AL-SISSI : L’INCERTITUDE MALGRÉ UNE ÉLECTION DE MARÉCHAL
Par Jacques
BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
copyright © Temps et Contretemps
Abdel Fattah al-Sissi
a été élu dans l’indifférence totale de son pays et surtout de celle de l’Occident
qui semble très gêné de devoir composer avec un militaire arrivé au pouvoir par
un coup d’État. Il a été élu avec un score de maréchal : 96,9 % des voix. Aucune
surprise n’était à attendre d’un scrutin dont l’issue était toute tracée. Ce
chiffre ne peut masquer cependant le faible taux de participation 47.45%, tellement
faible qu’une troisième journée de vote avait été organisée par les autorités
égyptiennes.
Les jeunes et
les femmes
Bureau de vote pour les hommes désert |
Les jeunes ont
été les plus nombreux à s’abstenir parce qu’ils estiment qu’ils sont mal
représentés. Selon Mohamad Al-Mahdi, professeur de psychologie : «Beaucoup
de jeunes vivent aujourd’hui dans ce qu’on appelle une aliénation politique,
puisqu’ils sentent que ce qui se passe ne les représente pas et que la
génération des plus âgés domine la scène. Une frustration frappe également les
jeunes révolutionnaires à cause des tentatives des médias pour déformer la
révolution du 25 janvier. Ils craignent aussi un retour du régime de Moubarak
et les restrictions des libertés». L’absence des bulletins de vote des jeunes
dans les urnes peut être, à moyen terme, une menace pour la stabilité du pays.
Moubarak les avait ignorés avec comme conséquence les grandes manifestations du
25 janvier 2011.
La queue des femmes pour voter |
En revanche les femmes, qui représentent 44% du corps
électoral avec 24 millions de voix, ont voté massivement car elles s'inquiètent de l’instabilité qui règne dans le pays. Elles donnent
l’impression d’être plus politisées, ce qui n’est pas le cas. Les bureaux de vote réservés aux hommes étaient presque
déserts alors que ceux réservés aux femmes ne désemplissaient pas. Depuis la révolution de 2011, les femmes ont
participé massivement à toutes les échéances électorales et pourtant rien n’a
depuis été fait pour améliorer leur condition. Mais, si elles n’ont aucune
motivation politique, elles ne recherchent que la sécurité car elles sont
conscientes de leur responsabilité envers leurs familles. Elles ont donc voté
en masse pour Al-Sissi sans que son programme ne comporte aucune avancée sur
les droits de la femme.
Grande déception
Révolution de 2011 |
La déception d’Al-Sissi
doit être grande pour un nouvel homme politique qui recherchait sa légitimité
dans les urnes. Sa personnalité a été difficile à cerner pour des Égyptiens
ballotés au gré des évènements et qui n’ont rien gagné du printemps arabe de
2011. Ils sont passés d’une dictature à une autre en étant à chaque fois les
dindons de la farce. Ils ne se sentent pas en état d’émettre un avis ou une critique
dès lors où la répression est terrible. Si les Frères musulmans ont placé leurs militants dans tous les rouages de l’administration,
il faut mettre à leur crédit qu’ils n’ont pas coupé de têtes comme c’est
souvent le cas après un changement brutal de régime dans les pays arabes et
comme semble vouloir le faire le nouveau régime.
Responsable du parti Nour |
Même les jeunes
libéraux laïcs, qui ont été les premiers à la tête de la révolte contre Hosni
Moubarak, ont été inquiétés car le nouveau régime craint qu’ils ne rééditent
leurs exploits de 2011. Les médias ont été muselés sauf s’ils vantaient les
qualités du nouveau régime. Le Parti Nour, un groupe salafiste puritain qui a
gagné un quart des voix lors de l'élection générale il y a deux ans, a organisé
des rassemblements et même sorti une chanson, dépouillé de l'accompagnement
musical «anti-islamique», à la louange de Al-Sissi.
Al-Sissi est seul
maître à bord puisque le Parlement a été dissous. En dehors de son cercle
militaire, on ne connait pas les conseillers qui l’entourent. Mais si le
président veut durer, il doit rapidement procéder à des élections législatives pour
donner un semblant de démocratie en s’ouvrant d'abord à des libéraux et ensuite à des islamistes non
violents. Dans le cas contraire, il les trouvera sur son chemin pavé de
terrorisme, avec le risque de les voir se joindre aux Frères musulmans, armés jusqu’aux dents et habitués à la clandestinité.
Al-Sissi a d’autre part des lacunes en économie. L'Egypte souffre d’une grande intervention de l’État avec des subventions pour les
carburants et les produits alimentaires qui absorbent le quart du budget. Il a souligné
que la dette nationale de l'Egypte a atteint le montant de 240 milliards de
dollars avec un déficit budgétaire de près de 14% du PIB. En outre, 12 millions
des 85 millions de la population sont au chômage.
Il sait par ailleurs qu’il doit s’atteler aux
problèmes sécuritaires s’il veut que le tourisme reparte et que les caisses se remplissent de devises. L’Égypte a aussi besoin
de capitaux étrangers et de nouvelle technologie pour reconstituer ses tissus
industriel et pas uniquement des
milliards de dollars stériles en provenance des monarchies du Golfe. Al-Sissi doit donc
revoir l’idéologie du pouvoir pour insuffler des méthodes modernes de gestion
et non pas créer une nouvelle dictature où l’armée détiendra encore les rouages de l’économie. Le défi est à la mesure des problèmes du pays.
Cher monsieur Benillouche,
RépondreSupprimerVous écrivez que Al-Sissi a été élu dans l'indifférence totale, surtout de l'Occident. Ce n'est pas tout à fait exact dans la mesure où je crois savoir qu'il a reçu un télégramme de félicitations du Quai d'Orsay.
Quai d'Orsay qui regrette peut-être de ne pouvoir envoyer le même télégramme à Bachar el-Assad qui jadis présidait à notre défilé du 14 juillet mais que nous considérons aujourd'hui comme notre ennemi sans nous préoccuper d'ailleurs de savoir si sans lui, ce ne seraient pas les islamistes qui seraient au pouvoir en Syrie.
Très cordialement.
Nous avons tous laissé Morci des Freres Musulmana gagner, le résultat était qu'il commençait à devenir un allié aux Hamas et avait préparé des troupes dans le Sinai sans demander a qui que ce soit pour atteindre une force comparable a l'armée Egyptienne sous le commandement du General El Sisi. et puis combattre El Sisi et son armée. Je ne vois aucune incertitude El Sisi est un home intelligentvil réussira malgré tout
RépondreSupprimer