LA TUNISIE SUR LA VOIE D'UNE DEUXIÈME
RÉVOLUTION
Par Jacques BENILLOUCHE
copyright © Temps et Contretemps
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Les manifestations en Tunisie ont pris de l’ampleur le 28 juillet à travers tout le pays, avec des milliers de personnes qui ont occupé la chaussée, avec calme et détermination. La Tunisie avait été la première à déclencher la révolution le 14 janvier 2011, avant celle d’Égypte du 25, mais à présent elle suit le mouvement qui a mis fin au régime des Frères musulmans. La contestation pacifique a gagné les députés puisque 60 d’entre eux ont décidé de démissionner de l’ANC (Assemblée Nationale Constituante).
Dirigeants tunisiens
sourds
Tout comme en Égypte, les dirigeants
tunisiens restent sourds aux doléances d’un peuple qui réclame un changement de
gouvernance parce que la voie islamique choisie mène à l’impasse et à la misère
économique. Ils ne veulent pas assimiler les évènements d’Égypte et ils pensent
qu’ils pourront indéfiniment s’accrocher au pouvoir sous prétexte que les urnes
ont parlé pour eux, dans un moment d’égarement. La saison touristique tunisienne
est perdue au profit de la Grèce qui engrange les euros des estivants qui ont
changé de destination.
Seuls l’ancien chef de gouvernement et actuel secrétaire
général d’Ennahda, Hamadi Jebali, et Abdelfattah Mourou, vice-président
d’Ennahda, avouent à voix basse l’échec de leur parti à apporter le changement
espéré par la révolution. L’idée d’un
gouvernement de technocrates, qui germait dans les esprits, a fait long feu
tant les islamistes refusent la concurrence. Jebali et Mourou reconnaissent que
leurs remplaçants islamistes, qui souffrent de la même incompétence, n’ont rien
pu faire de mieux face à une situation économique qui empire.
Habib Khedher |
La
rue craint qu’on lui vole sa révolution et réclame des élections qui ne sont
pas planifiées encore. Pourtant l’ANC, qui a été élue le 22 octobre 2011 pour
une année, n’a plus d’existence légale et n’a pas réussi à voter une nouvelle
constitution. Le gouvernement utilise tous les moyens pour durer. Ainsi le
rapporteur général de la Constitution, l’islamiste Habib Khedher, a falsifié
plusieurs dispositions en introduisant par exemple des articles qui interdisent
toute contestation judiciaire pendant trois ans, même si les textes sont
contraires aux principes démocratiques.
Il a imposé une loi d’immunisation
de la révolution bien à propos pour écarter
de la course aux élections les candidats jugés dangereux par les islamistes,
quand il ne s’agit pas de menacer ou d’assassiner les opposants charismatiques. Ceux qui
accusaient les régimes de Bourguiba et de Ben Ali de dictatures reconnaissent
aujourd’hui, qu’à l’exception de l’assassinat à l’étranger de l’opposant Salah
Ben Youssef, les meurtres politiques n’entraient pas dans la doctrine
tunisienne.
Manifestations
pacifiques
La population, comme le témoignent les photos prises par des participants au cours de
manifestations bon enfant, réclame le départ des dirigeants qui persistent dans
leur intransigeance et dans leurs certitudes. Des tentes commencent à être
dressées à travers la ville dans un calme et une discipline absolus. Mais les forces de l’ordre,
qui s’opposaient à une répression non justifiée et qui pour certaines
pactisaient avec le peuple, ont été progressivement remplacées par une police
parallèle, issue des rangs d’Ennahda, qui n’hésite pas à user de violence et de
provocation. Des islamistes de ce parti
tentent de se joindre aux manifestations pour, soi-disant, défendre la
légitimité du gouvernement. En fait ils veulent provoquer des manifestants qui
refusent de tomber dans leur piège. Par provocation, ils procèdent à des prières
de rues tout en les accusant de ne pas observer le jeûne du ramadan.
