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vendredi 25 novembre 2016

L'ultra-libéralisme appliqué par Gérard AKOUN



L’ULTRA-LIBÉRALISME APPLIQUÉ

Par Gérard AKOUN
Judaïques FM


Dimanche dernier, nous avons assisté, à l’annonce des résultats du premier tour de la primaire de la droite, à un retournement de situation que ne laissait pas prévoir les sondages.  Les instituts avaient bien laissé entendre que les résultats dépendraient d’un certain nombre de paramètres, qu’ils ne maitrisaient pas, comme le taux de participation à cette élection ; c’était une première pour l’électorat de droite. Les pourcentages obtenus par chacun des candidats pouvaient varier, les écarts se resserrer mais personne n’avait imaginé que François Fillon arriverait en tête avec plus de 44% des suffrages, laissant loin derrière lui Alain Juppé.  Quelles ont été les motivations de ceux qui ont voté pour lui ?



En premier lieu, elles sont idéologiques ; des électeurs appartenant à la droite catholique, conservatrice, provinciale dans son mode de vie, sa manière de penser, homophobe, réactionnaire pour tout dire, à cette vieille droite qu’on croyait, à tort, disparue alors qu’on l’avait vue réapparaitre dans les manifestations contre l’égalité des droits devant le mariage républicain.

Nous les avions vus défiler par centaines de milliers, avec étonnement, mais sans prendre au sérieux leur capacité d’organisation et de nuisance. Ils forment les gros bataillons du vote Fillon en qui ils reconnaissent leur représentant. N’est-il pas catholique pratiquant, père de famille nombreuse, opposé à titre «personnel», à l’interruption de grossesse, qu’il ne remettra pas en cause, mais quel encouragement pour tous ces médecins qui évoquent la clause de conscience pour ne pas en pratiquer, et condamnent les femmes dans les petites villes à effectuer de longs trajets pour pouvoir se faire avorter. La principale association issue des manifestations contre l’égalité des droits, «Sens commun», fut invitée à participer au meeting de François Fillon, au cirque d’hiver à Paris le 21 septembre 2016, pour mieux revendiquer la réécriture, avec laquelle le candidat est d’accord, de la loi Taubira.

En deuxième lieu, la volonté de se débarrasser, définitivement, de Nicolas Sarkozy. Beaucoup d’électeurs persuadés que Juppé arriverait de toute façon en tête ont considéré que la lutte aurait lieu pour la seconde place et que pour empêcher Sarkozy d’y accéder, leur vote serait plus utile s’il se portait sur Fillon ! Ils ont réussi au-delà de leur espérance, mais ils ont assuré une crédibilité plus importante à François Fillon, tant l’écart entre les deux hommes est grand, et semble difficilement rattrapable. Les suffrages des gens de gauche ou peut être du Front national, qui ont interféré dans cette primaire, n’ont pas réussi à combler le déficit.  Ce vote illustre bien le glissement vers une droite dure de la société française qui laisse, en lice, face à face deux candidats du même parti.
Ils se réclament l’un d’un libéralisme modéré, l’autre d’un l’ultra libéralisme sur le plan économique mais sont très éloignés sur le plan sociétal. Alain Juppé a déclaré à Toulouse, mardi dernier : «Notre vision de la société française n’est pas exactement la même. Moi je veux une France résolument ouverte sur la participation citoyenne, sur l’avenir» il a qualifié celle de François Fillon «d’extrêmement traditionnaliste pour ne pas dire rétrograde».
Nicolas Sarkozy a été éliminé ; son ombre a cessé de planer sur les deux candidats qui ne l’oublions pas ont été pour l’un, Juppé, son ministre des affaires étrangères, pour l’autre, Fillon, son premier ministre pendant toute la durée de son quinquennat. Ils lui doivent une partie leur carrière, tous deux ont besoin de prouver, semble-t-il, qu’ils sont capables de réussir à mener à bien des réformes que, lui, n’avait pas réussi à faire adopter. Sinon comment comprendre qu’ils veuillent nous faire rentrer dans le 21ème siècle, à reculons en reprenant des réformes toujours promises mais jamais totalement appliquées depuis 30 ans.
Baisser les dépenses publiques, augmenter la TVA de 1% pour l’un, de 2% pour l’autre, supprimer l’impôt sur la fortune, abroger les 35 heures, augmenter la durée du travail, supprimer 600.000 postes de fonctionnaires pour Fillon, 200 à 300.000 pour Juppé, reporter l’âge légal de départ à la retraite à 65ans etc. etc. J’ai cité les mesures les plus emblématiques. Des réformes sont nécessaires dans la France d’aujourd’hui, tout le monde en convient, même à gauche, mais pourquoi infliger à nos concitoyens un traitement aussi drastique qui va peser sur les plus faibles d’entre eux, alors que nous savons que l’austérité, quand elle est trop forte, alimente le populisme. 
François Fillon se montre le plus radical. Il veut appliquer en France les réformes qui ont réussi à Mme Thatcher entre les années 79 et 90 mais nous serons très bientôt en 2017. Ignore-t-il que Theresa May, qui a succédé au très Thatchérien David Cameron, insiste désormais sur le rôle de l’État dans la politique industrielle et la lutte contre les inégalités ? Alain Juppé demeure plus mesuré, d’autant que le FMI et même Bruxelles se montrent, maintenant plus réservés sur les bienfaits de l’austérité. L’heure est la relance, l’État retrouve son rôle directeur. Je vous ai cité des points communs, des nuances mais il y a aussi entre les deux hommes des divergences sur le plan international.

