Le palestinien Dahlan fait à nouveau parler de lui
par Jacques BENILLOUCHE
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C’est une information cyclique qui
revient au-devant de la scène politique palestinienne régulièrement. Mohamed
Dahlan n’a pas abandonné son projet de prendre la direction de l’autorité
palestinienne. Certes, on ne l’entend pas souvent mais ses gesticulations
politiques font de lui l’homme le plus courtisé par de nombreux pays arabes,
mais aussi par les Américains et les Israéliens. Il a la réputation d’être
l’homme du Mossad et de la CIA mais il s’en défend bien sûr. L’Autorité
palestinienne l’a exclu du Fatah en 2011 et l’a contraint à s’exiler aux
Émirats Arabes Unis où il est devenu l’un des conseillers du souverain et l'homme le plus écouté.
Projet renaissance Dam |
Il
reste discret et fait peu de déclarations politiques sur la situation en
Cisjordanie mais son silence est bruyant car il intervient sans cesse dans les
forums internationaux sponsorisés par les grands pays arabes. Il est le
Palestinien le plus présent sur les scènes internationales en raison de son
charisme et de son expertise sécuritaire et diplomatique. Ainsi en mars 2015, il a joué un
rôle majeur de médiateur dans l'accord signé par l’Égypte, l'Éthiopie et le
Soudan concernant la construction en Éthiopie du plus grand barrage d’Afrique
avec deux centrales hydro-électriques. Le président égyptien Abdel Fattah
al-Sissi lui avait assigné la mission épineuse de négocier ce projet Renaissance
Dam.
Dahlan deuxième à gauche |
Dahlan
avait participé le 19 novembre 2015 à une conférence sur la sécurité tenue à
Bruxelles sous les auspices de l'OTAN : «Cooperative security &
interconnected threats». Il avait pris la parole pour attaquer les
mouvements islamiques et pour accuser la Turquie de soutenir l'État islamique.
En décembre 2015, Dahlan avait aussi participé à la préparation du Forum culturel
international à l’occasion du 70ème anniversaire de l’UNESCO. Ce forum, qui
s’est tenu à Saint-Pétersbourg, a été l’occasion pour lui d’être aux côtés du président
russe Vladimir Poutine lors de son ouverture.
Ahmed Jarba |
Le
18 janvier, le journal turc Gercek Hayat l’avait accusé d’avoir fomenté
un coup d'État contre le président turc, Recep Tayyip Erdogan, avec l’aide des Émirats
Arabes Unis (EAU), soutenus par la Russie. Enfin le 13 mars 2016, il avait participé au Caire à la conférence constitutive du mouvement d’opposition
syrien, Ghad al-Suri (Lendemain de la Syrie) présidé par Ahmed Jarba et d'autres
opposants syriens. C’est à l’instigation de Mohamed Dahlan qu’Ahmad Jarba avait
fait publier, dans un journal israélien, un message en hébreu appelant à
soutenir l’opposition en Syrie et précisant qu’il était en faveur d’une
rencontre avec Benjamin Netanyahou. Le nouveau mouvement Ghad al-Suri avait voulu
ainsi sensibiliser le public israélien à son message politique et ouvrir une
opportunité de relations bilatérales avec Israël.
Dahlan
n’est plus le chef d’une bande de miliciens palestiniens à Gaza ; il a acquis
une stature internationale. Les relations étroites de Dahlan avec les Émirats
Arabes Unis et son important carnet d’adresses lui permettent d’agir en tant
que diplomate de haut niveau, capable de transcender la cause purement palestinienne. Il a ainsi
pris, en plus de son expertise sur les questions sécuritaires, une envergure
internationale qui lui donne une crédibilité dépassant de loin sa seule
influence à la Mouquata.