Le député
Sahbi Atig, chef du groupe Ennahda à l’ANC, lance des appels au meurtre, les
mêmes qu’il avait prononcés quelques jours avant la chute de Morsi dans un
meeting de soutien aux Frères d’Égypte. Il appelle de ses vœux des
affrontements sanglants pour justifier une répression forte et l’élimination
des meneurs. Le même scénario se profile, comme en Égypte, avec la différence qu’en
Tunisie l’armée n’est pas partie prenante dans le conflit ; elle reste
dans ses casernes. Le gouvernement, dont le mandat et expiré, refuse de
démissionner.
Sahbi Atig |
La presse visée
En raison des troubles qui mettent en danger le
régime, Rached Ghanouchi, leader d'Ennahda, semble à présent vouloir s’allier avec les salafistes
qui participent aux polices parallèles. Les témoins ont affirmé que le 27
juillet, devant le siège de l’ANC au Bardo, des milices occultes recevaient
leurs instructions, non pas du ministère de l’Intérieur, mais directement du
gouvernement. La députée Karima Souid a confirmé les réserves de la police
: «Ils se sont avancés avec la matraque prêts à nous frapper, certains
policiers se sont réfugiés avec nous, d’autres tiraient même sur leurs
collègues.» Le député Abdelaziz Kotti a confirmé l’existence de ligues de
protection de la révolution constituées de militants d’Ennahda déguisés en
policiers qui font un usage disproportionné de la violence. Le député Mongi
Rahoui en a fait l’amère expérience puisqu’il a été conduit à l’hôpital pour
des soins intensifs.
Sofiane Ben Farhat |
Les plus hauts responsables des partis d’opposition
abondent dans le même sens et le régime s’en prend à présent à certains
journalistes, qui ont diffusé des informations au sujet de ces troubles. Après
s'en être pris aux opposants politiques, le régime veut faire taire les fines plumes. Le journaliste de La Presse et
chroniqueur de la chaîne Nessma TV, Sofiane Ben Farhat, a été menacé. Alors
qu’il était en direct du plateau, le 27 juillet, un appel téléphonique du ministère de
l’Intérieur l’informait qu’il disposait désormais d’une garde rapprochée. En
effet des informations sérieuses étaient parvenues aux forces de l’ordre
faisant état de menaces de mort le concernant. Un nouvel assassinat pouvait
faire tâche.
Comme
Mohamed Morsi, le parti islamiste procède à des nominations partisanes pour
consolider son pouvoir sur les institutions. Mais l’opposition n’accepte plus
de fermer les yeux sur ces magouilles politiques. Elle est prête à aller jusqu’au bout pour mener la Tunisie
vers des élections libres et démocratiques et pour mettre en place une
administration compétente et neutre. La deuxième révolution est en marche.
oh la la je comprends plus : on parle de la Tunisie ou de l'Egypte là?
RépondreSupprimerMêmes causes memes effets?
Le monde arabe se cherche entre modernistes et arriérés de l'islam...
Les arriérés de l'Islam se divisent en clans qui se haissent.
Une belle mayonnaise qui tourne mal une fois les démons et l'armée libérés. Et la religion occupe quand on a rien à se mettre sous la dent.
Le problème du siècle s'internationalise en Syrie ailleurs.
Les islamistes et les intellectuels à la solde de régimes qui ont peur ne sont pas en reste.
Ainsi des 'intellectuels' algériens viennent de rendre public un communiqué appelant à déférer devant la justice le ministre de la defense Egyptien AL SISSI.
L'unité du monde arabe est un mythe.
Heureusement qu'Israel est là pour leur donner un semblant d'unité.!
Arafat disait il y a une trentaine d'années "Nous ne voulons pas d'un Etat ni de la paix, nous voulons un Etat qui naitra dans le sang"..Une généralité dans le monde arabe???
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