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samedi 10 août 2013

LA TURQUIE S’ATTAQUE AUX SYMBOLES CHRÉTIENS



LA TURQUIE S’ATTAQUE AUX SYMBOLES CHRÉTIENS

Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps


Sainte Sophie de Trébizonde
L’islamisation sournoise et rampante du passé chrétien de la Turquie est en marche. Le gouvernement autorise à nouveau la transformation des églises en mosquées. Cette action est loin d’être isolée car elle entre dans la stratégie de Tayyip Erdogan d'islamiser  des symboles chrétiens après avoir islamisé l'armée en éliminant les éléments les plus laïcs et les plus opposés au régime.




Sainte Sophie de Trébizonde


Sainte Sophie de Trébizonde, monument historique de l’architecture byzantine, est une cathédrale construite dans les années 1238-1263 par Manuel Ier. En 1461, Mehmet II a pris Trébizonde et a transformé son église en mosquée. La mosquée, qui était en mauvais état, fut restaurée en 1864 par Riza Efendi de Bursa. Elle fut utilisée comme dépôt et hôpital pendant le Iere Guerre mondiale, puis redevint mosquée. Elle fut transformée en musée en 1964 après les restaurations par la Direction des fondations et l’Université d’Edinbourg de 1958 à 1962. En juillet 2012 le vice-Premier Ministre Bulent Arych a annoncé l’intention du gouvernement d’autoriser le transfert de l’église à la communauté musulmane pour en faire à nouveau une mosquée. 
Le directeur général des Fondations de la Turquie Adnan Ertem avait ainsi annoncé «qu’il n’y a aucun obstacle à ce que l’église Sainte-Sophie de Trébizonde commence à fonctionner en tant que mosquée, et c’est ce qui va arriver dans les prochains jours. Nous voulons faire la même chose avec la basilique Sainte-Sophie à Istanbul, mais au final, cela ne dépend pas de nous. Une telle décision devra être prise par le gouvernement, c’est sa responsabilité».
Le patriarche Bartholomée

Le patriarche de Constantinople Bartholomée s’était rendu à Trébizonde pour marquer son opposition à ce que l’église Sainte-Sophie soit transformée en mosquée. Il a rappelé que, selon le chef de la communauté musulmane locale, il y avait bien assez de mosquées à Trébizonde et qu’il faudrait déjà les remplir avant d’en vouloir une autre. Mais c'est une idée fixe du vice-premier ministre turc Bulent Arinc d'offrir à l'islam l’ancienne église Haghia Sophia ou Sainte Sophie de Trébizonde, déjà transformée en musée Ayasofya müzesi en 1964.



Eglise musée


Transformée en musée


L’église orthodoxe Sainte-Sophie à Trébizonde a commencé à fonctionner comme mosquée. Le 28 juin 2013 y ont été prononcées les premières prières musulmanes. Selon la déclaration du directeur des institutions de bienfaisance, Mazhar Yyldyrymhan, du ressort duquel dépend le musée de Sainte-Sophie, l’église, en-dehors des heures de prières musulmanes cinq fois par jour, continuera à fonctionner comme musée. Au moment de la prière, «les fresques et mosaïques du musée de Sainte-Sophie sont recouvertes de tapis et de rideaux qui ne sont pas cloués pour ne pas causer le moindre dommage» a déclaré le fonctionnaire au sujet du sort des fresques et mosaïques uniques de l’édifice.  
«C’est un fait connu que la communauté musulmane de Trébizonde n’a pas besoin d’une nouvelle mosquée. Il n’y a pas non plus ici de paroisse orthodoxe. Le seul moyen de conserver l’église, est de la laisser fonctionner comme un musée» a déclaré le service de presse du Patriarcat de Constantinople, Dosithée Anagnostopoulos.
Fresques

Les islamistes se fondent sur une argumentation fallacieuse historique. Le sultan ottoman Mehmet II, avait arraché Istanbul aux Byzantins en 1453 et transformé l'église en mosquée en 1462 à la suite de la conquête de Trébizonde. Il est donc normal que l’église soit ouverte aux musulmans pour ne pas trahir l’héritage du sultan. En Décembre 2012, un tribunal avait statué que «la mosquée était une partie inaliénable de la fondation de Mehmet II» ce qui a permis au gouvernement d’entreprendre la conversion en mosquée. Le grand mufti de Trabzon s'est alors empressé de prier durant les vendredi du mois sacré du Ramadan, en juillet 2013.


Sainte-Sophie de Constantinople


Sainte Sophie de Constantinople


A présent, un autre édifice religieux exceptionnel est visé par les autorités turques : la Basilique Sainte-Sophie de Constantinople. Ancienne église chrétienne, elle était devenue une mosquée au XVe siècle sous l'impulsion du sultan Mehmed II. À son arrivée au pouvoir, Mustafa Kemal Atatürk décida de poursuivre la restauration de Sainte-Sophie et en 1934, il désaffecta le lieu du culte pour «l'offrir à l'humanité». Il fait décrocher les grands panneaux circulaires portant le nom d'Allah, de Mahomet et des califes : Sainte-Sophie était devenue un musée.