L’Autorité palestinienne a beaucoup perdu en l’éliminant de sa direction. Mahmoud Abbas aurait pu la crédibiliser en lui donnant une audience internationale alors que Dahlan a pris un grand poids politique en conseillant, sur le plan sécuritaire, le prince héritier Cheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan des Émirats Arabes Unis, prenant ainsi une grande place au sein de l'État. C'est face à cette concurrence que Mahmoud Abbas vient d'annoncer qu'il était ouvert à des négociations avec Israël.
L’Autorité palestinienne a beaucoup perdu en l’éliminant de sa direction. Mahmoud Abbas aurait pu la crédibiliser en lui donnant une audience internationale alors que Dahlan a pris un grand poids politique en conseillant, sur le plan sécuritaire, le prince héritier Cheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan des Émirats Arabes Unis, prenant ainsi une grande place au sein de l'État. C'est face à cette concurrence que Mahmoud Abbas vient d'annoncer qu'il était ouvert à des négociations avec Israël.
Usant
aussi de sa proximité avec le président Sissi il peut dépasser le seul niveau
de la scène palestinienne. Mohamed Dahlan a développé des relations apaisées
avec tous les acteurs modérés de la région, ceux qui pourraient compter dans
une ouverture diplomatique avec Israël à savoir, les Émirats Arabes Unis, l’Égypte,
la Jordanie, l’Arabie saoudite et l’opposition syrienne. L’Europe n’est pas
insensible au personnage qui rassure parce qu’il évite de parler de lutte armée
et d’éradication de l’État juif. Il a gardé les faveurs des jeunes du Fatah et
a maintenu des relations étroites avec le prisonnier palestinien le plus
célèbre, Marwan Barghouti, et avec l’ancien premier ministre Salem Fayyad, sans
compter les membres du Comité central qui n’osent pas afficher au grand jour
leur préférence. Ceux qui l’ont fait ont subi des sanctions allant jusqu’à
l’exclusion des postes de direction ou au licenciement pur et simple. C’est
pourquoi Dahlan évite l’affrontement direct avec Mahmoud Abbas pour ne pas lui
donner l’occasion de sévir. Mais seules des relations internationales
pourraient l’aider à réaliser son ambition.
De
nombreux Israéliens, des deux bords et des plus célèbres, le voient comme le
prochain président palestinien. Avigdor Lieberman l’aurait rencontré de manière
secrète dans plusieurs capitales européennes. En janvier 2016, Yossi Beilin, architecte des
accords d’Oslo estimait que Dahlan ferait un bon président car il est
pragmatique et intelligent. Mais Dahlan sait qu’il a besoin de partisans au
sein même de la population de Palestine et, pour cela, il n’oublie pas de distribuer
en projets de charité une partie de ses millions de dollars dans les
territoires pour s’acheter des partisans.
Il
n’a jamais fait mystère de son opposition aux islamistes d’une manière générale et
aux Frères musulmans en particulier et cela ne date pas d’hier. Quand il était
étudiant à Gaza en 1981, il avait déjà organisé la lutte contre la fraternité.
Il avait par ailleurs, lorsqu’il était à la tête des services de sécurité de
Gaza, arrêté entre 1995 et 2000 des centaines de membres du Hamas impliqués
dans des opérations militaires contre Israël. Mais, pragmatisme oblige, cela
n’empêche pas que depuis quelques temps, les relations entre le Hamas et Dahlan
se soient réchauffées dans une alliance contre l’ennemi commun, Mahmoud Abbas.
De ce fait ses chances d’accéder au poste suprême sont de plus en plus élevées
bien que Mahmoud Abbas persiste à ne pas vouloir lui céder sa place. Le seul qui pourrait lui faire de l'ombre serait Majed Faraj, le nouveau responsable de la sécurité de l'Autorité palestinienne, un personnage sans charisme et peu connu sur le plan international.
Les précédents articles sur Dahlan :
Très bien cet article , du journalisme pur ,
RépondreSupprimerJ'ai toujours pensé à cet homme , notre intelligentia ,doit être prête comme de juste , je pense Yossi Beilin qui a été prêt de lui et qui sera de la partie , le problème restera le "BARghouti
Je reste sur la touche