la sécurité au nord du pays bien que, malgré la
dialectique guerrière du Hezbollah qui menace d’envoyer des missiles et des roquettes, la guerre ne soit pas d’actualité
immédiate. Les Israéliens n’excluent pas que la victoire électorale du
Hezbollah encourage l'aventurisme de Téhéran contre Israël mais les mollahs
savent mesurer le risque qu’ils prennent à provoquer Tsahal.
Seule, la
participation du Hezbollah au gouvernement reste préoccupante car elle
favorisera l’infiltration des chiites dans l’armée et les services de
renseignements jusqu’à présent garants de l’ordre au Liban. Cependant le ministre de la Défense, Avigdor Lieberman est «prêt à
tout scénario». Tout est prêt pour s’opposer aux raids contre les
bases militaires et les espaces civils israéliens bien qu'aucune panique ne
soit de mise dans l’immédiat.
Mais si le Hezbollah est prêt à aligner ses missiles Fateh-110, il connaît les risques qu’il fait courir au Liban qui vient à peine de terminer sa reconstruction après des années de destruction. Israël n'acceptera aucune attaque contre ses villes et ses civils et les représailles seront immédiates pour détruite le centre-ville de Beyrouth, devenu un petit Manhattan avec ses nouveaux immeubles. Si le Hezbollah persiste à vouloir laver le cerveau des chiites en incitant à la peur des Sunnites et de l’Arabie saoudite, alors tout est possible pour une nouvelle libanisation du Liban.
Centre-ville de Beyrouth |
Mais si le Hezbollah est prêt à aligner ses missiles Fateh-110, il connaît les risques qu’il fait courir au Liban qui vient à peine de terminer sa reconstruction après des années de destruction. Israël n'acceptera aucune attaque contre ses villes et ses civils et les représailles seront immédiates pour détruite le centre-ville de Beyrouth, devenu un petit Manhattan avec ses nouveaux immeubles. Si le Hezbollah persiste à vouloir laver le cerveau des chiites en incitant à la peur des Sunnites et de l’Arabie saoudite, alors tout est possible pour une nouvelle libanisation du Liban.
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerVoici un article extrêmement bien documenté, comme toujours, et qui pourrait faire pâlir n'importe lequel des chroniqueurs de ce blog.
Mais si vous me le permettez, il me semble que ceux des lecteurs qui ne postuleraient pas pour une expertise en science politique libanaise, pourraient passer directement du titre : "Les Libanais renforcent le pouvoir islamique", au 8ème paragraphe : "On ne peut pas dire que la nouvelle soit bonne pour Israël..." et suite, jusqu'à la fin.
Ainsi ils gagneraient du temps, mais sans porter atteinte à l'angoisse que cet article génère.
Très cordialement.