Le 27 mai 2012, des milliers de militants islamistes avaient déjà manifesté à Istanbul pour réclamer la réouverture au culte musulman de la basilique Sainte-Sophie. Un groupe de musulmans s’était  à nouveau rassemblé pour une prière devant les portes de l’édifice, le 29 mai 2012, jour anniversaire de la prise de Constantinople par les Turcs en 1453. Le mouvement avait demandé au gouvernement d’autoriser la prière musulmane à l’intérieur de la basilique Sainte-Sophie et de lui redonner ainsi le statut de mosquée. Le Parlement turc a accepté le 29 janvier 2013 d’examiner la demande de reconvertir la basilique Sainte-Sophie d’Istanbul en mosquée

Mais en perdant son statut de musée, l’église n’est plus gardée par les forces de l’ordre, laissant ainsi les sculptures antiques et les pierres tombales à la merci des vandales ou des voleurs.  
Dome d'or

Contrairement aux pays d’Afrique du nord, la Turquie ne manque pas de mosquées et de toutes façons le gouvernement islamiste de l’AKP dispose de moyens pour en construire de nouvelles, sans avoir besoin de puiser dans les bâtiments historiques chrétiens, parmi les plus prestigieux. C’est donc bien une décision réfléchie tendant progressivement à effacer les traces du christianisme en Turquie. Il est vrai que les chrétiens turcs, en constante diminution, ne dépasseraient pas cent mille personnes, bien que la plus grande ville du pays, Istanbul, soit le siège de deux patriarcats anciens et prestigieux : celui des Grecs et celui des Arméniens.

Mais il s’agit de mesures symboliques de Tayyip Erdogan, sous forme de provocation, visant les Occidentaux et surtout les Européens qui persistent à refuser l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne.


6 commentaires:

  1. Sandy STINCTION9 août 2013 à 13:42

    Comme si l'on pouvait s'attendre à quoi que ce soit d'autre avec eux .

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  2. Emmanuel DOUBCHAK9 août 2013 à 18:13

    Emmanuel Doubchak
    Emmanuel Doubchak 9 août 17:26
    J'ai malheureusement entendu une guide officielle et donc répétant sa leçon devant des touristes étrangers de manière systématique, à Sainte Sophie, dite Ayia Sofia en grec, selon laquelle les Juifs et les Chrétiens auraient caché au monde le fait que l'on savait déjà que le Monde était rond, vieille lune de la propagande islamiste que j'avais déjà entendue dans une classe de la République à St Etienne de la bouche d'une élève turque de 12 ans qui m'avait traité de menteur à cause de sa conception toute spéciale de l'Histoire. Bof, me direz-vous, les Palestiniens vendent avec la même malhonnêteté intellectuelle le mythe de leur héritage Philistin. Ce serait risible, si ce n'était pas le signe d'une intolérance totale et d'une ouverture sélective au Monde d'aujourd'hui.

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  3. Marianne ARNAUD10 août 2013 à 08:49


    Cher monsieur Benillouche,

    Permettez-moi de rappeler que si les négociations de l'UE avec la Turquie sont suspendues (et seulement suspendues) ce n'est pas parce que Erdogan a décidé de transformer les églises en mosquées mais parce qu'il refuse d'appliquer à Chypre, le protocole additionnel de l'accord d'association d'Ankara visant à l'établissement d'une union douanière en vigueur depuis 1995.

    Mais la Turquie ne se serait-elle pas sentie confortée dans ses sentiments anti-chrétiens quand l'Europe elle-même, à la demande de Chirac, avait évacué dans sa mini-constitution, toute référence aux origines judéo-chrétiennes de l'Europe ? Et le même Chirac n'avait-il pas affirmé à cette occasion : "Les racines de l'Europe autant musulmanes que chrétiennes" ?

    Alors, de quoi nous plaindrions-nous ? Nous récoltons ce que nous avons semé.

    Très cordialement.

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  4. Marianne ARNAUD11 août 2013 à 22:31

    Si j'en crois Corto74 qui relaie une question du député UMP, Marc Le Fur à Manuel Valls, il n'y a pas qu'en Turquie qu'on s'attaque aux symboles chrétiens.
    Car contrairement aux idées reçues, ce sont les lieux chrétiens qui, en France aussi, sont les plus attaqués.

    Voici la réponse du ministère de l'Intérieur parue au Journal Officiel, page 4215 du 16/'/2013

    Lieux chrétiens: 275 en 2008, 390 en 2009, 522 en 2010, 527 en 2011 et 543 en 2012.
    Lieux israélites: 15 en 2008, 66 en 2009, 42 en 2010, 44 en 2011 et 40 en 2012.
    Lieux musulmans: 12 en 2008, 18 en 2009, 57 en 2010, 49 en 2011 et 84 en 2012.

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  5. Marianne ARNAUD12 août 2013 à 07:45


    ERRATUM

    Il fallait lire : "...au Journal Officiel page 4215 du 16/03/2013"

    http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-14282QE.htm

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  6. @marianne: ce n'est pas moi qu'il faut croire mais bien le ministère de l intérieur ! :)

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