La divergence le plus important porte sur la relation avec la Russie, François Fillon veut que la France se rapproche de la Russie de son ami Poutine ; il réclame l’abandon des sanctions prises par l’Union Européenne contre Moscou après l’annexion de la Crimée. Juppé est contre. La conduite à tenir en Syrie les oppose ; Juppé condamne Bachar El Assad, responsable de la mort d’au moins 300.000 de ses compatriotes et refuse toute alliance avec lui.  François Fillon accepte, lui, de s’allier avec Bachar El Assad au nom de la lutte contre Daesh et de passer, pour pertes et profit, toutes les victimes du boucher de Damas car ce dernier est le protecteur des Chrétiens d’orient, du moins de ceux qui résident en pays alaouite !!!!

Ce soir a lieu le dernier débat de ces primaires à la télévision : Le face à face Juppé/ Fillon. Alain Juppé va essayer de regrouper autour de son nom pour dimanche les électeurs modérés de la droite et du centre, les femmes de tout bord et des électeurs de gauche qui veulent éliminer Fillon de la bataille présidentielle.

4 commentaires:

  1. Il manque un peu de panache, François Fillon.
    Jacques ATTALI a dit que le prochain président serait "quelqu'un de nouveau".

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  2. Véronique ALLOUCHE24 novembre 2016 à 10:21

    Je ne suis ni catholique ni homophobe ni réac et encore moins contre la loi Veil, et pourtant je penche pour Fillon. Tous ses électeurs ne sont pas forcément ceux que vous décrivez.
    Une remarque sur les chiffres: Fillon veut supprimer 500000 postes de fonctionnaires et non pas 600000.
    Sur les retraites trouvez-vous normal par exemple qu'un conducteur de TGV y soit à 50 ans?? Sommes-nous encore au train à vapeur??
    A propos des 39 heures que Fillon veut courageusement remettre en place, faites-moi le plaisir d'être de bonne foi en reconnaissant que les 4 heures supplémentaires seront payées en conséquence et redonneront du pouvoir d'achat aux salariés.
    Dimanche les électeurs de gauche auront beau trahir leurs idées en votant pour un candidat de droite qui sera Juppé, cela ne sera pas suffisant pour qu'il soit élu.
    En définitive, il n'y a pas d'autres motivations dans ce vote que le désir des français à redresser leur pays presque en faillite après un quinquennat désastreux de Hollande.
    Cordialement

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  3. "Alain Juppé va essayer de regrouper autour de son nom" tous ceux "qui veulent éliminer Fillon de la bataille présidentielle."
    Et pour ce faire, il a convoqué : l'IVG, le Mariage pour tous, l'ultralibéralisme, le thatchérisme, l'homophobie, l'islamophobie, le poutinisme, les traditionalistes catholiques, et jusqu'au pape François !
    Sera-ce suffisant ? Réponse dimanche au soir !

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  4. Un des grands non-dits dans cette campagne et qui explique le score de Fillon, c'est que c'est le plus anti arabe.

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